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Archive pour la catégorie 'par réalisateurs'

Mission : Impossible (id.) – de Brian De Palma – 1996

Posté : 14 octobre, 2010 @ 1:43 dans 1990-1999, CRUISE Tom, DE PALMA Brian | Pas de commentaires »

Mission : Impossible (id.) - de Brian De Palma - 1996 dans 1990-1999 mission-impossible

Brian De Palma est un formaliste exceptionnel, et son style atteint une sorte de perfection dans cette grosse machine de studio, commande formatée qu’il transcende littéralement pour en faire un film d’une intelligence et d’une élégance absolues.

Le scénario de Robert Towne et David Koepp est déjà foncièrement gonflé ; il sera d’ailleurs renié par les fans de la série originale (tu m’étonnes que Peter Graves a refusé de reprendre son rôle de Jim Phelps, finalement joué par Jon Voight dans le film de De Palma). Mais les choix de mise en scène du cinéaste le sont tout autant : jusqu’à la fameuse séquence de l’Eurotunnel (pied de nez incroyable aux exigences des studios en matière de grosses productions : ah vous voulez de l’action, ben j’m'en va vous en donner, moi…), le film s’avère étonnamment peu spectaculaire pour un film de cette ampleur.

De Palma n’écrit pas ses scénarios mais c’est un véritable auteur. La preuve : même dans un film a priori aussi impersonnel que Mission : Impossible, on retrouve le thème préféré du cinéaste, à savoir le mensonge, la différence qu’il y a entre les images que l’on nous montre et la réalité. Comme dans Snake Eyes, ou dans Blow Out, toute l’intrigue du film repose sur ce thème, inépuisable dans l’œuvre depalmienne.

La plupart des rebondissements de ce film décidément anti-spectaculaire au possible, se déroulent d’ailleurs… dans l’esprit du héros, Ethan Hunt (Tom Cruise), qui recolle petit à petit les événements tels qu’on les lui a montrés et l’incroyable vérité. Ce basculement progressif du mensonge vers la vérité est illustrée d’une manière extraordinaire par la caméra de De Palma, qui se désaxe dans des cadrages insensés, pour donner corps au trouble de Tom Cruise, décidément un acteur formidable.

Ce trouble illustré avec une élégance infinie trouve son apogée dans la dernière scène de Prague (les extérieurs qui y sont tournés sont d’ailleurs d’une grande beauté) : le fameux face-à-face entre Ethan Hunt et son supérieur Kittridge, dans ce restaurant tout de verre, avec cet immense aquarium. Cette séquence où tout bascule est l’une des plus réussies de tout le cinéma de De Palma, ce qui n’est pas peu dire. Tom Cruise, silencieux la plupart du temps, y est d’une intensité remarquable : « Kittridge, you’ve never seen me very upset… »

La suite pourrait être plus convenue (on y retrouve enfin les fameuses missions impossibles chères à la série). Mais De Palma relève le défi sans la moindre faute de goût. Bien sûr, dans ce brillant exercice de style, les acteurs ont la part du pauvre (à part Tom Cruise, autour duquel tourne le film), et se contentent de faire (bien) ce qu’on leur demande : Emmanuelle Béart est belle, Jean Réno est inquiétant, Henry Czerny est trouble, Jon Voight (« Why, Jim ? Why ? ») est… Non, on n’en dira pas trop, des fois qu’y en aurait qu’auraient pas vu le film, encore… auquel cas faudrait vous bouger : M:I va avoir quinze ans.

D’ailleurs, après deux suites radicalement différentes (réalisées par John Woo - ici - et J.J. Abrams - ici -), mais tout aussi enthousiasmantes, le tournage du number four a commencé… à Prague. M:I 4 sera-t-il un retour aux sources pour Ethan Hunt ?

Scandale à Paris (A Scandal in Paris) – de Douglas Sirk – 1946

Posté : 14 octobre, 2010 @ 1:06 dans 1940-1949, SIRK Douglas | Pas de commentaires »

Scandale à Paris (A Scandal in Paris) - de Douglas Sirk - 1946 dans 1940-1949 scandale-a-paris

C’est le troisième film américain de Douglas Sirk, et celui qu’il avouait préférer. Largement méconnu par rapport à ses grands mélos des années 50, cette version très romancée de la vie de Vidocq, ancien malfrats devenu le flic le plus célèbre de France, est un vrai bonheur. L’histoire est basée sur des faits authentiques, avec lesquels le scénario prend d’énormes libertés. Ce qui frappe dans ce film, c’est à quel point Sirk se moque de la vraisemblance. Mais son scénario, aussi invraisemblable soit-il avec ces énormes rebondissements, est transcendé par la réalisation de Sirk, qui donne un mouvement extraordinaire à son film.

Le ton est donné dès les premières minutes, avec deux mouvements de caméra magnifique, qui évoquent d’une manière aussi simple qu’intelligente la fuite du temps : la caméra s’arrête sur les barreaux d’une prison, et ce sont trente années qui passent ; elle s’arrête sur un arbre, et c’est une nuit de misère qui prend fin… Tout le film est comme ça, porté par le génie d’un cinéaste déjà au sommet, qui accumule les cadrages impossibles et sublimes (la scène du cimetière, où le héros choisit son nom d’emprunt, est un modèle), et s’amuse à aller aussi loin que possible dans l’excès. Excès de romantisme, excès de rebondissements… même la famille du « dragon », le compagnon de Vidocq, est parfaitement excessive, accumulation de « gueules » inimaginables, autour de l’inoubliable « patriarche » Vladimir Sokoloff.

Les seconds rôles sont d’ailleurs tous exceptionnels : le préfet de police Richet, que Vidocq délaissera de son poste, de sa femme et de sa fierté, est interprété par un Gene Lockhart formidable, mélange de fourberie et de faiblesse qui finissent par lui attirer la sympathie du public ; sa femme aussi, actrice arriviste et séductrice jouée par la magnifique Carole Landis… Et puis il y a surtout George Sanders, qui est un Vidocq mémorable. Sirk n’a jamais tari d’éloges sur le travail de l’acteur, mais il faut reconnaître que sa performance est extraordinaire : le flegme qui le caractérise est ici utilisé à merveille, faisant du personnage un être que l’on sent capable de tout, du pire comme du meilleur, de l’acte le plus méprisable (voler la famille qui l’accueille, voire un prêtre) comme du plus héroïque (risquer de perdre ce qu’il a pour rester honnête avec celle qu’il aime)…

La richesse du film semble visuellement infinie. On n’en dira pas plus, toutefois : l’unique version DVD disponible en France ne laisse qu’entrevoir cette richesse. Cette version propose une image indigne du support (de tout support, d’ailleurs : c’est de la qualité d’une mauvaise cassette vidéo que l’on aurait laissée traîner dans un coin pendant quinze ans). Seul le DVD édité par Kino aux Etats-Unis est de bonne qualité, mais il n’est disponible qu’en zone 1, et ne possède pas de sous-titres français. A moins d’être un cinéphile parfaitement bilingue, mieux vaut attendre une prochaine réédition, dans une version digne de ce nom…

Robin des Bois (Robin Hood) – de Wolfgang Reitherman – 1973

Posté : 12 octobre, 2010 @ 6:39 dans 1970-1979, DESSINS ANIMÉS, REITHERMAN Wolfgang | 1 commentaire »

Robin des Bois (Robin Hood) - de Wolfgang Reitherman - 1973 dans 1970-1979 robin-des-bois-73

Après avoir découvert le Robin des Bois version Ridley Scott, petite plongée nostalgique, pour faire plaisir à mes deux fils (2 ans et 5 ans si ça intéresse quelqu’un), avec cette version Disney, initiée par le grand Walt lui-même avant sa mort (en 1966). Eh bien il faut reconnaître qu’il a plutôt bien vieilli, ce dessin animé très rythmé, et bourré d’humour. On est bien sûr aux antipodes du film de Scott, même si Wolfgang Reitherman n’hésite pas à forcer le trait de la misère et de la souffrance, dans quelques scènes assez dures, qui ont le mérite de montrer au jeune public que l’injustice touche les plus faibles. Robin des Bois serait-il un film politique ? On n’ira pas jusque là…

Il y a en tout cas de belles idées dans ce long métrage, à commencer par le ménestrel qui donne un rythme particulier au film (ça change du sempiternel livre de contes dont on tourne les pages au fur et à mesure que l’intrigue avance…), et par le très beau générique de début. Le duo de méchants est aussi une grande réussite : le prince Jean qui souffre d’avoir été mal aimé par sa maman, et son âme damnée le triste Sire, serpent persifleur à qui on le film fait subir toutes les misères du monde.

Robin des Bois est une vraie réussite, qui allie à la fois la richesse visuelle des grands classiques comme Blanche Neige ou de La Belle et la Bête, et le charme un peu désuet des productions plus modestes comme Dumbo.

Robin des Bois (Robin Hood) – de Ridley Scott – 2010

Posté : 12 octobre, 2010 @ 6:27 dans 2010-2019, SCOTT Ridley | Pas de commentaires »

Robin des Bois (Robin Hood) - de Ridley Scott - 2010 dans 2010-2019 robin-des-bois-2010

Dix ans tout juste après, Ridley Scott retrouve son héros de Gladiator, Russell Crowe, pour un film qui semble vouloir renouer avec la recette gagnante du précédent… Et franchement, on craint le pire. Mais le pire n’arrive pas. Le meilleur non plus, d’ailleurs, mais ce Robin des Bois version 2010, à défaut d’être la plus enthousiasmante des nombreuses versions du mythe, est sans aucun doute la plus brutale, et la plus réaliste. C’était d’ailleurs l’ambition de Scott : en finir avec les images d’Epinal, et filmer l’Angleterre de l’époque telle qu’elle était (Crowe, lui, affirme plus simplement que le film est le seul bon « Robin des Bois » de l’histoire… c’est qu’il ne se mouche pas du pied, le Russell…).

Alors oui, ce Robin des Bois est différent de tous les autres. Finis les collants verts moulants d’Errol Flynn, ou la précision presque magique de Kevin Costner à l’arc… Russell Crowe est un Robin comme on ne l’a jamais vu. D’ailleurs, s’il vole bien aux riches pour donner aux pauvres, c’est dans une unique scène : ce Robin-là n’a pas l’insouciance de ses prédécesseurs. Tel un William Wallace (Braveheart) ou un Maximus (le héros de Gladiator, tiens…), celui-ci se bat pour la liberté de son peuple, et n’hésite pas à tuer pour cela. Il faut dire que le gars a un rude passé. Survivant des Croisades, où il a combattu aux côtés du « bon » roi Richard Cœur de Lion (dont l’aura en prend un sacré coup aussi, d’ailleurs… on est loin de l’apparition presque angélique de Sean Connery à la fin de Robin des Bois, prince des voleurs), Robin y a commis des horreurs, qui continuent à le hanter.

Tirant définitivement un trait sur les précédentes versions, Scott fait même de son héros… un usurpateur : Robin Locksley (Loxley, en fait, ici) est un autre soldat, tué à son retour des Croisades. Le personnage de Russell Crowe accepte simplement de prendre sa place, pour assurer à la veuve de Loxley de pouvoir rester propriétaire de son château. Ne vous attendez d’ailleurs pas à voir Robin camper au sommet d’un arbre, ou dormir à même le sol dans la forêt : c’est au coin du feu, dans un château luxueux (pour l’époque, hein) que notre héros passe ses nuits, au côté de sa fausse épouse dont, bien sûr, il tombera amoureux : l’incontournable Lady Marian (qui avait déjà des allures de garçon manqué dans la version Kevin Costner, mais qui devient ici carrément une guerrière).

Ce Robin des Bois est assez réussi, avec quelques séquences très fortes, une interprétation au poil (il a beau être imbuvable, Russell Crowe, il apporte une puissance étonnante à ce Robin des Bois), et malgré un méchant un brin caricatural (franchement, il ne faut pas longtemps pour comprendre que ce prince n’a aucune parole !), des révélations sur le passé du héros franchement lourdingues, et quelques excès de mise en scène (la séquence du débarquement, sortie tout droit de Il faut sauver le soldat Ryan). Lorsqu’il ne se prend pas trop au sérieux, Robin des Bois emporte la mise. D’ailleurs, Ridley Scott finit par le reconnaître dans les dernières minutes : non, il ne voulait pas remettre totalement en cause le mythe de Robin des Bois, juste en poser les bases.

La Captive aux yeux clairs (The Big Sky) – de Howard Hawks – 1952

Posté : 12 octobre, 2010 @ 6:05 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, HAWKS Howard, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Captive aux yeux clairs

Un groupe d’hommes en marche dans une contrée sauvage, des amitiés viriles qui se nouent à coups de poings, et qu’aucune femme ne parviendra à troubler… Pas de doute, on est bien chez Howard Hawks, et dans un grand cru du monsieur, même. Quatre ans après ses premiers pas dans le western, avec un Rivière rouge mémorable, Hawks reprend une trame similaire, pour sa deuxième incursion dans le genre. Au convoi de bétail du précédent film, succède ici un voyage en bateau, en remontant le fleuve jusqu’à des contrées encore inexplorées par l’homme blanc.

La Captive aux yeux clairs est LE film que Hawks consacre aux Indiens. Souvent plus intéressé par les rapports entre les membres d’une même communauté (ce qui est d’ailleurs en grande partie le cas, ici encore), le cinéaste signe une peinture étonnamment contrastée (pour l’époque) de la nation indienne. Non pas d’une seule tribu, d’ailleurs, mais de deux : celle de la « captive » du titre, les Pieds Noirs, peuple pacifique prêt à récompenser les bons blancs qui ont pris grand soin de leur fille, mais prêts aussi à se plier aux règles du commerce… Et puis celle des « méchants » Crows, peuple fier dont on ne tarde pas à comprendre qu’ils sont en fait manipulés par d’autres marchands, bien décidés à rester maître de leur territoire.

Le film présente une tendresse inattendue pour un film de Hawks. Les scènes d’action sont nombreuses, et parfois très impressionnantes (la bataille le long du fleuve, notamment), mais le ton du film reste la plupart du temps assez léger, voire badin. La rencontre des deux héros, pour commencer, semble sortie d’un film d’Errol Flynn ! Bondissants et bouillonnants de vie, les deux comparses écument les petites villes et leurs bars, enchaînant les verres et les bagarres, toujours prêts à en découdre et à séduire les belles locales…

Et puis le film s’installe réellement lorsque tout ce petit peuple embarque en toute discrétion sur le bateau qu’ils ne quitteront plus, dans une magnifique scène nocturne, baignée de brume. La Captive aux yeux clairs est bien un western, mais un western qui ne ressemble à aucun autre, où les pistes poussiéreuses et rythmées par le bruit des sabots, a cédé la place au rythme tranquille (la plupart du temps en tout cas) du fleuve, où les éclaireurs ont plutôt la belle vie : lorsqu’ils ne paraissent pas sur le pont du bateau, ils chassent dans les terres, alors que les hommes d’équipage suent sang et eau pour faire avancer le bateau. Faignants, va…

Et bien sûr, comme ce n’est jamais le petit laborieux qui a le beau rôle, qui donc va se disputer les faveurs de la belle Indienne, que transportent le bateau ? Les deux amis éclaireurs, interprétés par le jeune chien fou Dewey Martin et le plus sage Kirk Douglas. Malin, Hawks nous fait croire un moment qu’on est dans un triangle amoureux comme tant d’autres. Mais que nenni. La rivalité entre les deux hommes prendra une tournure très, très inattendue, et loin du romantisme auquel on a généralement droit. Leur relation, au début très simple, se charge peu à peu d’un curieux sentiment de nostalgie, comme si l’un et l’autre regrettait que les tournants de leur cœur viennent compliquer une amitié si limpide…

Cette nostalgie baigne tout le film, dont le rythme est la plupart du temps assez lent, Hawks ne manquant aucune occasion de filmer la grandeur de ses décors naturels. C’est beau la nature, c’est beau le cinéma, et qu’est-ce que c’est beau, ce film…

Evangeline (id.) – de Edwin Carewe – 1929

Posté : 8 octobre, 2010 @ 6:22 dans 1920-1929, CAREWE Edwin, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Evangeline (id.) - de Edwin Carewe - 1929 dans 1920-1929 evangeline

On l’a oublié aujourd’hui, mais Edwin Carewe fut un réalisateur important à Hollywood, vers la fin du muet. On lui doit en particulier de très grosses productions épiques et romanesques, peuplés de personnages très marqués par leur dévotion religieuse : Resurrection en 1927, Ramona (l’adaptation d’un roman à succès déjà porté à l’écran par D.W. Griffith - ici) en 1928, et ce Evangeline, qui surfe évidemment sur le succès des deux précédents films. On y retrouve le même ton, la même actrice (Dolores Del Rio), le même romantisme tragique, et la même importance de la religion : les personnages sont des êtres profondément pieux, ce qui visiblement plaît beaucoup à Carewe (qui a d’ailleurs reçu le soutient des autorités religieuses pour le tournage de son film), et qui colle parfaitement au cadre de son histoire, à savoir l’Acadie du milieu du XVIIIème siècle.

Une époque tragique pour cette province du Nord de l’Amérique, puisque le peuple « historique » est déporté par les Anglais, qui gouvernent le pays, en l’espace de quelques années seulement. Cette tragédie est le sujet même du film de Carewe (dont le scénario s’inspire d’un célèbre poème racontant le terrible destin d’une Acadienne ayant vécu cet exode forcé), mais ce qui concerne tout un peuple est symbolisé par un seul village. C’est un choix narratif qui ne plaira évidemment pas aux puristes de l’Histoire, mais qu’importe : en simplifiant le récit, le film gagne en efficacité, le destin de milliers de personnes étant symbolisé par celui d’une poignée de personnages.

Le résultat est un mélodrame flamboyant, passionnant, et franchement plombant dans sa dernière partie.

Ça commence en fait comme un beau mélo bucolique, avec deux jeunes gens amoureux, un village où il fait bon vivre, un amoureux éconduit, et un mariage qui se prépare dans la liesse générale. Mais l’ombre de la tragédie à venir plane, et se noue bientôt à grands coups de bottes qui claquent. Point de grands combats, ici, même si la violence est souvent à deux doigts d’exploser : mais à chaque fois, le bon homme d’église est là pour rappeler le principe de non violence. Oui, les Acadiens savaient mieux que quiconque tendre l’autre joue… On a l’air de se moquer, là, mais cette première partie est terriblement émouvante, et le magnétisme de Dolores Del Rio, visage atypique, mais d’une grande beauté, n’est pas étranger à cette émotion qui vous prend aux tripes et ne vous lâche plus.

Pendant toute la première heure, l’émotion ne cesse de monter, et c’est le ventre serré qu’on arrive au point culminant du film : cette extraordinaire séquence de l’exode forcée, où des centaines de soldats anglais obligent des milliers de pauvres Acadiens à s’embarquer dans des bateaux, dont les destinations sont inconnues. Et ce n’est pas du cinéma au rabais que Carewe nous offre là : chaque Acadien, chaque soldat, et chaque bateau, est bien présent à l’écran (et sans effets spéciaux, s’il vous plaît). On se rend compte, alors seulement, qu’on est dans une très grosse production. Mais surtout, dans un grand film, car la dimension de cette séquence ne paralyse pas le réalisateur, qui nous offre ici un moment terrifiant de cinéma, illustrant en quelques minutes l’atrocité qu’on impose à tout un peuple : sans ménagement, les soldats poussent les Acadiens vers les bateaux, n’hésitant pas à séparer les mères des enfants, les épouses des maris… et Evangeline de son fiancé.

Après cette montée graduelle et constante en puissance, jusqu’à un sommet d’émotion, c’est comme un autre film qui commence, un peu moins convaincant, hélas : Evangeline va passer des années (mais vraiment des années) à rechercher son bien-aimé, parcourant le Sud de l’Amérique (dans de magnifiques paysages de Louisiane, notamment, où le film a réellement été tourné), mais les élipses plutôt brutales ne permettent pas de prendre la dimension du temps qui passe. Autant le dire, il arrivera les pires catastrophes autour d’Evangeline, au cours de son interminable quête. C’est déchirant, violent, douloureux. Et franchement plombant.

Collateral (id.) – de Michael Mann – 2004

Posté : 7 octobre, 2010 @ 7:39 dans * Thrillers US (1980-…), 2000-2009, CRUISE Tom, MANN Michael | Pas de commentaires »

Collateral (id.) - de Michael Mann - 2004 dans * Thrillers US (1980-…) collateral-300x199

Que ce soit bien clair : je trouve dans l’immense majorité des cas les films tournés en HD numérique d’une laideur absolue. Dans l’immense majorité des cas, mais il y a une exception notable : le cinéma de Michael Mann. Non seulement le cinéaste est, à mon sens, le seul à avoir réellement su maîtriser ce nouvel outil cinématographique, mais son cinéma, déjà franchement passionnant, s’en est trouvé considérablement enrichi. Ses deux derniers films en date, Miami Vice et Public Enemies, sont deux chef d’œuvre qui ne ressemblent à rien d’autre qu’à un film de Michael Mann : l’étonnante lumière de la nuit, la netteté presque troublante des arrière-plans… autant de signes qui définissent le style Mann, qui révolutionne bien d’avantage que la 3D le langage cinématographique.

Dans cette révolution, j’avais dans la tête que Collateral, que j’avais pourtant déjà vu deux fois, était une sorte de brouillon (excellent et hyper efficace, mais brouillon quand même) que Mann peaufinera avec Miami Vice, son film suivant. Eh bien il m’a fallu une troisième vision pour réaliser que ce n’était vraiment pas le cas : Collateral est un chef d’œuvre absolu, peut-être bien le meilleur film de Mann à ce jour (mais je changerai peut-être d’idée en revoyant Miami Vice, Public Enemies, voire Heat ou Le Sixième Sens). Tout, dans ce film, est à tomber par terre : les images sublimes (qui a filmé la nuit aussi bien que Mann ?), le rythme étonnamment lent (malgré quelques scènes d’action renversantes), et même les personnages, génialement joués par Jamie Foxx et Tom Cruise en vrai méchant.

L’histoire est typiquement « mannienne », elle aussi : c’est l’éternelle confrontation du bien et du mal. Ici, un brave chauffeur de taxi tellement gentil qu’il s’arrange pour faire gagner de l’argent à ses clients, qui embarque un homme d’affaires, qui est en fait un tueur à gages. C’est Vincent, Tom Cruise habillé et coiffé comme DeNiro dans Heat, qui prend le taxi en otage tout au long de la nuit, pour une virée à travers les rues quasiment désertes de Los Angeles, marquée par cinq étapes : les cinq gars que Vincent doit refroidir.

Contrairement à Heat, où la confrontation entre DeNiro et Pacino se faisait à distance (exceptée une scène trop courte et frustrante), le bien et le mal sont ici coincés ensemble tout au long du film, la plupart du temps dans l’espace exigu du taxi. L’échange qui se crée entre les deux hommes est fascinant, dialogue parfois irréel souligné par de longs plans visuellement sublimes du taxi roulant dans la nuit, dans un silence envoûtant. Mann filme L.A. comme personne avant lui. Peut-être parce que c’est là son vrai sujet : cette ville-monstre inhumaine où, comme le raconte le personnage de Tom Cruise, un homme peut mourir dans le métro sans que personne ne s’en rende compte pendant des heures…

Cette ville, Mann en montre toute la complexité, des highways à ciel ouvert aux ruelles écrasantes, des clubs de jazz chaleureux aux boîtes à la mode saturées de lumière, des motels miteux des bas quartiers aux luxueux bureaux des quartiers d’affaire. Il illustre magnifiquement la solitude de ces êtres, entourés par des tonnes de béton et des millions d’autres êtres qui vivent leur vie sans que jamais elles n’interfèrent les unes avec les autres. Cette ville-monstre est le principal adversaire de Vincent-Tom Cruise, pur méchant indifférent à la douleur des autres, mais qui révèle une humanité inattendue dans cet univers qui l’oppresse.

Le rythme est donc lent, lancinant. Mais le film est émaillé, comme toujours chez Mann, de scènes d’action époustouflantes, à commencer par la fameuse fusillade dans la boîte, dont on a beaucoup parlé, et qui mérite tout le bien qu’on en a dit. Impossible, a priori, de rendre constamment clair ce qui se passe précisément dans cette fourmilière humaine. Mais grâce à un montage serré et à des cadrages brillants, l’action qui se déroule est toujours limpide. Et formidablement grisante, d’autant plus que ce débordement soudain de violence surgit entre deux séquences presque contemplatives.

Collateral, c’est un pur bonheur de cinéma. Michael Mann n’a pas inventé le thriller, mais il en a créé une nouvelle forme, la plus passionnante de toutes…

L’Homme léopard (The Leopard Man) – de Jacques Tourneur – 1943

Posté : 7 octobre, 2010 @ 5:54 dans 1940-1949, TOURNEUR Jacques | Pas de commentaires »

L'Homme léopard (The Leopard Man) - de Jacques Tourneur - 1943 dans 1940-1949 lhomme-leopard-300x226

Dernier des trois films réalisés par Tourneur et produits par Val Lewton pour la RKO, The Leopard Man est le plus méconnu de la série, et aussi le seul à ne pas reposer sur un ressors fantastique. Le film n’est pourtant pas moins intéressant que La Féline et Vaudou, les deux précédents chef d’œuvre. Plus encore que dans les deux précédents films, Tourneur semble n’être intéressé que par la création d’une atmosphère angoissante. L’histoire, d’ailleurs, se résume en quelques lignes à peine : un léopard se sauve dans une petite ville, et peu après, des femmes commencent à se faire tuer. L’animal est-il le seul responsable ? L’intrigue n’est pas plus complexe que cela, et le film comprend relativement peu de personnages. L’Homme Leopard est un pur exercice de style, qui démontre une nouvelle fois l’immense talent de Tourneur.

Le film est surtout marqué par les trois séquences au cours desquelles des femmes se font tuer. Trois moments mémorables autours desquelles tout le récit est construit, même si les séquences de « transition » sont loin d’être inintéressantes. Même si, visuellement, elles sont moins impressionnantes que les trois scènes de mort, elles sont brillamment construites, avec toute la concision, la simplicité et l’efficacité dont le cinéaste sait faire preuve.

On est toutefois essentiellement marqué par la manière dont Tourneur filme, à chaque fois différemment, les morts des trois jeunes femmes. Loin de se répéter, ces moments sont d’une inventivité extrême, et reposent uniquement sur le génie du cinéaste : dans les trois cas, on ne voit qu’une jeune femme à l’écran. Dans un vaste terrain vague pour la première, dans un cimetière pour la deuxième, et dans les rues désertes de la ville pour la dernière. La manière dont Tourneur joue avec les ombres, les regards, et surtout l’invisible, est exceptionnelle. Comme dans La Féline, le cinéaste ne montre strictement rien des morts. Il étire le temps à l’extrême pour faire monter l’angoisse, puis la terreur, mais l’acte final se passe toujours hors champs (derrière une porte, ou derrière un mur)… Et le fait de ne rien voir (si ce n’est deux yeux qui brillent dans la nuit) renforce, évidemment, la trouille qu’inspire le film, et qui nous hante longtemps après.

Le titre le prouve : L’Homme léopard est à l’origine une opération commerciale, qui tente de surfer sur le succès de La Féline. Mais Tourneur a su en tirer une œuvre hypnotique et brillante, visuellement exceptionnelle. Le film se conclut d’ailleurs par une séquence étonnante et fascinante, étrange course poursuite autour d’un cortège funeste qui avance lentement dans le désert, dans une nuit où les nuages sont percés par la lumière du soleil levant. Ces images splendides restent gravées dans les esprits, et installent durablement un délicieux malaise. C’est du grand art…

By Indian Post (id.) – de John Ford (Jack Ford) – 1919

Posté : 7 octobre, 2010 @ 1:25 dans 1895-1919, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS, FORD John, WESTERNS | Pas de commentaires »

By Indian Post (id.) - de John Ford (Jack Ford) - 1919 dans 1895-1919 by-indian-post

Ce moyen métrage est l’un des rares de Ford à ne pas avoir disparu corps et bien. De l’époque muette du cinéaste, il ne reste qu’une partie infime de sa riche filmographie. By Indian Post est l’un des plus anciens, avec les longs métrages Straight Shooting et Bucking Broadway, qui avaient longtemps été considérés comme perdus.

Ce deux bobines est une œuvre de jeunesse, certes, mais il contient déjà beaucoup des qualités que l’on retrouvera dans les grands classiques du maître. A commencer par ce mélange d’action et d’humour, que Ford maîtrise déjà parfaitement bien. Les premières images, pourtant, laissent craindre le pire : statique, la mise en scène manque alors cruellement de dynamisme, lorsque Ford nous présente son « couple maudit ». On a du mal, alors, à être convaincu par l’acteur principal (le falot Pete Morrison), qui déclare son amour en faisant faire un salut à son cheval… Ça devait être romantique, à l’époque…

Heureusement, les choses s’arrangent nettement par la suite, en particulier avec une excellente course poursuite, après qu’un Indien a volé les vêtements des cow-boys, et surtout la lettre que notre Pete avait écrit à sa belle. Il n’y a d’ailleurs pas vraiment de suspense : on voit vite que l’Indien (un peu caricatural, il faut bien reconnaître) a porté la lettre à la dame en question… d’où le titre du film. Mais la manière dont Ford filme cette cavalcade est assez remarquable : avec un sens du rythme qu’on avait déjà remarqué dès Straight Shooting, deux ans plus tôt, mais qui semble s’être encore affirmé.

Ce sens du rythme et du cadrage, on le retrouve dans les dernières scènes, lorsque Pete tente de s’échapper de la chambre où l’a enfermé son futur beau-père (qui refuse l’union, évidemment), pour aller épouser sa belle. Il reçoit alors l’aide d’un jeune cow-boy défroqué (l’Indien lui a volé son pantalon), interprété par l’excellent et tout jeune Hoot Gibson, grande vedette de l’époque et fidèle complice de Ford.

Cette séquence rocambolesque est une leçon de maître que nous donne le jeune Ford, jouant avec l’espace, les portes, les fenêtres, dans un grand moment de suspense et d’humour.

Une fille et des fusils – de Claude Lelouch – 1964

Posté : 6 octobre, 2010 @ 6:36 dans 1960-1969, LELOUCH Claude | Pas de commentaires »

Une fille et des fusils - de Claude Lelouch - 1964 dans 1960-1969 une-fille-et-des-fusils

Oui, j’aime Claude Lelouch, et non, Lelouch n’a pas toujours été un grand cinéaste. Deux ans avant de trouver le public, la critique, son style, et en un mot la reconnaissance, avec Un Homme et une femme (chabadabada), le jeune cinéaste cherchait sa voie… et ne la trouvait pas. Avec Une fille et un fusil, il signe sans doute le plus « Nouvelle Vague » de ses films. Sauf que Lelouch est à peu près autant taillé pour la Nouvelle Vague que Steven Seagal pour le cinéma de David Lynch.

En filmant ces jeunes glandeurs attirés par le crime après avoir ingurgité des tas de mauvais films américains, on peut quand même se demander si Lelouch ne se moque pas gentiment de ses collègues d’alors, Jean-Luc Godard en tête. En fait, soit son film est une parodie gentillette des premiers Godard, en particulier A bout de souffle et Pierrot le fou, soit c’est un petit nanar pas vraiment sympathique, un brin ennuyeux, et franchement maladroit. Je penche pour la réponse B. La comparaison avec Godard (celui de cette époque, évidemment) est en tout cas incontournable : Lelouch va même jusqu’à citer le passage le plus célèbre du Mépris, le tournage d’une scène de film avec Brigitte Bardot, qu’il détourne ici pour en faire le ressort dramatique du film : l’enlèvement de « la star », sosie anonyme de BB.

Tout n’est pas raté dans Une fille et des fusils : les acteurs sont bons, et c’est avec un certain plaisir que l’on retrouve Jean-Pierre Kalfon, Pierre Barouh ou Amidou. Et puis les comédiennes sont jolies : Janine Magnan et Yane Bary (la patronne du bistrot) sont particulièrement mises en valeur par la caméra de Lelouch qui, il y a plus de quarante-cinq ans, aimait déjà visiblement beaucoup les femmes…

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