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Archive pour la catégorie 'par réalisateurs'

Comédiennes (The Marriage Circles) – de Ernst Lubitsch – 1924

Posté : 20 novembre, 2011 @ 10:09 dans 1920-1929, FILMS MUETS, LUBITSCH Ernst | Pas de commentaires »

Comédiennes (The Marriage Circles) – de Ernst Lubitsch – 1924 dans 1920-1929 comediennes

Un an avant L’Eventail de Lady Windermere, son plus beau film muet (et peut-être son plus beau film tout court), son plus élégant aussi, Lubitsch signe l’une de ces « sex comedies » qui étaient à la mode à l’époque (et dont l’un des spécialistes était Cecil B. De Mille). Arrivé à Hollywood l’année précédente, le cinéaste allemand ne se contente toutefois pas de rentrer dans le moule des studios : après l’expérience en demi-teinte de Rosita, le film qu’il a tourné l’année précédente pour Mary Pickford (c’est la star qui l’avait fait venir en Amérique), Comédiennes est son premier film hollywoodien réellement personnel.

La fameuse « Lubitsch touch », son sens du rythme, l’élégance et l’intelligence de sa mise en scène, et sa manière toute personnelle d’utiliser le plus anodin des objets… tout est là déjà, formidablement maîtrisé, dès les premières images : un gros plan sur les pieds d’Adolphe Menjou au sortir du lit… Dans cette scène d’ouverture, une simple paire de chaussettes en dit plus sur le couple qu’il forme avec l’impossible Marie Prevost. Il faut voir le film, aussi, pour comprendre comment à quel point le plan fixe d’un œuf à la coque et d’une tasse de chocolat peut être évocateur.

L’Eventail… renforcera encore ce penchant à « faire parler » les objets, ou accessoires. Mais dans Comédiennes, Lubitsch fait déjà preuve d’une inventivité et d’une intelligence de chaque plan. C’est d’ailleurs cette Lubitsch touch qui fait tout le sel du film, basé sur une histoire assez conventionnelle : le bonheur d’un couple est menacé par l’intrusion de la meilleure amie de madame, qui a des vues sur monsieur. Ajoutez à cela le mari de la meilleure amie, qui n’a qu’une envie : se débarrasser de sa femme ; et le meilleur ami du premier mari, qui est secrètement amoureux de sa femme à lui (vous suivez ?)… et vous aurez les recettes d’un pur vaudeville riche en quiproquos, amants dans le placard et portes qui claquent.

La mise en scène tire continuellement ce scénario vers le haut : le film est une étourdissante fantaisie, où les portes ne cessent de s’ouvrir et se fermer (classique, chez Lubitsch), et d’où émergent un quinté d’acteurs aux personnalités particulièrement fortes, à commencer par Monte Blue (le mari heureux mais tenté par l’amie de sa femme), espèce de grand dadais continuellement dépassé par les événements. Le contraste entre les deux amies, jouées par la garce Marie Prevost et la douce et émouvante Florence Vidor, est également très fort. Creighton Hale, lui, dans le rôle de l’ami secrètement amoureux, est la caution humoristique du film, loin du cynisme de Menjou (voir la scène cruelle où il refuse la tendresse que lui réclame sa femme, désespérée), dans un rôle qui évoque celui qu’il tenait dans L’Opinion publique.

Lubitsch, d’ailleurs, n’a jamais caché l’admiration qu’il avait pour le chef d’œuvre de Chaplin. Son inspiration se fait sentir à plusieurs reprises dans le film, notamment dans ce plan, a priori anodin, où Adolphe Menjou se rase en regardant la rue en contrebas par la fenêtre, « jumeau » d’un plan quasiment identique dans L’Opinion Publique.

Il est énormément question d’amour, bien sûr : de la difficulté de préserver l’amour, du manque d’amour, ou de l’amour secret… The Marriage Circles est-il pour autant un vrai film romantique ? Pas si sûr… Même si le couple aimant surmonte toutes les épreuves, il a laissé la suspicion et le doute s’insérer dans son quotidien. Quant au couple qui semble promis à se former, il n’a rien d’idyllique… Le seul qui sort réellement vainqueur de cette histoire, finalement, c’est celui qui a obtenu le divorce et peut jouir pleinement de sa liberté enfin regagnée. On fait mieux comme romantisme…

Deux rouquines dans la bagarre (Slightly Scarlet) – d’Allan Dwan – 1956

Posté : 19 novembre, 2011 @ 4:41 dans * Films noirs (1935-1959), 1950-1959, DWAN Allan | Pas de commentaires »

Deux rouquines dans la bagarre (Slightly Scarlet) – d’Allan Dwan – 1956 dans * Films noirs (1935-1959) deux-rouquines-dans-la-bagarre

C’est la fin du second âge d’or de Dwan (après celle de la fin des années 20), celle de son association avec le producteur Benedict Bogeaus. Ensemble, les deux hommes ont signé quelques séries B hautement recommandables comme Tennessee’s Partner (peut-être le meilleur rôle de Ronald Reagan) et surtout Quatre étranges cavaliers, son chef d’œuvre. Pour Slightly Scarlet, Dwan choisit d’ailleurs la même vedette que dans les deux précédents : John Payne, « star de second plan » qui manque un peu de charme et de mystère, mais pas d’une vraie présence.

Dwan, qui ne tournera plus que cinq films inégaux à l’issue d’une carrière riche de plus de 400 titres, s’attaque ici à un monument du polar noir : James M. Cain, l’auteur des fameux Facteur sonne toujours deux fois, Assurance sur la mort et Mildred Pierce, autant de classiques qui ont donné lieu à des chef d’œuvre du cinéma. Le film est à mille lieues de ces trois chef d’œuvre, bien sûr, et a des défauts aussi énormes que ses qualités. Il ne manque en tout cas pas d’originalité…

La séquence qui sert de générique surprend et séduit d’emblée. La couleur, déjà, vive et inattendue dans un film noir (les exemples de film noir en couleurs sont rares : Péché mortel en 1945, Sueurs froides en 1958…). Et puis surtout l’entrée en scène des trois acteurs principaux, avec des gros plans et des arrêts sur image qui semblent isoler chacun d’entre eux, et introduit une esthétique un peu kitsch de roman photo.

Les deux rouquines du grotesque titre français sont deux sœurs pulpeuses et diablement séduisantes : Arlene Dahl, qui sort de prison (faute de moyens, la prison est représentée par une grille et un panneau posé sur une simple façade de maison) après avoir été condamnée pour vol ; Rhonda Fleming, la secrétaire hyper-sexy du favori des prochaines élections municipales. Et il y a le troisième larron, John Payne donc, dont les motivations resteront troubles jusqu’au dernier moment. Détective ? truand ? ange-gardien ? Rien de tout ça, ou tout à la fois, au choix… on sent bien qu’il est tiraillé entre le fric du truand pour lequel il bosse, et la poitrine avantageuse de Rhonda.

Le truand en question, un stéréotype sur pattes, est l’âme damnée du maire en place, et cherche à décrédibiliser son adversaire, pourquoi pas en révélant le casier judiciaire de la sœur de sa secrétaire… Ouais, c’est un peu tiré par les cheveux, mais c’est Cain qui l’a écrit, semble-t-il (j’avoue ne pas avoir lu le livre). Pourquoi pas, d’ailleurs, mais on a droit à tous les poncifs du genre : des types qui font la tête (ce sont les méchants), des gens très avenants (ce sont les gentils). Et au milieu, deux personnages tout de même très intéressants : celui de la petite sœur cleptomane (mais Arlene Dahl n’est pas vraiment à la hauteur du rôle), et celui de John Payne.

Slightly Scarlet est-il un bon film parfois maladroit, ou un pur navet ? Je suis incapable de le dire, mais, à la deuxième vision, le plaisir (un peu coupable) reste intact. Pourtant, il y a souvent de quoi rire dans cette espèce de parodie de film hard-boiled, où Payne sert la mâchoire et se prend quatre balles dans le corps quasiment sans moufter. D’ailleurs, les balles ne tuent pas dans ce film. Elles picotent bien un peu, mais elles ne sont jamais fatales. Contrairement à la simple baffe qui envoie un directeur de journal ad patres. Déroutant, je vous dis…

L’Impératrice rouge (The Scarlett Empress) – de Josef Von Sternberg – 1934

Posté : 17 novembre, 2011 @ 10:25 dans 1930-1939, DIETRICH Marlene, VON STERNBERG Josef | 1 commentaire »

L'Impératrice rouge

Sixième des sept films tournés par Marlene Dietrich sous la direction de son pygmalion, cette adaptation des mémoires de Catherine II de Russie a connu un échec public et critique cinglant à sa sortie, avant d’être réhabilitée par la postérité. Mais la postérité a-t-elle vraiment raison ? Pas sûr : L’Impératrice rouge est, de tous les films tournés en commun par l’actrice et le cinéaste, le plus compassé et le moins vivant. Dépassé par l’ampleur de son sujet, Sternberg ne parvient pas à mener de front le double-but de son film : réaliser le portrait sensible d’une femme-enfant qui se transforme peu à peu en intrigante, femme de pouvoir ; et faire vibrer le souffle de l’Histoire avec un grand H.

Le film est parsemé de très belles scènes et d’images forcément magnifiques, qui subliment Marlene par la grâce d’un noir et blanc délicat, et de voiles qui donnent au visage de la star un aspect presque irréel. Une œuvre typique de Sternberg, donc, qui donne à sa muse un rôle en or, lui permettant de dévoiler une très large palette de ses talents d’actrices. Entre les grands yeux enfantins et innocents du début du film, et le sourire narquois et rageur de la fin, il y a un monde…

Mais le problème, c’est justement pour aller d’un monde à l’autre. Accumuler les (très) belles scènes ne suffit pas à faire un beau film : il manque à ce gros machin en costumes et aux mille acteurs ou figurants ce petit supplément d’âme, cette magie qui fait qu’on s’attache aux personnages, et qu’on vit en même temps qu’eux leurs évolutions. Il manque aussi un rythme à cette suite de séquences entrecoupées par d’innombrables cartons qui replacent constamment l’intrigue dans son contexte historique.

Le sujet était clairement fait pour Sternberg : ce portrait d’une jeune femme romantique confrontée à la dureté d’un monde auquel elle n’était pas préparée, est un pur thème sternergien. Mais son style intime se prête mal à l’ampleur des décors, de la distribution, et tout simplement de l’histoire qu’il veut raconter. Résultat : il manque au film ce charme vénéneux qui faisait le prix de Shanghai Express, la précédente collaboration de Marlene Dietrich et Josef Von Sternberg, autre portrait d’une romantique contrariée, avec en toile de fond l’Histoire en marche.

Par moments, le film semble même se transformer en une série de tableaux joliment composés, mais incapables de prendre vie, comme le montre cette incroyable scène de banquet, où la caméra commence par planer au-dessus de la table, avant de s’écarter et de dévoiler les convives attablés, comme privés de vie. Virtuose, curieux, et froid.

Dommage, parce qu’il y a de très beaux moments dans le film, comme cette (rare) scène d’extérieure, et de nuit, où la future impératrice perd définitivement ses inhibitions de jeune fille ; ou cette séquence en deux temps de l’escalier, où l’amante contrariée se venge de cet homme qu’elle aime peut-être en lui faisant vivre la frustration qu’elle avait elle-même connue par sa faute quelques mois plus tôt… Il y aussi la relation particulièrement cruelle entre la future Catherine II et sa mère, monstre de cruauté froide et calculatrice.

Le film ne manque pas d’attraits, mais c’est sans doute, des sept films du tandem, celui qui s’éloigne le plus d’un chef d’œuvre…

J’ai rencontré le Diable (Akmareul boatda) – de Kim Jee-won – 2010

Posté : 16 novembre, 2011 @ 9:50 dans * Polars asiatiques, 2010-2019, KIM Jee-won | Pas de commentaires »

J'ai rencontré le diable

Après avoir flirté avec le western spaghetti (Le bon, la brute et le cinglé), le Coréen Kim Jee-won flirte avec le thiller noirissime tendance Seven avec ce film de serial-killer violent jusqu’à la nausée. Point de mystère ici : l’identité du tueur nous est dévoilée dès la première séquence (scène de meurtre classique dans sa construction – une jeune femme en panne dans la campagne déserte, un véhicule inquiétant qui s’arrête – mais visuellement d’une beauté envoûtante), et le « gentil » lui-même résout l’enquête en moins d’une demi-heure.

Rapidement, le film de serial killer, plutôt classique au début, se transforme en un jeu de piste glauque et macabre entre le héros, un agent des services secrets qui s’avère être le fiancé de la première victime, et le méchant, un type à peu près normal à cela près qu’il est l’incarnation même du mal absolu. Or, la fiancée en a bavé avant de trépasser, longuement torturée par le tueur devant une caméra qui ne nous épargne rien. Alors l’agent secret, transformé en vigilante, jure de faire souffrir le tueur à son tour. Beaucoup, longtemps, avec un sadisme grandissant et une détermination sans faille qui fait froid dans le dos…

Pas de place pour la rigolade dans ce film noir, qui présente une Corée du Sud bien loin de l’image d’Epinal du sublime Chant de la Fidèle Chun-hyang. Ici, on est dans un pays habité par des esprits malades : le tueur en série est un être froid qui a grandi dans une famille de merde ; son seul ami est une épave qui se gave de chair humaine qu’il stocke dans des congélateurs pleins à dégueuler, et maqué avec une jeune femme totalement abrutie. Et quand le tueur est pris en stop après avoir pris une raclée par sa nouvelle nemesis, l’agent secret transformé en ange vengeur, c’est un duo de tueurs qui trimballent un cadavre dans leur coffre qui s’arrête… Probablement pas le film préféré des tour-operator…

La comparaison avec Seven n’est pas fortuite : le rôle de l’agent secret, interprété avec une sobriété dérangeante et bouleversante par Lee Byung-hun, fait férocement penser à celui de Brad Pitt dans le film de David Fincher. Flic intraitable lancé dans une quête qui dévore tout sur son passage, on le sait d’entrée condamné à une damnation forcément terrible. Entre-temps, il aura eu le temps de se transformer lui-même en un monstre froid, dans sa recherche de la vengeance ultime, apparaissant quand le tueur ne l’attend pas pour le torturer (lui brisant le poignet, lui sectionnant le tendon d’Achille ou lui fracassant le crâne… tout ça en gros plans sanguinolents) avant de le relâcher, pour mieux recommencer. Toujours plus violent, toujours plus implacable.

Et puis il y a le tueur lui-même, figure monstrueuse dont la seule étincelle d’humanité, dans les toutes dernières minutes du film, donne des frissons… La force du personnage (qui aurait facilement pu tomber dans la caricature) doit énormément à l’interprétation elle aussi monstrueuse et d’une force extraordinaire de Choi Min-sik, que l’on avait plus vu depuis sa prestation mémorable dans Old Boy. Son interprétation, fiévreuse et hallucinante (qui évoque un peu celle de Daniel Day Lewis dans Gangs of New York) est hypnotique et hante longtemps les esprits. Comme le regard froid de son adversaire, où la dernière étincelle d’humanité menace à tout moment de disparaître…

Les Anneaux d’or (Golden Earrings) – de Mitchell Leisen – 1947

Posté : 15 novembre, 2011 @ 2:09 dans 1940-1949, DIETRICH Marlene, LEISEN Mitchell | Pas de commentaires »

Les Anneaux d'or

Marlene Dietrich en gitane ? Il faut le voir pour le croire, et même en le voyant, on a un peu de mal à y croire tant l’image de la belle colle mal à l’extravagance de cette bohémienne, diseuse de bonne aventure… Surtout dans sa toute première apparition, étrange silhouette de sorcière dévorant goulûment un ragoût à la lumière d’un feu de camps. Alors là, on se pince un peu, et on se dit qu’elle en fait vraiment beaucoup, avec ce rôle de composition dans lequel on ne l’attendait pas. Et puis finalement, le charme agit.

Le métier de Mitchell Leisen, touche-à-tout honnête et souvent inspiré, n’y est pas pour rien : le cinéaste parvient à donner corps à la chaleur des gitans, avec des scènes de nuit joliment photographiées dans un très beau noir et blanc. Evidemment, on n’est jamais très loin de la caricature, mais Leisen parvient assez miraculeusement à rester continuellement sur le fil, évitant toujours de sombrer dans le grand-guignol. Puis on finit par se prendre au jeu, au charme hypnotique de ces images, et à celui de Marlene, immense même sous deux tonnes de fond de teint et avec un accent très discutable.

Face à la belle, il y a Ray Milland, immense acteur trop mésestimé, que l’on retrouve lui aussi grimé en gitan. Pour de faux, fort heureusement : on aurait mal imaginé ce pur Anglais pale et élégant incarner un véritable gitan. Lui incarne un agent britannique chargé d’une mission ultrasecrète dans l’Allemagne de début 1939. Parce que derrière ses aspects de film communautaire dédié au peuple gitan, Golden Earrings est un film d’espionnage. Mais l’intrigue n’est visiblement qu’un argument utilisé par les scénaristes (dont Abraham Polonsky, qui allait lui-même passer derrière la caméra quelques mois plus tard avec l’admirable L’Enfer de la Corruption) pour filmer ce peuple gitan, victime un peu oubliée de la barbarie nazie. Le chef des gitans, personnage lui aussi au bord de la caricature, mais attachant, n’est d’ailleurs pas dupe de l’avenir qui ai réservé à son peuple…

L’objet de la mission (récupérer la formule d’un gaz potentiellement mortel, mis au point par un savant allemand qui refuse de voir son invention servir la cause nazie) passe très vite au second plan. A vrai dire, dans la scène d’ouverture qui se déroule après la guerre (l’histoire est racontée en flash-back), le personnage de Ray Milland raconte son aventure en évoquant à peine sa mission officielle, la balayant d’un geste de la main. « Il y a une femme au cœur de cette histoire », lance-t-il, précisant ainsi que le film est avant tout une histoire d’amour.

Et une histoire d’amour particulièrement haute en couleurs, entre un officier britannique un peu rigide et sur la réserve, et une bohémienne impulsive et gouailleuse. Il fallait bien le savoir faire de Mitchell Leisen et des acteurs aussi formidables que Marlene Dietrich et Ray Milland pour faire passer la pilule…

Flight to Mars (id.) – de Lesley Selander – 1951

Posté : 14 novembre, 2011 @ 2:17 dans 1950-1959, FANTASTIQUE/SF, SELANDER Lesley | Pas de commentaires »

Flight to Mars

Si on reprenait le scénario de Rocketship X-M (petit film très rentable sorti l’année précédente), en changeant trois ou quatre trucs histoire qu’on ne nous accuse pas de plagiat, et en tournant en couleurs pour un peu mieux brouiller les pistes ? Oh, la bonne idée… On a donc une équipe de scientifiques (cinq, comme dans le film précédent) qui décolle pour le premier vol humain dans l’espace, à destination non pas de la Lune, mais de Mars, autant aller au but tout de suite. Bien sûr, dans l’équipe, il y a une femme de science (jolie, forcément), et un non-scientifique (journaliste, ici), pour mieux nous faire comprendre ce qui se passe…

Rien de nouveau, donc ? Ben non, rien de nouveau. Le film de Lesley Selander reprend une bonne partie du style visuel de celui de Kurt Neumann, une fusée qui ressemble trait pour trait, les mêmes rebondissements (y compris la pluie de météorites)… mais ça ne marche jamais vraiment. La faute à des acteurs peu sympathiques ? Sans doute, mais surtout à une mise en scène molle et sans inspiration, à des couleurs criardes et laides, et à un scénario qui pourrait être fendard s’il y avait la place pour un peu d’autodérision. Ce qui n’est pas le cas.

Bon, c’est vrai qu’on rit franchement (mais ce n’était visiblement pas le but initial) en voyant arriver comme si de rien n’était ces Martiens en costumes de plongée, qui parlent un anglais parfait, et qui comptent dans leurs rangs des Martiennes fort attrayantes. D’ailleurs, il y a sans doute moyen de voir le film avec un certain plaisir. Mais pas a jeun, et pas au premier degré.

24 heures chez les Martiens (Rocketship X-M) – de Kurt Neumann – 1950

Posté : 14 novembre, 2011 @ 10:34 dans 1950-1959, FANTASTIQUE/SF, NEUMANN Kurt | Pas de commentaires »

24 heures chez les Martiens

Une équipe de scientifiques (parmi lesquels une femme, belle, forcément) embarque pour le premier vol habité dans l’espace. Destination, la Lune. Mais la fusée est déviée de sa trajectoire, et c’est sur Mars qu’elle finit par atterrir… Voilà un scénario très typique de la SF des années 50. Une histoire qui, avec quelques variantes, a inspiré bien des films très inégaux à cette époque (voir Flight to Mars par exemple). Malgré le sentiment de déjà-vu, malgré l’aspect cheap et kitsch de l’entreprise, ce Rocketship X-M (voilà un titre qui a dû faire rêver plus d’un gamin de 1950 !) est une belle réussite, signée par le futur réalisateur de La Mouche Noire, petit classique du fantastique réalisé huit ans plus tard.

Bien sûr, aujourd’hui, le film fait sourire : voir les acteurs mimer l’apesanteur, ou débarquer sur Mars avec un simple masque de pilote de chasse, ne manque pas de sel. Les dialogues et l’interprétation sont aussi parfois assez approximatifs, même si on est toujours bien content de revoir Lloyd Bridges, le père de Jeff, sympathique habitué des séries B. On pourrait aussi évoquer la misogynie agaçante du film… Lloyd, qui a bien évidemment craqué pour la jolie Osa Massen soudain toute pimpante, lui lance cette magnifique réplique : « Vous n’êtes plus une scientifique, pour moi, je vois une femme douce, sensible et très belle » (et bonne cuisinière ?).

Mais il faut reconnaître à la mise en scène de Neumann une vraie élégance. La séquence d’ouverture, quasiment en temps réel, est par ailleurs franchement efficace : en un petit quart-d’heure (les quinze minutes qui précèdent le décollage), le réalisateur nous présente le contexte, les personnages, les enjeux, avec un montage ultra-serré et très efficace. On pouvait craindre qu’il tourne un peu en rond dans les longues scènes à l’intérieur de l’espace confiné de la fusée, mais il n’en est rien : Neumann s’acclimate parfaitement de ce huis clos imposé.

Quant aux scènes sur Mars, où l’équipage découvre une ancienne civilisation avancée ayant reculé à l’âge de pierre après une guerre nucléaire, elles permettent de clamer le message profond du film : messieurs les dirigeants, arrêtez le jouer avec l’arme atomique ! Message rabâché de film en film à l’époque ? Oui, mais celui-ci préfigure assez fidèlement un classique tourné plus de quinze ans plus tard : La Planète des Singes.

Les Quatre Fils (Four Sons) – de John Ford – 1928

Posté : 10 novembre, 2011 @ 7:17 dans 1920-1929, FILMS MUETS, FORD John | Pas de commentaires »

Les quatre fils

Encore un chef d’œuvre, pour Ford, qui filme avec une inspiration inouïe ce mélodrame au cœur d’un charmant village de Bavière. En fait de drame champêtre, c’est un film profondément émouvant sur les ravages de la guerre que Ford nous propose ici. De la guerre, on ne verra d’ailleurs quasiment rien : uniquement une courte scène presque irréelle, baignée dans la brume de la campagne française. On ne perdra rien, par contre, des émotions de « maman » Bernle, mère aimante de quatre grands garçons, qui les verra partir l’un après l’autre pour le front.

Nous sommes en 1914, alors que « l’ancien monde », comme le définit un carton au début du film, vit ses dernières heures : des heures d’insouciance qui disparaissent d’un revers de la main, à l’image de la gifle que donne un officier autoritaire à Joseph, le plus insouciant des fils Bernle. Cette gifle n’est pas anodine : elle résume à elle seule ce qui attend ce village si paisible alors que la Grande Guerre est sur le point d’éclater. C’est aussi la perte de l’innocence qui est au cœur du film, à travers le quotidien de ce village si typique, presque caricatural ; Ford ne fera pas autre chose avec Qu’elle était verte ma vallée, autre chef d’œuvre pittoresque sur la perte de l’innocence.

La figure bonhomme et magnifique du facteur illustre joliment cette perte d’identité. Lui qui ouvre le film, silhouette joviale, grosses moustaches avenantes et sourire communicatif, heureux d’apporter des nouvelles qui, dans le vieux monde, ne peuvent être que bonnes… C’est lui aussi qui devra apporter ces sinistres lettres cernées de noir, qui annoncent à la population la perte d’un proche. Les habitants, jadis aussi soudés qu’une famille, voient avec soulagement et un brin d’égoïsme bien compréhensible passer ce messager de mort devant eux sans s’arrêter…

Le facteur, lui, a la silhouette qui se voûte et la démarche lourde, assommé par le poids de ses nouvelles. Maman Bernle symbolise à elle seule les pertes subies par tout un peuple : trois de ses fils mourront au front ; quant au quatrième, il sera considéré comme un traître parce qu’il est parti vivre en Amérique avant le conflit, et qu’il s’est battu contre l’Allemagne. Dur ? Oh, on pleure, bien sûr, devant le triste destin de cette mère aimante (qui n’a rien à « envier » à la mère du soldat Ryan !), mais Four Sons n’est pas un film sinistre, bien au contraire.

Femme forte et profondément bonne (jouée avec beaucoup de pudeur et d’émotion contenue par Margaret Mann), maman Bernle n’est pas du genre à se laisser abattre, remerciant Dieu « pour tous ses bienfaits », même après avoir perdu son plus jeune fils. On pourrait être agacés par cette ferveur absolue, mais non, c’est juste profondément émouvant.

Ford a aussi le bon goût de terminer son film sur un brusque changement de ton, qui évoque L’Aurore (et ce n’est sans doute pas un hasard : le chef d’œuvre de Murnau est sorti l’année précédente, et il semble certain que Ford a rencontré Murnau, tous deux travaillant alors pour la Fox), lorsque Maman Bernle arrive à New York, ville monstrueuse bien éloignée de la Bavière, où tout est possible, l’aliénation comme la renaissance.

Le Réquisitoire (Manslaughter) – de Cecil B. De Mille – 1922

Posté : 10 novembre, 2011 @ 4:10 dans 1920-1929, De MILLE Cecil B., FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Le Réquisitoire

Cecil B. De Mille n’y va pas de main morte avec ce mélodrame qui n’a jamais peur d’aller trop loin. On a donc une riche héritière, Lydia (Leatrice Joy), frivole et amateur de vitesse, qui ne prend rien au sérieux. Surtout pas ce procureur, Dan (Thomas Meighan), qui l’aime et qui fait tout pour convaincre Lydia qu’elle vaut mieux que cette vie de débauche digne de la pire époque romaine (ce qui nous donne droit à quelques séquences romaines illustratives et indigestes, heureusement courtes). Sauf qu’à un moment, Lydia va trop loin : son égoïsme envoie une pauvre mère de famille en prison, et coûte la vie d’un policier. Alors Dan réalise que pour sauver Lydia d’elle-même, il ne reste qu’une option : la prison. Mais en faisant condamner celle qu’il aime, « c’est mon cœur que j’envoie en prison », et Dan sombre dans l’alcool. Jusqu’à ce que Lydia trouve la voie de la rédemption…

Ce curieux mélo s’apparente à un intrus dans la filmo muette de De Mille, souvent irrévérencieuse et pas loin d’être amorale. Il y a au contraire, dans Manslaughter, tout ce qui rendra parfois De Mille insupportable dans ses grandes fresques à venir : un moralisme gonflant (l’alcool, c’est mal), et une foi inébranlable dans les institutions. Parce que, finalement, quoi de mieux que quelques années en prison pour vous remettre dans le droit chemin ? Hein ?! Faut dire qu’elles ont l’air sympa, les prisons de De Mille. La prison pour femmes en tout cas : une espèce de village vacances où tout le monde doit travailler, certes, mais sous le regard bienveillant de gardiennes-copines, et main dans la main avec des tas de gentilles copines qui seront contentes de vous voir retrouver la liberté, mais un peu tristes quand même de vous voir partir…

On a l’air de se moquer, là, mais une fois ces (énormes) réserves posées, il faut bien constater que Manslaughter est une nouvelle fois l’œuvre d’un grand cinéaste particulièrement inspiré, d’un strict point de vue formel. Le scénario peut ne pas convaincre, mais le film se regarde avec un vrai plaisir. Même si on peut lui préférer les audaces et la liberté de la série de films consacrés aux couples et aux tromperies, qu’il venait alors de réaliser (notamment La Proie pour l’Ombre, déjà chroniqué sur ce blog).

Un Monstre à Paris – de Eric Bergeron – 2011

Posté : 10 novembre, 2011 @ 12:13 dans 2010-2019, BERGERON Eric, DESSINS ANIMÉS, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Un monstre à Paris

Joli dessin animé, basé sur une histoire très, très classique, vaguement inspiré du mythe de Frankenstein (deux gentils maladroits s’amusent avec des produits chimiques, qui transforment une mite en un monstre qui sème la terreur à Paris ; sauf que le montre est gentil), mais rehaussé par un style visuel très séduisant. Eric Bergeron donne vie au Paris du siècle dernier, et plus précisément celui de 1910, l’année des grandes inondations dans la capitale. Voir la Seine déborder de son lit n’est pas juste un clin d’œil nostalgique au Paris de l’avant-guerre : ce fait historique est plutôt habilement intégré à l’histoire, puisque le « monstre » est vu par les autorités comme une opportunité pour divertir l’opinion publique, furieuse contre ses dirigeants…

Le meilleur, dans ce long métrage français qui vaut bien mieux que tous les derniers Disney réunis, c’est l’atmosphère « villageois » de Montmartre, joliment rendu par le beau coup de crayon de Bergeron.

C’est, aussi, le casting vocal, impeccable et intelligent. Les acteurs ne sont pas simplement choisis pour pouvoir mettre leur nom sur l’affiche : ils sont l’essence même de leurs personnages. Gad Elmaleh est irrésistible en frimeur au grand cœur ; mais c’est surtout Vanessa Paradis qui séduit, dans le rôle de l’ange de Montmartre, chanteuse de cabaret à la voix envoûtante, qui forme bientôt un duo scénique avec le monstre, qui chante et joue de la guitare comme Mathieu Chédid. Normal, c’est lui qui prête sa voix, et on regrette simplement que le réalisateur n’ait pas laissé davantage de place aux numéros musicaux.

On se console avec les clins d’œil rigolos à la culture française dans tous ses états, de la fameuse coiffure de M au « C’est mon vélo ! » d’un gendarme qui a les traits et la voix de Bourvil.

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