Play it again, Sam

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Archive pour novembre, 2015

His regeneration (id.) – de G.M. « Broncho Billy » Anderson – 1915

Posté : 30 novembre, 2015 @ 2:45 dans 1895-1919, ANDERSON G.M. "Broncho Billy", CHAPLIN Charles, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

His regeneration 1

Une curiosité. Ce court métrage dramatique signé G.M. (« Broncho Billy ») Anderson aurait pu tomber dans le même oubli que ses autres films s’il n’était pas marqué par l’apparition, inattendue et inexplicable, de Charles Chaplin dans les frusques de Charlot…

Chaplin était alors sous contrat avec la Essanay, une société dont Anderson était l’un des fondateurs (le « A » de « S and A », Essanay phonétiquement), et les deux hommes semblaient s’apprécier mutuellement. Pour autant, la participation de Chaplin à ce film reste assez mystérieuse. Parce qu’on ne connaît pas exactement son implication dans la production, et parce que le numéro comique de Charlot contraste radicalement avec le sérieux du film.

His regeneration

C’est comme s’il y avait deux films bien distincts : les toutes premières minutes, centrées sur un Chaplin parfaitement dans son élément dans un bar-dancing où il nous offre des gags qu’il connaît bien, de manière un peu brouillonne peut-être, mais en faisant mouche tout de même.

Et puis il disparaît, aussi vite qu’il était apparu, pour laisser la place à la vraie star du film, G.M. Anderson, en voleur sur le chemin de la rédemption grâce à la bonté d’une jeune femme. Un petit drame bien ficelé et joliment réalisé par l’acteur lui-même, qui plonge une partie de son action dans l’obscurité totale, n’éclairant que les visages en gros plans à l’aide d’une lampe torche. Une esthétique pas si courante à l’époque.

Le Café du Cadran – de Jean Gehret (et Henri Decoin) – 1946

Posté : 30 novembre, 2015 @ 2:38 dans * Polars/noirs France, 1940-1949, DECOIN Henri, GEHRET Jean | Pas de commentaires »

Blanchette Brunoy, Bernard Blier, Félix Oudart

Bernard Blier en patron de bistrot à la femme trop belle… On a l’impression d’avoir vu ça cent fois. Pourtant, ce film méconnu d’un cinéaste oublié (même s’il semble que Decoin soit le véritable auteur du film) est une réussite et une œuvre assez originale. Parce que Blier n’est pas le cocu magnifique qu’on attend de lui, et parce que le réalisateur, quel qu’il soit, prend le temps d’installer son film dans une sorte de routine quotidienne assez passionnante.

C’est à la fois la force et la petite faiblesse du film : ne pas se reposer sur un enjeu dramatique fort, et signer une chronique basée sur les habitudes d’un bistrot parisien, ces gestes quotidiens répétés à l’envi, et ces petits changements qui paraissent si anodins mais qui sont de véritables révolutions pour ces silhouettes désormais si familières.

Sans doute le film manque-t-il d’une atmosphère plus envoûtante, et peut-être souffre-t-il d’une réalisation un peu trop fonctionnelle. Mais dans ce quasi hui-clos, on se laisse emporter par cette petite musique qui évite à tout prix le sensationnel. Et puis, il y a autant de personnages que d’enjeux personnels : le poivrot repenti qui cherche à se racheter aux yeux de celle qu’il a blessé, les journalistes confrontés au rachat de leur canard (déjà), cette amoureuse transie qui observe son amant lui échapper, ce vieux barman qui connaît tout de ses clients…

Malgré les contraintes de lieu (jamais la caméra ne va plus loin que le trottoir devant le café), le film grouille de vie et de mouvements. En fil rouge, la traditionnelle opposition de la campagne et de la capitale : Blier et sa femme (Blanchette Brunoy) sont deux Auvergnats tendres et amoureux, qui découvrent la vie parisienne. Avec résignation pour elle, avec un rien de cynisme pour lui, qui réalisera trop tard qu’il n’est pas de taille pour dompter la ville. La conclusion, cruellement ironique, remettra chacun à sa place.

L’Enfant du désert (Cattle Drive) – de Kurt Neumann – 1951

Posté : 27 novembre, 2015 @ 2:38 dans 1950-1959, NEUMANN Kurt, WESTERNS | Pas de commentaires »

L'Enfant du désert

Pas un saloon, pas un bandit, pas un Indien, pas une fusillade (si ce n’est pour rassembler le bétail), pas même une bagarre… Drôle de western que ce Cattle Drive, petite production Universal qui fait partie de ces nombreuses curiosités tombées dans un oubli total. Et pourtant, il ne manque de rien ce western : ni de rythme, ni d’émotion, et certainement pas de charme.

Les premières scènes laissent pourtant perplexes. Le « héros » est alors un gamin détestable: le fils trop gâté du riche président du chemin de fer, « oublié » au bord des rails en plein désert. Un petit capricieux, qu’un cow-boy sans histoire prend sous son aile. Ce cow-boy, c’est Joel McCrea, un acteur toujours formidable, au jeu discret et chaleureux à la fois (et dont l’épouse à la ville, Frances Dee, est celle qui apparaît sur la photo que montre le personnage à son jeune protégé).

En quelques plans seulement, l’apparition de McCrea emballe le film, plombé jusqu’alors par la présence de ce gamin que le jeune Dean Stockwell (alors enfant vedette d’Hollywood, bien avant la série Code Quantum) parvient à rendre réellement antipathique. Entre Joel McCrea, l’alchimie est parfaite. Et le changement qui s’opère est remarquable. En quelques scènes simples et bien foutues, Stockwell semble littéralement se transformer sous le regard bienveillant de son protecteur.

Le rythme du film aussi s’en resent. Accepté par un groupe de cow-boys qui convoient un important troupeau, le gamin élevé dans le luxe découvre le quotidien parfois difficile de ces hommes. Rien de très spectaculaire, si ce n’est quelques cavalcades plus ou moins contrôlées, mais une succession de moments tendres, tendus ou amusés, et quelques belles images de soleil couchant sur le désert.

Petite production oblige, le film utilise quelques plans de précédents westerns de la Universal (notamment les plans larges de bétail). Mais beaucoup de belles images plaçant les acteurs au coeur de la nature majestueuse sont bel et bien du fait de Kurt Neumann, réalisateur qui ne m’avait jamais réellement convaincu jusqu’à présent. Avec ses couleurs pastels et son rythme tranquille, Neumann réussit là un beau western bienveillant.

* Joel McCrea est à l’honneur de la nouvelle fournée des Westerns de Légende de Sidonis, avec trois films dont cet Enfant du désert (ainsi que Le Défilé sauvage et Le Solitaire des Rocheuses, avec en bonus la traditionnelle présentation par Patrick Brion.

Hors de portée (The Reach / Beyond the Reach) – de Jean-Baptiste Leonetti – 2014

Posté : 27 novembre, 2015 @ 2:31 dans 2010-2019, LEONETTI Jean-Baptiste | Pas de commentaires »

Hors de portée

Ah, la bonne vieille influence du comte Zaroff : souvent la promesse d’une bonne série B distrayante, à défaut de retrouver la magie du film original. Parce que ce sous-genre qu’est le « film de chasse dont l’homme est le gibier » est aussi abondant que généralement sans surprise.

Dans cette petite production, le budget semble se focaliser sur deux points : Michael Douglas, et l’impressionnant 4×4 très aménagé (four, bar à cocktail… tout pour un bivouac réussi) que son milliardaire de personnage s’est offert pour sa dernière chasse. Pour le reste, un héros pas très cher (Jeremy Irvine), des décors naturels, et une poignée de seconds rôles (dont cette vieille baderne de Ronnie Cox) qui ont dû se contenter de quelques jours de tournage seulement.

Quant au scénario, il se limite au strict minimum : un milliardaire s’offre une partie de chasse en plein désert avec un jeune guide, tue un homme accidentellement, et décide de se débarrasser du témoin en s’amusant un peu avec lui. Et à la clé : un vrai rôle de méchant pour Michael Douglas qui semble y prendre beaucoup de plaisir.

Le suspens est plutôt efficace, et on n’a pas vraiment envie de faire la fine bouche. Mais un montage à la serpe assez assommant, des rebondissements hautement improbables qui frôlent parfois le ridicule (après un revirement cynique convainquant, le film s’achève sur une note grand-guignol impardonnable), et des personnages qui manquent totalement de profondeur finissent par agacer, voire par ennuyer.

Il y a pourtant une très belle idée dans la première heure, mais trop peu utilisée : la tanière de la victime, marginal vivant en plein désert qui s’est aménagé une série de planques dans les coins les plus improbables. Ce qui donne lieu à quelques images inattendues, et à une chasse au trésor qui, mieux exploitée aurait pu faire de ce film autre chose qu’un survival banal et maladroit. Tant pis.

* DVD chez Metropolitan, avec commentaire audio, making of promotionnel, et featurette mettant en valeur l’incroyable voiture de Michael Douglas dans le film.

Vengeance à l’aube (Dawn at Soccorro) – de George Sherman – 1954

Posté : 26 novembre, 2015 @ 1:48 dans 1950-1959, SHERMAN George, WESTERNS | Pas de commentaires »

Vengeance à l'aube

On entre directement dans le vif du sujet avec ce petit western absolument formidable, qui commence là où beaucoup d’autres se terminent : par un grand règlement de comptes aux pistolets entre deux clans adverses. Un gunfight qui rappelle curieusement celui de O.K. Corrall, et ce n’est sans doute pas un hasard : toute la première partie s’inspire clairement du mythe immortalisé par Ford (notamment), et particulièrement de Doc Holiday, dont Ben Wade, le joueur, ami du shérif et as de la gâchette interprété par Rory Calhoun (qui a rarement été aussi bien qu’ici) est une copie quasi conforme jusqu’à la toux inquiétante.

Sauf qu’ici, George Sherman et son scénariste George Zuckerman (un habitué des films de Douglas Sirk) décident de commencer par ce qui est annoncé d’emblée par une voix off comme le moment de bravoure du film. Et cette curiosité donne le ton d’une série B remarquable du début à la fin, que Sherman met en scène avec une inspiration de chaque plan, avec un sens du cadre et de l’atmosphère qui est loin d’être évident dans tous ses films. Dans Vengeance à l’aube, il est au sommet de son art et signe un western formidablement tendu, et constamment étonnant.

La grande réussite du film repose aussi beaucoup sur la manière avec laquelle le scénariste joue avec les poncifs du genre, qu’il accumule avec gourmandise pour mieux les détourner. D’où des personnages à la fois très familiers et totalement originaux. A commencer par le héros lui-même, à qui son médecin prescrit du repos dans le bon air de la montagne, tout en sachant qu’il n’irait nulle part et continuerait à se tuer à petits feux. Sauf que non : les funérailles que le docteur lui avait prédites, Wade/Calhoun les transforme en une fête d’au-revoir, bien décidé à changer de vie et à se mettre au vert.

Dès lors, tous ceux qu’il rencontrera auront ce petit quelque chose de différent. La jeune femme innocente que le destin conduit dans un saloon mal fâmé (Piper Laurie, émouvante et toute en retenue) affiche clairement sa volonté de jouer ce jeu qui n’est pas le sien. Le shérif débonnaire (Edgar Buchanan, formidable) n’est pas le lâche habituel, mais un homme pragmatique, honnête et qui plus sobre. Le gunfighter qui a juré de tuer le héros refuse de l’abattre sans lui laisser une chance de se défendre, et voyage longuement face à lui, attendant que l’autre porte une arme.

Cela donne quelques scènes d’attente rares dans un film de cette durée (à peine une heure vingt), conçu pour être projeté en double-programme. Mais ce sont ces scènes au cours desquelles les drames et les tensions se nouent qui font tout le poids de cette petite production, et de cette réussite majeure.

* Difficilement visible et très peu connu jusqu’à présent, le film est désormais disponible en DVD dans la collection Westerns de Légende de Sidonis/Calysta. Avec en bonus les présentations habituelles, et très enthousiastes pour le coup, de Bertrand Tavernier, Patrick Brion et Yves Boisset.

La Route impériale – de Marcel L’Herbier – 1935

Posté : 25 novembre, 2015 @ 4:07 dans 1930-1939, L'HERBIER Marcel | Pas de commentaires »

La Route impériale

L’Herbier aborde un genre particulièrement en vogue ces années-là: « le film de troupes dans les colonies ». Sauf qu’ici on ne parle pas de colonies, mais du grand empire britannique, dont l’intégrité est menacée par les agissements de quelques rebelles au fin fond de l’Irak : cette production française, tournée en français avec des acteurs majoritairement français, se situe du point de vue de la fière Angleterre, avec omniprésence de God Save The Queen et de l’Union Jack.

L’Herbier est un grand formaliste, et il le prouve une fois de plus ici, avec quelques images magnifiques, comme ce soldat « crucifié » au sommet d’une dune face au soleil. Une image terrible et graphiquement impressionnante. Mais, et c’est loin d’être systématique dans son cinéma, il place les acteurs au coeur de son histoire, faisant de ce grand film d’aventures exotiques un drame intime et une exploration des affres de la culpabilité.

Après une première demi-heure plaisante mais assez classique, La Route impériale finit de ressembler à tant d’autres films du genre lorsqu’il dévoile son vrai sujet, inattendu. Lorsque son héros, jeune lieutenant en quête de rédemption et désireux de prouver sa vaillance et sa fidélité à la couronne, est subitement privé de l’acte de bravoure attendu pour un simple quiproquo digne d’un vaudeville. Forcé d’observer du haut d’une tour dorée un autre accomplir son rôle de héros…

Dans le rôle de ce héros contrarié, Pierre Richard-Willm est parfait, passif dépressif un peu trop porté sur l’autoflagellation. Kathe von Nagy, malgré un accent très peu british, est superbe dans un très beau rôle de tragédie. Mais le plus impressionnant est peut-être Pierre Renoir, dans un emploi d’officier un peu trop raide qu’il connaît par cœur, mais qu’il incarne avec une justesse rare.

C’est quand L’Herbier reste au plus près de ses personnages que le film est le plus réussi. On passera ainsi sur l’attaque finale, impressionnante mais un peu impersonnelle, pour retenir surtout quelques grands moments de tension. Celui où les trois jeunes officiers se disputent aux cartes le droit d’aller se faire tuer avec les honneurs. Ou celui du peloton d’exécution. Deux séquences que l’on regarde le souffle coupé.

The Lost Moment (id.) – de Martin Gabel – 1947

Posté : 24 novembre, 2015 @ 6:27 dans 1940-1949, GABEL Martin | Pas de commentaires »

The Lost Moment

Très belle surprise que ce film oublié d’un réalisateur oublié, Martin Gabel, l’un de ces acteurs (il jouait notamment le mafieux de Bas les masques) passés derrière la caméra. Une expérience sans suite d’ailleurs, pour cet ancien membre du Mercury Theatre d’Orson Welles, dont la carrière de cinéaste a sans doute été avortée à cause de l’échec injuste mais sans appel de The Lost Moment.

Le film avait pourtant tout du succès annoncé, adaptation ambitieuse d’un grand texte littéraire (la nouvelle Les Papiers d’Aspern de Henry James) dont l’action se déroule dans une maison chargée d’un lourd secret… Un véritable genre en soi depuis le triomphe de Rebecca. La première demi-heure, d’ailleurs, renvoie clairement au chef d’œuvre d’Hitchcock : même omniprésence du passé, même présence presque fantomatique de la maison, même voix off qui ramène des années en arrière, à cette époque où tout a basculé dans la vie du narrateur…

Mais le film se démarque rapidement pour imposer sa singularité, à mi-chemin entre l’effroi et le romanesque, entre le cynisme et le romantisme. Martin Gabel et le scénariste Leonardo Bergovici (un futur blacklisté d’Hollywood) jouent avec les codes du film de genre pour mieux s’en démarquer, inspirés par leurs magnifiques décors : les canaux de Venise qui donnent lieux à de superbes jeux de reflets, et cette maison au style gothique qu’une série de travellings impressionnants transforme en un personnage à part entière.

C’est là que vivent une étrange jeune femme (Susan Hayward, dont le regard est tout simplement bouleversant) et sa tante, une femme de 105 ans qui a été la maîtresse et l’inspiratrice d’un grand poète mort des décennies plus tôt. C’est là aussi que s’introduit le héros (Robert Cummings), véritable transfuge du film noir : un éditeur cynique et sans scrupule prêt à tout pour s’emparer des lettres d’amour écrites par ce poète.

Le film est une suite ininterrompue de faux-semblants, jouant sur la réalité et l’illusion. Même les ressors dramatiques reposent sur ces faux-semblants, comme cette séquence de pur suspense dans le restaurant, qui se révèle être un leurre pour le spectateur. Rien n’est jamais vraiment ce que l’on croit : la passion amoureuse d’hier, ou le romantisme d’aujourd’hui, cachent de sombres secrets. D’où le trouble qui s’insinue jusqu’au dénouement, poignant. Une bien belle découverte, oui.

* Le DVD est paru chez Sidonis/Calysta, curieusement dans la collection Perles Noires. Avec des présentations par Patrick Brion et François Guérif.

Les Gaités de l’Escadron – de Maurice Tourneur – 1932

Posté : 20 novembre, 2015 @ 5:51 dans 1930-1939, GABIN Jean, TOURNEUR Maurice | Pas de commentaires »

Les Gaités de l'Escadron

Maurice Tourneur, immense cinéaste oublié et en passe d’être réhabilité (grâce en particulier au beau livre de Christine Leteux, et à de récentes éditions DVD), considérait cette pochade adaptée d’une pièce de Courteline comme l’un de ses films préférés. Ah bon…

Peut-être à l’époque cette vision de l’armée était-elle audacieuse, et novatrice ? Aujourd’hui en tout cas, cette tranche de vie est au mieux amusante, mais surtout très anecdotique.

Réalisé gentiment, sans grande inspiration (on est loin de ses grands films muets ou de Justin de Marseille, tourné quelques années plus tard), le film est une succession de gags gentils et pas vraiment irrévérencieux, la chronique d’une caserne où l’ambition première semble être le bien-être.

Avec des intrigues à couper le souffle : qui a volé le pain laissé à refroidir sur le rebord de la fenêtre ? qui a mis ces tas de crottins dans le bureau de l’officier ? machin trouvera-t-il un moment pour se reposer ? Quitte à paraître d’une autre époque, l’intrigue ressemble plus à une BD de Pim, Pam, Poum qu’aux chefs d’oeuvre comme La Bandera que Gabin ne tardera pas à enchaîner.

Gabin justement : tout jeune, pas encore dans son emploi, il trouve ici l’un de ses premiers rôles marquants, celui d’un tire-au-flanc qui fait tout pour être chargé des corvées du camp, plus reposantes que les marches et exercices quotidiens des soldats…

Il y a Fernandel aussi, tout jeune également, amusant dans le rôle d’un soldat volontaire et courageux, mais poissard comme c’est pas permis. Et Raimu en figure paternelle et bienveillante, finalement très touchant. Plus que le semblant d’intrigue, plus que l’irrévérence d’une autre époque, plus que la comédie pas vraiment convaincante, ce sont eux, les comédiens, qui assurent l’intérêt du film.

La Traversée de Paris – de Claude Autant-Lara – 1956

Posté : 20 novembre, 2015 @ 5:48 dans 1950-1959, AUTANT-LARA Claude, GABIN Jean | Pas de commentaires »

La Traversée de Paris

Le chef d’œuvre d’Autant-Lara, cinéaste très très inégal dont une grande partie de la filmographie est pour le moins dispensable. Cette adaptation (par Jean Aurenche et Pierre Bost, deux scénaristes qui connaissent bien leur sujet) d’un roman de Marcel Aymé est un portrait au vitriol, d’une extrême cruauté, de la France de l’Occupation.

Dans La Traversée de Paris, il ne s’agit pas, pour une fois, d’opposer occupés et occupants, mais de filmer ces Français qui ont fait leur beurre de l’occupation, et ceux qui ont révélé leur part d’ombre, les aspects les plus indéfendables de l’âme humaine. Bref, une galerie pitoyable croisée par Bourvil et son comparse d’un soir Gabin, lors de leur traversée de Paris pour une livraison de charcuterie destinée au marché noir.

Dans ce Paris nocturne, ils ne sont pas nombreux à trouver grâce aux yeux d’Autant-Lara et de ses scénaristes. Avec un point d’orgue : la séquence dans le bistrot où Bourvil et Gabin vont se réfugier, peuplé d’êtres lâches et mesquins. Le fameux « Salauds de pauvres » lâché avec le plus grand des mépris, n’est finalement qu’une formule pour mettre des mots sur l’humanité dans toute sa laideur.

Ces « salauds de pauvre » qui ont choisi le repli sur soi et l’égoïsme le plus radical sont indéfendables. Mais qui l’est dans ce film ? Bourvil, chauffeur de taxi privé de travail par l’occupation qui survit en participant au sordide marché noir ? Ou Gabin, riche artiste qui ne prend part à cette virée nocturne que pour tromper son ennui ?

Le personnage le plus « propre », le plus sensé, c’est lui. C’est vers lui que va la sympathie du spectateur lorsqu’il fait face aux mesquins, aux profiteurs, à ce « Jambier, 45 rue Poliveau » interprété avec déjà beaucoup d’excès par Louis De Funès. Pourtant, que risque-t-il ? Que fait-il là, à s’amuser au côté des pauvres qu’il méprise tant ?

Et qui est le plus cynique ? Bourvil, qui affiche un dédain feint pour la terre entière ? Un sale type, oui, mais un pauvre type surtout… Ou Gabin, tellement à l’abri qu’il n’aura même pas à affronter les conséquences de ses actes.

Il y a des moments très savoureux dans La Traversée du Paris. Et Claude Autant-Lara n’a peut-être jamais été aussi inspiré, signant une mise en scène élégante dont le noir et blanc profond et les décors semblent faire le lien entre le réalisme poétique et le cinéma français des années 60. Une traversée cynique et inoubliable…

Les Mains d’Orlac (Mad Love) – de Karl Freund – 1935

Posté : 19 novembre, 2015 @ 4:23 dans * Films noirs (1935-1959), 1930-1939, FANTASTIQUE/SF, FREUND Karl | Pas de commentaires »

Les Mains d'Orlac

De Karl Freund, on retient surtout l’impressionnante carrière de directeur de la photo (du Dernier des Hommes de Murnau à Key Largo de Huston). Entre 1932 et 1935, ce grand nom du cinéma allemand a aussi réalisé une poignée de films à Hollywood, dont on n’a retenu que le premier (La Momie, classique du cinéma d’épouvante avec Boris Karloff) et le dernier : Les Mains d’Orlac.

Ce film construit autour de la figure fascinante de Peter Lorre (qui fait ses débuts hollywoodiens avec ce film, après sa parenthèse anglaise avec Hitchcock) s’inscrit alors dans un sous-genre horrifique très en vogue durant les années 30 : la figure du savant fou, popularisée par Frankenstein et dont Bela Lugosi va se faire l’un des spécialistes.

Un grand pianiste victime d’un accident et dont les mains doivent être amputées. Un chirurgien génial qui décide de lui greffer celles d’un tueur en série. Une femme trop belle entre ces deux grands hommes… Pour la psychologie des personnages, le film a de quoi faire sourire. Lorre, surtout, semble dans certaines scènes ne pas savoir quoi faire de son personnage : un psychopathe absolu, ou un homme poussé vers la folie par sa passion et son génie ?

Pourtant, le film est une merveille, un sommet du genre. Pour Freund, le cinéma est avant tout une affaire d’images. Et même s’il néglige quelque peu l’intrigue à proprement parler, on ne va pas lui en tenir rigueur ! Y a-t-il un seul plan anecdotique dans ce film ? Pas sûr… Les jeux d’ombres, les cadrages angoissants, l’importance des premiers plans… Tout, dans les images de Freund, semble faire sens, et en dire plus sur le drame qui se joue que les dialogues ou l’histoire elle-même.

Un exemple : installé dans le train dont l’accident à venir scellera son destin, le pianiste essuie la buée de sa vitre pour voir arriver le fameux tueur entouré par des policiers. La main qui essuie la vitre, au premier plan, paraît démesurée, et semble déjà ne plus être celle du pianiste. Un plan tout simple, mais qui crée un malaise inexplicable à ce stade…

Freund joue avec les codes du spectacle et du grand-guignol. Pas uniquement pour les scènes de théâtre, baroques et expressionnistes, qui préfigurent avec élégance le cinéma d’horreur européen des années 60. Mais aussi en confondant d’une manière troublante la violence et le crime, et le spectacle. Le tueur en série est un artiste de cirque à qui un passant demande un autographe ; la victime est lui-même un artiste, tout comme sa fiancée ; et le savant fou se constitue un angoissant musée de cire…

Yeux globuleux, crâne rasé et travestissement improbable… Peter Lorre en fait des tonnes. Sa présence est pour beaucoup dans l’atmosphère si étrange et fascinante du film. Sa rencontre avec Karl Freund était une évidence.

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