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Archive pour la catégorie 'ALLEN Woody'

Alice (id.) – de Woody Allen – 1990

Posté : 14 février, 2014 @ 4:23 dans 1990-1999, ALLEN Woody, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Alice

Après le magnifique Crimes et délits, Woody Allen confirme qu’il est dans une période créatrice exceptionnelle. Il offre à Mia Farrow, sa muse depuis dix ans, l’un de ses plus beaux rôles, l’antépénultième sous sa direction. Une femme qui a abandonné ses rêves de jeunesse pour épouser un homme riche et séduisant qui la garde comme on garde un trophée, la protégeant et la coupant de tout.

Alice est à la fois la sœur jumelle et le double inversé de l’héroïne de Blue Jasmine. L’épouse d’un homme riche qui mène une vie oisive et vaine. Un personnage purement allenien : son œuvre est peuplée de cette classe supérieure aux apparences impeccables, mais aux affres insupportables. Mais celle-ci aspire à autre chose, quelque chose de plus profond, de plus authentique.

Comme souvent chez Allen, son film est basé sur une idée forte et originale : la rencontre d’Alice avec un médecin chinois qui lui prescrit des herbes (« très légères, très naturelles ») aux effets pour le moins étranges : des herbes qui transforment cette grande timide en une allumeuse sans limite ; des herbes qui la rendent invisibles et lui permettent d’écouter ce que ses proches disent d’elles, fantasme éternel et dangereux ; des herbes qui poussent ceux qui les boivent à tomber amoureux d’elle ; ou encore des herbes qui font venir le fantôme de celui qu’elle aima avant de se marier.

Dans le rôle de l’amant disparu, apparition fantômatique, Alec Baldwin est particulièrement touchant. En quelques scènes seulement, il nous offre l’image de ce qu’Alice cache derrière ses apparences d’épouse discrète et dévouée : une passionnée refoulée, qui se ment à elle-même depuis vingt ans.

Alice est un film profondément original. Il aborde pourtant des thèmes que l’on retrouve dans la plupart des films de Woody Allen : la difficulté de former un couple, ou de vivre ensemble, et le besoin d’être en accord avec ce que l’on est au fond de soi.

Personnage magnifique parce qu’on la voit se révéler peu à peu à elle-même, Alice est en quelque sorte la synthèse de tout ce que Mia Farrow a joué jusqu’à présent sous la direction de Woody Allen. Avec ce film, le cinéaste ne nous offre pas seulement une belle leçon de cinéma. Il nous fait cadeau d’une magnifique leçon de vie.

Crimes et délits (Crimes and Misdemeanors) – de Woody Allen – 1989

Posté : 10 février, 2014 @ 11:20 dans * Thrillers US (1980-…), 1980-1989, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Crimes et délits

« Où j’ai grandi, à Brooklyn, personne ne se suicidait. On était trop malheureux. »

Woody Allen confirme son goût pour Hitchcock dans ce film qui rend un hommage évident au maître du suspense, à travers l’histoire d’un homme à qui tout réussit qui décide de faire éliminer son encombrante maîtresse. L’histoire, le milieu dans lequel elle se déroule, et le ton du film, évoquent notamment Le crime était presque parfait.
Le cinéaste, d’ailleurs, cite ses influences, comme toujours : en donnant le rôle principal à Martin Landau, acteur marqué à jamais par sa participation à La Mort aux trousses. Et puis lorsqu’on découvre pour la première fois le personnage joué par Woody lui-même, c’est dans une salle de cinéma qui projette Mr. and Mrs. Smith, comédie d’Hitchcock consacrée au couple.

Une manière cinéphile et brillante de résumer en quelques séquences seulement la richesse de ce film : film à suspense sur les errances qui poussent au crime et sur la culpabilité, mais aussi réflexion sur le couple, les rêves et le temps qui passe. Du pur Woody Allen dans le texte, qui nous offre quelques dialogues formidables (« C’est toi qui as arrêté de vouloir faire l’amour. Ça fera un an le 20 avril. Je m’en souviens, car c’est l’anniversaire d’Hitler. »), mais qui se livre cette fois sur un mode doux-amer.

Crimes et délits est une nouvelle merveille, marquée par cette conscience du temps qui passe. Woody Allen a passé la cinquantaine, et sa maturité prend des allures inattendues : sa vision de la vie, sa passion, sa façon d’aborder chaque chose sans calcul se heurtent à la réalité de la vie, aux mesquineries et aux faux-semblants qui l’entourent. De la même manière que la vie parfaitement protégée du riche professeur interprété par Martin Landau se heurte de manière brutale à la réalité incarnée par son frère, raté aux fréquentations douteuses.

Et finalement, c’est à Chaplin que Woody ressemble : au vagabond du Cirque qui offre son cœur sans espérer rien en retour, et qui se retrouve seul lorsque la belle écuyère part avec le beau dompteur. Comme lui reste seul lorsque sa belle Mia Farrow part avec ce bellâtre fat et un peu ridicule, joué par Alan Alda. Et comme Charlot, Woody refuse de se laisser engloutir par la tristesse, qu’il combat avec sa meilleure arme : son humour. C’est dans ce film qu’il sort l’une de ses répliques les plus célèbres : « La dernière femme que j’ai pénétrée, c’était la statue de la liberté. »

Allen a trouvé un équilibre assez miraculeux entre ses deux histoires parallèles aux sujets pourtant radicalement différents (un crime et ses conséquences, et une étude de mœurs drôle et touchante), qui aboutissent à une rencontre tardive entre les deux personnages centraux, sorte de parenthèse en dehors du temps et de l’effervescence de ce qui les entoure. Un moment rare de cinéma.

Une autre femme (Another woman) – de Woody Allen – 1988

Posté : 5 février, 2014 @ 2:26 dans 1980-1989, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Une autre femme

Encore une merveille signée Woody Allen, et une étape importante dans sa filmographie. Pour la première fois, il s’éloigne de l’influence de Bergman pour une non-comédie. Dans ce beau portrait d’une quinquagénaire en pleine crise existentielle, Allen met beaucoup de ses propres démons, que l’on retrouve de films en films : la difficulté de trouver sa place dans la société, l’angoisse de passer à côté de sa vie, la complexe et fragile alchimie du couple…

Le résultat est absolument brillant. Le film est pourtant basé sur une idée toute simple : l’héroïne, Gena Rowlands, est un écrivain qui s’est installé dans un appartement pour écrire son livre. Par un curieux jeu d’acoustique, les canalisations de l’immeuble lui permettent d’entendre distinctement toutes les conversations d’un psychologue avec ses patients. Les témoignages de l’une d’elles (Mia Farrow) la plongent dans une introspection inattendue, qui l’amène à remettre en cause tout ce qui lui semblait acquis dans la vie.

Réalité, souvenirs, rêves, fantasmes se mélangent dans ce portrait intime d’une délicatesse infinie. Gena Rowlands est sublime dans le rôle de cette femme qui réalise peu à peu que son incapacité à se laisser aller à ses sentiments l’ont poussée à se mentir à elle-même, travestissant ses propres souvenirs.

C’est souvent le même sujet que l’on retrouve, de Annie Hall à Blue Jasmine. Pourtant, chaque œuvre est une pépite unique. Il y a dans Another Woman un ton qui ne ressemble pas aux précédents films d’Allen. Une petite musique nostalgique et mélancolique, mais pleine d’allant. Des couleurs automnales et chaudes qui collent parfaitement à ce personnage, qui se découvre au fur et à mesure qu’elle prend des claques…

September (id.) – de Woody Allen – 1987

Posté : 3 février, 2014 @ 6:31 dans 1980-1989, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

September

Woody Allen renoue avec l’influence bergmanienne qui lui avait déjà inspiré Interiors, quelques années plus tôt. Le thème est sensiblement le même, le ton aussi, ainsi que le décor : une vieille maison de famille dans laquelle se retrouvent des personnages en crise. Mais comme toujours chez Allen, loin de se répéter, son cinéma se nourrit de lui-même : ce film s’inscrit dans la lignée de tous ceux qu’il a déjà réalisé, maillon différent, mais totalement cohérent.

Il y a du Intérieurs, mais aussi du Hannah et ses sœurs, pour la relation entre une fille et sa mère, ancienne vedette à la vie dissolue. Il y a aussi du Comédie érotique d’une nuit d’été : ce huis-clos dans une (magnifique) maison à la campagne se déroule à la fin d’un été qui aura été une parenthèse dans la vie des personnages qui s’apprêtent tous à retrouver l’effervescence de New York, ou la monotonie de leur vie.

Un été que personne n’oubliera, marqué par des passions contrariées, des ressentiments qui resurgissent… On est bien chez Allen : chaque personnage a son proche cousin dans les précédents films qu’il a tournés. Mais comme toujours, il y a un petit quelque chose de radicalement nouveau, y compris dans sa manière d’appréhender la mise en scène. Cette gageure de ne jamais quitter la maison par exemple, procédé théâtral qui ne fait que renforcer l’éphémère intimité des personnages, dont on sait qu’ils finiront par quitter cette maison, et donc retrouver leur place dans le monde.

Il y a aussi un parti-pris étonnant : la relation entre la fille (Mia Farrow) et sa mère (Elaine Stritch) s’inspire de « l’affaire Lana Turner ». Adolescente, la première aurait tué le gangster avec lequel sa mère vivait, comme la fille de Lana Turner a tué le fameux Johnny Stompanato lorsqu’elle avait 14 ans. Un fait divers qui inspire Woody Allen, qui imagine les effets dévastateurs d’un tel acte sur l’avenir de l’ado-assassin.

Chaque personnage a ses fantômes, ses angoisses : la mère qui reconnaît son dégoût de vieillir lors d’une scène bouleversante face à son miroir ; son ami (Jack Warden) angoissé par l’absurdité de l’existence dans un univers qui ne repose que sur le hasard ; la meilleure amie (Diane Wiest) tiraillée entre sa loyauté et son besoin de plaire encore…

Superbe, cette non-comédie de Woody Allen est d’une justesse et d’une douleur déchirantes.

Radio Days (id.) – de Woody Allen – 1987

Posté : 23 janvier, 2014 @ 5:02 dans 1980-1989, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Radio Days

« Je m’excuse d’avoir tendance à idéaliser le passé. Ce n’était pas toujours aussi orageux et pluvieux que ça. Mais c’est ainsi que je m’en souviens car c’était alors magnifique. »

Le génie de Woody Allen, avec ce film peut-être plus qu’avec aucun autre, c’est de réussir à nous faire croire que ce qu’il filme, ce sont ses propres souvenirs, bruts et comme sortis directement de sa mémoire. Difficile à dire où est la frontière entre la réalité et la fiction, entre le souvenir et le fantasme. Mais on retrouve beaucoup d’éléments associés systématiquement à l’enfance dans la filmographie d’Allen : des parents aimants et excessifs, un quartier populaire à proximité de Coney Island, une approche contestataire de la religion…

Radio Days est un pur Allen. Dans l’esprit, on n’est pas si loin d’Annie Hall ou Manhattan. Mais il ne ressemble pourtant à aucun autre film. Hommage vibrant à une époque – celle de son enfance au tout début des années 40 – où la vie était rythmée par la radio, sa musique populaire, ses rendez-vous quotidiens, le film est le portrait, que Allen reconnaît être sans doute en partie fantasmé, d’une Amérique révolue. C’est surtout sa propre enfance que le cinéaste évoque avec une nostalgie parfois ironique, souvent déchirante.

Il n’y a pas à proprement parler d’histoire dans ce film, qui déroule au fil des souvenirs du narrateur (la voix off de Woody Allen lui-même renforce l’aspect personnel et nostalgique), avec une totale liberté, passant d’une anecdote l’autre, évoquant tout à la fois les souvenirs personnels de sa famille et les histoires des vedettes de la radio. Mais il y a un ton, et l’omniprésence de la radio à laquelle tous les souvenirs marquants de celui qui était un enfant dans ces années-là semblent attachés.

De fait, la vie de cette famille si classique et si extraordinaire en même temps (cette grande maisonnée trop pleine de vie semble parfois sortie du film de Capra, Vous ne l’emporterez pas avec vous) s’inscrit dans les grands moments radiophoniques de l’époque : la fameuse adaptation de La Guerre des mondes par Orson Welles, l’attaque de Pearl Harbor par les Japonnais…

Lié à ces événements qui ont marqué la mémoire collective de l’Amérique, il y a aussi un geste absolument bouleversant. Alors que la radio annonce l’accident d’une fillette coincée dans un puits (un authentique faits divers tragique qui a tenu en haleine le pays), le père qui punissait son fils à coup de ceintures pour une quelconque bêtise retient soudain ses coups, et se met à caresser la tête de son enfant avec tout l’amour d’un père. Avec une délicatesse infinie, Woody Allen signe là un petit miracle d’émotion.

Son film, personnel et universel, est d’une authenticité et d’une sincérité totales. Il est tout simplement magnifique.

Hannah et ses sœurs (Hannah and her sisters) – de Woody Allen – 1986

Posté : 20 janvier, 2014 @ 2:48 dans 1980-1989, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Hannah et ses sœurs

Woody Allen, en mode doux-amer, signe un magnifique film chorale, la quintessence de son cinéma. Comme dans Intérieurs, le film est la chronique de trois sœurs qui se retrouvent régulièrement dans la grande maison familiale. Mais loin de l’aspect austère du très bergmanien Intérieurs, Hannah et ses sœurs est un film plein de vie et de rythmes, où les personnages et les points de vue ne cessent de se croiser.

Tout Allen est là. New York bien sûr, à l’antithèse de la vision plus romantique de Manhattan. Des quartiers huppés aux rues plus populaires, la ville est filmée comme elle l’a rarement été : avec l’œil d’un cinéaste non pas en pâmoison devant Big Apple, ou en critique féroce d’une cité aliénante, mais simplement comme un homme qui fait partie intégrante d’une ville qui est son élément naturel. Un élément dans lequel la solitude a des formes parfois inattendues.

Ils ont des vies bien remplies, tous ces personnages : les trois sœurs qui tentent de mener une carrière d’artiste avec des succès variable (Mia Farrow la talentueuse, Barbara Hershey l’effacée, Dianne Wiest la « ratée »), et tous ces hommes qui gravitent autour d’elles…

Mais tous à leur manière partagent un sentiment de solitude, ou d’inachevé, qui les mine. Mia Farrow, formidable, la femme à qui tout réussit mais qui est incapable de partager ses fêlures. Son mari, Michael Caine, qui s’invente une passion pour la sœur de sa femme, Barbara Hershey. Cette dernière, compagne d’un artiste-peintre qui vit reclus (Max Von Sydow, l’acteur fétiche de Bergman) et dont elle est le seul lien avec la société. La troisième sœur, Dianne Wiest, dont toutes les tentatives de faire quelque chose de sa vie se soldent par un échec. Et Woody Allen lui-même, dans son éternel personnage d’hypocondriaque névrosé, qui s’essaye à différentes religions pour trouver un sens à une vie qui en désespérément dénuée.

Le film est à l’image du New York qu’Allen nous a appris à connaître : grouillant de vie (on y croise notamment J.T. Walsh et John Turturro dans de brèves apparitions), et peuplé de personnages plongés en pleine quête de sens. C’est drôle bien sûr, c’est émouvant aussi, et c’est d’un optimisme renversant. La vraie religion de Woody Allen, ce n’est ni le judaïsme, ni le catholicisme, ni le boudhisme, mais Groucho Marx : lui seul pouvait ouvrir le chemin de ces névrosés vers le bonheur, et l’accomplissement.

Avec Hannah et ses sœurs, et grâce à l’aide des Marx Brothers, Woody réussit à faire de toutes ses névroses les bases d’un grand « feel-good movie ». C’est tout simplement magnifique.

La Rose pourpre du Caire (The Purple Rose of Cairo) – de Woody Allen – 1984

Posté : 31 décembre, 2013 @ 6:15 dans 1980-1989, ALLEN Woody, FANTASTIQUE/SF | 1 commentaire »

La Rose pourpre du Caire

Woody Allen aurait-il signé là le plus grand chant d’amour au cinéma ? Sur le modèle du Keaton de Sherlock Junior (qui sera repris version gros muscle par McTiernan dans Last Action Hero), Woody raconte l’histoire d’une jeune femme mal dans sa vie qui trouve refuge dans un cinéma, à tel point que la frontière de l’écran finit par s’estomper : l’un des personnages du film qu’elle voit et revoit jour après jour finit par s’adresser à elle, puis par sortir de l’écran, et tomber amoureux d’elle.

Woody Allen s’amuse du décalage entre la réalité et la fiction. La superbe et le romantisme du personnage, interprété par Jeff Daniels, sont confrontés à la dure réalité : dans la vraie vie, les coups de poing font plus mal que prévu, le champagne saoule, l’argent n’est pas un simple accessoire qu’on glisse dans les poches avant les prises, et les baisers de cinéma ne sont pas suivi d’un pudique fondu qui permet aux personnages de faire l’amour loin des regards indiscrets…

Grand cinéphile, Woody Allen rend un hommage vibrant aux « feel good movies » de l’âge d’or d’Hollywood. Ce n’est pas un hasard s’il recrée l’un des plans inoubliables de La Vie est belle : ce couple qui s’enlace, vu par la lunette arrière d’un taxi. Et c’est vrai qu’on regarde La Rose pourpre… comme on regarde un grand Capra : avec un sourire béat aux lèvres, avec un sentiment de bien-être absolu.

Sauf que derrière l’apparente légèreté du film, le sujet est grave. Tragique, même. Si le personnage de Mia Farrow (absolument formidable) se réfugie dans les films, c’est parce que sa vie est un ratage total. Mariée à un homme qui la trompe, la bat, et joue son argent aux cartes et aux dés (Danny Aiello), renvoyée d’un boulot guère épanouissant, confrontée à la Crise  que traverse l’Amérique (on est visiblement dans les années 30)¸ elle s’invente une meilleure vie face à l’écran.

Et plus son quotidien est glauque, plus ses yeux s’ouvrent grand devant l’écran, et plus son conte de fée paraît authentique : le personnage qui sort du film tombe amoureux d’elle ; puis c’est son interprète qui arrive d’Hollywood qui tombe sous son charme… Mais Woody Allen n’est pas dupe : il présente le cinéma comme une manière de rendre la vie plus belle, oui, mais pas comme un palliatif au mal-être.

Son film, euphorisant et terrible à la fois, est un pur chef d’œuvre.

Broadway Danny Rose (id.) – de Woody Allen – 1984

Posté : 30 décembre, 2013 @ 12:23 dans 1980-1989, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Broadway Danny Rose

Depuis ses débuts derrière la caméra, Woody Allen a souvent évoqué ses débuts d’artiste de music-hall. De film en film, ses origines sont toujours là, sous une forme ou une autre, mais comme un élément fondateur de sa filmographie. Cette fois, il en fait le sujet même de son film.

Il interprète Danny Rose, un agent de music-hall qu’une poignée d’humoristes évoquent autour d’une table, lors d’une soirée joyeuse dans un restaurant. Ils racontent l’histoire de ce manager entouré d’un curieux panel d’artistes de cabarets : un ventriloque bègue, une dresseuse d’oiseaux musiciens, un xylophoniste aveugle… et un chanteur de charme has-been qu’il accompagne dans son come-back, et dont il rencontre la fantasque maîtresse, interprétée par Mia Farrow.

La conversation qui sert de fil rouge du film, entre une demi-douzaines de comiques qui racontent des anecdotes et évoquent avec sérieux leur approche de l’humour sonne tellement vraie et incongrue à la fois qu’elle ne peut pas ne pas sortir des souvenirs d’Allen.

Le héros n’est pas une star, mais un homme de l’ombre, qui vit son métier avec passion, tout en ayant pleinement conscience que le métier ne lui rendra pas la pareille. Derrière la légèreté du film, Woody Allen décrit un milieu qu’il aime visiblement, mais sur lequel il ne se fait guère d’illusion. La générosité de Danny Rose, son abnégation totale, est une sorte d’aberration qui ne peut le mener qu’à la solitude et la souffrance. Mais comme il le dit lui-même : pour être heureux, il faut rire, mais il faut aussi souffrir…

Partant de ce principe, Broadway Danny Rose est un délicieux concentré de vie, et de bonheur. Woody Allen y passe avec une aisance confondante, et en quelques secondes seulement, de la comédie la plus débridée (avec coups de feu, amant dans le placard et course poursuite…) à une douce nostalgie bouleversante.

Zelig (id.) – de Woody Allen – 1983

Posté : 6 décembre, 2013 @ 12:06 dans 1980-1989, ALLEN Woody, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Zelig

Voilà peut-être le film le plus radical de Woody Allen. Pour la première fois (pas la dernière : Harry dans tous ses états déclinera un thème similaire), son personnage traduit physiquement ses névroses. En l’occurrence, un petit homme trop mal à l’aise qui se transforme physiquement pour se fondre dans son environnement du moment, et éviter qu’on le remarque. Ses yeux se brident lorsqu’ils parlent à des Chinois, son poids triple en présence d’obèse, de nouvelles connaissances lui apparaissent face à des médecins…

« Ses parents le punissent souvent en l’enfermant dans un cagibi noir. Quand ils sont très en colère, ils s’y enferment avec lui. »

Formellement aussi, le film est radical : Woody Allen fait de cette histoire fascinante un faux documentaire composé d’images d’archives (vraies ou fausses, la frontière étant totalement invisible), de fausses interviews, de reconstitutions plus vraies que nature. Son film est entièrement fait de ces amalgames entre vraies et fausses images d’archives, entre films d’époque et créations « à la manière de », entre faux extraits de films et images d’actualité habilement utilisés, entre citations enlevées de leur contexte et fausses interviews…

Techniquement, c’est absolument bluffant. Comme un certain Forrest Gump après lui, Woody Allen fait côtoyer son personnage avec de grandes personnalités de l’époque, de Eugene O’Neill à Adolf Hitler, en passant par le président Coolidge ou Charles Chaplin. A l’image, le résultat est bluffant : dans de fausses images d’archives ou d’actualité d’un réalisme incroyable, Woody et Mia Farrow posent à côté d’authentiques personnalités, ou leur donnent la réplique. Nous sommes en 1983, et Woody Allen n’a pas à sa disposition les trucages numériques dont disposera Robert Zemeckis onze ans plus tard. Mais le résultat est, techniquement, au moins aussi réussi.

« Je travaille sur un cas intéressant. Deux paires de frères siamois qui ont des doubles personnalités. Je suis payé par huit personnes. »

Malgré la limite qu’impose le procédé (une certaine distance s’installe de fait avec les personnages), l’exercice de style est brillant, et Zelig reste un film vraiment personnel d’Allen, qui plonge une nouvelle fois dans les mystères de la psychanalyse, avec cette histoire fascinante d’un anonyme dont le destin épouse son époque.

Zelig est aussi le portrait de l’Amérique de la fin des années 20 et du début des années 30 : celle du KKK et des gangsters, mais aussi celle de Chaplin et de Groucho Marx. Une époque d’insouciance et d’incompréhension tout à la fois, dans laquelle Woody Allen trouve son inspiration. Il n’en manque pas, et c’est passionnant.

« J’ai 12 ans. Je rentre dans une synagogue. Je demande au rabbin le sens de la vie. Il m’explique le sens de la vie. Mais il me l’explique en hébreu. Je ne comprends pas l’hébreu. Il me propose alors des cours d’hébreu pour 600 dollars. »

Comédie érotique d’une nuit d’été (A Midsummer night’s sex comedy) – de Woody Allen – 1982

Posté : 2 décembre, 2013 @ 5:42 dans 1980-1989, ALLEN Woody, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Comédie érotique d’une nuit d’été

Woody Allen s’évade de New York, mais le temps d’un été seulement, avec cette comédie champêtre qui trouve le parfait équilibre entre burlesque et nostalgie, avec une pointe de surnaturelle et, forcément, de psychanalyse. Son personnage est toujours le même, celui d’un pur New Yorkais (employé à Wall Street) qui goûte, le temps des vacances, les charmes simples de la campagne. Son meilleur ami est d’ailleurs joué par Tony Roberts, qui retrouve un rôle similaire à celui qu’il tenait dans Annie Hall.

Malgré son décor inhabituel, Comédie érotique d’une nuit d’été est en quelque sorte la synthèse de tout ce que le cinéaste a fait jusqu’à présent. Le burlesque de ses débuts (Woody y est un inventeur du dimanche qui crée d’improbables machines volantes), ses aspirations bergmaniennes, ses interrogations sur le couple, l’amour et le temps qui passe…

C’est aussi le premier film que Woody Allen tourne avec Mia Farrow, qui sera son égérie durant toute la décennie à venir.

Comme son titre le laisse penser, le film doit beaucoup au Songe d’une nuit d’été de Shakespeare, dont Allen signe une sorte de remake à peu près contemporain (l’histoire se déroule visiblement au début du siècle dernier), et surtout très allenien. Il en reprend quelques aspects, notamment le point culminant du film : une nuit dans la forêt où hommes et femmes se croisent, les sentiments se révèlent dans la confusion, et les esprits planent sur ce microcosme baigné par le doute et les interrogations.

Mais le cinéaste est aussi, une nouvelle fois, très inspiré de Bergman. D’une manière moins flagrante que pour Intérieurs, pastiche réussi du cinéaste du maître suédois. Mais difficile de ne pas penser à Monika notamment, pour cette manière de filmer la parenthèse enchantée et hors du temps « normal » que représente cet été que personne n’oubliera.

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