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Archive pour la catégorie 'FORD John'

Marked men (id.) – de John Ford – 1919

Posté : 19 septembre, 2023 @ 8:00 dans 1895-1919, FILMS MUETS, FORD John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Marked men

Encore un Ford qu’on croyait définitivement perdu… et qui l’est sans doute effectivement, à l’exception d’un court fragment que le Eye Film Institute a mis en ligne. Pour être précis, ces trois petites minutes ne sont pas officiellement attribuées à Ford, et apparaissent comme une segment anonyme.

Mais le casting (Harry Carey en tête) l’histoire que l’on devine, deux noms qui figurent sur un intertitre (en néerlandais) et un troisième aperçu sur un livre entre les mains d’un personnage lèvent tous les doutes : il s’agit bien d’une bribe de Marked Men, remake du film The Three Godfathers qu’interprétait déjà Carey en 1916, et dont Ford signera lui-même un remake trente ans plus tard (dédié à Carey).

Cette version-ci s’inscrit dans la longue série des Cheyenne Harry, popularisée par Straight Shooting ou Bucking Broadway par Ford. Un Cheyenne Harry que l’on découvre dans ce passage (sans doute la conclusion du film) laissant un bébé entre les mains d’une jeune femme, et s’apprêtant à se laisser arrêter par un homme dont on comprend qu’il représente la loi.

Il est des fragments de films perdus qui se suffisent presque à eux-mêmes. Ce n’est pas le cas de Marked Men, dont on ne comprend vraiment les enjeux que parce qu’on connaît l’histoire grâce au remake à venir. On comprend ainsi que Harry avait deux comparses qui sont morts en savant la vie du bébé, et que lui-même est un outlaw recherché par le shérif.

On comprend aussi qu’il est question de rédemption, de transmission, et que le poids du passé joue, déjà, un rôle important. De là à préjuger de la qualité du film… Dans un décor unique, et avec un montage qui semble syncopé à force sans doute d’avoir été coupé et recoupé, difficile de s’en faire une idée précise avec ces trois petites minutes, précieuses mais bien courtes.

Dieu est mort (The Fugitive) – de John Ford – 1947

Posté : 10 septembre, 2023 @ 8:00 dans 1940-1949, BOND Ward, FORD John | Pas de commentaires »

Dieu est mort

Adapté d’un roman de Graham Greene, The Fugitive a été un échec sans appel, l’un des plus cinglants de cette décennie pour John Ford. Et ce n’est pas surprenant, tant le cinéaste renonce pour une fois à toute concession dans la légèreté, signant un film grave et lent, quasiment dénué d’action, dont le rythme épouse fidèlement les affres mentales d’un homme traqué, un prêtre confronté à la peur et au doute.

L’histoire se passe dans un pays d’Amérique du Sud, où la religion a été purement et simplement interdite, et les prêtres exécutés. A l’exception d’un seul, qui erre comme une âme en peine et se cache dans une église en ruines. C’est là qu’on le découvre dans la première scène, qui justifie à elle seule l’insuccès populaire du film. The Fugitive s’ouvre en effet sur une longue scène quasi-muette, où le prêtre joué par Henry Fonda est surpris par une jeune mère célibataire (c’est tout dire de ses mœurs!), qui lui demande de baptiser son enfant…

On est d’emblée frappé par le rythme qu’adopte Ford, lent et pesant, comme empêché. Puis par l’absence totale d’humour ou de second degré. Par la symbolique des images aussi, le prêtre apparaissant d’abord par une ombre en croix qui se dessine au sol, et la jeune femme ayant le sublime visage de madone de Dolores Del Rio, douloureuse pieta dont les seuls traits procurent d’incroyables sensations.

Ford, plus encore que dans The Informer (sans doute le film le plus proche dans l’esprit de toute sa filmographie), fait un usage presque systématique de la symbolique religieuse dans ses choix de cadre, dans sa manière de filmer des personnages qui incarnent tous à leur manière le difficile rapport à la foi, à la vie et à la mort.

Fonda en prêtre qui se découvre incapable d’avoir la grandeur que sa fonction exige. Del Rio en femme aux mœurs jugées légères qui se révèle d’une pureté absolue. Et Pedro Armendariz, fascinant en officier incarnant l’autorité anti-religieuse, mais que l’on découvre menant une lutte interne contre sa propre foi. Ou encore Ward Bond, étrange dans un rôle pas très convaincant de bandit en fuite se transformant de manière très inattendue en ange gardien.

Ford affirmait que le film était l’un de ceux dont il était le plus fier. C’est en tout cas une œuvre très atypique dans sa riche filmographie. Clairement pas le plus aimable de ses films, ni le plus abouti. Mais la beauté un peu revêche des images, cette manière de filmer les visages comme des images religieuses chargées de symboles, l’ambition morale aussi… Tout ça fait de The Fugitive un film peut-être pas très attachant, mais franchement fascinant.

Hommes sans femmes (Men without women) – de John Ford – 1930

Posté : 23 avril, 2023 @ 8:00 dans 1930-1939, FILMS MUETS, FORD John, WAYNE John | Pas de commentaires »

Hommes sans femmes

Ce film ne ressemble à aucun autre Ford, mais pourtant, il porte son empreinte de la première à la dernière image. Il est unique parce qu’il est rare que le cinéaste maintienne une telle tension, avec une telle omniprésence de la mort. Et très Fordien parce qu’on retrouve là la camaraderie des hommes entre eux, le groupe qui révèle les meilleurs (et parfois les pires) côtés de chacun, la rédemption…

Mais commençons par la première partie, cette longue séquence se déroulant dans un bar de Shanghai qui, dans les années 1920, était considéré comme le plus long du monde. Ford y concentre toute l’action de cette première partie, introduisant ses personnages dans un contexte exotique qui révèle les instincts de chacun.

Les marins d’un sous-marin, donc, en attente d’une nouvelle mission, qui profitent des quelques heures de liberté qui leur restent pour se saouler et flirter avec les filles de la maison. Dans cette séquence, on sent plus que jamais toute l’affection et même la tendresse de Ford pour ces hommes qui laissent aller leurs instincts les plus primaires entre deux voyages à hauts risques. On retrouve dans cette première partie le sens de la camaraderie, l’humour potache, l’alcool qui coule à flot, et même en muet, l’accent irlandais de certains personnages (dont celui de J. Farrel MacDonald).

Pas tout à fait muet, d’ailleurs : Men without women est un film sonore, avec les bruits du bar et plus tard du sous-marin, des bribes de dialogues à peine perceptible… Surtout, le son permet à Ford de filmer des hôtesses du bar chantant pour entraîner les marins. La vie qui règne dans ce bar, et dans les quelques plans extérieurs de Shanghai, est assez fascinante, particulièrement ces plans tout en profondeurs montrant l’interminable rangée de marins accoudés au comptoir, tournant le dos à des jeunes femmes qui tentent de les attirer.

Mais les marins sont rappelés à bord, et c’est un tout autre ton qu’adopte alors Ford : un huis-clos rapidement étouffant, le sous-marin, éperonné par accident, se retrouvant au fond de la mer, avec des perspectives pour le moins sombre pour les marins survivants. Là, Ford filme comme jamais l’attente, l’angoisse, le courage et les accès de panique, la mesquinerie et l’héroïsme, et la peur de la mort, qui s’installe et s’étire. C’est terriblement oppressant, et profondément émouvant.

Tourné dans un authentique sous-marin, Men without women dégage une authenticité étonnante, et semble concentrer avec une grande intensité certaines obsessions de Ford, que l’on retrouvera tout au long de sa carrière. Que le film marque sa première collaboration avec Dudley Nichols, qui sera son scénariste de prédilection durant toute cette décennie, n’est peut-être pas un hasard à cet égard. Autre habitué du cinéma de Ford : John Wayne fait une très brève apparition durant la (formidable) scène de sauvetage.

Permission jusqu’à l’aube (Mister Roberts) – de John Ford et Mervyn LeRoy (et Joshua Logan) – 1955

Posté : 20 avril, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, BOND Ward, CAGNEY James, FORD John, LeROY Mervyn, LOGAN Joshua | Pas de commentaires »

Permission jusqu'à l'aube

Hollywood emprunte parfois d’étranges chemins… A l’origine, Mister Roberts est une pièce à succès, écrite et mise en scène par Joshua Logan, qui a valu à Henry Fonda un grand et long triomphe sur scène. Pour le porter à l’adapter à l’écran, les producteurs ont préféré John Ford à Logan, mais voulaient Brando dans le rôle titre. Ford, lui, a imposé son vieux complice Fonda… avec qui il s’est fâché définitivement après avoir fait réécrire l’histoire…

Résultat : Ford s’est mis à picoler, et n’a plus jamais retourner avec Fonda. Mervyn LeRoy a été chargé de reprendre les choses en main, modifiant le script pour revenir à sa pièce originale, et retournant pas mal de scènes. Et Logan a finalement été appelé à la rescousse pour consolider son sujet et retourner une poignée de scènes… On fait plus simple, comme processus créatif.

Avec un tel bordel, on pouvait s’attendre à un film bâtard, tiraillé entre les personnalités de trois réalisateurs. Et c’est vrai qu’on aurait du mal à affirmer sans le moindre doute qu’il s’agit là d’un film purement fordien, même si le ton et l’atmosphère évoquent un peu What Price Glory, tourné trois ans plus tôt. Mais le film est parfaitement tenu, et trouve même un bel équilibre entre la légèreté apparente et la gravité sous-jacente.

Parce que, en dépit de son cadre (« on est à 7000 miles des premiers Japonais ! »), Mister Roberts est un film de guerre. Mais un film de guerre loin de la guerre : un film sur l’attente, l’ennuie, la monotonie, mais aussi le sens du devoir, et l’esprit de corps. En ça, le film est fordien, même si tout était dans la pièce : il y met en valeur l’honneur d’appartenir à un groupe, l’amitié masculine, l’hostilité qui gomme toutes les différences entre les hommes…

Et pour le coup, le casting incarne parfaitement ces différences, mélangeant les fidèles de toujours (Fonda, Ward Bond, Ken Curtis, Harry Carey Jr…) et des nouveaux venus a priori très éloignés de l’univers de Ford (Jack Lemmon dans l’un de ses premiers rôles, William Powell dans son tout dernier), tous unis dans l’ombre oppressante du capitaine incarné par James Cagney, réjouissant dans un rôle très caricatural qui lui permet d’aller très loin dans la démesure.

C’est souvent drôle, toujours vif, et l’émotion qui surgit soudain est forte. Il mérite d’être redécouvert, ce Mister Roberts

Torpedo Squadron 8 (id.) – de John Ford – 1942

Posté : 18 avril, 2023 @ 8:00 dans 1940-1949, COURTS MÉTRAGES, DOCUMENTAIRE, FORD John | Pas de commentaires »

Torpedo Squadron 8

Torpedo Squadron 8 est une sorte de complément au documentaire que Ford a consacré à La Bataille de Midway. Le cinéaste était réellement sur place, et a rencontré les hommes à qui il rend hommage dans ce court film. Hommage simple et bouleversant : l’essentiel du film est une succession de courts plans dans lesquels les hommes, qui trouveront tous la mort dans la bataille, prennent la pose devant la caméra, à côté d’un bombardier.

Cette espèce de mausolée animé capte ces (jeunes) soldats dans cet univers que l’on devine de camaraderie. La plupart sont souriants, paraissent plein de vie, et sympathiques. Et c’est avec un énorme pincement au cœur qu’on les voit retenir un rire, dessiner un visage sur la bombe accrochée à l’avion, jeter un œil à un pote hors caméra dont on devine qu’il doit faire le pitre… Un dispositif simple, presque une série de photos, à peine animée, mais la vie est omniprésente.

L’apparition de chaque binôme est précédée par leurs noms. C’est une sorte d’appel aux morts funèbre, beau et digne, que Ford conclue par un beau plan de coucher de soleil sur la mer, sous un ciel bas et chargé. Plan filmé du porte-avion sur lequel se trouvaient les hommes, et pour le coup très fordien.

Sex Hygiene (id.) – de John Ford – 1942

Posté : 12 avril, 2023 @ 8:00 dans 1940-1949, COURTS MÉTRAGES, DOCUMENTAIRE, FORD John | Pas de commentaires »

Sex Hygiene

John Ford fait décidément preuve de pédagogie en ce début de l’engagement américain dans la guerre. Après un premier documentaire didactique dans lequel il livrait aux femmes tous les moyens d’être utile à l’effort de guerre (Women in Defense), le voilà qui s’adresse aux hommes, aux soldats qui seraient tentés par les escapades sexuelles d’un soir, au risque de se choper des maladies vénériennes.

Oui les gars, en vous laissant aller, vous menacer votre propre santé, et vous exposer aussi tout votre bataillon. Autant dire que sur une terre étrangère, loin du foyer américain, le risque est dépeuplé, et que l’armée n’a pas besoin de ça ! Voilà en substance le message martelé par ce documentaire projeté aux soldats de l’oncle Sam engagés dans le conflit. Et s’ils l’ont regardé avec autant d’attention que ceux que l’on voit dans le film, il a dû en faire réfléchir plus d’un.

Parce qu’il est assez remarquable, ce court documentaire, qui réussit le pari d’être à la fois complet, technique et clair, et jamais ennuyeux. Pour cela, Ford utilise plusieurs procédés. Brièvement celui de la fiction, en ouvrant son film avec une scène de genre courte et parlante : alors que des soldats passent la soirée entre eux, jouant au billard pour certains, l’un d’eux s’éclipse contre l’avis des autres, bien décidé à profiter de la soirée « en ville ».

On imagine bien ce que ça veut dire, le regard réprobateur des autres est un peu édifiant, on se dit qu’on va avoir droit à un film lourdement moralisateur… et il l’est d’une certaine façon. Mais le but étant clairement affiché, on ne peut que saluer la manière dont Ford entremêle la fiction et la démonstration, utilisant diagrammes évocateurs et images (d’archives?) d’examens médicaux, avec un grand sens de la pédagogie, et du spectacle.

C’est direct et même assez cru. Et Ford, plutôt prude habituellement dès qu’il s’agit de sexe, nous montre un nombre impressionnants d’hommes nus, de sexes attaqués par la syphilis, la gonorrhée ou d’autres maladies franchement dégueulasses. On a droit aussi aux traitements douloureux, au pus qui sort de l’urètre… L’objectif était d’interpeller les soldats sur les conduites à risques, il est largement atteint dans ce film dur, cru et didactique, et curieusement captivant.

Toute la ville en parle (The whole town’s talking) – de John Ford – 1935

Posté : 10 avril, 2023 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1930-1939, FORD John | Pas de commentaires »

Toute la ville en parle

Clairement pas le plus fordien des films de Ford, mais cette première décennie du parlant est sans doute la plus étonnante de tout son cinéma. Non seulement il n’y tourne aucun western (il ne s’y recollera qu’avec Stagecoach, en 1939), mais il s’y montre aussi capable de passer d’un genre à l’autre, avec une grande aisance, beaucoup d’efficacité, et quelques motifs redondants.

Dans Toute la ville en parle, Ford dirige Edward G. Robinson. C’est une première, et c’est presque une dernière : les deux hommes ne se retrouveront que trente ans plus tard pour Les Cheyennes, l’ultime western du cinéaste. Mais pour bien faire, il confie à l’acteur un double-rôle assez mémorable : celui d’un brave employé du bureau, timide et effacé, et celui de son sosie, un tueur sans pitié recherché par toutes les polices.

On imagine bien le quiproquos qui se profile. On n’est pas déçu… Et c’est lors d’une scène assez énorme en termes de moyens déployés que l’on assiste à l’interpellation du brave employé. Là, dans la longue séquence qui suit, Ford dénonce mine de rien la société de l’image, le jugement par la presse, la justice expéditive, dans une sorte de cauchemar kafkaïen assez fascinant.

Mais le ton est clairement à la légèreté. Le suspense n’est présent qu’en surface, malgré quelques passages étonnamment sombres (l’exécution qui se prépare dans la cour de la prison, le meurtre final). Ford a la caméra badine et rieuse, ce qui n’est pas si courant. D’ailleurs, il passe nettement plus de temps à filmer l’employé singeant la lippe mauvaise du tueur en se regardant dans un miroir, que la violence. De la même manière, le cauchemar éveillé de l’employé est contrebalancé par les réparties joyeusement bravaches de sa jolie collègue, jouée par une Jean Arthur évidemment enthousiasmante (ne l’est-elle pas toujours?).

Robinson face à Robinson… Ford n’invente rien en matières de trucages, mais reconnaissons qu’il les utilise très habilement. En dépit de quelques transparences bien visibles, les scènes mettant en contact les deux personnages joués par le même acteur sont d’une fluidité rare pour l’époque. La double prestation de Robinson n’y est pas étrangère. En terrain connu dans le rôle du tueur, il compose un réjouissant personnage de vieux garçon emporté par les événements.

Women in defense (id.) – de John Ford – 1941

Posté : 2 avril, 2023 @ 8:00 dans 1940-1949, COURTS MÉTRAGES, DOCUMENTAIRE, FORD John | Pas de commentaires »

Women in defense

John Ford n’est pas crédité au générique, mais il semble bien qu’on lui doive ce documentaire court et didactique, qui serait donc sa première contribution à l’effort de guerre, et la seule avant l’attaque de Pearl Harbor. Celle qui est créditée en revanche, c’est Eleanor Roosevelt, la première dame des Etats-Unis en personne, qui a écrit les textes que dit Katherine Hepburn en voix off.

Ford, en l’occurrence, n’est pas derrière la caméra, mais à la table de montage, pour assembler des images montrant comment les femmes peuvent participer à la défense de la démocratie. Après tout, « les femmes ont toujours été les gardiennes des maisons et des enfants, qui sont notre avenir », comme le concluent Eleanor et Katherine. Oui, c’est grandiloquent et très américain, très dans l’esprit du patriotisme de cette époque trouble.

Ce petit film a pour vocation d’expliquer comment les femmes peuvent être utiles. Et à quel point leurs qualités propres sont précieuses : ces mains menues qui leur permettent de manipuler les petites pièces indispensables pour les machines que leurs hommes conduiront ou piloteront sur le front, avec une patience qui n’appartient qu’à elles. Usines, hôpitaux, ateliers de couture, dons de sang… les décors s’enchaînent avec musique héroïque de rigueur, histoire de rappeler à quel point chaque femme a envie de s’engager à sa manière.

C’est martial et héroïque, très hollywoodien. Ça montre aussi à quel point la place de la femme dans la société a évolué ces dernières décennies. Bref, ça se remet dans le contexte, et ça se regarde comme une curiosité fordienne. Après tout, c’était pour la bonne cause.

The Black Watch (id.) – de John Ford – 1929

Posté : 28 mars, 2023 @ 8:00 dans 1920-1929, FORD John | Pas de commentaires »

The Black Watch

Pour le moins inégal, ce Ford des premiers temps du parlant. The Black Watch aborde de nombreux thèmes, ébauche de multiples pistes. Parfois avec beaucoup de bonheur, parfois avec un résultat nettement moins convaincant.

Les scènes dialoguées sont ainsi lourdes et figées, franchement peu convaincantes. Cela s’explique : quelques mois seulement après l’apparition du parlant, Hollywood tâtonne encore dans ce domaine. Le moins qu’on puisse dire ici, c’est que ces dialogues pèsent sur le rythme et la cohérence du film. Il faut dire aussi que ces scènes dialoguées ont été confiées à Lumsdal Hare, l’acteur qui joue l’officier en chef de la Black Watch et qui était aussi metteur en scène de théâtre. Une fausse bonne idée.

C’est dans les scènes plus vivantes que l’on retrouve le talent de Ford. Ce moment, notamment, où le personnage joué par l’incontournable Victor McLaglen s’éloigne dans la nuit, laissant derrière lui les chants de ses camarades de régiment qu’une mission secrète l’oblige à abandonner, les laissant croire qu’il est un lâche fuyant la violence des combats.

L’histoire se déroule durant la Grande Guerre, alors que son régiment d’Ecossais, la Black Watch, s’apprête à embarquer pour le front de France. L’occasion pour Ford de filmer des scènes de camaraderie comme il les aime tant, et de nous plonger dans la culture écossaise comme il l’a tant fait avec l’Irlande. L’occasion aussi de filmer une séquence mémorable sur un champ de bataille des Flandres, images plongées dans l’obscurité et réduites à quelques plans percutants et dramatiques.

McLaglen, lui, a dû quitter ses frères d’arme pour mener à bien une mission top secret en Inde, où il doit éviter une guerre civile. Cette partie, centrale, est plombée par plusieurs handicaps. D’abord, cette manie hollywoodienne de confier des rôles d’indigènes à des acteurs très blancs (Roy d’Arcy et Myrna Loy, qui surjouent lourdement l’accent indien, sans avoir grand-chose de pertinent à jouer). Et puis un exotisme à la limite de la caricature.

Quelques belles idées surnagent dans cette Inde de carte-postale : Victor McLaglen en séducteur patriotique (un emploi pour le moins inattendu), une évocation très d’actualité de la violence extrême au nom de la religion, ou encore une scène de massacre assez glaçante, qui vient mettre un sacré coup à la notion de bien ou de mal, et que Ford filme en laissant planer le doute sur ses intentions. Il sera en tout cas plus ouvertement critique lorsqu’il filmera une autre scène de massacre assez similaire, dans le sous-estimé Quatre hommes et une prière.

Deux durs à cuir (What Price Glory) – de John Ford – 1952

Posté : 27 mars, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, CAGNEY James, FORD John | Pas de commentaires »

What Price Glory Ford

Vu il y a une quinzaine d’années, What Price Glory m’avait laissé dubitatif : Ford me semblait hésiter constamment sur le ton à adopter, finissant par lasser, et conduisant tout droit à un franc désintérêt. L’un de ses films démissionnaires, concluais-je, estimant que le grand Ford avait une tendance, surtout à cette période de sa carrière, d’abdiquer sur des projets qui ne le passionnaient pas. 1952 était donc l’année d’un film de cœur (L’Homme tranquille, effectivement magnifique), et d’un film de commande inabouti.

Le revoir me permet d’évaluer l’étendue de mon erreur d’alors. What Price Glory est un film très fordien, dont les ruptures de ton permettent au cinéaste d’aborder avec une légèreté feinte des thèmes particulièrement sombres : cette guerre qui tue les gamins, et où toute forme d’héroïsme est traitée avec une ironie bien cruelle.

What Price Glory est le remake d’un film muet de Walsh, auquel Ford a semble-t-il participé, lui-même adapté d’une pièce de théâtre. De la pièce initiale, il reste de longues séquences dans des décors très léchés et chaudement éclairés, qui figurent une vision très hollywoodienne de la France et des champs de bataille de la première guerre mondiale.

On voit bien ce qui a pu attirer Ford dans ce projet, qu’il connaissait donc de longue date : l’opposition vacharde mais pleine de tendresse entre deux officiers qui passent leur temps à s’engueuler et à se battre. Un rôle qu’en d’autres temps, il aurait sans aucun doute confier à Victor McLaglen. Qui d’ailleurs était le capitaine Flagg de Walsh. En 1952, John Wayne était le choix logique de Ford, mais la production préférait James Cagney.

James Cagney ce sera, donc, que Ford oppose à Dan Dailey, que Ford avait déjà dirigé dans When Willie comes marching home. Et ce double choix de casting est une idée de génie. Parce que Cagney et Dailey viennent du music-hall, et ont une expérience de danseurs. Et parce qu’ils apportent leur sens de la chorégraphie à leur opposition, une incarnation savamment excessive qui donne au film ce ton si proche de la pure comédie.

On sourit, et on rit même franchement devant ce duo qui se dispute inlassablement les faveurs de la belle Française Corinne Calvet. Mais ce marivaudage se heurte constamment aux ordres impitoyables des officiers supérieurs, qui ne cessent de les envoyer au front. Alors la comédie se heurte aux réalités de la guerre, à sa cruauté. Cela donne des scènes déchirantes : cette marche à travers les hautes herbes, où tombent un à un les jeunes recrues ; le face-à-face de Flagg avec la jeune fiancée qui attend vainement son homme…

Le rire devient jaune. L’ironie mordante de Cagney se teinte d’amertume, puis d’écœurement. Ford ne désarme pas, mais finit par resserrer son monde sur l’essentiel : la camaraderie, le sentiment d’appartenance. On en sort avec un sourire bien amer pour le coup, mais assez emballé.

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