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Archive pour la catégorie 'Chronologie'

Carry-on (id.) – de Jaume Collet-Serra – 2024

Posté : 26 décembre, 2024 @ 8:00 dans 2020-2029, ACTION US (1980-…), COLLET-SERRA Jaume | Pas de commentaires »

Carry-on

Ne comptez pas sur moi pour être original ! Après tout, est-ce que Carry-on l’est, hmmm ? Tout le monde compare le grand succès Netflix de la fin d’année à la saga Die Hard ? Eh bien je vais m’empresser de faire la même chose. D’ailleurs, il me semble à peu près certain que le scénariste a pensé très fort à 58 minutes pour vivre en écrivant l’histoire d’un homme seul affrontant une menace terroriste dans un aéroport bondé la veille de Noël.

Premier constat : Taron Egerton n’est pas Bruce Willis. Et on pourrait presque s’arrêter là, tant la comparaison est cruelle, et vient renforcer un sentiment déjà tenace depuis un moment : le film d’action made in 2020s n’a pas d’âme. On trouvera toujours des contre-exemples, mais pas ici, pas dans cet aéroport, où la fadeur de l’acteur produit l’effet exactement inverse au charisme de dingue du Bruce d’il y a trente ans.

Deuxième constat : Jaume Collet-Serra n’est pas John McTiernan. Et on pourrait presque s’arrêter là, tant la comparaison est cruelle, et vient renforcer un sentiment déjà tenace depuis un moment : le film d’action made in 2020s n’a pas d’âme… Comment ? Je l’ai déjà dit ?… Eh bien c’est que j’ai de la constance.

Ce n’est pas qu’on s’ennuie franchement : c’est rythmé, et il se passe plein de choses, avec un énorme enjeu dramatique. Et, surtout, un dilemme assez malin auquel est confronté le héros, agent de sécurité qui doit choisir entre deux options inacceptables : laisser passer une valise contenant un agent chimique très très mortel qui va coûter la vie à 200 personnes, ou laisser sa fiancée se faire abattre. Bon… je mettrais bien un billet sur une troisième option.

On ne s’ennuie pas franchement donc, mais entre un acteur transparent (qui n’est d’ailleurs pas le pire, Sophia Carson, dans le rôle de sa fiancée, se révèle une actrice assez désespérante) et un réalisateur efficace mais sans la moindre aspérité, difficile de se sentir impliqué outre-mesure. Seule bonne surprise finalement : le méchant incarné sans grands effets par Jason Bateman, plutôt à contre-courant des méchants habituels. Ça ne suffit pas faire de Carry-on un monument du genre, mais ça suffit pour assurer l’intérêt.

Fantômas – d’André Hunnebelle – 1964

Posté : 25 décembre, 2024 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1960-1969, HUNNEBELLE André | Pas de commentaires »

Fantômas

Envie d’un classique en cette période de fêtes ? Quoi de mieux qu’un bon vieux Fantômas… Oui, hein : quoi de mieux ? A vrai dire, beaucoup de choses. Beaucoup, beaucoup de choses. Parce que le sourire poli de mon fiston ne laisse guère de place aux doutes : il a pris un méchant coup de vieux, le premier opus de la version Jean Marais / Louis de Funès / André Hunnebelle.

Côté mystère, c’est à peu près le degré zéro du cinéma. Loin, très loin des versions précédentes, celles en particulier de Louis Feuillade et de Paul Féjos. Mais ça, disons que c’est assumé par un scénario et une mise en scène ouvertement tournés vers l’humour et l’aventure. Un pur divertissement conçu avant tout autour de sa star, Jean Marais.

Avant que Belmondo ne le supplante, Jean Marais était alors le grand homme d’action du cinéma français, transformé en héros bondissant par André Hunnebelle dans une série de films de cape et d’épée qui ont connu un énorme succès… et qu’on a bien du mal à revoir aujourd’hui. Mais côté action et aventures justement, Hunnebelle est un cinéaste bien poussif, que De Broca viendra totalement ringardiser dès cette époque.

Revoir ce premier Fantômas aujourd’hui est d’autant plus rude, que de nombreuses cascades et scènes d’action annoncent curieusement celles des Mission Impossible : courses poursuites sur un train, à moto, accroché à un hélicoptère… La comparaison, évidemment, n’est guère flatteuse pour ce Fantômas, malgré une générosité dans l’action qu’il faut souligner, jusqu’à une poursuite finale qui n’en finit pas de rebondir, semblant ne jamais devoir s’arrêter jusqu’à un final joyeusement grotesque, pour le coup assez réjouissant.

D’ailleurs, Hunnebelle n’a pas dû tarder à constater que ce qui fonctionnait le mieux dans son film, ce n’était ni le mystère, ni l’action, ni Jean Marais (franchement pas terrible d’ailleurs), mais Louis De Funès. Pas encore super star (il le devient cette année 1964, avec également Le Corniaud et Le Gendarme de Saint-Tropez), il s’impose comme un immense voleur de scène. Même en roue libre comme dans ce film où il semble ne pas être dirigé, il est le principal centre d’intérêt. Les scènes où il ne figure pas sont bien ternes…

Dernier caprice / L’Automne de la famille Kohayagawa (Kohayagawa-ke no aki) – de Yajujiro Ozu – 1961

Posté : 23 décembre, 2024 @ 8:00 dans 1960-1969, OZU Yasujiro | Pas de commentaires »

Dernier caprice

L’ombre de la mort plane sur l’avant-dernier film d’Ozu. Pas de manière morbide, non, ce n’est pas le genre de la maison. Mais il y a dans ce film une conscience de la fragilité de la vie, étonnante chez un cinéaste qui ne savait pas encore que ces jours étaient comptés, et qui n’était pas si vieux. Le temps qui passe est un thème récurrent chez Ozu, mais le personnage du patriarche ne ressemble pas aux autres : cet homme débordant de vie, espiègle et vaguement régressif, mais en même temps si fragile, comme un symbole d’une vie qui tient à pas grand-chose.

Au fond, Ozu raconte ce qu’il a souvent raconté, avec son style inimitable, ces longs plans de décors nus, sa caméra au sol, ces motifs récurrents, cette modernité qui s’impose régulièrement, tranchant avec la tradition calme et rassurante, avec ses grands spots de lumière… Il filme un moment de transition, les dernières heures de quelque chose : à la fois le Japon de sa jeunesse, et une certaine période de cette famille, avec les incertitudes et les interrogations qui vont avec.

Et, surtout, avec un mélange de conscience absolue et d’amertume, qui fait de Dernier caprice (le titre, déjà…) un film à part dans cette dernière partie de l’œuvre d’Ozu. Les personnages semblent mus par la tentation de se raccrocher à un passé disparu, ou sur le point de disparaître. Le patriarche qui renoue avec un amour d’autrefois, la fille aînée qui hésite à se remarier (Setsuko Hara), la cadette rêvant d’un mariage d’amour…

Et beaucoup de personnages qui gravitent autour d’eux, avec des liens familiaux parfois difficiles à suivre, ce dont s’amuse d’ailleurs un personnage, soulignant la complexité des liens qui unissent les membres de cette famille. Comme pour dire : qu’importe, finalement, la famille qui nous entoure ne répond à aucune règle strictement rigide.

Ozu filme un moment en suspens, où l’alcool semble là pour repousser l’échéance… ou retenir les illusions. Mais le grand Chishu Ryu apparaît, tardivement et brièvement, en paysan guettant la fumée sortant d’un crématorium, comme l’alter ego d’Ozu qu’il a toujours été, témoin conscient que la vie passe, que la jeunesse remplace la vieillesse. Toujours. Qu’il y a un temps pour tout. Même si c’est difficile à accepter, comme le soulignent ces derniers mots simples et amers : « Déjà la fin. »

L’Atlantide (Antinea, l’amante della città sepolta) – d’Edgar G. Ulmer (et Giuseppe Masini, et Frank Borzage) – 1961

Posté : 22 décembre, 2024 @ 8:00 dans 1960-1969, BORZAGE Frank, MASINI Giuseppe, ULMER Edgar G. | Pas de commentaires »

L'Atlantide 1961

Frank Borzage est tombé malade quelques jours seulement après le début du tournage, remplacé par le pas manchot Edgar G. Ulmer (seul crédité au générique) et par l’inconnu de mes services Giuseppe Masini. Et je ne sais pas trop ce qu’il faut en penser : regretter qu’il n’y ait pas derrière la caméra un cinéaste à l’univers aussi fortement romanesque que Borzage, ou se réjouir que son immense carrière ne se termine pas officiellement par ce film d’aventure que j’aurais sans doute trouvé trépidant à 11 ans, devant la télé familiale ?

Ne refaisons pas l’histoire… Cette énième adaptation du roman de Pierre Benoît (après celle de Feyder et celle de Pabst quand même, comment rivaliser…), modernisée et mise au goût du jour atomique de ce début des années 1960, est un film d’aventure comme on en tournait alors des dizaines, une espèce de grosse production fauchée pas si mal fichue, mais au scénario vraiment impossible.

Un exemple de dialogue, juste pour le plaisir. « Je ne veux pas mourir », lance une jeune femme avec beaucoup d’esprit. « Ce serait une injustice… tu es trop jolie », rétorque le jeune premier dont elle est tombée amoureuse. Autrement dit : si tu avais été moche ma grande, tu n’aurais qu’à prendre sur toi et te laisser mourir bien gentiment. Et sachant que l’élégant jeune homme qui lance cette réplique s’appelle Jean-Louis Trintignant, voilà une bonne raison de voir le film. Au second degré.

L’histoire, on la connaît : des Européens perdus dans le désert se retrouvent par hasard dans la cité perdue mythique de l’Atlantide, faux paradis et vraie dictature dont ils réalisent bientôt qu’ils sont prisonniers. Seule nouveauté : l’explosion imminente d’une bombe atomique, ce coin paumé du désert ayant été choisir pour un essai qui promet d’éradiquer pour de bon cette cité disparue.

Pas si mal fichue, donc, parce qu’on ne s’ennuie pas vraiment : le rythme est impeccable, et la séquence de la tempête est même franchement tendue, et très joliment éclairée (par Enzo Serafin, chef op de Rossellini pour Voyage à Rome ou d’Antonioni pour Chronique d’un amour), baignée d’un bleu profond et dramatique.

Mais que le scénario est poussif, bourré de détails très cons. Un exemple, encore : pour sauver un homme en train de se noyer dans 10 centimètres d’eau cinq mètres plus bas, Trintignant, courageux, demande à son pote de le suspendre en le tenant par les chevilles. Si. La mise en scène, visiblement très partagée entre les trois réalisateurs qui se sont succédé, ne sauve pas toujours la situation. On parle de ce plan cadrant un tout jeune Gian Maria Volonte à travers les jambes de son adversaire ?

Reste le plaisir de découvrir une authentique curiosité, dont Trintignant n’a pas dû beaucoup se vanter dans les décennies qui ont suivi. Et d’ajouter une pierre, certes mineure, à la découverte des filmographies de Borzage (qui avance) et d’Ulmer (qui piétine).

L’Homme le plus laid du monde (The Way of the Strong) – de Frank Capra – 1928

Posté : 21 décembre, 2024 @ 8:00 dans * Films de gangsters, 1920-1929, CAPRA Frank, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

The Way of the Strong

En commençant son film par une course-poursuite pleine de rythme et de fureur, Capra donne le ton de ce film, qui doit plus à la mode du film de gangsters (très en vogue depuis le Underworld de Josef Von Sternberg) qu’à l’émergence de son propre style, déjà tangible dans The Matinee Idol, sa précédente réalisation.

The Way of the Strong n’est pas un Capra classique, pas tel qu’on l’imagine. Mais un film auquel le cinéaste apporte un ton singulier, un mélange d’humour et de gravité, et cette extraordinaire maîtrise du rythme qui est son indéniable marque.

Son héros s’appelle Handsome Williams. Mais, ironiquement, il est d’une laideur repoussante. Il est aussi un bootlegger en guerre ouverte avec le chef d’un autre gang de trafiquants, dont il vole toutes les cargaisons avec un plaisir sadique.

Mais l’homme est aussi transi d’un amour secret pour une belle violoniste aveugle, qui se retrouve prise au cœur de cette guerre de gangs, mais aussi d’une rivalité entre Handsome et son protégé, beau gosse lui, qui tombe également amoureux de la belle aveugle.

Le film n’a pas l’âpreté réaliste d’Underworld. Du vrai monde, Capra ne filme finalement pas grand-chose, résumant son univers à deux repères de contrebandiers et à leurs habitués, ne montrant rien du monde extérieur, si ce n’est quelques plans de rues et routes désertes, ou fréquentées par des policiers.

Et, donc, cette jeune femme aveugle ballotée d’un gang à l’autre, d’un amoureux à l’autre, d’un repère à l’autre, centre d’intérêt constamment tiraillée, incarnation du rythme même de ce film mené sans temps mort.

Capra a déjà fait plus personnel, sans même parler de ses nombreux chefs d’œuvre à venir. Mais ce n’est pas une raison pour négliger ce film, lui-même tiraillé entre le mélo et le film noir, avec même des tentations de comédie malgré un final rudement dramatique, porté surtout par un Mitchell Lewis d’une intensité folle dans le rôle de Handsome, brute étonnamment émouvante.

Sherlock Holmes à Washington (Sherlock Holmes in Washington) – de Roy William Neill – 1943

Posté : 20 décembre, 2024 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, NEILL Roy William, Sherlock Holmes | Pas de commentaires »

Sherlock Holmes à Washington

Après avoir quitté le XIXe siècle pour participer à l’effort de guerre (à partir de La Voix de la Terreur), Holmes et Watson quittent l’Angleterre pour cette nouvelle enquête, cinquième épisode de la longue série de films portés par Basil Rathbone et Nigel Bruce.

Direction Washington, donc, pour un grand voyage transatlantique à la recherche d’un mystérieux document dont dépend le sort du monde, et surtout d’une amitié anglo-américaine, seul rempart contre le totalitarisme.

Il y a un immense penchant bi-patriotique dans ce film qui participe à l’effort de guerre, et qui ne fait pas dans la dentelle, notamment dans sa manière de présenter les symboles de la démocratie américaine, le Lincoln Memorial ou le Capitol.

Pourtant, le film est passionnant. Ni novateur, ni vraiment surprenant, mais réalisé avec une grande efficacité par Roy William Neill, qui fait des merveilles de ses contraintes de production : un budget sans doute pas extensible, et un format minimal d’à peine plus d’une heure. L’obligation d’aller à l’essentiel, de faire concis et percutant.

La première séquence est particulièrement réussie : ce long prologue plein de suspens qui noue le drame, avant l’apparition des deux héros. C’est même un modèle de précision et de concision dans les espaces exigus d’un avion, et surtout d’un train, pour une séquence d’une grande efficacité. La suite est un peu plus convenue, mais c’est du pur cinéma du rythme, pas hyper ambitieux, mais très divertissant.

Men at work (id.) – d’Emilio Estevez – 1990

Posté : 19 décembre, 2024 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 1990-1999, ESTEVEZ Emilio | Pas de commentaires »

Men at work

Tout cinéphile a-t-il une année fondatrice de sa cinéphilie ? Pour moi, c’est 1990. 14 ans, une passion qui prend son essor, l’envie de tout voir, tout découvrir, les heures plongé dans les magazines de cinéma… Et depuis, un lien presque intime avec tout film de cette période, y compris ceux que je n’ai fait que fantasmer alors, et depuis lors.

C’est le cas de Men at work, jamais vu jusqu’à présent, mais qui fait pourtant partie de mon univers cinéphilique depuis plus de trente ans. Parce qu’il date de 1990, et que les photos dans les magazines, la bande annonce et tout ce que j’ai pu en lire ou en voir restent imprégnés dans la partie socle cinéphilique de mon cerveau.

Longue intro, oui, et toujours pas un mot sur le film lui-même. Mais il y a une raison à ça : j’ai bien plus à dire sur les raisons qui me donnaient envie de le voir que sur le film à proprement parler, dont le vague intérêt repose sur cette particularité : les deux héros, joués par les frangins Charlie Sheen et Emilio Estevez, sont des éboueurs. Ce qui, dans le cinéma américain (ou de n’importe quel pays d’ailleurs), est rare.

Pour le reste… Emilio Estevez, acteur sympathique mais un peu fade des années 80, est un scénariste et un réalisateur au talent discutable, qui semble totalement en roue libre avec ce film, faux polar qui commence comme un thriller vaguement politique (un élu est assassiné parce qu’il voulait dénoncer un scandale environnemental) qui tourne vite à la comédie, et même à la grande farce cartoonesque.

Dans cette histoire totalement idiote, les deux frangins trouvent un cadavre dans un baril, le gardent avec eux plutôt que de prévenir la police, font équipe avec un vétéran du Vietnam complètement ravagé, prennent en otage un livreur de pizzas, réalisent des pièges lance-merde, affrontent des méchants flegmatiques et des policiers hystériques…

Bref : du grand n’importe quoi, jamais excitant, jamais vraiment drôle, et baignant dans une musique électro-pourrie très 80s. Mais bon, c’est 1990. Et ça fait bien plaisir d’ajouter ça à ce blog. C’est bizarre, un cinéphile.

La 25e heure / 24 heures avant la nuit (25th hour) – de Spike Lee – 2002

Posté : 15 décembre, 2024 @ 8:00 dans 2000-2009, LEE Spike | Pas de commentaires »

La 25e heure.jpg

C’est le premier film important tourné à New York après les attentats du 11 septembre 2001, et ça n’a rien d’anodin. Spike Lee, grand cinéaste new-yorkais au même titre que Scorsese ou Woody Allen, capte les mutations de cette ville qu’il a si souvent filmée, l’ambiance si particulière, et ce Ground Zero que les engins continuent à déblayer jour et nuit, sous les fenêtres de l’appartement luxueux de l’un des personnages.

Il n’est jamais directement question des attentats dans La 25e heure (rebaptisé 24 heures avant la nuit pour des problèmes de droits). Pourtant, leur souvenir plane constamment sur ce beau film, qui s’ouvre d’ailleurs sur la fameuse skyline, deux colonnes de lumière remplaçant les tours jumelles dans une image qui prend aux tripes, et qui installe une atmosphère lourde et déchirante.

Rien à voir avec l’histoire, donc, si ce n’est qu’il est question d’un monde qui s’effondre : celui de Monty (Edward Norton, magnifique), petit dealer à qui il reste 24 heures de liberté avant d’aller purger la peine de sept ans de prison à laquelle il a été condamné. Sept ans, toute une vie… Et ce n’est pas le moindre mérite de Spike Lee que de mettre du poids derrière cette durée : sept ans de prison, c’est long.

Et 24 heures, c’est court, pour mettre ses affaires en ordre, et quitter comme il faut les personnes qui comptent vraiment : sa petite amie dont il se demande si ce n’est pas elle qui l’a dénoncé, son père avec qui il a du mal à échanger, et ses deux amis d’enfance dont il s’est pourtant éloigné en choisissant sa vie de trafic. 24 heures pour les retrouver tous, et mieux pouvoir leur dire au-revoir.

La 25e heure est une merveille, dont j’ai toujours pensé (alors et depuis) que c’était le chef d’œuvre de Spike Lee. Son Carlito’s Way à lui, une sorte de miracle de cinéma, dont le mouvement et le ton s’épousent parfaitement pour donner corps au désespoir, aux regrets et à la soif de vie du personnage principal, et de ses proches, dans des virées nocturnes et diurnes déchirantes.

Au passage, Spike Lee confirme qu’il est, outre un cinéaste au style très affirmé et immédiatement identifiable, un grand directeur d’acteur. Rosario Dawson a rarement été aussi bien que dans le rôle de la petite amie qui prend les soupçons contre elle comme une double peine. Barry Pepper est d’une intensité folle en trader carnassier qui cache sa douleur derrière une façade d’arrogance.

Philip Seymour Hoffman impressionne en prof frustré qui se laisse déborder par une élève trop jeune et trop femme à la fois. Et Brian Cox est bouleversant dans le rôle de ce père maladroit qui ne sait comment retenir son fils. Les scènes qu’ils partagent sont peut-être les plus belles de ce film qui porte en lui tous les regrets du monde, un grand cri étouffé face à l’ampleur du gâchis.

Terminator : Dark Fate (id.) – de Tim Miller – 2019

Posté : 14 décembre, 2024 @ 8:00 dans 2010-2019, ACTION US (1980-…), FANTASTIQUE/SF, MILLER Tim | Pas de commentaires »

Terminator Dark Fate

Terminator, premier du nom, a révélé un cinéaste, James Cameron. Terminator 2 a révolutionné le cinéma hollywoodien à grand spectacle. Et depuis trente ans que Cameron est passé à autre chose, la série n’a cessé de se chercher, d’hésiter sur la voie à suivre, et même de faire demi-tour, passant de la suite-remake vaguement parodique (Terminator 3) au dynamitage en règle (Genysis), essayant même de se passer de Schwarzenegger, de toute façon occupé par sa carrière de gouverneur (Renaissance). Sans jamais convaincre.

Voir James Cameron revenir aux affaires, avec ce sixième film basé sur une histoire qu’il a imaginée, avait de quoi redonner un peu d’optimisme aux fans de la première heure. Le fait que Linda Hamilton reprenne son rôle de Sarah Connor aussi, tant elle était l’âme des deux premiers films. Quant à la volonté de tirer un trait sur les trois suites tournées depuis 1991… eh bien pourquoi pas !

L’histoire, d’ailleurs, en vaut une autre (on sent l’enthousiasme ?). Le danger Skynet écarté, on découvre que, l’homme étant indécrottable, il va quand même créer des machines qui finiront par prendre le pouvoir et à exterminer une grande partie de l’humanité. On apprend aussi qu’un espoir renaîtra grâce à une personne qui saura mobiliser les survivants. Les robots du futur envoient donc un Terminator (encore plus sophistiqué que les précédents, évidemment) pour dézinguer le futur sauveur. De son côté, la rébellion envoie un super-soldat. La routine, quoi.

On serait même dans un remake quasi parfait de l’original s’il n’y avait… Sarah Connor et le T1000 qui se joignent à la fête : Linda Hamilton et Schwarzenegger en personne, vieillis mais toujours coriaces, hantés par des années de combats pour la première… et par une vie de famille inattendue pour le second (oui, oui, c’est dire si la machine est proche de l’homme).

L’histoire n’apporte rien d’autre qu’une nouvelle occasion de relancer la machine, pour pouvoir espérer de nouvelles suites et de nouvelles rentrées d’argent. Ce qui ne serait pas si grave si Tim Miller apportait quelque chose. Le réalisateur a de l’imagination pour filmer des scènes d’action toutes plus démesurées les unes que les autres, reconnaissons lui ça, avec efficacité, et avec une certaine lisibilité de l’action, ce qui n’est pas si courant.

Mais ces scènes d’action gavées d’effets numériques envahissants ressemblent à toutes celles de l’immense majorité des blockbusters actuels : un déluge d’effets numériques envahissants, auquel il manque la patte d’un vrai cinéaste, l’aspect rugueux et tangible des premiers opus. Un réalisateur aussi puissant que James Cameron donc, voire même un solide artisan comme Jonathan Mostow (T3). Et si, quand on n’avait rien à dire, rien de neuf à ajouter, le mieux était juste de passer à autre chose…

La plus précieuse des marchandises – de Michel Hazanavicus – 2024

Posté : 13 décembre, 2024 @ 8:00 dans 2020-2029, DESSINS ANIMÉS, HAZANAVICUS Michel | Pas de commentaires »

La Plus précieuse des marchandises

Serge Hazanavicus a une propension assez réjouissante à ne jamais être là où on l’attend. Refusant de se laisser enfermer dans des cases trop faciles, il n’a cessé de prendre le contre-pied de lui-même, fuyant les comédies-pastiches après OSS 117 et sa suite, ou une carrière américaine toute tracée après les Oscars de The Artist.

Et il parvient encore à nous surprendre, en se lançant dans le film d’animation. Et dans le conte. Et dans le récit de la Shoah. Autant dire que l’ambition est grande. Et le résultat est beau, sincère, humble, et d’une délicatesse qui n’étonnera pas les admirateurs du cinéaste, confronté comme tant d’autres avant lui à la même problématique : comment représenter la Shoah.

La forme du conte, avec la belle voix off de Jean-Louis Trintignant (dans son tout dernier rôle au cinéma), permet à Hazanavicus de viser l’abstraction, en ne montrant des camps d’extermination que des visages émaciés, des regards hallucinés, et des visions cauchemardesques. Littéralement : comme sorties des rêves horrifiés de ceux à qui on a tout pris.

Jean-Claude Grumberg, dont la famille a été décimée dans les camps de la mort, a écrit le conte. Hazanavicus le porte à l’écran avec un grand respect, et avec la volonté de mettre en valeur la dignité de ses personnages, qu’il a lui-même dessinés dans une sorte d’épure qui colle parfaitement au ton du film.

Le conte, donc, une sorte de contre-pied au Petit Poucet, cette histoire idiote… « Où a-t-on vu des parents abandonner un enfant parce qu’ils n’avaient pas de quoi le nourrir », ironise la voix de Trintignant. Là aussi, un pauvre bûcheron et une pauvre bûcheronne, une forêt, un enfant perdu… Mais cet enfant, c’est un bébé lancé d’un train fonçant vers la mort par un père désespéré.

C’est un « sans-cœur », comme les appellent les gens d’ici, dans ce film où le mot « Juif » n’est jamais prononcé. Un sans-cœur recueilli par pauvre bûcheronne, mais dont pauvre bûcheron ne veut pas, jusqu’à ce qu’il découvre qu’il a un cœur. Le conte est bouleversant, révoltant, et beau, dans ce qu’il dit de l’autre, de la différence, de l’attention.

La Plus précieuse des marchandises est un film dur, cruel, mais aussi plein de vie. Et Hazanavicus réussit le miracle de ne jamais être larmoyant. Pas facile, avec une telle histoire. Cette délicatesse constamment tenue, et l’élégante épure des dessins et de l’animation, en font une belle et grande réussite.

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