Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour la catégorie 'ALLEN Woody'

Stardust Memories (id.) – de Woody Allen – 1980

Posté : 28 novembre, 2013 @ 1:17 dans 1980-1989, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Stardust Memories

En une seule scène, muette, Woody Allen pose les bases de ce film étonnant et déroutant. Il se met en scène dans un wagon peuplé d’hommes et de femmes aux gueules improbables, êtres lugubres et angoissants qui l’oppressent tandis qu’il observe par la fenêtre les occupants d’un autre train, beaux et joyeux, mais inaccessibles (parmi lesquels une blonde apparition : Sharon Stone dans l’un de ses premiers rôles).

Avec cette première séquence, Woody Allen surprend parce que pour la première fois, il se met en scène sur un ton grave. Jusqu’à présent, même si Annie Hall et Manhattan avaient révélé la profondeur et la brillance du type, il y avait toujours en lui cet humour qui habillait tout. Ici aussi, comme dans ses deux précédents chef d’œuvre, Allen joue avec son propre passé, sa propre expérience : celle d’un artiste comique qui aspire à autre chose.

Mais cette fois, c’est un homme oppressé par sa propre vie qu’il interprète, et qu’il présente avec ces premières minutes fascinantes, sorte de cauchemar projeté sur un grand écran. Un cinéaste qui amorce un tournant psychologique pas toujours compris, encore marqué par son passé de pur comique, et entouré de fans hystériques, d’admirateurs étouffants, de cinéphiles insupportables.

Un homme qui aspire à autre chose, mais qui ne sait pas quel chemin prendre. Comme dans Manhattan, les interrogations de Sandy le cinéaste sont cristallisées autour de plusieurs femmes qu’il croit aimer : cette actrice avec qui il a eu une liaison passionnée et dont l’image le hante (Charlotte Rampling), cette mère de famille simple et posée (Marie-Christine Barrault) ou cette jeune admiratrice belle mais dominée par ses démons.

Mais cette fois, le ton est radicalement différent. Woody Allen renoue avec le noir et blanc, mais avec une image beaucoup plus âpre et granuleuse. L’humour, même s’il n’est pas totalement absent comme dans Intérieurs, n’est plus qu’une façade à laquelle même le personnage d’Allen semble ne plus croire.

C’est de l’introspection, et une réflexion cynique et grave sur la création et le monde du cinéma. Des thèmes loin d’être uniques dans la filmographie de Woody Allen.

Manhattan (id.) – de Woody Allen – 1979

Posté : 27 novembre, 2013 @ 8:40 dans 1970-1979, ALLEN Woody | 1 commentaire »

Manhattan

Isaac, 42 ans, a deux ex-femmes, un gamin élevé par un couple de femmes, une maîtresse de 17 ans, et un meilleur ami à la femme parfaite, qui entretient une liaison avec une jeune femme dont Isaac a une première impression catastrophique… Isaac est surtout un New-Yorkais totalement incapable de vivre ailleurs que dans cette ville qu’il aime, et pour qui la seule idée d’ailleurs représente une rupture inimaginable.

Deux ans après Annie Hall, Woody Allen retrouve un esprit similaire (mais dans un noir et blanc amoureux), mélange d’humour et d’introspection parsemé de clins d’oeils et de références à ses modèles que sont Ingmar Bergman, Groucho Marx ou W.C. Fields. Manhattan est souvent considéré comme le sommet du cinéma allenien. C’est en tout cas un chef d’œuvre absolu.

En trois films seulement, Woody Allen est devenu un immense cinéaste. L’ancien gagman qui avait fait ses armes sur grand écran avec des comédies marquées par un humour à sketchs souvent irrésistible, mais limité sur le plan cinématographique, s’est mué en un réalisateur délicat et profond, sans rien perdre de sa personnalité et de son humour.

Woody Allen semble se livrer comme jamais dans ce film qui reprend pourtant les mêmes recettes que celles d’Annie Hall. Mais cette fois, l’humour est un peu en retrait au profit d’une authenticité et d’une émotion aussi discrète que profonde. On rit, souvent : le dialoguiste Woody Allen est toujours aussi inspiré (notamment lorsqu’il s’inquiète parce que ses couples « ne durent jamais plus longtemps que celui d’Adolf Hitler et Eva Braun »). Son personnage ne change pas. Mais cette fois, le sujet est moins sa manière de tourner en dérision ses névroses et ses angoisses, que sa fascination et son amour pour cette ville gigantesque qu’il filme comme un décor familier : le théâtre de sa vie.

Il y a bien sûr ce plan, le plus célèbre de tout son cinéma, montrant Woody Allen et Diane Keaton sur un banc sous le pont de l’East River Mais ce n’est qu’une vision parmi d’autres, peut-être la plus stéréotypée (même si magnifique). Central Park, les musées, les bars, le vin, les rues trop fréquentées, les appartements trop bruyants, les rencontres au squash… Manhattan est un chant d’amour à New York Chant, peut-être le plus bel hommage d’un cinéaste à « sa » ville. New York a pourtant été filmée plus souvent qu’aucune autre. Mais jamais comme ici, jamais avec le même regard, avec la même ferveur, la même intimité. Une ville magique ? Un film magique et indispensable, en tout cas.

Intérieurs (Interiors) – de Woody Allen – 1978

Posté : 27 novembre, 2013 @ 8:31 dans 1970-1979, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Intérieurs

Dans Annie Hall, son film précédent, Woody Allen assumait enfin sa vraie personnalité de cinéaste, et posait les bases de toute son œuvre à venir. Comme si cette révélation lui donnait une confiance nouvelle, Allen délaisse pour la première fois la comédie, pour un homme appuyé à l’un de ses maîtres, le grand Ingmar Bergman. Le résultat est surprenant : pas le moindre humour dans ce film parfois pesant, où les lieux (appartements de ville ou villa en bord de mer) semblent peser sur les personnages par tout ce qu’ils représentent de souvenirs.

Pour la première fois aussi, Woody Allen l’acteur s’éclipse, au profit de comédiens moins marqués par la comédie. Mais la marque du cinéaste est bien là : son goût pour l’introspection, et pour ces histoires de couples forcément éphémères.

Mais cette fois, c’est sur le mode sérieux, avec un rythme volontairement languide, qu’Allen aborde ces thèmes. L’histoire est bergmanienne en diable : trois jeunes femmes, trois sœurs qui tentent de trouver leur place (dans la culture, pour toutes : la comédie pour l’une, la poésie pour la deuxième, la photographie pour la troisième) et d’assumer leur propre vie, alors que leur mère est en pleine dépression depuis que leur père l’a quittée.

Le thème est bergmanien, mais il y a dans le personnage de la mère, interprétée par une vaporeuse Geraldine Page, quelque chose de la future Cate Blanchett de Blue Jasmine : même incapacité, pathétique et déchirante, d’affronter la solitude et la séparation.

C’est aussi un film sur le deuil de l’enfance. Le mariage du père (E.G. Marshall) avec sa nouvelle compagne, ressemble à l’enterrement des derniers vestiges de l’enfance et de son innocence. Avec une image presque caricaturale : celle où la belle-mère insuffle littéralement la vie à l’une des filles, tandis que la mère disparaît. Pas hyper délicat, mais très émouvant.

Qu’importe l’imagerie, à la limite de la parodie bergmanienne (curieusement, les vraies parodies du cinéma de Bergman reprendront souvent les cadres imaginés par Woody Allen) : avec ce film étonnamment austère, mais d’où émane une émotion déchirante

Annie Hall (id.) – de Woody Allen – 1977

Posté : 26 novembre, 2013 @ 5:31 dans 1970-1979, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Annie Hall

Annie Hall est un film fascinant. Parce que c’est un chef d’œuvre, l’un des films majeurs de son auteur. Et aussi parce qu’on y assiste à la métamorphose d’un artiste, qui se met en scène dans cette position d’un artiste en pleine mutation, qui rompt avec son passé de gagman pour s’assumer dans toute sa complexité. Woody Allen a évidemment mis beaucoup de lui dans ce personnage d’Alvy Singer, qui lui ressemble comme un frère, et qui fixe à jamais le personnage allenien.

Après ses précédents films de jeunesse, prolongement de son expérience de comique pur, Allen semble découvrir toutes les possibilités du cinéma en tant que langage. Non seulement le propos est plus complexe. Mais pour la première fois, il s’y impose comme un authentique cinéaste

Plus inventif, mieux construit, plus écrit, plus intellectuel, plus exigeant, Annie Hall est aussi beaucoup plus drôle que ses précédents films (« Ces types de la Résistance étaient vraiment courageux. Avoir à supporter les chansons de Maurice Chevalier…»). Beaucoup plus tendre, aussi : le rire et l’émotion ne sont jamais loin, comme dans cette magnifique séquence des homards, symbole éternel de la complicité qui unie Woody et son égérie d’alors, Diane Keaton.

Il invente une sorte d’autofiction d’une intelligence et d’une audace folle. Il se permet toutes les audaces pour raconter cette histoire d’un couple dont on sait d’emblée qu’il est séparé, plongeant dans son enfance, revivant les moments les plus forts de cette histoire d’amour : le narrateur devient le témoin de scènes du passé, qu’il commente avec une douce ironie, dialoguant même avec son double d’hier.

Il entremêle dialogues et pensées, s’adresse au public face caméra, utilise le dessin animé (comme un certain Tarantino trente ans après lui), et fait intervenir Marshall MacLuhan en personne pour remettre à sa place l’un de ces m’as-tu-vu qui parlent bien fort pour être sûrs d’être entendus…

La métamorphose est spectaculaire. En un film, Woody Allen s’impose comme un réalisateur audacieux, drôle et intelligent, comme LE cinéaste de New York, et comme un génie qui joue d’une manière irrésistible avec ses névroses et ses modèles. Son premier chef d’œuvre est un film merveilleux.

Guerre et amour (Love and Death) – de Woody Allen – 1975

Posté : 19 novembre, 2013 @ 2:33 dans 1970-1979, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Guerre et amour

Une révolution dans une république bananière (Bananas), un film de science-fiction (Woody et les robots), et maintenant un film de guerre napoléonienne. L’esprit de Woody Allen est déjà là, plus ou moins perceptibles, dans ses films de jeunesse, mais toujours sous couvert du film de genre, et de l’effet comique immédiat et pas toujours très fin.

Mais dans ces films de jeunesse, ce Love and Death constitue un pas en avant gigantesque pour Allen. Parce qu’il aborde concrètement les principales obsessions d’Allen (la psychanalyse, le sexe, Dieu). Et surtout parce que c’est, alors, son film le plus drôle, et de loin (on le sent dès les premières minutes avec cette réplique d’anthologie : « Je vais être exécuté demain à 6h. Je devais partir à 5h, mais j’ai un bon avocat. » Mais aussi et surtout parce que c’est le mieux construit et le plus dynamique de tous ses films d’avant Annie Hall.

Même s’il se cache encore un peu derrière les apparats du film en costumes, avec de belles reconstitutions, des scènes de bataille pleine de figurants et d’explosions, et une (formidable) musique tonitruante, Woody Allen semble enfin se faire vraiment confiance, consacrant de longues scènes à son personnage et à sa relation avec Diane Keaton, avec un sens du rythme et des dialogues réellement formidables. « Si, par miracle, j’en réchappe demain, accepterais-tu de m’épouser ? – Quelles sont tes chances ? »

Love and Death est, de loin, le plus drôle de ses films de jeunesse. Visuellement, Allen s’inscrit une nouvelle fois comme un digne descendant de Chaplin (les séquences d’entraînement militaire sont irrésistible). Et puis il y a ces dialogues, souvent à mourir de rire (il y a bien longtemps que je n’avais pas ri aussi franchement et aussi souvent), qui rythment le film. « Si je pouvais voir un miracle, un seul miracle. Un buisson ardent, les mers s’ouvrirent en deux, ou… Ou mon oncle Sasha payer l’addition. » Et cette manière unique d’enchaîner, sur le même ton, les citations les plus érudites et les dialogues les plus triviaux : « Vous avez bafoué l’honneur de la comtesse – Pourquoi ? Je l’ai laissée jouir en premier. »

Très, très drôle, le film est le trait d’union parfait entre les films de jeunesse et la grande période d’Allen, qui s’ouvre dès son film suivant, Annie Hall.

Woody et les robots (Sleeper) – de Woody Allen – 1973

Posté : 17 novembre, 2013 @ 4:48 dans 1970-1979, ALLEN Woody, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Woody et les robots (Sleeper) – de Woody Allen – 1973 dans 1970-1979 woody-et-les-robots

Après la douteuse récréation de Tout ce que vous avez toujours voulu savoir…, Woody Allen signe une sorte de remake futuriste de Bananas, où son personnage, cette fois cryogénisé et réveillé 200 ans plus tard, est impliqué malgré lui dans une révolution qui n’a de sens pour lui que pour séduire LA femme.

La femme en l’occurrence, c’est Diane Keaton, pour son premier rôle dans un film d’Allen. L’actrice, qui sortait du premier Parrain, se révèle d’emblée comme le parfait pendant féminin du personnage de Woody Allen. La complicité entre ces deux-là est parfaite, et c’est de cette complicité que viennent les meilleurs moments du film.

Le passé de gagman de l’acteur-réalisateur est encore très palpable : Sleeper tire encore énormément vers le pur burlesque, et son personnage a encore quelque chose de très chaplinesque. Mais il y a dans ce film plein d’excès une sorte de parenthèse qui annonce les grandes heures à venir du cinéma allenien : un simple dialogue sur les marches d’un escalier.

Comme si la clarinette qu’il avait à la main dans cette scène lui permettait soudain de révéler sa vraie nature, face à une Diane Keaton très complice. C’est dans ce moment de magie, sensible et délicat, qu’arrive le meilleur dialogue du film, celui qui évoque le plus le génie d’Allen : « C’est dur d’imaginer que tu n’as pas fait l’amour depuis 200 ans – 204 si tu comptes mon mariage. »

Contrairement au film précédent, Allen apporte une attention inédite à son scénario, parfaitement construit et émaillé de dialogues brillants : « Mon cerveau ! Mais c’est mon deuxième organe préféré ! ». Et lorsqu’il comprend que la banale opération pour laquelle il avait été hospitalisé en 1973 a mal tourné : « Je savais que c’était trop beau : je m’étais garé à côté de l’hôpital. »

Woody Allen, cependant, est encore plus un homme de mots qu’un homme d’images. Gagman efficace, scénariste brillant, interprète formidable, il semble n’accorder de réel intérêt à la mise en scène que lors de brefs passages, en particulier une courte scène en ombres chinoises entre Diane Keaton et lui. Mais il faudra attendre les films suivants pour s’en mettre un peu plus sous la dent…

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe [sans jamais oser le demander] (Everything you always wanted to know about sex [but were afraid to ask]) – de Woody Allen – 1972

Posté : 17 novembre, 2013 @ 11:22 dans 1970-1979, ALLEN Woody, CARRADINE John | Pas de commentaires »

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe [sans jamais oser le demander] (Everything you always wanted to know about sex [but were afraid to ask]) – de Woody Allen – 1972 dans 1970-1979 tout-ce-que-vous-avez-toujours-voulu-savoir-sur-le-sexe

Plus encore que Bananas, son précédent film (dans lequel le génie allenien affleurait déjà à travers quelques aphorismes), Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe porte l’empreinte du Woody Allen première époque : le gagman et l’homme de stand-up.

Le film est une succession de six sketchs inspiré à Allen par le livre à succès du docteur David Reuben, dont il se moque gentiment. Le seul fil conducteur : le sexe, sous tous ses aspects. Et pas forcément avec l’approche la plus fine. Woody lui-même semble plus désireux de peaufiner un personnage vaguement inspiré de Chaplin et de Groucho Marx, que d’écrire des dialogues qui font mouche. Pas grand-chose à se mettre sous la dent, de ce côté-là.

Pas non plus la peine de chercher une quelconque émotion : Allen joue clairement la carte du grand n’importe quoi. Le résultat est pour le moins inégal, se révélant parfois pénible, comme dans cette parodie de film d’horreur où John Carradine est une sorte de Frankenstein du sexe, et où Woody doit affronter un sein gigantesque qui menace la ville comme l’araignée géante de Tarantula

Gênante aussi, cette parodie de jeu télévisé où de vieux messieurs dévoilent leurs perversions sexuelles face à la caméra. Où cet autre sketch racontant l’histoire d’amour entre un médecin bien marié et un mouton. Au moins Gene Wilder est-il formidable dans ce rôle impossible.

Le premier sketch, finalement, est le plus réussi : Allen, en bouffon du roi, tente de forcer la ceinture de chasteté de la reine. Du pur burlesque, plutôt efficace. C’est là aussi que l’on trouve ce qui ressemble le plus à l’aspiration d’un autre cinéma : une citation inattendue de shakespeare par un Woodu Allen ouvertement clownesque.

Ailleurs, on le retrouve en amant italien cherchant désespérément à faire jouir sa femme (plutôt pas mal), et surtout en spermatozoïde se préparant pour l’éjaculation. A défaut d’être particulièrement drôle ici, Woody Allen s’amuse…

Bananas (id.) – de Woody Allen – 1971

Posté : 17 novembre, 2013 @ 11:09 dans 1970-1979, ALLEN Woody, STALLONE Sylvester | Pas de commentaires »

Bananas (id.) – de Woody Allen - 1971 dans 1970-1979 bananas

Avec cette deuxième réalisation (la troisième, si on tient compte du bidouillage de Lily la Tigresse), Woody Allen n’est pas encore un grand cinéaste, loin s’en faut. A vrai dire, il n’est tout simplement pas un authentique cinéaste : son film est une extension sur grand écran de ce qu’il faisait en tant que gagman et showman pour la télévision. Il y a encore beaucoup de gags faciles qui émaillent ce Bananas filmé un peu n’importe comment, et ce n’est assurément pas ce qu’il y a de plus réussi ici.

Mais entre les effets comiques un peu lourdingues, se dessinent le Woody Allen en devenir. Celui qui se confie à sa psy : « Je me rappelle qu’enfant j’avais volé un livre porno écrit en braille. Je caressais les passages cochons. » Celui qui utilise les mots comme des  séducteurs plus virils leurs bras : voulant séduire une hippie avide de grandes causes, il lance un très allenien « j’adore la lèpre ».

Il faut accepter de se laisser embarquer dans cette improbable histoire d’un Juif new-yorkais qui devient par hasard un maillon important d’une révolution dans un petit pays d’Amérique du Sud qui ressemble étrangement à Cuba. Pas pour les images d’un Allen encore très approximatifs en tant que formaliste. Pas vraiment non plus pour le cinéaste, qui flirte du côté du Lelouch version L’Aventure c’est l’aventure. Mais pour le personnage de Woody Allen, déjà là dans ses grandes lignes, et à travers quelques répliques lapidaires.

Le cinéaste se cherche, c’est indéniable. Dès sa première apparition, testant une étrange machine destinée à muscler les travailleurs sur leurs postes de travail, Allen reconnaît en Chaplin (celui des Temps modernes) l’un de ses modèles. Son personnage est d’ailleurs encore marqué par l’influence du burlesque, comme dans cette petite séquence du métro, muette, où le fluet Woody est confronté à deux mauvais garçons (dont l’un est interprété par le jeune et inconnu Sylvester Stallone). Mais c’est quand il crée son propre personnage, plus inspiré par Groucho Marx ou W.C. Fields, quand il fait du Woody Allen en somme, qu’il est le plus drôle, et le plus moderne.

Blue Jasmine (id.) – de Woody Allen – 2013

Posté : 20 octobre, 2013 @ 10:12 dans 2010-2019, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Blue Jasmine (id.) - de Woody Allen - 2013 dans 2010-2019 blue-jasmine

Woody Allen se bonifierait-il avec l’âge ? Son dernier opus, en tout cas, est une merveille d’une justesse et d’une force rares. Une œuvre élégante aussi, où les riches et les pauvres sont filmés avec le même mélange d’affection et d’hyper-conscience. Avec ce portrait de l’ex-femme d’un richissime trader véreux, passée de la fortune à la misère, du luxe mondain de Central Park à la promiscuité d’un quartier populaire de San Francisco, Allen aurait pu choisir de dénoncer les dérives du capitalisme, magnifiant les victimes et faisant des cyniques boursicoteurs des monstres insensibles.

Blue Jasmine est beaucoup plus délicat que ça, même s’il n’évite pas ces sujets, qui donnent le fond du film (notamment avec le beau personnage de l’ancien mari de Ginger, la sœur de Jasmine). On a déjà vu des films s’intéresser à des personnages à la Madoff (le récent et très bon Arbitrage, avec Richard Gere), mais cette fois, c’est à son entourage qu’il s’intéresse. De ce « Madoff », interprété par un Alec Baldwin rajeuni et ressuscité (depuis quand ne l’a-t-on pas vu aussi bien au cinéma ?), on ne voit que la superbe, ou les prémisses du doute, pas la déchéance.

C’est celle de Cate Blanchett, sa femme, qui intéresse Woody Allen. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette déchéance est profonde. C’est aussi celle d’un système… qui n’en profite pas pour se remettre en cause et renaître. La force surprenante du film tient justement au fait qu’Allen évite soigneusement les revirement attendus, l’hypothétique résurrection morale ou matérielle.

Il ne condamne pas, jamais. Mais il n’est ni dupe, ni naïf : Cate Blanchett est touchante parce qu’elle est brisée, mais elle est aussi détestable, totalement égoïste et égocentrique. Ce fils qui a tout perdu, y compris un père qui était son modèle, elle ne le retrouve que pour lui reprocher de ne pas être là quand ELLE avait besoin de lui. Cette sœur qu’elle snobait quand elle était sur le toit du monde, elle continue à vouloir la façonner à son image…

Les personnages, d’ailleurs, sont absolument formidables, très « alleniens » bien sûr, mais d’une grande justesse : en particulier ce fiancé brut de décoffrage, physique de brute mais sensibilité à fleur de peau, qui éclate en sanglots dans le magasin où travaille son amie… Ou la sœur bien sûr, personnage incroyablement attachant joué par Sally Hawkins.

Finalement, le seul stéréotype dans ce film, c’est le « prince charmant » interprété par Peter Sarsgaard, dont on finit par se demander s’il est réel ou s’il n’est qu’un fantasme de Jasmine, son ultime chance de retrouver sa place dans cet univers qu’elle sait hypocrite et fait de faux-semblant, mais auquel elle appartient corps-et-âmes.

Cate Blanchett est exceptionnelle, d’une grande intensité, donnant corps aux différentes étapes de cette déchéance abyssale dans des allers et retours incessants, et intelligents, entre présent et passé. Deux époques qui se répondent ironiquement, ou tragiquement, grâce à la formidable construction du film.

Le cinéma de Woody Allen m’avait fait fuir durablement à la fin des années 90. Blue Jasmine est une splendide invitation à renouer avec ses films…

12345
 

Kiefer Sutherland Filmographie |
LE PIANO un film de Lévon ... |
Twilight, The vampire diari... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | CABINE OF THE DEAD
| film streaming
| inderalfr