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Archive pour la catégorie 'LEAN David'

Les Grandes Espérances (Great Expectations) – de David Lean – 1946

Posté : 7 septembre, 2012 @ 12:37 dans 1940-1949, LEAN David | 2 commentaires »

Les Grandes Espérances (Great Expectations) - de David Lean - 1946 dans 1940-1949 les-grandes-esperances

Le chef d’œuvre de Dickens a été plusieurs fois porté à l’écran. Cette adaptation, signée Lean (qui reviendra à Dickens dès l’année suivante avec Oliver Twist), est sans doute à la fois la plus fidèle, et la plus réussie.

Avec cette œuvre visuellement somptueuse, Lean signe un magnifique film sur le passage à l’âge adulte, et sur le difficile deuil de l’enfance. Derrière son aspect de conte un peu naïf, le film est d’une richesse impressionnante. Il dresse des liens complexes entre l’adulte et l’enfant qu’il fut. En devenant un homme (un passage difficile marqué par une rupture totale de cadre de vie), Pip, le héros, réalisera que les bonnes fées de son enfance ne sont pas ce qu’il pensait, pas plus que le croquemitaine qu’il avait rencontré par une nuit brumeuse et cauchemardesque.

La bonne fée, alias l’étrange Miss Haversham, n’est qu’une imposture ; le monstre, bagnard évadé, est bien moins monstrueux qu’il en a l’air… C’est tout l’univers imagé, naïf et manichéen de l’enfance qui explose, mine de rien. Et la perte de l’innocence ne se fait pas sans douleur…

L’histoire de Pip est racontée en deux époques : l’enfance d’abord, puis le début de l’âge adulte. Et c’est passionnant de voir les changements visuels et narratifs que Lean adopte d’une époque à l’autre. Pour l’enfance, son style est proche de l’expressionnisme, avec des ombres inquiétantes, des plans désaxés très marqués, et de grands ciels nuageux qui surplombent d’immenses espaces vides et inquiétants; des marais baignés de brumes… On pense à L’Aurore, de Murnau. On pense aussi à l’utilisation des paysages dans Lawrence d’Arabie, que Lean tournera quelques années plus tard. La couleur et le cinémascope en moins.

Cette première partie est du pur Dickens : Pip, jeune orphelin, grandit dans une maison perdue dans un environnement hostile, élevé par une sœur qui ne l’aime pas et le bat à longueur de journées… De la même manière, l’apparition du forçat évadé à qui Pip vient en aide un peu malgré lui évoque les grandes figures machiavéliques dickensiennes, mais aussi la créature de Frankenstein (pas étonnant que De Niro ait joué les deux personnages dans les années 90 – voir le Frankenstein de Branagh).

Changement de style et de ton avec le passage à l’âge adulte. Finies les brumes inquiétantes et les grands paysages : Pip hérite d’un mystérieux donateur (qu’il croit à tort être Miss Havisham), et part apprendre les bonnes manières à Londres… où il apprendra surtout le cynisme, la débauche et la snobinerie, avant d’être rattrapé par son enfance avec une apparition inattendue. Là, l’approche de Lean se veut moins onirique, plus ancrée dans la réalité, et dans ce Londres grouillant de vie.

Comme souvent chez Lean, les personnages, et leur évolution, sont intimement liés aux décors dans lesquels ils évoluent. C’était le cas avec la maison de Heureux mortels, la gare de Brève rencontre ou la chambre de Madeleine ; ce sera évidemment le cas pour ses grandes fresques à venir (du Pont de la Rivière Kwai à La Route des Indes). Ici, peut-être plus encore que dans ses autres films, Lean fait des décors des personnages à part entière. Il oppose le clinquant hypocrite de Londres à l’authenticité simple de la maison du marais, et cela suffit pour montrer les égarements d’un Pip en quête d’identité.

Lorsque Pip retrouve Estella dans le château sans vie de Miss Haversham, il sait que le bonheur n’a pas sa place dans cette demeure vide et figée dans le passé. Et quand il se réveille après une longue maladie qui marque la fin de son « apprentissage », c’est « à la maison » que Joe, son forgeron de père adoptif, l’a ramené…

Beau film sur le deuil de l’enfance, ce Great Expectations est du pur Dickens, et du pur Lean.

Madeleine (id.) – de David Lean – 1950

Posté : 25 avril, 2012 @ 9:57 dans 1950-1959, LEAN David | Pas de commentaires »

Madeleine

Lean nous livre là une petite merveille de mise en scène, un film magnifique dominé par quelques séquences extraordinaires. Loin de ses grosses productions à venir, le cinéaste compose chacun de ses plans magistralement, et utilise comme personne la profondeur de champs, les contre-plongées et les différences de niveau : la rue qui surplombe la chambre de Madeleine, la jeune femme qui gravit le raide escalier qui la mène au cœur du tribunal, le rendez-vous galant au sommet d’une corniche… Un jeu perpétuel qui souligne le décalage du personnage par rapport à son entourage, et par rapport au regard qu’on pose sur elle.

Le sujet semblait tailler sur mesure pour le réalisateur de Brève rencontre. Pourtant, David Lean n’était pas enthousiasmé par ce film, qu’il n’a tourné que pour accéder à la demande pressante de celle qui était alors sa compagne. Ann Todd (déjà héroïne du très beau Les Amants passionnés) s’était prise de passion pour Madeleine Smith, jeune femme de la haute société écossaise du milieu du XIXème siècle, qui avait été au cœur d’un procès resté célèbre.

Accusée d’avoir empoisonné son amant, Madeleine avait déchaîné les passions, divisant l’opinion publique. Le procès, d’ailleurs, avait débouché sur un verdict sans précédent : ni coupable, ni innocente, la jeune femme avait été libérée car les preuves avaient été jugées « sans fondement ». Le mystère reste entier, et c’est la personnalité complexe qui a visiblement fasciné Ann Todd, qui l’avait déjà interprété sur scène, et qui rêvait d’en tirer un film.

Avec une délicatesse infinie, David Lean s’attache à illustrer cette complexité. Et il y arrive formidablement bien (à l’exception, peut-être, d’un dernier regard faussement ambigü et un peu lourdingue, qui rappelle les pires erzats du cinéma hitchcockien). Jeune femme bien sous tout rapport, Madeleine/Ann Todd n’a en fait rien d’une pudibonde. Avec toute la bienséance qu’il convient, Lean filme pourtant un personnage taraudé par le sexe, et pas uniquement par des amourettes de midinette.

Les censeurs s’y sont peut-être trompés à l’époque, mais aujourd’hui, les non-dits sautent aux yeux des spectateurs. La découverte de sa future chambre par Ann Todd est particulièrement évocatrice : en regardant ce soupirail qui donne sur le trottoir de la rue, elle réalise à quel point cette pièce en sous-sol sera un baisodrome parfait pour elle. Dans l’atmosphère romantique de ce Glasgow aux pavés humides, Lean nous montre une jeune femme qui semble être l’incarnation même de l’héroïne romantique, mais qui en est tout l’inverse.

Au fond, même si elle se convainc du contraire, les histoires d’amour n’intéressent pas Madeleine, qui leur préfère les aventures clandestines. Les choix qu’elle fait sont parfaitement anti-romantiques : son mari, un homme bon et aimant, est sacrifié au profit d’un petit aventurier détestable et calculateur. Cette Madeleine nous laisse un drôle de goût, l’impression de nous être attachés à une jeune femme qui est loin d’avoir révélé tous ses secrets.

Les Amants passionnés (The Passionate Friends) – de David Lean – 1949

Posté : 23 janvier, 2012 @ 6:36 dans 1940-1949, LEAN David | Pas de commentaires »

Les Amants passionnés

Après ses deux adaptations de Dickens (Les Grandes Espérances et Oliver Twist), Lean revient à un genre qui lui avait bien réussi avec Brève rencontre, quatre ans plus tôt. D’ailleurs, la présence en tête d’affiche de Trevor Howard rend la comparaison entre les deux films inéluctables : Les Amants passionnés serait une version « high society » de Brève rencontre, dont il reprend l’un des thèmes principaux, le personnage principal féminin étant tiraillé entre son mari et le jeune homme (Howard dans les deux films) dont elle est tombée amoureuse.

Mais Les Amants passionnés est bien plus qu’une simple variation sur le même thème. La construction, pour commencer, est bien plus complexe, faite de flash-backs qui s’imbriquent les uns dans les autres, pour donner une densité immense à ce mélodrame bouleversant. Brève rencontre était une épure absolue. Les Amants passionnés pousse beaucoup plus loin les ficelles du mélo, en faisant intervenir le destin implacable (les deux amants d’autrefois se retrouvent par hasard dans un hôtel près du Lac de Genève), en mettant en scène un mari que l’on prend plaisir à haïr (Claude Rains, qui révèle une humanité de plus en plus touchante), ou encore en plantant l’histoire dans des décors typiques du genre.

Aucun conformiste dans ce film, pourtant : les personnages sont complexes et fascinants, et la construction gigogne donne tout le poids de cet amour clandestin d’une vie, un sentiment de gâchis et d’inéluctabilité qui prend aux tripes. Car dès le début, on sait que le personnage de Mary (Ann Todd, qui était alors la femme de Lean) a fait le choix de sacrifier son amour au profit d’une ambition à l’issue forcément malheureuse. Cette détresse dans laquelle plonge Mary au fil des années est attendu, il n’en est que plus bouleversant.

Lean joue avec les codes du genre, faisant du mari le stéréotype du mari cocu (la scène où il comprend que sa femme le trompe est un modèle de mise en scène), pour mieux surprendre le spectateur. Finalement, c’est peut-être lui la vraie victime du film, le plus grand amoureux aussi, celui capable d’attendre des années que l’amour qu’il donne lui soit rendu.

Plus complexe que Brève Rencontre, Les Amants passionnés appartient indubitablement à la même famille. On y retrouve de nombreuses images jumelles : les petits moments de bonheur au bord de l’eau, les rendez-vous au spectacle (le cinéma dans le film de 1945, le théâtre ici), et bien sûr la tentation de se jeter sous un train, dans une scène qui là encore, prend le contre-pied de la retenue de rigueur dans Brève rencontre. L’approche est différente, mais l’émotion tout aussi immense.

Brève rencontre (Brief Encounter) – de David Lean – 1945

Posté : 24 novembre, 2011 @ 11:08 dans 1940-1949, LEAN David | Pas de commentaires »

Brève rencontre

C’est la quatrième et dernière collaboration entre le jeune David Lean et le dramaturge Noel Coward, qui lui avait donné ses premières chances en lui demandant de co-réaliser avec lui Ceux qui servent en mer, puis en lui confiant les adaptations de deux de ses pièces : Heureux mortels et L’Esprit s’amuse. Brève rencontre est aussi le sommet de cette riche collaboration, et l’un des plus grands classiques du cinéma anglais d’après-guerre. Des quatre films, c’est aussi celui que Lean a su le mieux faire sien, faisant d’une pièce qui se déroulait exclusivement dans un café de gare une œuvre intime, mais lyrique, l’une des plus belles (et déchirantes) histoires d’amour que l’on ait pu voir.

D’une délicatesse infinie, le film raconte la brève passion d’une jeune femme bien mariée avec un médecin qu’elle rencontre par hasard sur un quai de gare, et qu’elle revoit semaine après semaine. Lorsqu’ils se déclarent enfin leur amour, c’est déjà le début de la fin : l’un comme l’autre sont rongés par la culpabilité, et par les mensonges qu’ils doivent faire à leurs conjoints respectifs, pour la première fois de leur vie.

Le film ne laisse pas planer le suspense : on sait dès le début que leur histoire se termine par une rupture, grâce à une scène d’adieu déchirante où l’émotion redouble avec l’intrusion d’une commère intarissable qui vole aux deux amants leurs ultimes minutes ensemble. Une main délicate posée sur une épaule, et les grands yeux bouleversants de Celia Johnson… il n’en faut pas plus à Lean pour réussir l’une des plus belles scènes d’adieux de l’histoire du cinéma, tout simplement.

Les yeux de Celia Johnson… Il faudrait écrire un livre sur ce regard immense et triste, qui passe de la gêne au rire, de la résolution aux pleurs, en un clin d’œil… merveille d’actrice à qui Lean a été l’un des seuls à savoir mettre en valeur, dans Heureux mortels et surtout dans ce Brève rencontre, évidemment le rôle de sa vie. Loin des canons de beauté habituels, Celia Johnson incarne mieux que quiconque l’Anglaise moyenne, avec son visage sans attrait particulier, mais qui en devient beau tant il est émouvant. Dommage qu’elle n’ait pas fait une plus grande carrière par la suite…

Face à elle, Trevor Howard trouve son premier grand rôle au cinéma. Lui qui avait jusqu’à présent privilégié le théâtre (depuis une vingtaine d’années) est absolument formidable, avec un jeu d’un naturel assez sidérant. La réussite de ces deux personnages fait évidemment beaucoup pour la force du film, qui peut se résumer platement : c’est l’histoire on ne peut plus banale de deux êtres on ne peut plus banaux. C’est simple, et c’est sublime.

Les seconds rôles sont également particulièrement réussis. Le mari de Celia Johnson pour commencer, un peu ennuyeux certes, mais profondément bon et sensible. Lean lui offre d’ailleurs quelques belles scènes, en particulier la toute dernière du film. On aimerait pouvoir détester ce mari trompé, histoire de se donner bonne conscience. Mais ce n’est bien sûr pas aussi simple. Et ce sentiment de culpabilité, Laura (Celia Johnson) le paiera au prix fort.

Même si le film se déroule la plupart du temps loin du café de la gare, le décor unique de la pièce originale reste le lieu autour duquel l’histoire s’articule. Sa « faune » donne également une caution non pas comique, mais plus légère au film, avec cette romance inattendue et enthousiasmante entre la très élégante tenancière au passé un peu mystérieux (Joyce Carey, figure de la scène londonienne), et le chef de gare bonhomme et jovial (le très sympathique Stanley Holloway, qui était lui aussi dans Heureux mortels, dans le rôle du voisin).

Quant à la mise en scène de Lean, elle est rien moins que brillante, tout comme la construction du film, Celia Johnson imaginant (en voix off) qu’elle raconte à son mari son histoire d’amour, dans une longue série de flash backs. Dans un noir et blanc somptueux, avec des allers et retours incessants des trains qui donnent au film un mouvement presque ininterrompu et le sentiment que cette passion ne pourra pas s’installer, le cinéaste signe une œuvre qui évoque la beauté du « réalisme poétique » du cinéma français des années 30.

Et comme les films de Carné ou Grémillon, ce réalisme poétique s’inscrit parfaitement dans son époque : celle de l’Angleterre de l’immédiat après-guerre. Cette toile de fond est discrète, mais elle ne fait que souligner l’aspect tristement anecdotique de cette romance sans lendemain, mais inoubliable. Comme ce chef d’œuvre absolu.

L’Esprit s’amuse (Blithe Spirit) – de David Lean – 1945

Posté : 21 octobre, 2011 @ 9:38 dans 1940-1949, FANTASTIQUE/SF, LEAN David | Pas de commentaires »

L'Esprit s'amuse

Après le succès de Heureux mortels, David Lean adapte une nouvelle fois une pièce de Noel Coward. Le résultat est considéré comme l’une des meilleures comédies anglaises des années 40, mais je vais être bien moins enthousiaste que la postérité ! Bon, je dois reconnaître ne pas être très friand des comédies de mœurs mettant en scène des fantômes (si, si, il doit y en avoir d’autres). C’est peut-être pour ça que cette comédie qui se veut enlevée (la femme de ménage n’arrête pas de courir) et acide (un homme qui fait ménage avec sa nouvelle femme et le fantôme de sa femme précédente, quel scandale !) m’a totalement laissé sur la touche.

Rex Harrison y interprète un écrivain remarié après la mort de sa première femme, qui fait appel à une médium pour l’observer sans en avoir l’air et en faire un personnage de son prochain roman. Sauf que la séance tourne bizarrement, et que le fantôme de son ex lui apparaît (mais juste à lui) et s’incruste durablement… Dans un premier temps, le personnage très excentrique de Margaret Rutherford (la médium) fait sourire, mais sa prestation finit par être un brin exaspérante. Quant aux quiproquos créés par ce fantôme qui n’est visible et audible que de Rex, ils font sourire une ou deux fois… mais le running gag revient sans cesse, jusqu’au trop-plein. C’était sans doute très drôle sur scène, mais David Lean ne renouvelle pas le miracle de son précédent film : s’approprier le matériau de départ pour en tirer un film qui lui soit personnel.

On n’est pas pour autant dans du théâtre filmé : Lean, s’il reste très « cowardien », donne du rythme au film, et lui donne une atmosphère très british, qui lui font dire des choses très cruelles (le personnage de Rex Harrison est quand même un type d’un cynisme et d’un égocentrisme assez inouïs) avec une impression de légèreté délicieusement inconvenante. Rien que pour ça, et malgré le vert très laid du fantôme et l’ennui qui pointe son nez de temps en temps, le film mérite bien d’être vu.

Heureux mortels (The Happy Breed) – de David Lean – 1944

Posté : 17 octobre, 2011 @ 4:11 dans 1940-1949, LEAN David | Pas de commentaires »

Heureux mortels

Le futur réalisateur de La Fille de Ryan qui adapte, pour sa première mise en scène solo, une œuvre renommée de Noel Coward, véritable institution en Grande-Bretagne ? J’y allai davantage par curiosité que par enthousiasme… Grand bien m’en a pris : Heureux mortels est un grand bonheur de cinéma, une fresque intime sublime et sensible, d’une intelligence rare, et d’une délicatesse infinie. Un chef d’œuvre ? Ben oui, un chef d’œuvre, à la fois ambitieux (c’est l’histoire d’une famille londonienne entre la fin de la Première guerre mondiale et la veille de la seconde) et d’une étonnante simplicité : cette famille, ce pourrait être n’importe laquelle, ou presque.

Le début et la fin du film se font écho. Le générique de début se termine sur une porte qui s’ouvre. La caméra est à l’intérieur d’une maison jusqu’alors vide, qui voit arriver toute une famille, revenue d’un exil forcé pendant la guerre. Le film se terminera par la même porte qui se referme sur les derniers habitants qui s’en vont vers une autre étape de leur vie. Entre deux, la caméra n’aura quasiment pas quitté la maison ou ses environs proches, comme si c’étaient ces murs qui nous racontaient l’histoire si banale et si belle à la fois de la famille Gibbons.

Cette famille, c’est un couple uni entouré d’une grand-mère acariâtre, d’une belle-sœur veuve de guerre, et de trois grands enfants que l’on voit grandir, quittant la maison l’un après l’autre. Il y a des fâcheries, des engueulades, des réconciliations, des départs, des mariages, et des drames aussi, terribles. Il y a des rires et il y a des larmes, mais ce qui est beau dans ce film, c’est la pudeur extrême de Lean, qui filme le pire des drames (je ne vais pas dévoiler de quel drame il s’agit) sans rien en montrer, et sans rien en dire. Les joies, par contre, sont filmées frontalement, et c’est là que les larmes jaillissent enfin (je parle de mes larmes à moi, en fait…). Il y a cet ami inséparable et profondément sympathique aussi, et puis les fréquentations amicales ou amoureuses que les enfants amènent à leur tour…

Le film, qui évoque évidemment le temps qui passe, pourrait être plombant. Ce n’est pas le cas, en partie aussi grâce aux personnages qui sont pourtant des « caractères » très typiques, mais qui évitent constamment le cliché ou l’excès. Celia Johnson (qui jouera l’année suivante dans Brève rencontre, grand classique également signé David Lean et Noel Coward), figure idéale de la mère de famille « normale » (beauté sans glamour, attachante mais rugueuse), forme avec Robert Newton (père idéal, mari aimant, homme simple qu’on aimerait avoir pour ami) un couple en dehors de toutes les modes, et donc inoubliable.

Ils sont au cœur de cette fresque intime d’une famille qui traverse les grands événements  historiques en les vivant pleinement, mais toujours par le prisme de la famille. Une grève générale, la mort d’un roi, une guerre qui menace… Jamais ces événements historiques ne prennent le pas sur les personnages, mais l’influence du « monde extérieur » est continuellement perceptible.

Tourné dans un technicolor d’une sobriété elle aussi extrême (on est finalement proche du noir et blanc), ce film sublime est, à travers l’histoire de cette famille à la fois classique et unique, le portrait doux amer de la société anglaise de l’entre-deux-guerre.

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