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Archive pour la catégorie 'VIDOR King'

La Grande Parade (The Big Parade) – de King Vidor – 1925

Posté : 26 septembre, 2017 @ 8:00 dans 1920-1929, FILMS MUETS, VIDOR King | Pas de commentaires »

Le Grande Parade

Trois ans avant La Foule, son chef d’œuvre, King Vidor réalise déjà une grande fresque romanesque, à la fois intime et spectaculaire, et déjà sublime. Cette fois, c’est la Grande Guerre qui sert de toile de fond, c’est sans doute pourquoi le film a souvent été comparé à L’Heure suprême (le plus beau film du monde), que tournera Borzage. Les deux films ne manquent pas de points communs, c’est vrai, en particulier dans la légèreté des premières scènes et dans le romantisme bouleversant de la conclusion.

Mais au lyrisme de Borzage, Vidor préfère une approche plus ancrée dans la réalité, avec des ruptures de ton parfois brutales, de longs moments en creux, et même des passages de pure comédie. comme la rencontre entre les deux personnages principaux, le soldat américain interprété par John Gilbert, et la fermière française jouée par Renée Adorée (quel pseudo !). Au passage, les deux comédiens sont magnifiques, trouvant chacun, sans doute, le plus beau rôle de leur carrière.

Il y a dans cette scène, très drôle, quelque chose comme la quintessence de l’art muet. Oui, ce sont de grands mots, mais Vidor trouve le ton juste et l’approche inattendue et parfaite pour filmer la rencontre de cette femme et de cet homme qui ne parlent pas la même langue, et ne peuvent donc échanger que par la gestuelle, la pantomime même. C’est drôle, et c’est aussi très beau, surtout lorsque Vidor filme… la barrière de la langue et de la culture, par petites touches d’une délicatesse infinie.

Le moment où la jeune femme découvre le chewing-gum est ainsi, pour une raison assez magique, formidablement émouvante. Peut-être parce que ce détail apparemment sans importance dit beaucoup sur cette histoire d’amour improbable entre un homme venu du bout du monde et cette jeune femme dynamique et active qu’il n’aurait jamais dû croiser, comme une parenthèse entre la vacuité de sa vie de riche héritier et les horreurs de la guerre qui l’attendent.

Ce long passage à l’arrière-front, où les hommes passent le temps comme ils le peuvent, est passionnant, et rend le départ vers les zones de combat d’autant plus marquantes. Parce que c’est toute une vie organisée, et finalement pleine de petits bonheurs, qui volent en éclat. Là, dans ce départ impressionnant, filmé à grands renforts de figurants, Vidor, réussit une grande scène dramatique et inoubliable, filmant Renée Adorée en plans rapprochés, scrutant les centaines d’hommes qui défilent devant (et derrière) elle à la recherche de celui qu’elle aime. Avant de s’accrocher à lui comme si elle voulait à tout prix retenir ce bonheur fugace, se retenant à sa jambe dans un geste prémonitoire. Si on ne verse pas sa larme, là…

Le film passe alors de la romance à la découverte de l’enfer. Mais si le ton change radicalement, le point de vue reste le même : celui d’un homme qui découvre tout de la vie, avec un esprit totalement impréparé. C’est ce qui rend si saisissante cette première marche de John Gilbert fusil à la main. Dans une forêt qui semble morte, les soldats avancent régulièrement sous les tirs ennemis, sans même prendre la peine de se protéger. Autour de notre héros, les hommes tombent les uns après les autres. Vision presque irréelle qui dit mieux que des mots l’incompréhension face à cette irruption de la violence.

La grande scène de bataille qui suit fait partie des plus impressionnantes de toute l’histoire du genre. Toujours à hauteur d’homme, Vidor nous plonge au cœur de la violence, sans rien gommer de son horreur, et sans jamais oublier l’humanité des soldats. D’où un magnifique face-à-face entre John Gilbert et le soldat allemand mourant, dans le trou d’obus, filmé avec une superbe sensibilité.

Sensible et délicat, malgré la noirceur du sujet : voilà qui définit parfaitement la mise en scène de Vidor, jusqu’à la dernière partie, belle et émouvante, mais sans le grand lyrisme des films de Borzage. Dans son style ou dans sa construction, La Grande Parade influencera d’innombrables films ayant la guerre pour toile de fond, comme Voyage au bout de l’enfer ou Cheval de guerre.

Duel au soleil (Duel in the sun) – de King Vidor (et William Dieterle, Otto Brower, B. Reeves Eason, Chester Franklin, Josef Von Sternberg, Hal Kern et William Cameron Menzies) – 1946

Posté : 22 mai, 2014 @ 2:07 dans 1940-1949, BROWER Otto, DIETERLE William, EASON B. Reeves, FRANKLIN Chester M., KERN Hal, MENZIES William Cameron, VIDOR King, VON STERNBERG Josef, WESTERNS | Pas de commentaires »

Duel au soleil

Signé King Vidor, ce monument du western est sans doute, avant tout, l’œuvre du producteur David O. Selznick, comme Autant en emporte le vent quelques années plus tôt. Duel au soleil est en tout cas un exemple extrême mais passionnant de ce qu’était la paternité d’un film durant la grande époque des studios hollywoodiens. Vidor, qui a fini par quitter le tournage (au très long cours) suite à ses innombrables désaccords avec Selznick, a certes réalisé la plus grande partie du film. Mais il n’est pas le seul réalisateur à y avoir travaillé : William Dieterle en a probablement réalisé une partie non négligeable, tout comme Otto Bower. Et d’autres ont réalisés quelques scènes, ou quelques plans : William Cameron Menzies, Chester Franklin, Hal Kern, B. Reeves Eason, et même Josef Von Sternberg.

Mais les décisions, c’était bien Selznick qui les prenait, transformant peu à peu ce qui devait être un petit western tragique et romanesque en une immense fresque démesurée, que le producteur voyait comme le pendant westernien de Gone with the wind. Une œuvre marquée par la fascination que le producteur avait pour son actrice – et fiancée – Jennifer Jones, magnifiée et d’une sensualité torride tout au long d’un film gorgé de soleil, de désir et de sang.

C’est la quintessence du grand spectacle. Avec ce film, Selznik et Vidor (même s’il ne peut être considéré comme l’auteur du film, le réalisateur a donné une forme aux visions du producteur) ont pris le parti de ne pas tourner le dos aux poncifs hollywoodiens, mais au contraire de les prendre à bras le corps et de les élever au rang de grand art. On a ainsi droit à des couchers de soleil d’un rouge éclatant, à une musique tonitruante et romantique (partition impressionnante de Dimitri Tiomkin), à des histoires d’amour à mort…

A la vraisemblance, producteur et réalisateurs préfèrent le spectaculaire, transformant la moindre scène en ce qui pourrait être l’apothéose du film. Une séquence aussi anodine que l’arrivée de Pearl (Jennifer Jones) dans le ranch devient un passage grandiose à la Rebecca (une autre production Selznick). Un simple gros plan de Joseph Cotten et sa fiancée (Joan Tetzel) devient un grand moment de cinéma : la caméra ne bouge pas, mais le train sur lequel ils se trouvent se met en route et s’éloigne, transformant le gros plan en un beau plan large…

Tout est exagéré dans le film : chaque éclairage, chaque plan, les vastes mouvements de caméras qui soulignent l’ampleur de l’entreprise (la scène du saloon au début du film, l’arrivée du chemin de fer, la grande fête dans le domaine…), la présence de centaines de figurants dans certaines scènes, les émotions, les situations, les sentiments, et même ce final mythique qui flirte constamment avec le ridicule.

Sauf que rien n’est ridicule bien sûr, et tout est sublime, déchirant. Bouleversante, l’histoire de cette métisse, Pearl, tiraillée entre sa volonté de mener une vie honnête auprès du gentil frère (Cotten) et son désir presque animal pour cet autre frère rustre et brutal (Gregory Peck), luttant entre le modèle de ce père droit et aimant mort pour sauver son honneur (Herbert Marshall) et l’héritage de cette mère aux mœurs légères qui couchait avec le premier venu.

De ce western à l’histoire finalement assez classique, Selznick & co tirent une sorte de tragédie shakespearienne bouleversante qui est aussi un condensé magnifié de ce que sait faire l’usine à rêve hollywoodienne. Ce n’est pas un hasard si le casting réunit à la fois de jeunes stars en vogue des années 40 (Jennifer Jones, Gregory Peck, Joseph Cotten), et des mythes des premières années d’Hollywood (Lillian Gish, Harry Carey, Lionel Barrymore). Une somme, et un chef d’œuvre…

La Foule (The Crowd) – de King Vidor – 1928

Posté : 5 avril, 2014 @ 3:57 dans 1920-1929, FILMS MUETS, VIDOR King | Pas de commentaires »

La Foule 3

Avec La Foule, King Vidor signe sans doute son plus grand film, un monument du muet, d’une beauté sidérante. Rien à jeter, rien d’approximatif, rien de trop dans ce chef d’œuvre absolu qui réussit à être à la fois terrible et optimiste.

C’est le destin d’un couple d’Américains moyens, qui tente de trouver une place dans l’immense foule de New York, entêtante et aliénante. Le héros, John Sims (formidable James Murray) est né le 4 juillet 1900, tout un symbole. Sans aller jusqu’à l’appeler John Smith (on en est pas loin, quand même), Vidor en fait le symbole d’une certaine Amérique : un homme pour qui le père rêvait d’une destinée hors du commun, un homme sûr d’être promis à un avenir extraordinaire, et qui part tenter sa chance dans la Grosse Pomme, persuadé que la métropole lui tend les bras. Comme 7 millions d’autres personnes comme lui…

Exceptionnel dans sa forme, grâce à une mise en scène sublime, La Foule est aussi un film d’une grande modestie dans le fond. John Sims a beau vouloir s’élever au-dessus de la foule, cette dernière finit toujours par le rattraper, par le remettre dans la bonne direction. Au sens propre : lorsqu’il se permet de se retourner dans un ascenseur, il est immédiatement rappelé à l’ordre, et invité à respecter son rang dans cette foule immense qui n’est constituée que d’anonymes.

La Foule 1

Le film se déroule sur plusieurs années, le temps qu’il faudra à John Sims pour réaliser que le bonheur ne se situe pas forcément en dehors de la foule, et qu’il lui faut y trouver une place qui est la sienne. Réaliser aussi que tout ce qu’il attend est déjà là : une famille aimante, et surtout une épouse merveilleuse. Dans le rôle de cette femme à peu près parfaite, Eleanor Boardman est absolument magnifique, à la fois déterminée et d’une douceur renversante. C’est tout simplement l’un des plus beaux couples de l’histoire du cinéma…

Beau à pleurer (et je ne m’en suis pas privé), La Foule met franchement à mal le fameux rêve américain, selon lequel chacun peut devenir président, ou tout au moins devenir quelqu’un d’important s’il sait saisir les opportunités. Derrière cette superbe et déchirante histoire d’amour, derrière les tragédies aussi, Vidor filme un pays qui n’offre pas vraiment d’opportunité, et qui se moque des individualités : une scène, terrible, montre Sims tenter de faire taire la ville pour respecter le repos de sa fille gravement malade… La ville, évidemment, ne cille même pas.

Beaucoup plus ancré dans la réalité de son époque que les grands mélos de Borzage de ces années-là, ou plus tard les classiques de Capra, La Foule réussit un petit miracle : être une critique dure et sans concession de la société américaine, tout en étant une histoire d’amour euphorisante. Comme L’Aurore ou comme L’Heure suprême (autant de films tournés entre 1927 et 1928), La Foule est l’un des plus beaux films du monde.

• Le film a été l’un des premiers à avoir droit à une édition DVD « luxe » chez Bach Films, il y a quelques mois (avec Les Rapaces, A Fool there was et Le Vent) : un beau coffret carton, quelques lobby cards, un petit livret consacré à King Vidor par Jean-François Rauger, et en bonus un portrait plutôt intéressant du cinéaste par Jean-Loup Bourget, qui évoque également le film. Bach Films a une qualité formidable : sortir de l’oubli des films muets jusqu’alors introuvables en DVD. L’éditeur a aussi un défaut récurrent : utiliser des copies parfois très abîmées, sans le moindre travail de restauration. Même si on est loin de la qualité qu’offrent certains éditeurs (comme Carlotta avec L’Aurore ou L’Heure suprême, notamment), La Foule reste tout à fait regardable. La musique d’accompagnement, par contre, purement technique, est assez indigeste.

L’Homme qui n’a pas d’étoile (The Man without a star) – de King Vidor – 1955

Posté : 30 août, 2013 @ 4:35 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, VIDOR King, WESTERNS | Pas de commentaires »

L’Homme qui n’a pas d’étoile (The Man without a star) - de King Vidor - 1955 dans 1950-1959 lhomme-qui-na-pas-detoile

De ce chef d’œuvre du western, vu il y a bien quinze ans, je me souvenais de la chanson-titre, interprétée par Frankie Laine : l’une des chansons les plus marquantes de toute l’histoire du genre (avec « My darling Clementine » et une poignée d’autres). A le revoir, ce qui marque le plus, c’est de constater avec quelle perfection et quelle évidence le film combine des éléments inoubliables, et une grande simplicité.

Le scénario, signé Borden Chase (quelle carrière, quand même, allez donc jeter un œil à sa filmographie) et D.D. Beauchamps (qui a travaillé sur Le Barrage de Burlington), est d’une rare intelligence, et va bien au-delà du simple postulat de base, hyper classique.

C’est l’histoire d’un cow-boy sans le sou qui se retrouve au cœur d’un affrontement entre gros et petits éleveurs. Un thème récurrent dans l’histoire du western, qui évoque l’arrivée des barbelés dans les « open ranges » : la fin de l’Ouest sauvage et des grands espaces ouverts, et l’arrivée du capitalisme, d’une économie de plus en plus organisée. La lutte entre les puissants et les modestes ne se règle plus uniquement à coups de revolvers, mais aussi par une guerre économique.

Une mise en scène formidablement fluide, un montage au cordeau (pas un plan superflu, pas une minute inutile), une manière presque unique d’intégrer la musique (et notamment la chanson de Laine) à l’histoire jusque dans la bouche des personnages… Vidor signe l’un des plus grands westerns de la décennie, malgré un tournage chaotique, marqué par des affrontements constants entre le cinéaste et sa star, Kirk Douglas.

L’acteur entendait bien imposer sa vision du film. Difficile d’affirmer ce que l’on doit vraiment à l’un, et ce que l’on doit à l’autre, mais une chose est sûre : Douglas appose sa marque. Son interprétation, toute en énergie explosive (impressionnant lorsqu’il passe d’un rictus de tueur à un large sourire de fêtard), donne un ton à peu près unique et un rythme exceptionnel au film.

L’Homme qui n’a pas d’étoile est totalement à l’image de son interprétation : enlevé, souvent très léger (Douglas discute tranquillement à table tandis qu’on entend son jeune partenaire se battre dehors, hors champs), mais pourtant complexe et d’une grande profondeur, et bouleversant. Car ce type avide de liberté, qui apprend malgré tout à composer avec des règles de plus en plus contraignantes, surmonte toutes les épreuves mais arrive à une triste conclusion : il n’a plus sa place dans ce monde en mutation.

Bardelys le magnifique (Bardelys the magnificent) – de King Vidor – 1926

Posté : 3 septembre, 2012 @ 4:26 dans 1920-1929, FILMS MUETS, VIDOR King | Pas de commentaires »

Bardelys le magnifique

Il y a à peut près tout ce dont on peut rêver dans ce film muet qui fut longtemps considéré comme irrémédiablement perdu, jusqu’à ce que Serge Bromberg le retrouve au milieu des années 2000 (une version presque complète) : un humour ravageur, une romance passionnée, et des scènes d’action à faire pâlir d’envie Douglas Fairbanks.

L’humour est même omniprésent dans la première partie : dès la première séquence, qui présente un Bardelys (joué par John Gilbert) délicieusement amoral, enchaînant les conquêtes féminines en débitant les mêmes phrases toutes faites qui les font fondre, battant le fer avec un mari cocu à qui il se permet de faire des remontrances. Grand faiseur de cocu, il voit dans ses aventures un véritables intérêt sociologique : c’est lorsqu’elles tombent sous son charme que leurs maris réalisent qu’ils tiennent à elles…

Là, on croit qu’on est parti pour une pure comédie. Mais Vidor s’amuse à varier les tons, et s’évertue à ne jamais être là où on l’attend. Ainsi, le film devient plus noir alors que Bardelys endosse l’identité d’un mort (la scène a disparu, mais a été habilement reconstituée par des photogrammes qui permettent de ne perdre ni le fil, ni le rythme), la farce tournant au film romantique et grave lorsque le même Bardelys tombe sincèrement amoureux de celle qu’il avait fait le pari de séduire.

Prisonnier de son propre mensonge, il souffre pour la première fois, lui qui s’est attiré les faveurs du roi Louis XIII (joué par Arthur Lubin, futur réalisateur moyen, qui sera l’un des premiers à donner sa chance à Clint Eastwood, dans une série de séries B pas terribles : Francis in the Navy, Madame de Conventry, La VRP de choc et Escapade au Japon) grâce à sa totale désinvolture.

Cette romance impossible donne la plus belle scène du film : un flirt d’une beauté sidérante entre Gilbert et Eleanor Boardman sur un canot avançant au fil de l’eau, le visage des deux amoureux barré des branches qui défilent alors que l’embarcation dérive…

Sans révéler tous les secrets de ce film plein de surprises et de rebondissements, signalons encore ce climax totalement délirant et hyper impressionnant, d’un Bardelys tentant d’échapper à la potence dans une cour immense et spectaculaire. John Gilbert virevolte, grimpe, saute, semble voler par-dessus une rangée de soldats, saute à la perche, transforme une hallebarde en toboggan, puis en cheval d’arçon, en perche, et enfin en corde… avant de finir sur le carrosse du roi à l’issue d’un saut en parachute. Une séquence absolument démesurée, déraisonnable, et réjouissante, que même le Doug Fairbanks du Voleur de Bagdad n’égale pas…

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