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Archive pour la catégorie 'FORD John'

Riley the Cop (id.) – de John Ford – 1928

Posté : 4 juillet, 2013 @ 4:21 dans 1920-1929, FILMS MUETS, FORD John | Pas de commentaires »

Riley the Cop (id.) – de John Ford – 1928 dans 1920-1929 riley-the-cop

Tourné après des monuments comme Le Cheval de Fer, Les 3 Sublimes Canailles ou Quatre Fils, Riley the Cop fait figure d’aimable divertissement dans la filmographie muette de Ford. Le cinéaste aborde visiblement ce projet comme une récréation, et semble ne pas s’être investi à fond, même si on retrouve clairement ce qui fait l’esprit de beaucoup de ses films : un esprit frondeur irlandais qui définit nombre de ses personnages.

Riley est joué par J. Farrell McDonald (l’une des trois « sublimes canailles » de son western), mais ce pourrait être Victor McLaglen. Un Américain comme Ford les affectionne : marqué par ses origines irlandaises, porté sur l’alcool, et n’aimant rien tant que les amitiés viriles et les virées entre hommes.

Celui-ci est un flic de quartier, bonhomme et tir au flanc, qui a trouvé une sorte de havre de paix sur le trottoir dont il a la charge. Les dix premières minutes le montrent dans son « travail », côtoyant des habitants qu’il considère plus comme ses enfants, ou ses petits frères, que comme des suspects potentiels. Cette première partie, légère (comme tout le film) et pleine d’humour, est aussi curieusement assez émouvante : Ford filme une harmonie que l’on devine fragile.

Puis, Riley est chargé d’aller en Europe pour extrader l’une de ses ouailles, jeune homme amoureux parti retrouvé sa belle, mais arrêté pour un vol qu’il n’a pas commis. N’attendez pas qu’un semblant de suspense se mette en place : le film se résume essentiellement à une virée alcoolisée à Munich et à Paris, où Riley trouve l’amour (une Bavaroise au caractère bien trempé), tente de passer incognito mais est accueilli comme un prince par tous les policiers d’Europe qui reconnaissent en lui un confrère à la simple vue de ses (grandes) chaussures, boit énormément, et envisage de s’installer sur ce vieux continent qui n’a pas choisi cette loi si inhumaine de la Prohibition !

Bref, rien de sérieux à l’horizon. Riley the Cop est une rareté très mineure dans la filmo de Ford, très loin de ses chef d’œuvre, mais un film qui porte bel et bien la marque du cinéaste, son univers si personnel et chaleureux.

La Chevauchée fantastique (Stagecoach) – de John Ford – 1939

Posté : 19 avril, 2013 @ 1:12 dans 1930-1939, CARRADINE John, FORD John, WAYNE John, WESTERNS | 1 commentaire »

La Chevauchée fantastique (Stagecoach) – de John Ford – 1939 dans 1930-1939 la-chevauchee-fantastique-1

Que dire sur ce monument du western ? Treize ans après Trois sublimes canailles, Ford renoue avec un genre qu’il avait totalement délaissé depuis la fin du muet. Avec ces retrouvailles, le cinéaste signe une espèce de western définitif, qui rassemble toutes les grandes figures du genre : attaque d’Indiens, cavalerie à la charge, duel dans la nuit.

Surtout, Ford réunit dans une diligence tous les personnages typés du genre westernien : le hors-la-loi, le médecin alcoolique, le joueur de poker, le banquier hautain, le petit homme un peu lâche, la femme du monde qui arrive dans l’Ouest pour retrouver son mari, le shérif, le conducteur débonnaire, et la « fille » au passé sulfureux.

De ces stéréotypes, Ford fait des personnages à part entière, extraordinairement bien écrits et vivants. Le cinéaste a un vrai génie pour donner de la consistance au moindre second rôle de ses films, et pour créer des communautés éphémères, qui ont tout d’une vrai famille, avec ses attirances, ses inimitiés, ses engueulades, ses coups bas. Il est ici épaulé par des acteurs absolument formidables. De Claire Trevor (très émouvante) à Thomas Mitchell (forcément attachant), en passant par John Carradine (forcément fourbe), Berton Churchill (forcément détestable) ou Andy Devine (forcément bon bougre), que des grands acteurs, dans des rôles taillés sur mesure. Et que des habitués du cinéma de Ford.

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Et puis il y a John Wayne, bien sûr. L’acteur avait déjà fait quelques panouilles pour Ford à la fin du muet (notamment dans Hangman’s house), et avait déjà tenu la vedette de La Piste des géants pour Walsh, en 1930. Mais depuis près de dix ans, il enchaînait les westerns de série B (C ? D ?…) assez miteuses. C’est bien dans Stagecoach que Wayne devient un acteur puissant. Et une star par la même occasion.

D’ailleurs, on sent bien que Ford a décidé de faire de Wayne une star : l’acteur apparaît pour la première fois dans un travelling qui se termine en gros plan sur son visage impressionnant. Ce plan spectaculaire est de ceux qui créent les légendes…

Wayne est le vrai pivot d’un film qui combine merveilleusement l’intime et le spectaculaire, l’exiguïté de cette diligence avec l’immensité de Monument Valley, les drames personnels des personnages et les guerres indiennes qui font rage. Stagecoach est l’un des chef d’œuvre de Ford (et du western). De cette accumulation de figures obligées, Ford a tiré un film très personnel, et constamment inspiré. Un classique incontournable, oui.

Steamboat round the bend (id.) – de John Ford – 1935

Posté : 17 avril, 2013 @ 2:56 dans 1930-1939, FORD John | Pas de commentaires »

Steamboat round the bend (id.) – de John Ford – 1935 dans 1930-1939 steamboat-round-the-bend

Troisième et dernier film tourné par Will Rogers avec John Ford (l’acteur mourra peu avant la sortie du film, victime d’un accident d’avion), Steamboat round the bend s’inscrit dans la lignée des deux précédents (Judge Priest et Doctor Bull). Une nouvelle fois, Rogers est le symbole d’une Amérique rurale qui n’aspire qu’au calme et à la bonté.

Nouveau propriétaire d’un bateau à aube qu’il a acheté avec son neveu, il n’a plus qu’un rêve : fumer sa pipe et boire ses cafés dans la cabine, au fil des futurs voyages le long du fleuve. Un rêve qui est menacé lorsque son neveu, qui s’est amouraché d’une « fille des marais » un peu sauvageonne, est condamné à mort pour avoir tué un homme.

Cette Amérique-là n’a sans doute jamais existé, mais elle nous semble pourtant tellement familière et chaleureuse. C’est une contrée où le shérif (l’indispensable Eugene Pallette) confie la clé de sa cellule au prisonnier, en lui disant de s’installer où bon lui semble. Où une tentative d’évasion se termine par des excuses gênées. Où les prisonniers s’unissent dans un orchestre improvisé. Et où la survie d’un homme peut dépendre de l’issue d’une course de bateau le long du fleuve.

C’est du pur Ford, où se croisent des tas de figures familières : Rogers bien sûr, mais aussi Berton Churchill en prédicateur, et l’indispensable Francis Ford, une nouvelle fois en vieil alcoolique constamment ivre.

On y sent aussi constamment la complexité de Ford : son attachement pour une Amérique traditionnelle où les minorités n’ont pas le beau rôle (Stepin Fetchit dans son éternel emploi de « nègre » pour le moins discutable), est intimement lié à sa veine humaniste (la vision nuancée des « gens du marais »).

Surtout, Steamboat round the bend est un petit moment de pur plaisir cinématographique. Une invitation à côtoyer de doux dingues formidablement attachants, sur des eaux tranquilles et bienveillantes. Un voyage qui ne se refuse pas.

Le Forgeron du village (The Village Blacksmith) – de John Ford – 1922

Posté : 8 avril, 2013 @ 1:35 dans 1920-1929, FILMS MUETS, FORD John | Pas de commentaires »

Le Forgeron du village (The Village Blacksmith) - de John Ford - 1922 dans 1920-1929 the-village-blacksmith-2

(photogramme tiré d’une séquence disparue)

11 minutes : c’est tout ce qui a survécu de cette œuvre de jeunesse de Ford, long métrage dont la quasi-totalité semble avoir disparu à jamais. Mais l’unique bobine qui nous soit parvenue est impressionnante : The Village Blacksmith, ou ce qu’il en reste, est à placer parmi les très grandes réussites muettes de Ford. La perte des autres bobines n’en est que plus désolante.

Evidemment, on ne peut juger du film dans son ensemble, mais ce passage, qui correspond vraisemblablement à la fin du film, est tout simplement extraordinaire. On est apparemment en plein climax, et Ford nous livre un montage alterné ahurissant où plusieurs drames semblent se dénouer.

Les deux tiers de la bobine se déroulent durant une nuit sombre et orageuse, dans une campagne inquiétante. Durant ces quelques minutes, Ford filme un homme handicapé qui rampe dans la boue animé par une rage peu commune (vision qui paraît tout droit sortie d’un film de Tod Browning) ; une jeune femme foudroyée ; une bagarre à main nue sous la pluie ; un père et son fils battant à coup de cravache et avec un sourire incroyablement sadique le jeune handicapé cloué au sol ; le père de celui-ci traînant les deux salauds à travers la nuit menaçante…

the-village-blacksmith-1 dans FILMS MUETS

(image tirée de l’unique bobine rescapée)

Au sommet de son art, déjà, Ford compose des images inoubliables qui impressionnent, même si l’enjeu dramatique reste relativement obscur. On devine quand même que le jeune handicapé (qui retrouvera l’usage de ses jambes grâce à son frère chirurgien) et son père, des gens modestes visiblement, ont été accusés à tort d’avoir volé de l’argent destiné aux bonnes œuvres, et que ce vol a en fait été commis par les membres d’une famille nettement plus « respectable ».

Mais tout ça finit bien : après cette séquence mémorable, Ford conclut son film par une fête comme il les aime. Un mariage filmé avec légèreté, et où on devine l’esprit de communauté cher à Ford, avec ses gueules irlandaises (notamment celle de Francis Ford, le grand frère, qui n’était pas encore cet éternel vieillard alcoolique à la barbe blanche, figure incontournable des films de John) et ses amitiés viriles.

Cette ultime bobine de The Village Blacksmith est une rareté, évidemment. C’est aussi un témoignage précieux qui rappelle que, même si quelques films sont encore miraculeusement retrouvés (Upstream, récemment), la grande majorité des œuvres muettes de Ford, comme de beaucoup d’autres cinéastes, est sans doute irrémédiablement perdue.

La Conquête de l’Ouest (How the West was won) – de Henry Hathaway, John Ford et George Marshall (et Richard Thorpe) – 1962

Posté : 19 mars, 2013 @ 6:48 dans 1960-1969, FORD John, HATHAWAY Henry, MARSHALL George, STEWART James, THORPE Richard, WAYNE John, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Conquête de l’Ouest (How the West was won) – de Henry Hathaway, John Ford et George Marshall (et Richard Thorpe) – 1962 dans 1960-1969 la-conquete-de-louest

La démesure est le mot qui définit le mieux ce western hors norme, expérience à peu près unique dans l’histoire du cinéma. Près de trois heures de métrage, un écran qui n’en finit plus de s’élargir (le film est tourné en Cinérama, un procédé qui a fait long feu, qui implique l’utilisation de trois caméras simultanément, et la projection sur trois écran, plongeant ainsi le spectateur au cœur de l’action), des tas de stars parfois réduites à des apparitions (John Wayne, James Stewart, Henry Fonda, Gregory Peck et beaucoup, beaucoup d’autres), et même trois grands réalisateurs : Ford, Hathaway et Marshall.

L’ambition, surtout, est de réunir dans un même film toutes les grandes figures du western. A travers le destin d’une famille de pionniers, c’est toute la conquête de l’Ouest qui est racontée : plus de trente ans d’épopée à travers trois générations de cette famille Prescott : Agnes Moorehead, Karl Malden et leurs descendants.

Le long voyage des colons, les guerres indiennes, la guerre civile, la construction du chemin de fer, l’arrivée de la loi dans l’Ouest encore sauvage… Le film est une suite de cinq épisodes inégaux et à peu près indépendants (la famille Prescott sert de fil conducteur) auxquels il manque sans doute un peu plus de cohérence. Mais à travers ces destins hors normes, c’est toute l’histoire américaine du XIXème siècle que le film retrace, rien moins.

Hathaway signe la majeure partie du film : trois des cinq épisodes qui ouvrent et ferment le film, lui donnant ses bases et son rythme. Ford, lui, signe le plus court, et visuellement le plus impressionnant : celui consacré à la guerre civile, dont on ne voit pas grand-chose, si ce n’est les conséquences sur les hommes. Pas de scène de bataille, dans cette parenthèse très sombre, mais deux dialogues en parallèle, au soir de la bataille de Shiloh, l’une des plus meurtrières de toute cette guerre : le général Sherman (Wayne) qui réconforte le général Grant, et deux soldats de base, l’un Nordiste l’autre Sudiste, qui partagent la même horreur des combats. C’est là que figure le plus beau moment du film : le jeune Nordiste (George Peppard) boit de l’eau dans la rivière, lui trouve un goût étrange, et réalise qu’elle est rouge du sang des centaines de morts…

Quant à l’épisode consacré au chemin de fer (signé Marshall), il est le plus spectaculaire, utilisant merveilleusement le Cinerama dans une séquence de fusillade sur le train lancé à pleine vitesse. Impressionnant, comme cette hallucinante cavalcade de centaines de bisons qui dévastent tout sur leur passage, ne laissant derrière eux que morts et ruines.

Pourtant, malgré sa démesure et ces quelques morceaux de bravoure, cette énorme production laisse un sentiment nostalgique et cruel. Ce qui marque dans cette épopée de l’Ouest américain, ce sont les sacrifices humains, et le poids du temps qui passe. Les hommes meurent, laissant les femmes passer le témoin à leur place. Les générations passent, et c’est avec ces morts que la société avance, pour le meilleur ou pour le pire.

Pas de grand héroïsme ici. Même les plus braves (comme le personnage de James Stewart), qui accomplissent les actions les plus nobles, meurent seuls. Le film, qui se veut une ode à l’esprit d’entreprise des pionniers américains, porte clairement la marque de vieux briscards qui ne se font plus guère d’illusion sur la vie et leur place dans le monde…

Quatre hommes et une prière (Four Men and a prayer) – de John Ford – 1938

Posté : 11 mars, 2013 @ 3:42 dans 1930-1939, CARRADINE John, FORD John, YOUNG Loretta | Pas de commentaires »

Quatre hommes et une prière (Four Men and a prayer) – de John Ford – 1938 dans 1930-1939 quatre-hommes-et-une-priere

Film de commande, a priori loin de l’univers de Ford, d’autant plus que les héros sont des frères d’une grande famille anglaise… un comble pour cet Irlandais de cœur et d’esprit, dont l’œuvre est bien plus marquée par l’amour de la verte Erin.

Quatre frères, donc (dont George Sanders et David Niven), qui enquêtent à travers le monde pour réhabiliter le nom de leur père (C. Aubrey Smith), grand militaire mort dans le déshonneur.

Cette enquête internationale concerne une sombre histoire de trafic d’armes, étonnamment obscure et complexe pour une œuvrette qui, la plupart du temps, reste très légère. Une complexité quasi parodique, comme si Ford cherchait délibérément à nous éloigner de l’intrigue, au profit d’une étude de caractère pleine de charmes, de légèreté et d’ironie, que résume admirablement le personnage de Loretta Young, formidable et belle comme c’est pas permis.

Une petite légèreté, où Ford impose sa marque, notamment lors d’une scène de bagarre mémorable dans un bar, portée par l’Irish et Fordien Barry Fitzgerald.

Mais la plus belle scène, inattendue et marquante, se passe sur une île d’Amérique du Sud, en proie à la Révolution. Un décor de carte postale, que Loretta Young  découvre avec une excitation de touriste. Et soudain, elle prend conscience de la réalité, de sa violence et de sa cruauté, en assistant à un massacre épouvantable… Cette soudaine immersion dans la noirceur et l’horreur est d’autant plus frappante et dure qu’elle fait irruption soudainement, au cœur d’un océan de faux semblants.

Pas une œuvre majeure, non, mais un petit film gonflé et insolent, derrière des apparence un rien inconséquentes.

La Patrouille perdue (The Lost Patrol) – de John Ford – 1934

Posté : 1 février, 2013 @ 11:20 dans 1930-1939, FORD John | Pas de commentaires »

La Patrouille perdue (The Lost Patrol) – de John Ford – 1934 dans 1930-1939 la-patrouille-perdue

C’est l’un des films les plus dépouillés de Ford, tourné à une époque de transition pour lui (entre ses chefs d’œuvre du muet et ses grands classiques à venir à partir de la fin des années 30), où il touchait à tous les genres, tous les styles, tous les tons.

Considéré, à l’époque, comme l’un des meilleurs films de cette année 1934, La Patrouille perdue est à la fois une œuvre atypique dans les films fordiens (pas de femme, même si elles sont souvent évoquées ; une unité de lieu et de temps ; et un dispositif étonnant de huis-clos à ciel ouvert), et un film très représentatif de l’univers de Ford : ce qu’il filme ici, comme souvent dans sa carrière, c’est un groupe d’hommes réunis par les circonstances.

L’action se déroule durant la Grande Guerre, dans les grandes étendues désertiques de la Mésopotamie. Mais le contexte historique n’est qu’un prétexte. Ce qui compte pour Ford et son scénariste Dudley Nichols (c’est leur première collaboration), c’est de s’attacher à ce groupe de soldats perdus dans un univers qui n’est pas le leur, et où la menace (des soldats arabes qu’on ne verra jamais avant les toutes dernières minutes) est omniprésente.

Après avoir erré dans les dunes de sables, ces hommes dirigés par Victor McLaglen se réfugie dans une oasis, sans grand espoir de s’en sortir. Les soldats se font descendre, l’un après l’autre, mais Ford ne s’intéresse pas aux combats, réduits à leur plus simple illustration (un coup de feu, un corps qui tombe). Il reste constamment à hauteur d’homme, soulignant avec infinie délicatesse la peur grandissante de ces hommes confrontés à leur propre mort.

Réalisé avec une belle économie de moyens, dans des décors (l’oasis) simples et beaux, le film est passionnant et d’une grande délicatesse, porté par des comédiens d’une grande justesse. Seul bémol : l’interprétation outrancière, qui supporte mal l’épreuve du temps, de Boris Karloff, bien moins à l’aise en soldat taraudé par sa foi qu’en créature de Frankenstein.

Sur la piste des Mohawks (Drums along the Mohawk) – de John Ford – 1939

Posté : 6 décembre, 2012 @ 7:52 dans 1930-1939, BOND Ward, CARRADINE John, FORD John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Sur la piste des Mohawks (Drums along the Mohawk) – de John Ford – 1939 dans 1930-1939 sur-la-piste-des-mohawks

1939 est souvent considéré comme la plus grande année du cinéma américain. On pourrait ajouter que c’est aussi l’année la plus faste de John Ford. En quelques mois (et alors qu’il tourne Les Raisins de la Colère) sortent sur les écrans La Chevauchée fantastique, Vers sa destinée, et ce Sur la piste des Mohawks. Une liste tout simplement hallucinante !

Dans cette série de chefs d’œuvre, ce dernier film fait presque figure de curiosité, tant il est méconnu. Drums along the Mohawk, premier film en couleurs de Ford, est pourtant tout aussi réussi que les autres. En tant que formaliste, Ford est au sommet. Il n’a pas encore adopté le dépouillement relatif qui marquera ses films d’après-guerre, et chaque plan de ce film impressionne par la beauté pictural de ces cadres, et par l’utilisation des couleurs.

Le choix d’utiliser la couleur, après plus de vingt ans de cinéma, ne doit visiblement rien au hasard. La couleur est ici totalement au service du sujet : la place des pionniers américains vivant à la « frontière » en 1776, lors de l’indépendance des Etats-Unis. Les couleurs, vives et chaudes, rehaussent l’importance de cette nature à la fois sublime et hostile, d’où les Indiens (à la solde des Anglais) surgissent comme par magie, menaces quotidiennes sur la vie de ces pionniers.

Le vert des forêts, le jaune des moissons, le rouge des couchers de soleil… Les couleurs vives sont omniprésentes et envoûtantes, et semblent justifier l’amour que les pionniers ont pour ces terres isolées et éloignées des grands événements historiques qui se déroulent simultanément à l’action du film : la guerre pour l’indépendance, dont on ne voit que des menaces lointaines, l’arrivée de messagers porteurs de nouvelles inquiétantes, ou le retour d’hommes meurtris.

Ford s’intéresse à une poignée d’hommes et de femmes qui ont décidé de s’installer loin de la civilisation, dans un pays qui reste à construire, où tout reste à faire. La ferme qu’achètent Henry Fonda et Claudette Colbert symbolise parfaitement ces contrées encore sauvages : la terre est défricher, la maison est à construire ; et même là, rien n’est jamais acquis pour de bon… A travers le destin de ce couple qui quitte la civilisation pour s’installer loin de tout, dans un pays où les « voisins » les plus proches se trouvent à des heures de cheval, Ford raconte l’histoire de tous ces pionniers qui ont accompagné la naissance des Etats-Unis.

Sur la piste des Mohawks est sans doute le meilleur film consacré à cette période, notamment parce qu’il reste constamment à hauteur d’hommes, ne montrant de l’histoire en marche que ce que les pionniers en voyaient.

C’est aussi un petit chef d’œuvre de mise en scène, qui utilise constamment brillamment les décors naturels. L’apogée du film : une course poursuite à pied ébouriffante, dans le soleil levant et à travers l’immensité de la nature, où Fonda court chercher de l’aide, les Indiens attaquant le fort dans lequel se sont réfugiés les pionniers. Un moment de cinéma qui ne ressemble à aucun autre, absolument sublime.

• Le film est disponible dans un coffret formidable réunissant trois chef d’œuvre de Ford de la fin des années 30, avec Vers sa destinée et Je n’ai pas tué Lincoln. Trois grands films visuellement splendides ayant pour toile de fond la naissance des Etats-Unis.

Le Convoi des braves (Wagon Master) – de John Ford – 1950

Posté : 27 août, 2012 @ 7:30 dans 1950-1959, BOND Ward, FORD John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Convoi des braves

De tous ses films (et ils sont nombreux, près de 200 recensés entre 1917 et 1966), John Ford disait que Le Convoi des Braves était son préféré. Il faut dire que ce western dépouillé et d’une grande simplicité est peut-être celui qui résume le mieux le cinéma fordien. Comme La Mort aux trousses pour Hitchcock, Le Convoi des braves semble être le film vers lequel le cinéma de Ford tendait depuis des années, voire des décennies.

En terrain familier, dans des décors qu’il connaît par cœur (Monument Valley), avec les acteurs de sa « troupe » (Ward Bond, Harry Carey Jr, Ben Johnson, Joanne Dru, Jane Darnell, son frère Francis…), Ford se permet d’attendre le mitan du film pour introduire un élément réellement dramatique : l’irruption d’une famille de redoutables hors-la-loi dans la caravane de mormons qui, jusqu’à présent, se contentait de traverser les grandes étendues de l’Ouest sauvage.

Loin de La Piste des Géants, qui racontait également la lente avancée d’une caravane vers l’Ouest (c’était vingt ans plus tôt, et réalisé par Walsh), Ford ne filme par une grande épopée spectaculaire, mais préfère suivre au plus près cette communauté qui ressemble à tant d’autres rencontrées au fil de ses films. C’est bien ce qu’il y a de plus beau dans ce western en noir et blanc aussi simple que magnifique : les « gueules », qu’elles soient crispées, agressives ou souriantes, sont filmées avec un égal amour de ses acteurs et de ses personnages. Et Ford sait filmer ces communautés hautes en couleur : l’alchimie de cette petite troupe est parfaite.

Les deux jeunes cow-boys qui acceptent de guider la caravane, sont également parfaitement dessinés. Ford donne à deux de ses seconds rôles habituels l’occasion de tenir des premiers rôles : Ben Johnson et Harry Carey Jr sont parfaits. Pourtant, c’est le charisme du génial Ward Bond qui emporte tout. Truculent, grande gueule et grand cœur, l’éternel second rôle de Ford trouve ici l’un de ses rôles les plus mémorables.

Le succès du film débouchera d’ailleurs à la création d’une série télévisée au long cours, Wagon Train, dont Ward Bond tiendra le rôle principal jusqu’à sa mort, en 1960. John Ford en réalisera même un épisode (l’excellent Colter Craven Story), qui sera son ultime collaboration avec son acteur fétiche.

Upstream (id.) – de John Ford – 1927

Posté : 6 août, 2012 @ 5:34 dans 1920-1929, FILMS MUETS, FORD John | Pas de commentaires »

Emile Chautard, Earle Fox, and Nancy Nash in a scene from UPSTREAM, 1927.

Ce n’est pas un Ford majeur, loin de là. Mais l’événement est quand même de taille. Jugez plutôt : depuis plus de 80 ans, personne n’avait vu cette comédie muette, qui faisait partie de la longue liste des films du cinéaste considérés comme irrémédiablement perdus. Jusqu’à ce qu’une copie soit miraculeusement retrouvée parmi un lot de dizaines de vieilles bobines nitrates non identifiées qui croupissaient depuis des décennies dans les archives de la cinémathèque néo-zélandaise.

C’était en 2009, et on a enfin pu découvrir ce trésor retrouvé dans l’indispensable Cinéma de Minuit de Patrick Brion. Pour mémoire, c’est lui déjà qui avait été le premier à diffuser Straight Shooting, puis Bucking Broadway, deux autres muets disparus et retrouvés de John Ford.

Alors forcément, découvrir ce Upstream, dont on pensait ne jamais voir autre chose que quelques photogrammes, est l’un de ces « graals » qui font le bonheur de tout bon cinéphile. Et que ce film ne soit pas vraiment à la hauteur de l’attente ne change pas grand-chose.

Totalement en marge dans la filmographie fordienne, ce triangle amoureux situé dans les coulisses d’un music-hall ne se prend absolument pas au sérieux. Pas assez, peut-être : il manque un enjeu dramatique fort à cette chronique décalée, souvent drôle mais parfois poussive.

Un triangle amoureux, donc, dans le décor presque unique d’une pension d’artiste : un lanceur de couteaux sans grand relief, sa jolie assistante, et un comédien raté, dernier d’une prestigieuse lignée de comédiens. Le lanceur est raide dingue de la belle, qui n’a d’yeux que pour le bellâtre. Mais ce dernier n’a que deux amours : sa petite personne et sa gloire vacillante.

Ford s’amuse visiblement avec des personnages hauts en couleurs, qu’il filme avec une tendresse assumée. C’est d’ailleurs dans cette petite communauté constituée dans la pension que l’on retrouve l’unique véritable motif fordien : le cinéaste a toujours aimé ces communautés improvisées, faites d’hommes (et parfois de femmes) de tous horizons, qu’il n’a cessé de réinventer au fil de sa filmographie, mais aussi dans sa propre « troupe » de techniciens et d’acteurs.

Le résultat est une comédie attachante à défaut d’être inoubliable. Mais la déception vient aussi du fait qu’on nous avait annoncé Upstream comme étant l’un des rares films muets de Ford marqués par l’expressionnisme allemand, après sa rencontre avec Murnau. Pourtant, point d’expressionnisme à l’horizon dans cette œuvrette plutôt anodine visuellement. L’influence de Murnau sur Ford sera par contre nettement perceptible dans Four Sons, magnifique film que tournera Ford l’année suivante.

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