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Archive pour la catégorie 'Palmes d’Or'

Oncle Boonme, celui qui se souvient de ses vies antérieures (Lung Boonmee raluek chat) – d’Apichatpong Weerasetakhul (2010)

Posté : 4 juillet, 2013 @ 4:14 dans 2010-2019, Palmes d'Or, WEERASETAKHUL Apichatpong | Pas de commentaires »

Oncle Boonme, celui qui se souvient de ses vies antérieures (Lung Boonmee raluek chat) – d’Apichatpong Weerasetakhul (2010) dans 2010-2019 oncle-boonme

La toute première séquence donne le ton de ce film qui, en décrochant la Palme d’Or, a aidé de nombreux cinéphiles (dont moi) à découvrir le Thaïlandais Apichatpong Weerasetakhul : dans un paysage verdoyant à peine éclairé par les reflets de la lune, une vache (un gnou ?… disons un bovidé) tire sur la corde qui l’attache à un arbre, et finit par se libérer, traversant alors de vastes étendues d’herbe désertes, jusqu’à s’enfoncer dans une forêt dense et touffue, où son maître finit par la retrouver pour la guider.

Cette longue séquence, fascinante et d’une grande beauté picturale, annonce le propre parcours de cet oncle Boonmee, apiculteur dont le rein malade est relié à une poche de goutte-à-goutte, lien symbolique dont il se libérera pour s’enfoncer lui aussi dans la forêt, vers sa mort. Le film raconte les derniers jours de ce sexagénaire, que sa belle-sœur et son neveu viennent rejoindre dans sa ferme perdue dans la campagne.

Dans ce havre de verdure transformé en mouroir, ils voient apparaître la femme de Boonmee, morte dix-neuf ans plus tôt. L’apparition de ce fantôme est bientôt suivie par celle de leur fils, lui aussi disparu depuis longtemps, et qui revient sous les traits d’une espèce de singe velu au regard rouge, silhouette d’une grâce inouïe dans l’ombre de la forêt. Puis, Boonmee partira à la recherche du lieu de première naissance, évoquant ses précédentes existences.

En voyant ce film, il y a d’abord la barrière de la culture, qui n’aide sans doute pas à comprendre toutes les subtilités du film. Le rapport à la mort, le respect incroyable de la moindre forme de vie (un insecte écrasé est ramassé avec le plus grand des égards) et la manière totalement dépassionnée de faire face à la mort de ses proches ou à sa propre disparition. Rien de froid dans ce rapport, pourtant : les retrouvailles de Boonmee et de sa famille disparue, sans effusion, sont bouleversantes.

Ce fossé de la culture déroute et séduit. Il faut accepter de ne pas tout comprendre, mais il y a quelque chose de très beau dans cette manière si apaisée d’affronter la mort, et dans cette culture qui veut que les morts ne sont jamais loin, et que la vie est un cycle sans fin. Ce rapport à la mort est lié à une une connexion intime avec la nature (sublime), et ce lien inspire à Apichatpong Weerasetakhul des images d’une beauté sidérante. Froides et presque banales lors des rares séquences dans la « civilisation » (notamment la fin, étrangement déshumanisée), ces images, lorsqu’elles montrent les personnages comme faisant partie de la nature, touchent au sublime.

Brève rencontre (Brief Encounter) – de David Lean – 1945

Posté : 24 novembre, 2011 @ 11:08 dans 1940-1949, LEAN David, Palmes d'Or | Pas de commentaires »

Brève rencontre

C’est la quatrième et dernière collaboration entre le jeune David Lean et le dramaturge Noel Coward, qui lui avait donné ses premières chances en lui demandant de co-réaliser avec lui Ceux qui servent en mer, puis en lui confiant les adaptations de deux de ses pièces : Heureux mortels et L’Esprit s’amuse. Brève rencontre est aussi le sommet de cette riche collaboration, et l’un des plus grands classiques du cinéma anglais d’après-guerre. Des quatre films, c’est aussi celui que Lean a su le mieux faire sien, faisant d’une pièce qui se déroulait exclusivement dans un café de gare une œuvre intime, mais lyrique, l’une des plus belles (et déchirantes) histoires d’amour que l’on ait pu voir.

D’une délicatesse infinie, le film raconte la brève passion d’une jeune femme bien mariée avec un médecin qu’elle rencontre par hasard sur un quai de gare, et qu’elle revoit semaine après semaine. Lorsqu’ils se déclarent enfin leur amour, c’est déjà le début de la fin : l’un comme l’autre sont rongés par la culpabilité, et par les mensonges qu’ils doivent faire à leurs conjoints respectifs, pour la première fois de leur vie.

Le film ne laisse pas planer le suspense : on sait dès le début que leur histoire se termine par une rupture, grâce à une scène d’adieu déchirante où l’émotion redouble avec l’intrusion d’une commère intarissable qui vole aux deux amants leurs ultimes minutes ensemble. Une main délicate posée sur une épaule, et les grands yeux bouleversants de Celia Johnson… il n’en faut pas plus à Lean pour réussir l’une des plus belles scènes d’adieux de l’histoire du cinéma, tout simplement.

Les yeux de Celia Johnson… Il faudrait écrire un livre sur ce regard immense et triste, qui passe de la gêne au rire, de la résolution aux pleurs, en un clin d’œil… merveille d’actrice à qui Lean a été l’un des seuls à savoir mettre en valeur, dans Heureux mortels et surtout dans ce Brève rencontre, évidemment le rôle de sa vie. Loin des canons de beauté habituels, Celia Johnson incarne mieux que quiconque l’Anglaise moyenne, avec son visage sans attrait particulier, mais qui en devient beau tant il est émouvant. Dommage qu’elle n’ait pas fait une plus grande carrière par la suite…

Face à elle, Trevor Howard trouve son premier grand rôle au cinéma. Lui qui avait jusqu’à présent privilégié le théâtre (depuis une vingtaine d’années) est absolument formidable, avec un jeu d’un naturel assez sidérant. La réussite de ces deux personnages fait évidemment beaucoup pour la force du film, qui peut se résumer platement : c’est l’histoire on ne peut plus banale de deux êtres on ne peut plus banaux. C’est simple, et c’est sublime.

Les seconds rôles sont également particulièrement réussis. Le mari de Celia Johnson pour commencer, un peu ennuyeux certes, mais profondément bon et sensible. Lean lui offre d’ailleurs quelques belles scènes, en particulier la toute dernière du film. On aimerait pouvoir détester ce mari trompé, histoire de se donner bonne conscience. Mais ce n’est bien sûr pas aussi simple. Et ce sentiment de culpabilité, Laura (Celia Johnson) le paiera au prix fort.

Même si le film se déroule la plupart du temps loin du café de la gare, le décor unique de la pièce originale reste le lieu autour duquel l’histoire s’articule. Sa « faune » donne également une caution non pas comique, mais plus légère au film, avec cette romance inattendue et enthousiasmante entre la très élégante tenancière au passé un peu mystérieux (Joyce Carey, figure de la scène londonienne), et le chef de gare bonhomme et jovial (le très sympathique Stanley Holloway, qui était lui aussi dans Heureux mortels, dans le rôle du voisin).

Quant à la mise en scène de Lean, elle est rien moins que brillante, tout comme la construction du film, Celia Johnson imaginant (en voix off) qu’elle raconte à son mari son histoire d’amour, dans une longue série de flash backs. Dans un noir et blanc somptueux, avec des allers et retours incessants des trains qui donnent au film un mouvement presque ininterrompu et le sentiment que cette passion ne pourra pas s’installer, le cinéaste signe une œuvre qui évoque la beauté du « réalisme poétique » du cinéma français des années 30.

Et comme les films de Carné ou Grémillon, ce réalisme poétique s’inscrit parfaitement dans son époque : celle de l’Angleterre de l’immédiat après-guerre. Cette toile de fond est discrète, mais elle ne fait que souligner l’aspect tristement anecdotique de cette romance sans lendemain, mais inoubliable. Comme ce chef d’œuvre absolu.

Pacific Express (Union Pacific) – de Cecil B. De Mille – 1939

Posté : 2 novembre, 2010 @ 2:04 dans 1930-1939, BOND Ward, De MILLE Cecil B., Palmes d'Or, STANWYCK Barbara, WESTERNS | Pas de commentaires »

Pacific Express (Union Pacific) - de Cecil B. De Mille - 1939 dans 1930-1939 pacific-express

Cecil B. De Mille est entré dans l’histoire pour de mauvaises raisons. De lui, on ne retient généralement que ces péplums et ses grandes fresques bibliques, alors qu’il s’agit là de la partie (infime) la moins intéressante de sa filmographie. Et si, plutôt, on redécouvrait ses comédies de mœurs si grinçantes du muet… Et si, enfin, on revoyait ses westerns : Une aventure de Buffalo Bill et ce Pacific Express, deux chef d’œuvre du genre. Pacific Express, surtout, est un film immense, dans tous les sens du terme, peut-être bien le meilleur film de De Mille…

Immense, parce que, fidèle à sa réputation, le cinéaste ne fait dans l’intimiste. Dans l’intime, oui ; dans l’intimiste, non. Comme John Ford quinze ans plus tôt (Le Cheval de Fer), De Mille mobilise des moyens immenses pour raconter la construction du chemin de fer, qui doit relier les deux côtes américaines. Et comme chez Ford, De Mille met tout l’argent (et il y en a) qu’il a à sa disposition sur l’écran, sans jamais se laisser envahir par le gigantisme. Pacific Express est une très grosse production, avec des décors gigantesques, et des milliers de figurants. Mais c’est aussi un triangle amoureux filmé au plus près des acteurs. Et dans tous les cas, c’est magnifique.

De Mille nous fait sentir ce qu’avait d’exceptionnelle la vie sur les rails : le personnage, central, interprété par Barbara Stanwyck, est en cela unique, et inoubliable. C’est réellement une fille du rail, une jeune femme qui a vécu toute sa vie sur les chantiers de construction du chemin de fer : son père est le mécanicien de l’une des locomotives qui suit l’avancement des travaux. Ce beau personnage de western, à la fois forte et amoureuse, est le pivot du film : celui qui ajoute une dimension tragique à l’affrontement des deux personnages masculins principaux.

Le premier (joué par Robert Preston) est le partenaire d’un bandit (l’excellent fourbe Brian Donlevy), payé pour retarder le chantier par tous les moyens. Le second (Joël McCrea, un peu trop lisse), est un agent du gouvernement chargé du maintien de l’ordre. Classique, bien sûr, sauf que Robert et Joël sont amis de longue date, qu’ils aiment la même femme, et qu’ils se retrouvent dans deux camps qui risquent bien de se déclencher une guerre sanguinaire…

Pas le moindre temps mort dans ce film mené à 100 à l’heure, malgré la lenteur des travaux. On assiste à des traversées interminables de désert, à des franchissements de montagne, à une attaque d’Indiens mémorables, à des bagarres de saloon, à des duels… C’est foisonnant, impressionnant, et passionnant, et les personnages sont de merveilleux stéréotypes parfaitement dessinés. Les seconds rôles sont également excellents : on reconnaît notamment Anthony Quinn, en second couteau particulièrement détestable, dans les premières scènes du film.

Mais le vrai personnage principal du film, c’est le train lui-même, qui avance pas à pas dans des paysages gigantesques. C’est autour de lui que ce petit monde (pas si petit d’ailleurs : le chantier emploie des milliers de personnes) gravite exclusivement. Autour de lui que se construisent et se déconstruisent les villes, au fur et à mesure que le chantier avance (dans des scènes de « déménagement » extraordinaires). C’est avec lui que Barbara Stanwyck vit sa plus belle histoire d’amour, qui, lorsqu’elle est contrariée, donne la plus jolie scène : chassée du chantier, la belle vit sa dernière nuit dans le train, et c’est un immense sentiment de nostalgie qui nous envahit. Et c’est très beau…

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