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Archive pour la catégorie 'LUPINO Ida (actrice)'

La Péniche de l’amour (Moontide) – d’Archie Mayo – 1942

Posté : 25 décembre, 2021 @ 8:00 dans 1940-1949, GABIN Jean, LUPINO Ida (actrice), MAYO Archie L. | Pas de commentaires »

La Péniche de l'amour

La carrière hollywoodienne de Jean Gabin, pendant l’occupation, se limite en gros à Moontide (il y a tourné deux films, en fait, mais l’autre, L’Imposteur, est réalisé par son vieux comparse Julien Duvivier et participe à l’effort de guerre, disons donc qu’il ne compte qu’à moitié). C’est donc une vraie curiosité, dans laquelle Gabin trouve un rôle dans la lignée de ceux qui ont fait sa gloire, mais avec un regard hollywoodien… et une belle chevelure blonde.

Un rôle taillé pour lui, donc : un docker qui pense être le meurtrier d’un homme, tué lors d’une de ses innombrables soirées de beuverie. Il ne fait d’ailleurs pas les choses à moitié, éclusant des choppes de whisky et de saké, histoire que son amnésie passagère soit crédible. A vrai dire, elle l’est assez moyennement : survivre à une telle quantité d’alcool est en soi assez miraculeux.

Le film n’est, de fait, pas d’une finesse extrême. L’identité du tueur est bien vite évidente, l’histoire d’amour manque de subtilité, la plupart des personnages sont monoblocs… Et le naturel habituel de Gabin tombe souvent à plat dans une langue qui n’est pas la sienne. Malgré tout, Moontide est un film très attachant, en partie pour sa jolie naïveté.

Le principal décor de l’histoire fait beaucoup pour cette réussite. Non pas une péniche, mais une barge, transformée en cocon romantique coupé (y compris physiquement) du monde, pour le docker paumé et une jeune femme qu’il a sauvée du suicide, jouée par Ida Lupino. Presque une abstraction : on ne saura rien de son passé, Gabin lui-même refusant de l’écouter lorsqu’elle veut se confier.

Là encore, la vision du couple n’est pas la plus subtile ni la plus avant-gardiste qui soit : la belle Ida comprendra bien vite que ce qu’attend un homme, c’est que sa femme tienne la maison et l’accueille après la journée de boulot avec une belle robe sexy. Mais oui, voilà qui est parlé ! Remettons dans le contexte, comme on dit…

Pas avant-gardiste, non, mais attachant par sa bonhomie, par la manière aussi de réduire l’intrigue à quelques personnages qui tournent autour de la barge, ne laissant que de brèves scènes à d’autres personnages plus secondaires. Beau casting, d’ailleurs, avec Thomas Mitchell et Claude Rains notamment.

Presque un huis clos, d’où émergent toutefois quelques scènes « extérieures » baignées de brumes, comme si rien d’autre n’existait que cette barge, seul bonheur possible pour nos deux tourtereaux. On retiendra surtout une implacable poursuite dans la nuit, sur une jetée, ou l’aboiement d’un chien qui annonce le danger…Soudaines montées dramatiques dans un film qui, par ailleurs, ressemble plus à une fable bon enfant, malgré son sujet.

Bigamie (The Bigamist) – d’Ida Lupino – 1953

Posté : 23 décembre, 2021 @ 8:00 dans 1950-1959, LUPINO Ida, LUPINO Ida (actrice) | Pas de commentaires »

Bigamie

Tout est dans le titre, et on ne peut pas dire que ce soit le titre le plus porteur de promesses de l’histoire du cinéma. La promesse d’une soirée « dossier de l’écran », plutôt : faits et méfaits de la bigamie, ou comment un homme peut mentir pendant toute une vie pour assouvir ses désirs à lui. La surprise n’en est que plus forte : The Bigamist est un beau film, à la fois sensible et très ancré dans la réalité. Du cinéma qui ne triche pas, avec une vraie fibre sociale, et une délicatesse infinie.

Derrière la caméra : Ida Lupino, passionnante actrice devenue passionnante réalisatrice. The Bigamist, sixième de ses films (le dernier pour le cinéma avant un ultime long métrage treize ans plus tard), est aussi le seul dans lequel elle se dirige elle-même. Elle retrouve aussi Edmond O’Brien, excellent comédien qu’elle avait déjà dirigée dans Le Voyage de la peur, son précédent film. O’Brien n’est jamais si bien que quand il joue les Américains sans histoire. C’est le cas ici.

Et c’est l’une des forces du film : O’Brien est un type bien, mari fidèle et aimant, chef d’entreprise qui passe une grande partie de son temps en déplacement, pour jouer les représentants de commerce. Mais il s’ennuie, seul loin de son foyer. Et chez lui, il se sent délaissé par une épouse, Joan Fontaine, qui vit mal le fait de ne pas pouvoir avoir d’enfant. Alors un dimanche de grande solitude, il se laisse aller à aborder une inconnue qui a l’air aussi désespérément seule que lui. C’est là qu’Ida Lupino entre en scène.

C’est à peu près à ce moment que la douce épouse se décide à vouloir adopter un enfant. Le mari ne veut faire souffrir personne, et il les aime sincèrement et profondément, toutes les deux. Peu à peu, il s’installe avec Ida à Los Angeles, tout en continuant sa vie normale avec Joan, à San Francisco. Comment en est-il arrivé ? C’est ce qu’aimerait comprendre le responsable de l’agence d’adoption (joué par Edmung Gwenn), qui enquête sur la moralité du couple. C’est ce que le film nous montre par de longs flash-backs.

Si The Bigamist est si réussi, c’est grâce à la pudeur extrême de la cinéaste, et par le refus de simplifier la situation. Inutile de chercher : il n’y a pas l’ombre d’un salaud, aucune mesquinerie chez les personnages. Pas non plus de jugement de la part de la cinéaste, qui filme une impasse avec une immense empathie pour tous ses personnages.

Tiraillée entre deux belles personnes (et deux belles actrices), Edmond O’Brien est formidable en homme incapable de se résoudre à faire souffrir les femmes qu’il aime. Un peu victime du sort aussi : lorsqu’il semble décidé à dire la vérité, un événement vient la rendre impossible à avouer. Mais avant tout, c’est la bonté qui se dégage de ce film au sujet si rare. Jusque dans les dernières minutes, très belles.

Le Vaisseau Fantôme (The Sea Wolf) – de Michael Curtiz – 1941

Posté : 12 février, 2020 @ 8:00 dans 1940-1949, CURTIZ Michael, GARFIELD John, LUPINO Ida (actrice) | Pas de commentaires »

Le Vaisseau fantôme

Un film qui s’appelle Le Vaisseau fantôme, dans lequel on croise Edward G. Robinson, Ida Lupino, John Garfield et Barry Fitezgerald, et que réalise Michael Curtiz en plein dans sa période Warner… Franchement, si ça ne vous tente pas, vous n’avez pas grand chose à faire sur ce blog !

Cette adaptation d’un roman de Jack London joue à plein sur l’imagerie liée aux vaisseaux fantômes, même si le film n’a rien de fantastique sur le fond. La forme, elle, emprunte clairement au cinéma d’épouvante, avec l’omniprésence de la brume qui, plus que cacher les choses, semble plutôt enfermer l’action et les personnages dans une sorte d’enfer sur terre.

Ou plutôt sur mer : l’exception de la séquence d’ouverture, brillante introduction du personnage de Garfield, tout le film se déroule à bord du « Ghost », ce bateau présenté comme l’enfer sur mer, sur lequel Robinson fait régner une terreur constante, dans des scènes d’une rare cruauté. On retiendra en particulier l’humiliation terrible du médecin alcoolique, joué par l’excellent Gene Lockhart.

Huis-clos étouffant, brillant film de genre, The Sea Wolf hésite un peu sur le point de vue à adopter, passant de l’un à l’autre de ses quatre personnages principaux. Cette multitude de points de vue donne un ton particulier au film. Après un semblant de flottement, ce choix renforce le côté incertain de l’aventure, et le suspense qui entoure le destin de tous ces personnages.

La force du film, c’est aussi ses acteurs. Garfield est l’incarnation parfaite de l’homme blessé. Ida Lupino est superbe, maquillage impeccable même après s’être pris des trombes d’eau dans la gueule. Robinson est inquiétant, glaçant et pathétique. Barry Fitzgerald est génial en lèche-cul odieux. Au milieu de cette distribution spectaculaire, Alexander Knox semble un peu en retrait dans le rôle central de Van Weyden. Mais cette discrétion se révèle un atout formidable, qui renforce l’immersion du spectateur sur ce bateau franchement flippant.

La Maison dans l’Ombre (On dangerous ground) – de Nicholas Ray – 1951

Posté : 18 septembre, 2013 @ 9:21 dans * Films noirs (1935-1959), 1950-1959, BOND Ward, LUPINO Ida (actrice), RAY Nicholas, RYAN Robert | Pas de commentaires »

La Maison dans l’Ombre (On dangerous ground) – de Nicholas Ray – 1951 dans * Films noirs (1935-1959) la-maison-dans-lombre

La première demi-heure est hallucinante : une plongée dans le quotidien de flics abîmés par les horreurs qu’ils côtoient au quotidien. Trois flics. Deux sont mariés et parviennent à sauvegarder leur jardin secret, mais le troisième ne vit que pour les crimes sur lesquels il enquête. C’est Robert Ryan, simplement immense ici, dans ce qui ressemble fort à la matrice de tous les flics borderline qui feront le cinéma policier US des décennies à venir.

Cette première partie, filmée au plus près de ce flic au bord du gouffre, joue vaguement le jeu du polar traditionnel, en nous refilant un semblant d’enquête criminelle qui, on s’en rend vite compte, n’a strictement aucune importance. Ce qui compte, c’est le regard de Ryan, d’un noir profond, et ce qu’on y lit : un dégoût profond de ce qui l’entoure et de ce qu’il fait au quotidien. Un type à qui il reste à peine la force de s’émouvoir du dort d’une gamine tapinant dans un bar mal fréquenté.

Cette première partie donne le ton immédiatement. Mais Ray, cinéaste d’une modernité étonnante, ne plante le décor d’un polar urbain et poisseux que pour mieux s’en défaire. Son anti-héros, il l’envoie enquêter dans le grand Nord, comme le fera Christopher Nolan avec Al Pacino dans Insomnia, descendant évident de ce On dangerous Ground.

Là encore, l’intrigue policière, vite émousse, n’est qu’un prétexte à faire se côtoyer une poignée de solitudes abîmés par la vie. Ryan bien sûr, qui trouve l’un des plus beaux rôles d’une carrière exceptionnelle : il est de toutes les scènes, presque de tous les plans, et sa placidité qui cache (mal) un malaise abyssal, est absolument déchirante.

A ses côtés, Ida Lupino est d’une justesse rare dans le rôle d’une aveugle, évitant constamment la surenchère ou le cabotinage malvenu. Simplement dans le ton. Quant à Ward Bond, en père vengeur, il laisse peu à peu pointer une humanité bouleversante. Nicholas Ray, grand créateur formel, est un immense directeur d’acteurs. Et ses comédiens sont au sommet.

Le dernier quart d’heure se débarrasse totalement de tout semblant d’intrigue policière. Ne reste alors que deux solitudes déchirantes condamnés à tâtonner pour finir par s’effleurer. C’est tout simplement magnifique.

• Indispensable, La Maison dans l’ombre fait partie de la collection bleue RKO des Editions Montparnasse. En bonus, comme la plupart des titres de la collection : une introduction du passionné Serge Bromberg.

La Cinquième Victime (While the city sleeps) – de Fritz Lang – 1956

Posté : 17 décembre, 2012 @ 4:33 dans * Films noirs (1935-1959), 1950-1959, LANG Fritz, LUPINO Ida (actrice) | Pas de commentaires »

La Cinquième Victime (While the city sleeps) – de Fritz Lang – 1956 dans * Films noirs (1935-1959) la-cinquieme-victime

Après Moonfleet, Lang change radicalement de registre, et réalise en quelques mois ces deux derniers films américains, qui seront, derrière les apparences de films de genre, des charges assez radicales à l’encontre des évolutions de la société américaine. Deux films jumeaux qui se complètent et se répondent : La Cinquième victime et L’Invraisemblable vérité. Vingt ans après son arrivée en Amérique, Lang semble à la fois attiré et déçu par cette Amérique dont il est devenu l’un des cinéastes les plus brillants, et les plus critiques. Mais l’évolution récente (le développement de la télé, le cynisme ambiant) semble le troubler. Le roman de Charles Einstein, The Bloody Spur, sera pour lui le matériau idéal pour signer l’un de ses films les plus mordants et cruels.

Il apparaît bien vite que Lang ne s’intéresse pas vraiment à ce tueur de femmes qui sévit à New York (et qu’interprète John Barrymore junior). L’intrigue policière, d’ailleurs, est un peu tirée par les cheveux, et certains rebondissements sont pour le moins hasardeux (la manière dont le tueur trouve l’adresse de la petite fiancée du héros). Le cœur du film, ce sont les mesquineries auxquelles se livrent une poignée de journalistes pour démasquer le tueur, et ainsi s’attirer les bonnes grâces du patron de presse, jeune héritier gâté interprété par Vincent Prive, marié à la belle (mais infidèle) Rhonda Fleming.

Thomas Mitchell, George Sanders et James Craig sont sur les rangs. Ida Lupino joue de ses charmes, et Dana Andrews, grand journaliste lauréat du prix Pulitzer, a des allures de héros désigné. Sauf que le héros en question est un alcoolique qui tromperait allégrement sa fiancée s’il n’était pas freiné par une gueule de bois carabinée, et qui n’hésite pas à se servir de la douce comme d’un appât pour attirer le tueur.

Les sourires et les grandes phrases n’y changent rien : il n’y a ni morale, ni fidélité, ni sens du devoir dans ce milieu du journalisme new-yorkais, qui semble n’être régi que par une ambition dévorante. Et à travers ce milieu, c’est tout un fonctionnement de société que Lang égratigne sévèrement.

Et il le fait avec un style nettement épuré, depuis ses débuts américains : peu de jeux d’ombres (si ce n’est pour souligner les formes fort jolies de Rhonda Fleming, et pour renforcer le suspense d’une poursuite dans le métro), mais une image propre et soignée, et un sens du rythme et de la narration qui n’a cessé de s’affirmer au fil des années.

La Cinquième victime, dont Lang restera très fier, est un grand film sur le journalisme et sur l’ambition. Un grand film, tout court.

Une femme dangereuse (They drive by night) – de Raoul Walsh – 1940

Posté : 19 avril, 2012 @ 5:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, BOGART Humphrey, LUPINO Ida (actrice), WALSH Raoul | 2 commentaires »

Une femme dangereuse (They drive by night) – de Raoul Walsh – 1940 dans * Films noirs (1935-1959) une-femme-dangereuse

Voir deux grands films en l’espace de 90 minutes, c’est possible ? Oui, grâce à Raoul Walsh et cet opus plutôt méconnu de sa filmographie, pourtant un véritable bijou. Peinture sociale, film noir, Walsh passe d’un genre à l’autre avec une aisance confondante, et une brusque rupture de ton qui ne nuit en rien à la fluidité du film ou au rythme légendaire du cinéaste.

La première partie est une esquisse fascinante du quotidien des petits routiers américains : ces chauffeurs de poids lourds qui traversent les immenses étendues du pays-continent au détriment de leur vie privée (et de leur couple), et souvent au péril de leur vie.

Sur ces routes qu’ils arpentent durant d’interminables journées, parfois sans dormir, le risque est omniprésent. Et les restaurants pour routiers qui jalonnent le parcours sont autant de havres où les chauffeurs retrouvent ce qui ressemblent le plus à un cocon familial, mais totalement masculin… le genre d’atmosphères que Walsh aime particulièrement.

Dans cet univers, George Raft et Humphrey Bogart interprètent deux frères qui partagent le même camion. Bogart¸ dans sa période pré-monstre sacré, est le petit frère un peu en retrait, qui n’aspire qu’à une vie rangée avec sa femme, et qui suit aveuglement les rêves de son grand frère George Raft, qui était alors « la » star. Lui a une ambition grande comme ça, et une volonté farouche d’indépendance : prêt à travailler des jours entiers sans s’arrêter, pour pouvoir monter sa propre affaire.

Cette première partie est fascinante, portrait très humain et passionnant d’une Amérique populaire qui peine à se relever de la grande dépression. Ces petites gens qui se battent au quotidien pour gagner leur croûte sont autant de personnages de tragédies en puissance. Et la tragédie intervient bel et bien : par un virage dangereux qui coûte un bras à Bogie, et par la femme du patron, personnage-type de la vamp de film noir, interprétée par Ida Lupino. Ambitieuse prête à tout, romantique contrariée qui a sacrifié sa vie d’amoureuse au profit d’une fortune toute faite, intrigante au bord de la folie, elle fait totalement basculer le film vers autre chose…

La seconde moitié du film vire en effet vers le noir le plus obscur. Il y a un meurtre, un chantage, des destins tragiques, des arrestations, un procès, de l’amour, de l’amitié et de la fraternité… Bref, du grand cinéma populaire d’où émergent de solides seconds rôles qui n’allaient pas tarder à incarner à eux seuls le grand film noir. Raft est excellent, mais son étoile n’allait pas tarder à vaciller face à ceux qui sont encore derrière lui au générique. Ida Lupino, géniale de bout en bout mais qui devient une star grâce à une seule scène : celle où sa folie éclate lors du procès (qu’elle interprète avec un rien d’excès pourtant). Et Bogart, en retrait mais d’une grande intensité.

Il n’y a pas de hasard : quelques mois plus tard, Walsh allait donner à Ida Lupino et Humphrey Bogart les rôles principaux de High Sierra, le film qui ferait de l’actrice une star incontournable, et de Bogie le mythe qu’il est toujours…

La Grande Evasion (High Sierra) – de Raoul Walsh – 1941

Posté : 5 juillet, 2011 @ 10:15 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, BOGART Humphrey, LUPINO Ida (actrice), WALSH Raoul | Pas de commentaires »

La Grande Evasion (High Sierra) - de Raoul Walsh - 1941 dans * Films noirs (1935-1959) la-grande-evasion

C’est comme ça qu’un acteur habitué depuis dix ans aux seconds rôles et aux séries B entre dans la légende. Bogart avait déjà tourné avec de grands cinéastes auparavant (Ford, Curtiz, Walsh lui-même), mais sa carrière se bornait aux rôles de faire-valoir ou de méchant de service. Le rôle de Roy Earle, le gangster de High Sierra, ne lui était d’ailleurs pas destiné : c’est George Raft qui était pressenti, mais la star souhaitait changer de registre, et a refusé le rôle… comme il refusera celui de Sam Spade dans Le Faucon Maltais, et celui de Rick Baines dans Casablanca. Oui, on peut dire que Bogart doit beaucoup au manque de discernement de Raft.

Il doit aussi beaucoup à John Huston, qui réalisera Le Faucon Maltais (son premier film) la même année, et qui signe le scénario de ce High Sierra qui vaut, largement, tout le bien qui en a été dit depuis soixante-dix ans. Déjà spécialiste du film de gangster (il avait déjà signé l’un des premiers du genre, Regeneration, en 1915 ; ainsi que l’un des plus grands des années 30, Les Fantastiques années 20), Walsh s’amuse ici à casser les codes du genre.

Roy Earle n’est pas un jeune gangster qui monte, mais un caïd vieillissant qui sort de prison. Il ne cherche pas à changer de vie, mais prépare un nouveau coup dès qu’il a recouvré la liberté. L’histoire ne se déroule pas dans les ruelles humides d’une grande ville américaine, mais dans de grands espaces naturels. Le coup lui-même a un côté branquignol inattendu (les complices du gangster n’ont pas l’étoffe de gros durs, et la cible n’est pas une banque, mais un hôtel)…

La personnalité de Roy Earle, et jeu très nuancé de Bogart, font beaucoup pour le film. Le gangster tue sans hésiter, mais il se prend d’affection pour un chien perdu. Il est attiré par une jeune femme qui traîne avec ses complices (Ida Lupino, émouvante comme le sont toutes les grandes héroïnes de film noir), mais tombe amoureux de la petite-fille handicapée d’un vieux couple de fermiers tout droit sortis des Raisins de la Colère.

High Sierra, c’est le parcours qu’on devine fatal d’un homme taillé pour vivre seul, mais qui s’entoure de tout ce que l’Amérique de l’après-grande dépression a fait de laissé-pour-compte : un gardien noir, un bâtard, une orpheline sans attache, une handicapée, de vieux chômeurs…. Comment ce parcours pourrait-il se terminer autrement qu’en drame ?

La dernière séquence est la plus connue : ce sont les derniers instants d’un homme épris de liberté, qui prolonge ces derniers instants de liberté sans rien attendre d’autre, dans le décor sauvage et abrupt de la « high sierra ». C’est immense, et c’est beau.

 

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