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Archive pour la catégorie 'De MILLE Cecil B.'

Les Bateliers de la Volga (The Volga Boatman) – de Cecil B. De Mille – 1926

Posté : 26 octobre, 2023 @ 8:00 dans 1920-1929, De MILLE Cecil B., FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Les Bateliers de la Volga

Voilà un film très étonnant de la part de De Mille. D’abord pour son sujet : la révolution russe de 1917, qui colle assez mal avec ses thèmes habituels. Puis par son refus du manichéisme : pas question pour lui d’en faire un film anti-communiste, pas plus qu’anti-tsariste d’ailleurs.

Enfin, par son point de vue. La révolution, on ne la suit dans la plus grande partie du film que par le prisme d’un petit microcosme, dont on ne sort pas jusqu’à la moitié du métrage : un château qui surplombe un camp tartare sur les rives de la Volga.

Mieux encore, il résume la révolution à un triangle amoureux : un fringant officier s’apprête à épouser une jeune noble, qui tombe amoureuse d’un batelier, l’un de ces forçats qui halent les bateaux sur la Volga, appelé à devenir un leader de l’armée rouge.

Ce parti-pris peut sembler simpliste. Mais De Mille n’est pas Eisenstein, et on peut sereinement affirmer qu’il n’a guère d’appétence pour le peuple en tant que foule. Ce qui l’intéresse, ce sont les troubles de chacun, les doutes, les passions. Et c’est passionnant.

A vrai dire, la première moitié du film est aussi étonnamment bon-enfant. Il y a de la cruauté ; d’abord dans le mépris de la classe dominante, puis dans la soif de vengeance des révolutionnaires. « L’assaut » du château a ainsi un côté très hors-sol, proche de la comédie de mœurs. Une sorte d’accès de violence où le sang serait remplacé par du vin. Littéralement.

Et puis il y a une séquence qui fait la bascule, particulièrement forte. La jeune noble, en fuite avec l’ancien batelier, est arrêtée avec lui par l’armée « blanche », qui ignore qui elle est. Les soldats décident alors de profiter d’elle. Des exactions qu’elle subit, on ne voit rien, la caméra scrutant les visages des hommes qui l’entourent. Un moment d’une grande intensité.

A partir de là, fini l’aspect bon enfant. De Mille renvoie les deux camps dos à dos, filmant les actes des uns en écho à ceux des autres. Et le film se révèle assez pessimiste sur la nature humaine, tout en gardant une lueur d’espoir. Dans ce monde qui se déchire, il reste l’amour, après tout.

La Fille du Far West (The Girl of the Golden West) – de Cecil B. De Mille – 1915

Posté : 25 octobre, 2023 @ 8:00 dans 1895-1919, De MILLE Cecil B., FILMS MUETS, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Fille du Far West

Découvrir The Girl of the Golden West après avoir revu The Plainsman permet de voir à quel point De Mille, mais aussi le cinéma en général, a évolué en vingt ans seulement. Comparer ces deux westerns n’est pas aberrant : l’un comme l’autre commence par un carton justifiant les libertés prises avec le réel par une volonté de rendre hommage à cette époque de pionniers.

Les temps, cela dit, ne sont pas les mêmes. Et il y a dans cette adaptation d’une pièce à succès quelque chose de très théâtral. Moins dans le sujet et le scénario d’ailleurs, que dans la mise en scène elle-même. Comme c’était beaucoup le cas à cette époque, la caméra est fixe, occupant à peu près la place qu’occupe le spectateur dans un théâtre, offrant une vue large et frontale sur la scène.

De Mille en sent visiblement les limites, et varie ses effets : plans larges, plans rapprochés, gros plans… Mais le plus souvent, ce sont les personnages qui se déplacent vers la caméra pour changer la perspective. D’où un côté un peu figé auquel le cinéaste n’échappe pas toujours.

Le film n’en est pas moins assez passionnant, parce que mené à un rythme d’enfer (55 minutes, bien remplies) par un De Mille déjà très maître du timing, qui réussit quelques belles séquences d’action.

Quant à l’histoire elle-même, elle est assez classique, reprenant l’éternelle trame du triangle amoureux : le shérif traque un bandit, ce dernier tombe amoureux de la jolie patronne de bar en taisant sa véritable identité, jeune femme que convoite le shérif…

L’originalité vient plutôt du décor : un campement boueux d’orpailleurs, plutôt qu’une ville à proprement parler. Et la présence importante du climat : la neige, la boue, et même le soleil qui éclaire cette espèce de saloon à ciel à demi-ouvert. On n’est pas chez Nuri Bilge Ceylan, mais…

Un détail étonnant, aussi : ces gouttes de sang qui coulent du faux plafond, trahissant la présence du bandit. Un détail que Hawks n’a donc pas inventé, même s’il le sublimera dans Rio Bravo.

Le Détour (Saturday Night) – de Cecil B. De Mille – 1922

Posté : 22 octobre, 2023 @ 8:00 dans 1920-1929, De MILLE Cecil B., FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Saturday Night

Ah ! L’ironie de ce dernier plan ! Oui, non, pas question de spoiler bien sûr, et de dévoiler la conclusion de cette romance à quatre, qui évoque l’amour pour le moins complexe lorsqu’il tente d’effacer les barrières sociales…

Le Cecil B. De Mille de cette première période étudie décidément sous toutes les coutures les mystères des rapports entre les hommes et les femmes. Avec sa fidèle complice Jeanie Macpherson, sa scénariste depuis Forfaiture, il imagine non pas un, mais deux couples contre-nature sociale.

D’abord, deux couples qui semblent si naturels. L’un sans le sou, qui se croise et se toise de part et d’autre d’une palissade. L’autre richissime : un jeune millionnaire fiancé à une riche héritière. Mais cette dernière tombe amoureuse de son chauffeur, qui n’est autre que le gars de la palissade, tandis que le riche fiancé décide d’épouser la fille de ladite palissade.

Vous suivez ? Toute la question est de savoir si, oui ou non, ces deux couples qui défient l’ordre établi ont une chance. Ou pas. Et toute la réponse repose sur ce constat implacable : on est chez De Mille, pas chez Capra. Ce qui donne une idée assez précise de l’issue de l’histoire, et de l’ironie, donc, de ce dernier plan.

Un constat, aussi, qui rappelle que le film a été tourné il y a un siècle : quel que soit le choix des uns et des autres, quel que soit le niveau social et la richesse de celui ou celle dont on tombe amoureux(se), c’est le train de vie et le quotidien de l’homme que l’on va adopter. En d’autres termes : c’est à la femme de s’adapter.

D’où deux situations pathétiques ou comiques, c’est selon : une femme de peu dont les manières ne sont que gênes pour sa belle-famille, et une riche héritière incapable de se faire aux mœurs de son mari mal dégrossi. Dans les deux cas, pour faire simple : la femme fout la honte à son homme. Qui commence à trouver le temps à long et à s’interroger sur le bien fondé de son coup de foudre.

C’est un De Mille essentiellement tourné vers les personnages, qui semble très loin de ses grandes fresques à venir. Mais son sens de l’ampleur et de l’emphase apparaît régulièrement, dans les scènes de grandes soirées, grouillantes de vie. Et comme dans tous ses meilleurs films, cette ampleur ne vient jamais écraser le récit, lui donnant au contraire un socle solide.

C’est aussi un De Mille qui, mine de rien, s’oppose à l’angélisme hollywoodien déjà en vigueur. Pas dupe, mais naïf, il signe un double romance qui dit toute la limite de l’amour à tout prix, rappelant le poids écrasant des conventions, et ramenant à chacun à ses obligations. Ce qui peut se faire avec jubilation. Ou avec l’ironie si cruelle de cette dernière image.

Une aventure de Buffalo Bill (The Plainsman) – de Cecil B. De Mille – 1936

Posté : 21 octobre, 2023 @ 8:00 dans 1930-1939, COOPER Gary, De MILLE Cecil B., WESTERNS | Pas de commentaires »

Une aventure de Buffalo Bill

Le titre français est doublement trompeur. D’abord, le héros n’est pas Buffalo Bill : le plus célèbre des tueurs de bisons est bien là, mais il ne tient qu’un second rôle au côté du véritable pilier du film, Wild Bill Hickock. Sans doute moins ancré dans les esprits français, et moins bankable par la même occasion.

Surtout, ce titre semble annoncer un western assez classique, basé sur un épisode héroïque de la vie d’une légende de l’Ouest. Comme on en verra des tas dans les années 40 ou 50. Mais l’ambition de Cecil B. De Mille est toute autre : à travers le parcours de Wild Bill et des compagnons qui croisent régulièrement sa route (Bill Cody et Calamity Jane, surtout), c’est rien moins que toute la mythologie de l’Ouest qu’il cherche à porter à l’écran.

L’ambition est grande, et l’approche décomplexée. Le texte qui ouvre le film (après un générique à la manière spectaculaire que reprendra George Lucas pour ses Star Wars) annonce la couleur : le film qu’on va voir condense en une seule histoire « plusieurs années, plusieurs vies, et des événements d’époques différentes ». Une entrée en matière simple et maligne qui permet d’anticiper et de balayer d’un revers de la main les fines bouches historiques.

Dans cette histoire, qui s’ouvre sur le dernier jour de Lincoln, on assistera donc, en vrac, à la ruée sur les Black Hills, au massacre de Little Big Horn, à l’assassinat de Wild Bill… Qu’importe la vérité historique : De Mille présente son film comme un hommage à un certain état d’esprit. Et comme un pur film de cinéma, tel qu’il le conçoit, avec pour seules contraintes celles du grand spectacle, de l’efficacité et de l’émotion.

Et dans ce domaine, De Mille est l’un des plus grands. Même en noir et blanc, même avec un format classique loin du Cinemascope, même avec des transparences encore imparfaites… le grand spectacle est de tous les plans, tous les instants. De Mille voulait faire de son hommage aux pionniers de l’Ouest une narration cohérente : il le fait avec une fluidité absolument parfaite, avec un sens du rythme parfait.

Les grands moyens dont il dispose (décors impressionnants, figurants par centaines) étoufferaient le talent de bien des réalisateurs. Lui les utilise pleinement (ces moyens se voient clairement à l’écran), mais toujours au service du mouvement, de l’action et des personnages. Régulièrement, sa caméra embrasse les décors dans ce qu’ils ont de grands et bouillonnants, pour se recentrer sur les visages rapprochés de deux personnages, sans que plus rien d’autre n’existe.

C’est historiquement très discutable. Les héros ont le cœur pur et les amitiés sincères, sans grand défaut apparent. Du pur cinéma hollywoodien, donc. Mais dans ce qu’il a de meilleur, enthousiasmant, passionnant, et même émouvant. Gary Cooper est impérial en Wild Bill flamboyant. Jean Arthur touchante en Calamity Jane énamourée. Même le bien terne James Ellison séduit en Buffalo Bill rangé des affaires…

The Plainsman (le titre original, nettement plus convainquant dans ce qu’il évoque une idée de l’Ouest plutôt qu’un unique personnage) m’avait laissé un souvenir très fort dans mon adolescence, un western épique fondateur de ma cinéphilie. Le revoir bien des années après laisse une impression tout aussi forte, et donne l’envie de revoir l’autre grand western épique de De Mille, le tout aussi passionnant Pacific Express.

Les Naufrageurs des mers du Sud (Reap the Wind Will) – de Cecil B. De Mille – 1942

Posté : 12 septembre, 2021 @ 8:00 dans 1940-1949, De MILLE Cecil B., WAYNE John | Pas de commentaires »

Les Naufrageurs des mers du Sud

Très original, et très ambitieux (forcément, c’est De Mille), cette grosse production nous plonge dans un univers rarement montré au cinéma : celui des premiers temps des bateaux à vapeur, et d’une époque où le commerce passait encore essentiellement par la mer, avant l’essor du chemin de fer. L’univers des naufrageurs, aussi, que De Mille dévoile dans une séquence d’ouverture qui impressionne autant par la pure mise en scène, dense, tendue et spectaculaire, que par son incroyable cynisme.

Sur les côtes de Floride, les bateaux sont nombreux à prendre la mer dès que l’un d’entre eux est sur le point de couler. Bien sûr, il y a l’urgence de sauver les marins en péril. Mais il y a surtout cette prime au premier arrivée, qui peut s’approprier 50 % de la marchandise transportée par le bateau échoué. Une fortune, bien souvent, surtout quand les naufrages se multiplient, sans doute causés par l’un des « sauveteurs ». On le reconnaît au premier coup d’œil : c’est Raymond Massey, la lippe odieuse et machiavélique, un pur méchant.

Autour de lui, les autres personnages sont, heureusement, nettement plus nuancés. John Wayne surtout, héros affiché qui révèle au fil du film une part d’ombre bien corsée, et assez inattendue. Un homme, un vrai, comme répète sans cesse Paulette Goddard, dont le cœur balance sans qu’elle s’en rende vraiment compte entre Duke et Ray Milland, un peu précieux et un peu antipathique au début du film. Mais la vision que l’on a de la plupart des personnages change du tout au tout au fil de l’histoire. A l’image de Robert Preston, trouble et passionnant dans le rôle du frère de Massey. Un rôle plus en retrait mais aussi intéressant que celui qu’il tenait dans Pacific Express, du même De Mille.

Belles séquences en mer en tout cas, magnifiquement filmées malgré quelques trucages qui ont peu vieilli : des transparences bien visibles surtout, et un calamar géant en latex du plus bel effet ! Pour le reste, De Mille réussit à se réinventer à chaque moment marquant, jouant tantôt du chaos, tantôt de l’invisible, glissant habilement quelques éléments comiques (le chien et son ventriloque) et une vraie tension dramatique (la disparition de la cousine jouée par Susan Hayward). A vrai dire, De Mille semble embrasser une quantité de genres différents dans ce film d’aventure : le thriller, la romance contrariée, le film de procès… Un film généreux, pour le moins.

La Rançon d’un trône (Adam’s Rib) – de Cecil B. De Mille – 1923

Posté : 6 juillet, 2017 @ 8:00 dans 1920-1929, De MILLE Cecil B., FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Adam's Rib

Ça commence comme l’une des nombreuses comédies du remariage dont De Mille s’est fait une spécialité à cette époque. Mais très vite, le réalisateur dévoile une ambition nouvelle, décuplée, ambition qu’il confirmera cette même année avec Les Dix Commandements, sorte de trait d’union entre les deux grandes tendances de sa filmographie, la comédie de mœurs et le film biblique.

Il y a, au cœur d’Adam’s Rib, un couple en crise, une fois encore. Mais il y a beaucoup plus que ça : une évocation des rapports entre les peuples (avec une vision énamourée du mode de vie américain, en opposition avec ceux de tous les autres pays du monde, pour faire simple), une illustration des Révolutions de l’Est, et beaucoup d’autres choses, avec des intrigues croisées, une demi-douzaine de personnages centraux, et même l’un de ces épisodes « historiques » (pré-historique même, en l’occurrence) que De Mille adorait, qui coûtent une fortune, et qui franchement n’amènent pas grand-chose.

Cette séquence, censée illustrer le fait que rien ne change jamais dans les rapports hommes-femmes, est même la seule faille de ce film par ailleurs passionnant. Au cœur du film, il y a surtout les rapports humaines, le portrait d’une mère de famille d’âge mur (quasi 40 ans !), délaissée par son mari, mais qui veut encore connaître l’amour. L’une de ces femmes d’habitude reléguées aux bons soins de monsieur, qui se retrouve « en compétition » avec sa fille de 17 ans, qui connaît elle ses premières amours. La scène du bal est ainsi étonnante et particulièrement audacieuse, les deux femmes se disputant les faveurs d’un même homme…

La manière dont De Mille filme ces deux femmes est exceptionnelle, surtout dans cette Amérique si puritaine. Pour le coup, et même si la conclusion remet quelque peu les choses (et les femmes) à leurs places, il n’est pas loin d’endosser le statut de cinéaste le plus féministe de l’époque !

L’un des plus passionnants en tout cas. Surtout que, pour cette fois, la référence biblique du titre (la côte d’Adam que Dieu a utilisé pour créer Eve) ne prend jamais la forme d’un message moralisateur (ce dont De Mille ne se privera pas toujours par la suite). Adam’s Rib est juste un film formidable.

L’Echange (Why change your wife ?) – de Cecil B. De Mille – 1920

Posté : 20 mai, 2017 @ 8:00 dans 1920-1929, De MILLE Cecil B., FILMS MUETS | Pas de commentaires »

L'Echange 1920

Old Wives for new, Don’t change your husband, et maintenant ce Why change your wife ?… A la fin des années 10 et au début des années 20, Cecil B. De Mille a réalisé toute une série de films consacrés à des couples en mariage, et dont le grand succès populaire a lancé la mode des « comédies du remariage ». Quelle que soit la crise traversée par les couples en question, quelles que soient les étapes par lesquelles ils passent, la conclusion est quasi-systématiquement la même : pas la peine d’aller chercher ailleurs quand on est déjà marié.

Le cinéaste ne signe pas pour autant des films puritains ou moralisateurs, bien au contraire : il y a une certaine audace et une vraie liberté de ton dans ce film, comme dans d’autres. Une vision du couple aussi qui évite les clichés habituels, mais souligne tout de même le caractère misogyne du monsieur. Car si on résumait la « morale » de Why change your wife, ce pourrait être en une phrase : « mesdames, pour rendre heureux vos maris, devenez celle qu’il veut que vous soyez ! »

Les (trop nombreux) cartons vont quasiment tous dans ce sens, et c’est bien vers ce message pas vraiment subliminal que se dirige l’histoire de ce couple qui se sépare avant de se retrouver. Gloria Swanson, épouse trop sage et trop rigide, se délurera, et finira pas aimer le chien de son mari… et même par casser le disque de musique classique qu’elle écoutait volontiers pour jouer la musique plus rythmée que son mari a toujours aimé et dont elle ne voulait pas. Ben oui, pourquoi s’emmerder à faire des concessions quand on a une femme à la maison !

Cela dit, et malgré tout, Why change your wife ? est un film très recommandable. Pas parce que se cache derrière l’auteur de ce blog un misogyne qui n’ose pas dire son nom, mais parce que le personnage le plus sympathique là-dedans, le seul même à avoir une vraie profondeur, c’est celui de Gloria Swanson, épouse délaissée, magnifique une nouvelle fois.

Et à vrai dire, on bafferait bien Thomas Meighan, le mari, pour s’être retourné aussi rapidement vers cette autre femme assez insupportable, interprétée par Bebe Daniels. Autant le jeu de cette dernière semble aujourd’hui un peu daté, autant celui de Gloria Swanson reste d’une justesse absolue, et justifie à lui seul la vision de ce film à la morale douteuse.

Les 10 commandements (The Ten Commandments) – de Cecil B. De Mille – 1923

Posté : 25 novembre, 2016 @ 8:00 dans 1920-1929, De MILLE Cecil B., FANTASTIQUE/SF, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Les 10 commandements 1923

Sommet du cinéma hollywoodien biblique, Les 10 commandements version Charlton Heston n’est pas le remake de cette première version déjà réalisée par Cecil B. De Mille. Non, le film de 1956 n’est le remake que du prologue de cette version muette de 1923 : les 50 premières minutes, illustration chapitre par chapitre du destin de Moïse et des Hébreux dans l’Egypte de Ramsès II.

Ce prologue n’est certes qu’une succession de faits marquants, sans le souffle lyrique du remake. Mais la marche des esclaves, l’avancée des chars, le mur de flammes ou, bien sûr, la traversée de la mer rouge sont déjà très impressionnants. De Mille, alors roi de la « comédie conjugale », fait ses premiers pas dans le cinéma de la démesure. Et son sens du spectacle est déjà extraordinaire.

Qu’il filme des milliers de figurants ou qu’il utilise les trucages de l’époque (des surimpressions, essentiellement), l’ampleur de sa mise en scène est toujours au service de l’histoire. 33 ans plus tard, il donnera une dimension encore plus impressionnante à l’histoire de Moïse (pour ce qui sera son dernier film). Mais cette version 1923 est déjà franchement bluffante.

Bon. Sur le fond, on est quand même dans la pure illustration biblique. Tout le film, d’ailleurs, baigne dans une bien-pensance et un moralisme qui, quand même, rompt assez radicalement avec le cynisme et la liberté de ses grandes comédies conjugales, souvent autrement plus audacieuses en matière de mœurs.

On retrouve un peu de ce ton, par bribes, dans ce qui est en fait le cœur du film: le drame contemporain. Car lorsque Moïse a brisé les tables de la loi, De Mille enchaîne avec le plan d’une bible que l’on referme : une mère lisait cet épisode à ses deux grands garçons. Deux hommes qui, bien sûr, s’apparaîtront à des versions modernes des frères ennemis du récit biblique.

Le premier (joué par Richard Dix) est honnête, travailleur et humble. Le second (Rod La Roque) est ambitieux, jouisseur et impie. Tous deux tombent amoureux de la même femme (Leatrice Joy, très émouvante), mais c’est autour d’une église que leurs destins se sépareront irrémédiablement : une église que le second est chargé de construire, et pour laquelle il utilise un béton de mauvaise qualité pour faire de plus grands bénéfices.

Non, la symbolique n’est pas légère. Mais De Mille a du savoir faire, et un sens unique du spectacle, même dans un récit finalement aussi simple que celui-ci. Le meilleur: une séquence au sommet de l’église en construction, où les sentiments se dévoilent sans fardn, et où tous les masques semblent tomber. A la fois beau… et vertigineux, dans le sens premier du terme.

Après la pluie, le beau temps (Don’t change your husband) – de Cecil B. De Mille – 1919

Posté : 12 juillet, 2016 @ 8:00 dans 1895-1919, De MILLE Cecil B., FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Après la pluie, le beau temps

Très tôt, De Mille a affirmé son goût pour les films en costumes, et pour la démesure. C’est ce qui fera sa légende, ce pourquoi l’histoire le retient en premier lieu : ses superproductions comme Les 10 commandements. Dans les années 10, c’était sa version de Jeanne d’Arc, succès populaire qui paraît aujourd’hui bien daté et un rien pompeux.

A l’époque déjà, le succès était certes important, mais le coût de production était tel que les producteurs préféraient, de loin, le voir tourner ces comédies de mœurs qu’il a enchaîné au tournant de 1920 : des productions autrement plus rentables qu’il tournait un peu à reculons, mais qui connaissaient de gros succès pour des dépenses modestes.

Grâce soit rendue à l’appât du gain des producteurs ! Parce que ces comédies de mœurs qui semblent souvent basées sur le même modèle (un couple se sépare, va chercher ailleurs, et se retrouve finalement), avec des titres qui paraissent interchangeables (Old Wives for New auparavant, Why change your wife après), rappellent à quel point De Mille était un bon cinéaste.

Don’t change your husband n’est peut-être pas son film le plus abouti, mais il y a là un sens du rythme et du récit absolument imparable. L’histoire est simple, et on sait d’emblée où elle nous entraîne : négligent et fermé aux désirs de sa femme (Gloria Swanson), le mari qui aime trop les cigares et les oignons (Elliott Dexter) va ouvrir les yeux et redevenir un séducteur élégant pour reconquérir celle qu’il avait perdu.

Ce cheminement sans grande surprise vaut surtout pour ces petits détails que De Mille accumule pour illustrer l’usure des couples, et qui se répètent et se répondent, comme ce journal grand ouvert durant les petits déjeuners, symbole de la barrière qui sépare les deux époux. Amusante aussi, la comparaison, par enchaînement de fondus-enchaînés, entre la tenue impeccable de l’amant en puissance, et celle débraillée du mari installé…

A la fin, la morale est souvent sauve, chez De Mille. Mais en chemin, il n’hésite pas à bousculer et à faire preuve d’un cynisme authentique, dans sa peinture sans grande concession du couple. Il laisse aussi apparaître un début de postulat féministe : le personnage de Gloria Swanson est le vrai moteur de l’histoire. Même si, au final, ses aspirations romantiques seront ramenées à une réalité plus prosaïque.

Le Rachat suprême (The Whispering Chorus) – de Cecil B. De Mille – 1918

Posté : 28 avril, 2012 @ 11:01 dans 1895-1919, De MILLE Cecil B., FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Le Rachat suprême

Voler, c’est mal. John Tremble, le « héros » de ce mélodrame muet particulièrement cruel signé De Mille va s’en rendre compte bien amèrement, et en payer le prix fort…

Petit comptable sans le sou, tiraillé entre son mauvais ange et sa bonne conscience (qui apparaissent tout au long du film en surimpression : un visage d’homme pour le mal ; une douce femme pour le bien… De Mille ne fait pas exactement dans la légèreté, ici), il hésite entre mener une existence miséreuse mais honnête, vie dans laquelle il ne peut offrir ce qu’il souhaite à sa femme (Kathlyn Williams) et sa mère (la très digne Edythe Chapman) ; ou céder à la tentation en jouant au jeu d’argent et en volant de l’argent à son riche patron.

L’homme est faible, et souvent dominé par ses basses pulsions, dans la filmographie muette de De Mille. Tremble passe donc du côté obscur, et le piège ne tarde pas à se refermer sur lui. Acculé, il décide de disparaître, ce qui n’est pas le rebondissement le plus réussi du film : le départ semble bien précipité, alors qu’on ne ressent pas vraiment une pression énorme peser sur les épaules de notre pauvre héros.

Ce n’est pas non plus le rebondissement le plus spectaculaire, car la suite est tout bonnement incroyable. Réfugié dans les bois, Tremble découvre un cadavre qu’il « pêche » au bout de sa ligne, et qu’il décide de rendre méconnaissable pour le faire passer pour lui. Considéré comme mort, il refait sa vie dans les docks, devient estropié, et finit par être accusé de son propre meurtre, pendant que sa femme se remarie avec l’homme qui l’a fait arrêter (le très charismatique Elliot Dexter, un habitué du cinéma de De Mille). Et ce n’est pas fini…

Trop, c’est trop ? Non : De Mille signe un film hyper sombre, mais extrêmement poignant. Si le couple formé par Kathlyn Williams et Elliot Dexter est touchant, on sent De Mille bien plus ému par les rapports filiaux que par les relations maritales : il n’y guère de passion au sein du couple Tremble, et jamais le fuyard ne donne l’impression de regretter sa vie d’homme marié. C’est par contre le souvenir douloureux de sa mère qui le pousse à revenir.

L’un des deux plus beaux moments du film est d’ailleurs les retrouvailles entre la vieille mère et ce fils qu’elle ne reconnaît pas, un passage déchirant. L’autre, c’est cette scène où Jane Tremble, remariée, envisage de sacrifier cette vie de famille qui s’annonce, par fidélité pour son ancien mari. La caresse qu’elle esquisse au fantôme de son enfant pas encore né est bouleversante.

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