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Archive pour la catégorie '1980-1989'

Le Chanteur de jazz (The Jazz Singer) – de Richard Fleischer – 1980

Posté : 23 mars, 2019 @ 8:00 dans 1980-1989, FLEISCHER Richard | 2 commentaires »

Le Chanteur de jazz 1980

Le principe même du film laisse dubitatif. Un remake du Chanteur de jazz, resté dans l’histoire essentiellement pour avoir été le premier film parlant (chantant, en fait, le film étant majoritairement muet, à l’exception des chansons entonnées par Al Jolson) ? Drôle d’idée… On ne peut pas dire que les premières scènes rassurent vraiment, avec cet hommage pas très inspiré au film d’Alan Crosland, qui sonne comme un passage obligé : le personnage principal se noircit le visage pour renforcer un groupe jouant dans un club pour Noirs.

L’un des principaux problèmes réside dans le fait que le film est nettement plus musical que l’original, et que les chansons sont en grande partie très quelconques, malgré le succès colossal que la bande originale rencontrera (a contrario du film qui, lui, sera un bide retentissant). Les quelques ballades sont plutôt sympas, mais malgré tout le respect que mérite le chanteur (et acteur occasionnel, pour le coup) Neil Diamond, ses morceaux plus rythmés censés être cool ont pris un immense coup de vieux.

Il n’est pas si mauvais acteur, Neil Diamond, nettement meilleur en tout cas que ce que la mauvaise réputation du film a laissé entendre. Il tient plutôt bien son rôle : celui du fils d’un « cantor » juif, qui rompt avec la tradition familiale en devenant vedette de variété. Jusqu’à ce que la culpabilité, liée au regard inquisiteur de son père, finisse par le ronger.

Et là, Fleischer fait fort. On sait bien qu’il n’est pas au sommet de son art, au cours de cette ultime décennie de sa carrière. Mais il frôle carrément le ridicule dès qu’il veut illustrer les grands mouvements d’humeur de son personnage : que ce soit la naissance de l’histoire d’amour avec ses détails si mignons (il se cogne contre les murs, si si), ou la fugue interminable du chanteur en plein mal-être sur les routes de l’Amérique profonde (avec barbe qui pousse à n’en plus finir).

Il y a de beaux moments, quand même : l’arrivée de Neil Diamond à Los Angeles par exemple, avec cette jeune Californienne qui s’attendait à trouver quelqu’un « avec un look un peu plus religieux », qui en dit beaucoup sur le communautarisme et l’absence d’ouverture sur l’autre. Et puis Fleischer signe de très belles images de New York, cadres puissants aux couleurs cuivrées.

Suffisant pour se dire que Jazz Singer (et on passe sur le fait qu’il n’y a pas l’ombre d’une note de jazz là-dedans) n’est pas la catastrophe industrielle parfois évoquée. Pas plus qu’il n’est digne des grands films d’autrefois de Fleischer.

Tu ne tueras point (Krótki film o zabijaniu) de Krzysztof Kieślowski – 1988

Posté : 20 mars, 2019 @ 8:00 dans * Polars européens, 1980-1989, KIESLOWSKI Krzysztof | Pas de commentaires »

Tu ne tueras point

Un jeune homme légèrement inquiétant erre dans les rues ; un chauffeur de taxi légèrement méprisant prépare sa tournée ; un autre homme s’apprête à devenir avocat. Le premier va assassiner le second, gratuitement et froidement, de manière délibérée et sans remords, et sera défendu par le troisième, impuissant. Pourquoi ? Ce n’est pas vraiment la question : c’est plutôt le « comment » qui intéresse Kieślowski, dans ce long métrage tiré de son fameux Décalogue, ensemble de dix moyens métrages évoquant chacun l’un des dix pêchés capitaux.

Dans un décor dénué de tout semblant de beauté, le cinéaste filme avec une extrême stylisation des êtres sans joie et sans perspective. Des images glaciales et sidérantes qui suffisent à insuffler l’idée que, peut-être, la société telle qu’elle existe pourrait être à l’origine des monstres qui y naissent. Mais Kieślowski n’est pas un moraliste : son film décrit de manière presque clinique les derniers pas avant l’irruption du Mal extrême.

Le plus terrible, c’est cette capacité qu’il a à faire ressentir l’enfant que ce tueur en devenir a été. Son sourire si innocent face aux deux fillettes qui l’observent de l’autre côté de la vitrine alors qu’il prépare activement son meurtre, est à la fois glaçant et bouleversant. Les vitres, les miroirs, les reflets, sont d’ailleurs omniprésents, comme autant d’artifices qui semblent dissocier le jeune homme de ses actes. Troublant.

Et quand la violence explose enfin (« enfin », tant l’attente est chargée en tension dérangeante), elle n’a rien d’une libération : elle est absolument insoutenable, mais comme l’est la séquence de l’exécution, comme si Kieślowski mettait dos à dos ces deux mises à mort, esthétiquement aux antipodes l’une de l’autre, mais chargées toutes deux par le même dégoût. « Tu ne tueras point », rappelle le titre du film. Les lois érigées par la société ne sont pas une excuse…

Kalidor, la légende du Talisman (Red Sonja) – de Richard Fleischer – 1985

Posté : 15 mars, 2019 @ 8:00 dans 1980-1989, ACTION US (1980-…), FANTASTIQUE/SF, FLEISCHER Richard | Pas de commentaires »

Kalidor

Il y a des cinéastes qui restent au sommet jusqu’au bout. John Ford, William Wellman ou Stanley Kubrick sont de ceux-là. Et puis il y en d’autres… Oui, j’ai déjà eu l’occasion de l’écrire : c’est une fin de carrière franchement pas glorieuse que vit Richard Fleischer dans ces années 80 où, visiblement, il n’y a pas grand-chose à sauver.

Après avoir signé un calamiteux Conan le destructeur, voilà que l’ancien grand peintre du Mal sur grand écran nous livre une sorte de nouvelle suite officieuse, qui aurait très bien pu s’appeler Conan 3 si ce n’était la mise en images d’un autre mythe de l’héroic fantasy : Red Sonja. Surtout que l’on retrouve Arnold Schwarzenegger tout aussi musculeux, tout aussi court vêtu, et tout aussi tranchant. Au sens propre.

Son personnage s’appelle donc Kalidor, et les distributeurs français semblent avoir bien compris qu’il était le meilleur atout (le seul à vrai dire) de ce film dont la vedette est censée être Brigitte Nielsen, actrice désastreuse pour faire simple et court. Non pas qu’Arnold livre une grande prestation d’acteur, mais au moins a-t-il cette présence indéniable.

Kalidor est même un cran au dessus de Conan le destructeur. L’histoire est tout aussi con, mais le rythme est plus convainquant, et les scènes d’action plutôt réussies, même si elles ont une fâcheuse tendance à tirer en longueur. On notera aussi la musique généreuse mais oubliable d’Ennio Morricone, ainsi que… eh bien rien. Mais c’est déjà pas si mal.

Pink Cadillac (id.) – de Buddy Van Horn – 1989

Posté : 11 février, 2019 @ 8:00 dans 1980-1989, ACTION US (1980-…), EASTWOOD Clint (acteur), VAN HORN Buddy | Pas de commentaires »

Pink Cadillac

C’était l’époque où le grand Clint n’avait rien sans rien. La fameuse époque où il sacrifiait avec la Warner à ce principe : un film pour eux, un film pour moi. Principe dont le succès critique et public et la reconnaissance d’Impitoyable le débarrasseront. Trois ans avant son ultime western, Eastwood semble encore loin de ce statut privilégié qui sera le sien.

Entre Bird et Chasseur blanc cœur noir, deux films personnels qui lui vaudront d’être enfin pris au sérieux par les critiques, Eastwood accepte donc d’enchaîner deux films de commande qui peineront à séduire le public : un cinquième Inspecteur Harry et ce Pink Cadillac. Deux films particulièrement dépourvus d’ambition qui résument à eux seuls l’impasse dans laquelle la star se dirigeait… et qui l’amènera à sortir de ses tiroirs ce fameux scénario de western crépusculaire qu’il gardait depuis une dizaine d’années.

Pink Cadillac est un cas unique dans la carrière d’Eastwood : un film si improbable, au-delà même de ses défauts manifestes, que les distributeurs n’ont même pas pris la peine de le sortir en salles dans des pays comme l’Angleterre ou la France, pourtant les premiers défenseurs du cinéma d’Eastwood. Avec cette comédie d’action en Amérique profonde, la star pensait sans doute renouer avec le succès de Doux, dur et dingue et Ça va cogner. Raté.

La parenté avec cet improbable diptyque « avec orang-outan » est évidente. Mais malgré la qualité discutable de ces deux films, la comparaison est toujours cruelle pour Pink Cadillac. Essentiellement pour deux problèmes majeurs. D’abord les méchants du film, suprématistes blancs décidés à dézinguer les noirs et les juifs, mais qui se contentent de dégommer des cibles en carton en pleine forêt, sans pour autant être aussi ouvertement (et drôlement, si le cœur nous en dit) caricaturaux que les « Veuves noires » des précédents. Et puis la bande musicale, trois étoiles dans le diptyque, cheap et moche ici.

Poussif et lourdingue, réalisé mollement par le cascadeur Buddy Van Horn à qui personne d’autre que Clint ne laissera réaliser le moindre film, Pink Cadillac n’est cependant pas totalement aussi calamiteux que cela. Malgré ses plus de deux heures, il se laisse même voir avec un certain plaisir intermittent, grâce surtout au cabotinage de Clint, dans le rôle d’un détective qui aime se déguiser pour retrouver des fugitifs (en roue libre dès qu’il se déguise, plus posé au naturel), et à l’interprétation assez rigolote de Bernadette Peters.

Très dispensable, donc. Pink Cadillac ne vaut que comme l’étrange jalon qu’il est dans la carrière de Clint Eastwood, sur le point de prendre une direction nettement plus engageante…

Poulet au vinaigre – de Claude Chabrol – 1985

Posté : 31 janvier, 2019 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1980-1989, CHABROL Claude | Pas de commentaires »

Poulet au vinaigre

« Ecoute ta mère : touche pas à ça, c’est une lève-tard ! » Stéphane Audran, en invalide victime des bourgeois d’une ville de province, ne serait-elle pas plus odieuse encore que lesdits bourgeois, dans cette nouvelle charge très chabralienne, qui valut à son cinéaste l’un de ses plus grands succès populaires ?

A vrai dire, il n’y a pas grand-monde à sauver, dans cette bourgade de Seine-Maritime où les petits secrets bien pourris ne sont l’exclusivité de personne. En vrac : un notaire hautain (Michel Bouquet, qui d’autre…), un médecin malsain et un garagiste au sang chaud associés pour virer à tout prix l’invalide en question de chez elle ; le fils de ladite, postier qui épie les premiers et ouvre leurs lettres (Lucas Belvaux) ; sa collègue un rien nymphomane, qui pique dans la caisse (Bernadette Laffonf) ; et bien sûr le flic le plus célèbre du cinéma de Chabrol, l’inspecteur Lavardin, arrogant et violent, pas à un dérapage près.

Dans le rôle, Jean Poiret fait preuve d’une antipathie gourmande, dans une interprétation réjouissante qui fait beaucoup pour le charme du film. Surtout que la présence de ce personnage très fort est loin d’étouffer le reste : il n’apparaît que très tardivement, et ne revient que de loin en loin, comme le sparadrap de Dupont dont ce microcosme à l’équilibre vacillant n’arriverait pas à se débarrasser.

Tellement peu présent que Chabrol (et ses producteurs) en ressentira une sorte de frustration, enchaînant l’année suivante avec un Inspecteur Lavardin qui annoncera d’emblée l’ambition, et avec une éphémère série éponyme.
C’est d’ailleurs une nouveauté dans le cinéma de Chabrol : l’intérêt du film repose avant tout sur ce flic intarissable sur les œufs au plat du matin, et sur les petites gens, eux-mêmes victimes de la férocité du cinéaste. Des personnages atypiques que l’on retrouve dans un univers, lui, bien familier. Du Chabrol dans le texte, où les bourgeois sont très exactement comme on les attend.

E.T. l’extraterrestre (E.T. the Extra-Terrestrial) – de Steven Spielberg – 1982

Posté : 28 janvier, 2019 @ 8:00 dans 1980-1989, FANTASTIQUE/SF, SPIELBERG Steven | Pas de commentaires »

E.T. l'extraterrestre

Une merveille. Que dire de plus que ce simple constat : E.T. est une merveille, un film d’une délicatesse et d’une tendresse folles, le chef d’œuvre d’un amoureux du cinéma devenu le plus grand cinéaste de sa génération, une œuvre visuellement splendide, bouleversante, bienveillante et jamais mièvre. Ben oui : que dire de plus ?

Si vous avez des enfants, organisez vite une projection en famille. Sinon… eh bien empruntez ceux des voisins. Le bonheur, total, vient aussi des coups d’œil lancés à mes rejetons. Le petit, 6 ans, les paupières fixes et la bouche grande ouverte. Le grand, 13 ans, qui aurait préféré mater 58 minutes pour vivre, ne cherche pas longtemps à cacher ses larmes. Celui du milieu, 10 ans, partage ses émotions en serrant ou desserrant le bras de sa maman… Et à la fin, un grand silence, une même émotion, un même enthousiasme.

C’est rare, des films capables d’emporter comme ça toute une famille. Rare et précieux. Bref, E.T. est une merveille. A partir de quelle image, précisément, ce constat est-il généralisé ? A partir de l’apparition des « méchants », silhouettes sans visages qui reviendront comme un fil rouge, et comme une belle leçon sur la notion de bien et de mal ? Ou à partir de ce moment, simple et magnifique, où la balle que le petit Elliot a lancé dans la remise revient comme par magie ?

C’est du pur Spielberg, ça. Du niveau de la fameuse scène entre Roy Scheider et son fils dans Les Dents de la mer, scène dont on retrouve l’esprit tout au long d’E.T.. Spielberg s’y livre une nouvelle fois de manière très personnelle, évoquant avec beaucoup de sensibilité ses propres regrets en tant que fils.

Pas de cynisme, pas d’effets faciles. Spielberg signe une fable intemporelle, que lui seul peut-être pouvait réussir sans tomber dans le grand-guignol, la cul-cul-terie ou la grandiloquence. E.T. est un récit initiatique bouleversant, c’est aussi une grande leçon de vie qui reste d’une acuité incroyable aujourd’hui. Cette peur irrépressible de l’étranger, de celui que l’on ne connaît pas… La photo d’Elliot et de son p’tit pote de l’espace devrait être placardée un peu partout. Juste pour mémoire.

A nous la victoire (Escape to Victory) – de John Huston – 1981

Posté : 21 janvier, 2019 @ 8:00 dans 1980-1989, HUSTON John, STALLONE Sylvester | Pas de commentaires »

A nous la victoire

Eh oui, Stallone a tourné sous la direction de John Huston. OK, pas pour le meilleur film de ce dernier (pas au top en ce tout début des années 80: il venait de réaliser Phobia), mais quand même. Sur un CV, un film de Huston, ça vous classe immédiatement un acteur…

Auréolé de sa jeune gloire rocky-esque, le trentenaire déjà fort musclé se voyait encore comme un possible acteur de composition à l’époque: entre deux épisodes de sa saga déjà bien entamée (cette année-là, il sort aussi Rocky 3), il s’essaye à différents genres, passant de l’univers de Norman Jewison (F.I.S.T.) au polar noir très seventies (Les Faucons de la nuit). Avec, donc, une sorte d’apothéose: être embauché par Huston en personne.

Sauf qu’on a connu Huston nettement plus impliqué que dans ce drôle de film d’évasion qui semble totalement anachronique en ce début de décennie, avec un camp de concentration qui ressemble plus à un club de vacances vaguement contraignant, avec ses gardiens débonnaires et ses tentatives d’évasion pour la forme. Tout ça passerait sans problème si le film était une comédie, mais non.

D’ailleurs, la toute première scène, sombre et intense, vient d’emblée souligner le danger mortel qui plane sur le personnage. Une belle scène d’ailleurs, visuellement très soignée comme toutes les (rares) séquences nocturnes qui suivront, et qui crée une atmosphère que l’on ne retrouvera à aucun moment. A se demander même si cette première scène n’a pas été rajoutée in fine pour rendre l’atmosphère du film moins « conviviale »…

Drôle de film en tout cas, qui évoque l’organisation d’un match de football entre des soldats prisonniers de tous les pays alliés qui doivent affronter une sélection nationale de la wehrmacht. Le climax, c’est bien sûr le match lui-même, « chorégraphié » par le mythique Pelé, qui joue lui-même au côté d’autres grands noms du foot que les spécialistes connaissent sans doute. Un match qui possède une force dramatique indéniable, même si Huston filme ça à l’arrache et monte à la va-comme-je-te-pousse.

Le film de sport a cette capacité d’emporter et d’émouvoir (même dans des réussites très discutables comme Rocky 4). C’est le cas ici. Quelques plans accrochent la rétine (celui sur Pelé à sa sortie du terrain, très beau), et cette caméra qui semble filmer n’importe comment finit par dégager une sorte de vérité brute et brouillonne, qui donne à la Marseillaise qui ne manque pas de retentir dans le stade une vraie force émotionnelle.

Pas un ratage complet, donc, mais Huston est visiblement en roue libre la plupart du temps et semble ne pas même chercher à créer une sorte de cohérence entre les personnages, livrés à eux-mêmes pour la plupart. Max Von Sydow en affable officier allemand, Michael Caine en entraîneur passionné, Sylvester Stallone en chien fou américain, Jean-François Stévenin en résistant très impliqué, ou Carole Laure (« introducing Carole Laure », comme le générique l’annonce, elle qui avait déjà une bonne dizaine d’année de carrière…). Aucun n’est mauvais, mais chacun semble faire son film dans son coin. C’est un peu gênant…

Rambo 3 (id.) – de Peter MacDonald – 1988

Posté : 9 janvier, 2019 @ 8:00 dans 1980-1989, ACTION US (1980-…), STALLONE Sylvester | Pas de commentaires »

Rambo 3

Je dois faire un petit mea culpa. Rien de révolutionnaire, certes, mais il me faut reconnaître que Rambo 3, eh bien ça n’est pas si mal que ce que j’ai pu en dire dans d’autres chroniques, évoquant ce film comme l’une des pires bouses de la carrière de Stallone. D’abord, il a fait bien pire depuis (Evasion 2, quand même). Ensuite, ce troisième volet a certes un côté nanardesque, mais pas plus que l’épisode 2. Et puis, mine de rien, Stallone y fait déjà l’ébauche d’un retour aux sources, quant à la nature de son personnage. L’ébauche, j’ai dit.

Oui, Rambo reste comme dans le précédent une machine de guerre aux muscles soigneusement huilés et à la chevelure soyeuse. En cela, le film a les mêmes excès cruellement datés que Rambo 2, avec une esthétique très années 80 qui trouve son apogée lors d’un plan sublime : au début du film, Stallone se tourne pour la première fois face caméra dans un plan dramatisé à l’extrême qui inspirera des tas de caricatures… souvent moins caricaturales que l’original.

Mais quand même, ce Rambo 3 est loin d’être inintéressant. Le personnage, d’abord, affiche une lassitude et une envie de paix plus proches du film originel que de sa première suite. Et puis les parti-pris narratifs et esthétiques sont relativement ambitieux: plutôt que de se contenter d’un nouveau retour au VietNam, ou dans un autre pays à la végétation luxuriante, le film prend le contre-pied, et conduit le héros en Afghanistan, dans des paysages poussiéreux et dépouillés.

Visuellement, c’est très réussi. Différent des deux films précédents, mais avec une vraie ambition esthétique qui tape parfois à côté (quelques scènes sont un peu ternes), et qui fait parfois mouche, notamment lors d’une belle scène au fond d’une grotte, sombre et violente. D’une manière générale, les décors sont utilisés très efficacement. D’autant plus intéressant que ces décors sont à peu près inédits dans les grosses machines hollywoodiennes.

Il y a aussi une vraie bienveillance envers le peuple afghan, que le film prend le temps de mettre en scène, même si les facilités narratives et les stéréotypes sont bien là. Et même si on sent bien que cette bienveillance répond à une autre logique, qui pourrait se résumer ainsi : « tout ce qui peut faire chier les Soviétiques est bon à prendre ».

Mais le plus gros problème du film, c’est le colonel Trautman, ou Richard Crenna. Est-ce le personnage qui est mal dessiné ? Est-ce l’acteur qui joue mal ? Un peu des deux, sans doute. Trautman n’est en tout cas pas un personnage intéressant : son seul intérêt dans le premier film était de confronter Rambo à ses démons et à ses faiblesses. Ici, Trautman a un rôle central. D’abord comme représentant l’objectif de Rambo (le colonel est prisonnier des Russes), puis en tant que sidekick de notre héros.

Et c’est là que ça cloche. Absent, Trautman est une figure importante. Présent, il fait perdre à Rambo toute sa consistance, toute sa cohérence. Dans cette dernière partie, les deux personnages sont côte à côte et passent leur temps à se balancer des punchlines grotesques, se vannant face à l’armée russe qui menace de les faire passer de vie à trépas. Curieux et totalement hors sujet.

Ce drôle de flottement peut-il être mis sur le compte d’une production compliquée ? Russell Mulcahy, engagé pour réaliser sa première grosse production hollywoodienne, s’est fait virer tardivement pour différents artistiques comme on dit (tu m’étonnes : le résultat est aux antipodes de l’univers clipesque du gars), remplacé au pied levé par un Peter MacDonald qui n’était alors que réalisateur de la deuxième équipe. Le relatif échec du film pèsera sur la suite de sa carrière. Celle de Mulcahy ne fera pas illusion bien longtemps.

Le Secret de la pyramide (Young Sherlock Holmes) – de Barry Levinson – 1985

Posté : 8 janvier, 2019 @ 8:00 dans 1980-1989, FANTASTIQUE/SF, LEVINSON Barry, POLARS/NOIRS, Sherlock Holmes | Pas de commentaires »

Le Secret de la pyramide

Sherlock Holmes et John Watson se seraient rencontrés sur les bancs de l’université ? Cherchez pas : jamais Conan Doyle n’aborde la jeunesse de son détective. Cette idée originale permet à la team Spielberg d’intégrer le personnage dans son univers très codifié et très cohérent en ce milieu des années 80, l’époque héroïque de Retour vers le Futur ou des Goonies, l’époque aussi où Indiana Jones était flanqué d’un enfant. Bref, une poignée d’années au cours desquelles Spielberg, réalisateur ou (comme ici) producteur; n’envisageait un film que par et pour la jeunesse.

Un parti pris qui ne durera pas, mais qui a une petite tendance à tourner au recyclage. Dans Le Secret de la Pyramide, la Spielberg touch est ainsi particulièrement visible dans une séquence de cérémonie sacrificielle qui semble tout droit sortie du Temple maudit, jusqu’à la manière de la mettre en scène et d’y inclure les héros. Quant à la manière d’évoquer les attributs légendaires du héros (la pipe, la casquette, la redingote…), elle annonce presque à l’identique la première partie de La Dernière Croisade. Rien ne se perd, tout se recycle, jusqu’à l’excès parfois.

Cela étant dit, Young Sherlock Holmes reste une vraie réussite, à laquelle le réalisateur Barry Levinson réussit à donner un look à part, une esthétique très soignée qui évoque davantage l’expressionnisme allemand avec ses longues ombres portées, que les autres productions Amblin. Le scénario n’évite pas les longueurs, mais la mise en scène est le plus souvent très inspirée, et donne un rythme imparable et une allure folle à ce film fun, mais aussi assez sombre : il est quand même question d’un jeune homme qui apprend la perte, le deuil et la solitude…

L’intrigue est totalement improbable, cette histoire de vengeance semble sortie d’un serial des années 30, l’identité du grand méchant est évidente dès qu’il apparaît (y compris son identité secrète, qui n’est dévoilée qu’après le générique de fin)… Mais le film séduit par sa manière de jouer avec les peurs enfantines, les incluant même dans la narration, à travers des séquences d’hallucination qui mettent en scène des effets spéciaux datés, mais très rigolos.

Bien fichue, bourrée de séquences mémorables (celle de l’enterrement, celle du cimetière, celle du lac gelé…), cette production typique du Spielberg des années 80 a particulièrement bien vieillie. Quant à Nicholas Rowe, il retrouvera le personnage de Sherlock Holmes trente ans plus tard, à l’occasion d’un bref cameo dans le Mr. Holmes qui, lui, présentait l’autre versant inconnu de la vie du détective : sa vieillesse.

48 heures (48 hrs.) – de Walter Hill – 1982

Posté : 4 janvier, 2019 @ 8:00 dans 1980-1989, ACTION US (1980-…), HILL Walter, POLARS/NOIRS | Pas de commentaires »

48 heures

Un flic dur à cuire (et blanc) doit faire équipe avec un jeune taulard (noir) pour retrouver des tueurs particulièrement dangereux. C’est le film qui a lancé la mode des buddy movie, ces polars et films d’action mettant en scène des duos mal assortis, qui vont pulluler à partir de la seconde moitié de cette décennie. C’est aussi le tout premier film du jeune Eddy Murphy, alors humoriste très populaire à la télé américaine, pour qui les années 80 seront triomphales.

36 ans plus tard, son génie comique si souvent vanté n’est plus aussi flagrant. Il faut dire que, même s’il apporte une certaine légèreté à son personnage de repris de justice, Reggie Hammond n’est pas Axel Foley (Le Flic de Beverly Hills). Et derrière la caméra, c’est Walter Hill qui s’y colle, cinéaste pas franchement porté sur la déconne, qui semble constamment retenir la bride de Murphy, tout en cravachant sauvagement son sidekick Nick Nolte pour libérer un maximum son côté badass.

Clairement, ce n’est pas le film le plus personnel de Hill, que l’on sent le cul entre deux chaises, conscient de la nécessité de jouer sur la cool attitude d’Eddy Murphy, mais plus désireux de livrer un polar nerveux et violent. Le résultat est logiquement un peu bâtard, mais c’est bien le côté sombre et rude qui domine la plupart du temps, avec une vraie tension dans quelques scènes franchement réussies : celle de la fusillade dans l’hôtel notamment, explosion de violence qui ne laisse pas indifférent.

Hill réussit aussi à glisser son amour pour le western dans une séquence d’ouverture aux antipodes de l’atmosphère très urbaine du film. Son film flirte par ailleurs souvent avec la caricature, penchant parfois du côté de l’excès, notamment avec les personnages de bad guys sans surprise et sans profondeur. Mais avec aussi quelques effets plutôt réussis, à commencer par deux scènes jumelles qui montrent l’une le jeune détenu noir dans un bar de blancs jouant de la musique country, l’autre le flic blanc à l’ancienne dans un bar de noirs branchés. Ou comment jouer à fond la carte du buddy movie.

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