Play it again, Sam

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Archive pour la catégorie 'POLARS/NOIRS'

Are you lonesome tonight ? (Re dai wang shi) – de Wen Shipei – 2021

Posté : 11 septembre, 2024 @ 8:00 dans * Polars asiatiques, 2020-2029, WEN Shipei | Pas de commentaires »

Are you lonesome tonight

Une nuit, un jeune homme un peu en retard renverse un homme et le laisse pour mort. Pris de remords, il cherche à se rapprocher de sa veuve… L’intrigue de ce film noir made in China n’est pas révolutionnaire, mais elle sert de base à un film étonnant, audacieux, et même hypnotique.

Le réalisateur chinois Wen Shipei (dont c’est le premier long métrage) joue avec les perceptions, les sensations, pour un film envoûtant autour de deux personnages comme emmurés dans leurs solitudes respectives, solitudes renforcées avec beaucoup de beauté par les évocations de la chanson du King, qui donne son titre au film.

L’esprit, ou plutôt l’aura qui baigne ce film a de quoi séduire, évoquant à sa manière l’effet inoubliable produit par les films de Wong Kar-wai à l’époque de In the mood for love. Mais ça, c’est pour la première partie du film.

La relation improbable entre la veuve, entre deux âges, et le jeune chauffard dont elle ignore qu’il a tué son mari, est assez fascinante. Mais elle est bientôt éclipsée par une révélation certes inattendue (attention, je spoile… l’écrasé a deux balles dans la peau), mais qui fait l’effet d’une douche froide.

Quoi ! A ce double portrait de deux êtres malades et désespérément seuls (solitude renforcée par la société, comme l’illustre cette tristement et ridiculement sinistre scène des condoléances des voisines), le réalisateur et scénariste préfère une intrigue policière banale et décevante ? L’histoire d’un sac de fric qui devient la pierre angulaire du récit…

Formellement, Wen Shipei n’abdique pas vraiment dans ses ambitions, jusqu’à une chasse à l’homme tendue et originale dans un hangar tout en box et rideaux. Mais cette stylisation de l’action ne fait plus qu’habiller une intrigue qui perdu de son attrait.

En changeant de cap à mi-film, Wen Shipei a perdu le fil de son récit immersif, transformant un magnifique mélodrame en un habile polar existentiel. C’est bien, mais ça promettait d’être tellement mieux que bien.

L’Insoumis – d’Alain Cavalier – 1964

Posté : 5 septembre, 2024 @ 8:31 dans * Polars/noirs France, 1960-1969, CAVALIER Alain | Pas de commentaires »

L'Insoumis

Alain Delon est mort. L’info ne vous a peut-être pas échappé. Moi, elle m’a secoué, bien plus que je ne l’aurai cru. Parce que, du haut de mes 48 ans, il m’est toujours apparu comme une figure du passé, qui appartenait déjà à une autre époque bien révolue quand j’ai commencé à fréquenter les salles de cinéma. Combien de dois l’y ai-je vu sur un grand écran ? Je me souviens d’1 chance sur 2, et du plus beau passage des Acteurs. Mais dans les deux cas, il se contentait de jouer avec sa légende.

Sa mort, pourtant, m’a marqué plus qu’aucun autre acteur français avant lui. Comme si, sans que j’en ai conscience, il avait toujours fait partie de mon panthéon. Pourquoi ? Humainement, il ne donnait pas franchement envie de partager des soirées. Artistiquement, il avait depuis bien longtemps abdiqué, se réfugiant derrière un passéisme complaisant. Politiquement, n’en parlons pas.

Ces derniers jours, j’ai donc revu pas mal de ses films (déjà chroniqués sur ce blog), histoire de comprendre d’où venait ce profond sentiment de grande perte. Plein Soleil, Le Samouraï et quelques autres ont apporté un début de réponse : cette présence hallucinante, cette douleur renfermée, et ce regard qui en dit tellement derrière un visage qui semble impassible. Delon est un acteur qui peut être formidable.

Découvrir L’Insoumis (c’était la plus longue intro depuis la création de ce blog) apporte un autre éclairage, plus éclairant encore, sans doute. Quand il tourne ce film du jeunot Alain Cavalier, Delon est déjà une star : Clément et Visconti lui ont offert de très grands rôles, Gabin l’a adoubé… Bref, il peut faire ce qu’il veut, et il en a conscience : il décide de produire ses propres films, et L’Insoumis est le premier qu’il porte à bout de bras.

Et quel rôle s’offre-t-il dans ce premier film produit par lui-même ? Celui d’un déserteur de la guerre d’Algérie. Pas un lâche, non : la première séquence montre que ce n’est pas le cas. Mais un soldat qui déserte parce qu’il ne croit pas en la cause pour laquelle il est censé se battre. Bien loin de l’image de réac de droite qu’il a toujours trimballée.

Non pas que cette image soit fausse d’ailleurs : lui-même ne s’en défendait pas, et se complaisait même à l’alimenter ad nauseum. Mais les idées de l’homme n’ont finalement jamais pesé sur les choix de l’acteur, et c’est peut-être ça qui est le plus beau chez Delon, capable de s’engager pour un film anti-peine de mort (Deux hommes dans la ville), lui qui était favorable, ou d’incarner sans retenue un homosexuel (Un amour de Swann), lui qui trouvait ça contre-nature.

Et je me rend bien compte que je parle bien peu de L’Insoumis, et c’est bien injuste. Parce que ce film, franchement méconnu dans la filmographie de Delon, est l’un de ses meilleurs, un beau film engagé qui prend les allures d’un film noir pour raconter la déroute d’un homme qui, au fond, refuse simplement de suivre les diktats de la société. Un homme qui choisit la liberté, en sachant que ce choix l’emmène dans une véritable impasse.

Delon est particulièrement touchant dans le rôle de cet anti-héros, qui semble condenser sa vie en quelques heures, dans une fuite en avant passionnante et amère. Ce grand rôle méconnu, dans un film qui l’est tout autant, pourrait bien être, paradoxalement, une belle porte d’entrée pour découvrir ou redécouvrir la carrière de l’acteur, au-delà des stéréotypes dans lesquels il s’est lui-même complu.

Le Club des trois (The Unholy Three) – de Tod Browning – 1925

Posté : 21 août, 2024 @ 8:00 dans * Films de gangsters, 1920-1929, BROWNING Tod, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Le Club des Trois

Tod Browning dans l’univers du cirque ? C’est avant L’Inconnu et Freaks, et c’est forcément très excitant, surtout que le cinéaste dirige une nouvelle fois son alter-ego du muet, le grand Lon Chaney. Le Club des trois, pourtant, m’a laissé sur ma faim, donnant le sentiment d’une petite chose pas désagréable, mais bien vaine à côté des deux chefs-d’œuvre à venir.

C’est un peu à l’image de Lon Chaney qui, s’il se déguise (ça devait être contractuel!) bien sous les traits d’une vieille dame très convenable qui sert de couverture à ses activités illégales, incarne un personnage pour une fois bien convenu : un ventriloque (dans un film muet, on ne peut que croire les cartons sur parole) qui se sert de son don pour monter une arnaque avec deux autres artistes du cirque, un colosse (Victor McLaglen, juste avant de commencer sa collaboration avec John Ford) et un nain aux traits juvéniles (Harry Earles, que l’on reverra dans Freaks).

Le personnage est assez classique. Le film l’est tout autant, Browning délaissant l’horreur au profit d’un récit policier assez simple. Ce n’est d’ailleurs que quand le cinéaste laisse allers ses penchants pour la bizarrerie que son film reprend du souffle, en particulier lorsque le nain aux allures de bébé tout mignon révèle sa cruauté.

Là, Le Club des trois dérange, bouscule et passionne. Pour l’essentiel, il se laisse voir avec un petit plaisir vaguement distrait. C’est bien, mais on attend tellement plus fort du cinéaste de West of Zanzibar.

Place Vendôme – de Nicole Garcia – 1998

Posté : 20 août, 2024 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1990-1999, GARCIA Nicole | Pas de commentaires »

Place Vendôme

J’aime bien le cinéma de Nicole Garcia, sa manière de dresser des portraits sensibles et complexes, et sa manière aussi de diriger les acteurs (et actrices), en tirant souvent quelques-unes de leurs meilleures prestations. Avec Catherine Deneuve, Jean-Pierre Bacri ou Jacques Dutronc devant sa caméra, autant dire qu’elle n’avait pas forcément à forcer son talent, pour en tirer le meilleur. Et pourtant, tous trois réussissent à surprendre, avec des personnages d’une belle complexité, et d’une belle évidence en même temps.

Deneuve surtout, est magnifique dans le rôle de cette veuve d’un grand joaillier, fragile psychologiquement, qui décide contre toute attente (et contre les intérêts de pas mal de gens) de reprendre les affaires de feu son mari, découvrant par la même occasion les libertés qu’il prenait avec les lois, ou la morale.

Parce que pour une fois, Nicole Garcia signe un film de genre : une sorte de polar à l’atmosphère très élégante, et à l’intrigue touffue et complexe. Un prétexte, d’ailleurs. Parce que même si cet aspect polar tient ses promesses, ce n’est visiblement pas ça qui intéresse la cinéaste et coscénariste (le film est écrit avec Jacques Fieschi, co-auteur de tous les films de Garcia), qui préfère décortiquer les relations elles aussi complexes entre les personnages.

Encore que « décortiquer » n’est pas le terme le plus adéquat, tant il se dégage un naturel et une vérité de ces rapports, parfois très inattendus, à l’image de cet étonnant flirt entre la sophistiquée et sublime Catherine Deneuve et un Jean-Pierre Bacri emprunté mais touchant, loin de son univers. Le contre-pied de cette ancienne idylle entre le personnage de Deneuve et celui de Dutronc, deux oiseaux de la même branche…

Les débuts de Nicole Garcia derrière la caméra avaient d’emblée étaient beaux (Un week-end sur deux, puis Le Fils préféré). Mais c’est avec ce troisième long métrage qu’elle gagnait ses galons de grande cinéaste. Depuis, elle n’a cessé de confirmer qu’elle fait partie des plus grands.

Elyas – de Florent-Emilio Siri – 2024

Posté : 11 août, 2024 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2020-2029, SIRI Florent-Emilio | Pas de commentaires »

Elyas

Il y a un peu plus de vingt ans, Florent-Emilio Siri avait frappé fort avec un Nid de Guêpes jouissif et décomplexé, film d’action pur d’une efficacité redoutable, qui révélait le digne élève des grands noms du film de genre américain (et hong-kongais), sous influence de John Carpenter et John Woo notamment.

Depuis : une carrière hollywoodienne logique mais tuée dans l’œuf (Otage, échec au box-office), et un retour en France où il semble se chercher, entre réhabilitation historique ambitieuse (L’Ennemi intime), biopic musical (Cloclo) et comédie populaire (Pension complète). Et puis un silence de presque une décennie, qu’il rompt avec ce Elyas qui sonne comme un retour aux sources.

Vingt ans après, Siri est donc toujours sous influence du film de genre américain. Et cette fois, c’est dans la grande vague des films dont-le-héros-est-un-ancien-homme-d’action-retiré-des-affaires-mais-qu’un-événement-dramatique-oblige-à-sortir-de-sa-retraite-et-à-affronter-une-véritable-armée-à-lui-seul-dans-un-déluge-de-feu-et-de-sang qu’il trouve son inspiration. Oui, c’est un genre, qui n’a cessé de surenchérir entre Taken et la série des John Wick.

Côté surenchère, Siri n’y va pas avec le dos de la cuillère, en particulier dans le très long moment de bravoure, qui emprunte aussi bien du côté de John Wick que de Mission : Impossible, en mettant de côté toute notion de réalisme et même de crédibilité pour n’offrir qu’un condensé de pur cinéma d’action totalement décomplexé. Du strict point de vue de l’efficacité, c’est assez énorme, il faut le reconnaître.

C’est donc avec un certain plaisir que l’on découvre ce Elyas, dont on sent qu’il est taillé pour être le premier d’une série. Mais un plaisir coupable. Parce que Siri n’invente rien, se contentant d’enfiler les références plus ou moins glorieuses avec un savoir-faire imparable. Et parce que ce cinéma d’action décérébré et brut s’inscrit dans une histoire sombre aux thèmes plutôt sérieux : le traumatisme des anciens soldats, et surtout l’immigration, dont le scénario fait un ressors dramatique franchement douteux.

Music Box (id.) – de Costa-Gavras – 1989

Posté : 12 juillet, 2024 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 1980-1989, COSTA-GAVRAS | Pas de commentaires »

Music Box

Il y a au moins une chose qu’on ne peut pas retirer à Costa-Gavras, c’est sa sincérité. On peut aussi y ajouter l’audace, la colère, et l’honnêteté, y compris dans un film comme ce Music Box, dont on sent qu’il est aux confluents de deux mondes.

Le générique de début porte déjà en lui quelque chose de détonnant : Costa-Gavras dans une production Carolco, studio alors en vogue qui sera le spécialise des grosses machines d’action des années qui suivront, c’est un peu comme Menahem Golan qui produisait le King Lear de Godard… Une rencontre hautement improbable.

Le résultat est bien un film de Costa-Gavras, pas de doute. Mais on sent constamment une envie de s’imposer sur le marché américain. C’est surtout flagrant dans le premier tiers, d’une maladresse confondante, avec des effets très appuyés sur une Jessica Lange qui surjoue le bonheur familial. Ou dans les dernières minutes, qui évacuent dans un final nerveux (et efficace) un doute qui eût été autrement plus troublant s’il n’avait pas été clarifié.

Mais entre deux, Costa-Gavras réussit haut la main son film de procès américain, donnant à cette longue partie centrale une grande tension, et une vraie force d’évocation, dans une mise en scène au cordeau. Là, Jessica Lange redevient une excellente actrice, dans le rôle de cette avocate qui défend son père (Armin Mueller-Stahl, parfait comme toujours) accusé d’être un ancien criminel de guerre.

L’émergence du doute, la confrontation avec les récits d’horreur des témoins, les mystères de l’âme humaine, l’incapacité de connaître vraiment ces aînés dont on n’a pas vécu la jeunesse, mais qu’on croit connaître mieux que quiconque… Sans aucun flash-back, sans images d’horreur, avec la seule force de la parole (et du montage cinématographique), Costa-Gavras signe un film intense, qui interroge plus qu’il ne dénonce. En tout cas, il bouscule.

L’Assassin a peur la nuit – de Jean Delannoy – 1942

Posté : 8 juillet, 2024 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1940-1949, DELANNOY Jean | Pas de commentaires »

L'Assassin a peur la nuit

Il s’en passe des choses, dans ce film qui oscille entre le noir, la romance et l’aventure… Quelque part entre Lumière d’été pour les paysages brûlants et poussiéreux et les illusions perdues, Le Dernier Tournant pour l’anti-héros marqué par le destin, les films anglais genre Jeune et innocent pour les allers-retours constants et l’utilisation du vieux moulin, et L’Assassin habite au 21.

Les premières images, surtout, ressemblent en tout point à celles du film de Clouzot, sorti peu avant. De là à imaginer que Delannoy surfe sur le succès dudit, il n’y a qu’un pas que je franchis allégrement : dans l’entrée en scène des personnages, la manière de filmer les policiers arpentant la ville la nuit, l’humour des dialogues et l’utilisation des ombres sur les murs, l’influence est plus que manifeste. Et explique ce curieux titre qui ne correspond pas vraiment au film.

La comparaison avec le chef d’œuvre de Clouzot s’arrête là, d’ailleurs. Après cette introduction, le film prend d’autres directions. Plusieurs autres directions. Avec un vrai sens de l’image et de la narration : Delannoy réussit des tas de belles scènes, bien ficelées (celle du cambriolage, pleine d’entrain et d’inventivité, jusque dans les dialogues assez marrants), voire très fortes : l’arrivée dans la mine, le final dans le moulin…

Mais Delannoy, dans cette adaptation d’un roman de Pierre Véry (très en vogue sous l’occupation, avec des films adaptés de son œuvre comme L’Assassinat du Père Noël ou Goupi Mains Rouges), donne le sentiment d’enchaîner les scènes en oubliant de leur donner du liant, une ligne directrice, un rythme cohérent. C’est généreux, souvent plaisant, mais on peine à s’attacher aux personnages, à croire au soudain traumatisme du personnage principal (Jean Chevrier) ou au repentir de la vamp (Mireille Balin, très bien).

Mais il y a dans ce film référencé, généreux, et maladroit suffisamment de bons moments pour ne pas faire la fine bouche.

Chair de poule – de Julien Duvivier – 1963

Posté : 3 juillet, 2024 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1960-1969, DUVIVIER Julien | Pas de commentaires »

Chair de poule

On a un peu vite dit que la fin de carrière de Duvivier était décevante. Peut-être ce constat un peu trop facilement partagé a-t-il fait oublier quelques réussites. Ce Chair de poule, malgré un titre moche et une affiche ratée, en fait partie : avec cette adaptation d’un roman noir de James Hadley Chase, le cinéaste renoue avec une veine sombre qui lui va bien, et qui lui a inspiré quelques chefs d’œuvre, souvent avec Gabin en anti-héros marqué par le destin.

Vingt-cinq ans plus tôt, le rôle que tient ici Robert Hossein (excellent, d’ailleurs) serait sans doute revenu à l’interprète de La Bandera : qui d’autre, avant guerre, pour incarner ce genre de personnages dont on sait dès le début qu’ils sont promis à un sort funeste, que le hasard mène droit dans les bras d’une authentique femme fatale qui scelle son sort au premier regard.

Hossein, donc, évadé qui trouve refuge dans une station service au milieu de nulle part, où il se lie d’amitié avec le patron, homme jovial et vieillissant (George Wilson, jovial et attachant), marié à une femme trop jeune et trop belle (Catherine Rouvel). Oui, on croirait le postulat du Dernier Tournant et Le Facteur sonne toujours deux fois, les adaptations du roman de James M. Cain. Et on n’est clairement pas loin dans l’esprit.

Mais c’est bien d’un roman de Chase qu’il s’agit, auteur que Duvivier avait déjà adapté avec L’Homme à l’imperméable (nettement moins convaincant). De l’admirable première séquence, modèle de découpage et de mise en scène, à la conclusion sombre et ironique, cette histoire noire au possible inspire à Duvivier son dernier grand film, d’une richesse extrême jusque dans ses détails.

Une courte scène dans un HLM suffit à faire ressentir l’étouffement d’un personnage. L’effervescence d’un dimanche dans une cafétéria illustre la violence sexiste d’une société machiste… Et cette chaleur, la poussière, la culpabilité, la suspicion et le dégoût… que l’on ressent sans grand discours.

Duvivier n’est peut-être jamais aussi passionnant que quand il plonge dans les côtés les plus obscurs de l’âme humaine. Avec ce film noir, il s’épanouit comme rarement dans cette dernière partie de carrière. C’est brûlant et glaçant, et c’est une réussite majeure.

Un détail pour finir, intriguant : ce générique de début, à la manière de ceux, immuables, d’Ozu, qui mourra un mois après la sortie du film en salles. Curieux hasard, qui fait planer d’emblée et rétrospectivement une ombre de mort sur le film…

La Voix de la Terreur / Sherlock Holmes et la voix de la terreur (Sherlock Holmes and the voice of terror) – de John Rawlins – 1942

Posté : 25 juin, 2024 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, RAWLINS John, Sherlock Holmes | Pas de commentaires »

La Voix de la Terreur

En 1942, tout le monde participe à l’effort de guerre, y compris Sherlock Hommes et son comparse Watson. Après deux premiers films fidèles dans l’esprit et dans l’époque, voilà donc Basil Rathbone et Nigel Bruce appelés à revêtir leurs frusques conan-doyliennes dans une étonnante réinvention contemporaine.

Ces deux figures de l’ère victorienne se retrouvent donc confrontés… aux dangers du nazisme, qui menace de l’intérieur une Angleterre en guerre. Un changement de cap étonnant, justifié par un carton inaugural simple et bien pratique, et sur lequel le film ne joue que le temps d’une très courte scène, lorsque Holmes fait mine de renfiler son vieux couvre-chef à oreilles. « Non Holmes, vous avez promis ! » l’arrête Watson.

Le film joue à fond la carte du patriotisme de rigueur, n’évitant pas les grandes envolées lyriques de défenseur du monde libre, parfois grandiloquent, souvent maladroitement. Il y aurait à redire aussi sur les rebondissements attendus, sur la naïveté confondante des méchants (Thomas Gomez notamment, en nazi infiltré), et sur le simplisme du scénario.

Mais cette série B d’à peine plus d’une heure, taillée pour les double-programmes, est constamment tirée vers le haut par une image très travaillée du chef-op’ Woody Bredell (qui travaillera avec Siodmak sur Les Mains qui tuent et Les Tueurs) et par les cadres dynamiques de John Rawlins (qui lui restera cantonné à la série B).

Pas transcendant sur le fond, ce troisième Holmes de la série est formellement une vraie réussite, particulièrement dans les scènes se déroulant dans les bas-quartiers et les bouges mal famés, où les ombres profondes et le beau contraste des images transforment cette petite production en un film racé qui a de la gueule.

Saints & Sinners (In the land of Saints and Sinners) – de Robert Lorenz – 2023

Posté : 17 juin, 2024 @ 8:00 dans * Polars européens, 2020-2029, LORENZ Robert | Pas de commentaires »

Saints & Sinners

Liam Neeson est un excellent acteur. Il y a quelques années, ce constat allait de soi. Mais après quinze ans de coups de tatanes vengeresses, cela fait du bien de se le remettre en tête. Non pas que Saints & Sinners soit un chef d’œuvre impérissable qui révolutionnerait quoi que ce soit. Mais le film de Robert Lorenz, ancien compagnon fidèle de Clint Eastwood, qu’il a dirigé dans son premier film (Trouble with the Curve), a pour le moins le mérite de lui donner un vrai rôle.

Celui d’un tueur de l’IRA, dans l’Irlande du Nord tourmentée de 1974. Côté géopolitique, on gardera quelques réserves. Côte folklore nord-irlandais, on se régale… Grandes étendues à la beauté austère, pubs plein de vie, personnages truculents… Lorenz ne fait pas dans l’originalité, mais il crée une atmosphère que le passionné de pubs et de grands espaces tourbeux que je suis ne peux qu’aimer.

Et puis ces paysages si fascinants et si hostiles à la fois correspondent bien au personnage de Neeson, à ses fantômes et à la quête d’une nouvelle chance, d’un nouveau départ.

Et, donc, le septuagénaire qu’il est ne triche pas avec son âge, en rigolant même avec son pote Ciaran Hinds, très beau second rôle. Il triche d’autant moins que l’incontournable love-interest est une sexagénaire qui porte elle aussi son âge, ce qui fait un bien fou dans le jeunisme inévitable imposé (notamment) par Hollywood.

Les quelques facilités et incohérences du scénario n’ont pas une grande importance. Le film séduit par son classicisme, son humanité, et sa sincérité.

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