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Archive pour la catégorie '1980-1989'

Arizona Junior (Raising Arizona) – de Joel et Ethan Coen – 1987

Posté : 30 juin, 2024 @ 8:00 dans 1980-1989, COEN Ethan, COEN Joel | Pas de commentaires »

Arizona Junior

Les crétins ont une place à part chez les frères Coen. Et dans cette espèce de grande famille décérébrée et hyper-réjouissante qui se construit tout au long de leur filmographie, le Hi interprété par Nicolas Cage dans Arizona Junior fait figure de patriarche, bien épaulé c’est vrai par son épouse Ed, Holly Hunter.

C’est le deuxième film des frangins après Blood Simple, et on peut déjà dire que l’essentiel de leur cinéma est déjà là, condensé dans ces deux films fondateurs. Bien sûr, c’est réducteur, et c’est oublier un peu vite les richesses de Barton Fink ou Inside Llewyn Davis, mais quand même : dès ces premières années, ce qui fera la singularité de tout leur cinéma est bien là.

Et Arizona Junior préfigure merveilleusement les idiots magnifiques qu’incarneront George Clooney (O’Brother) ou Brad Pitt (Burn after reading). Pour incarner ces idiots magnifiques et désespérément humains, on peut dire que les Coen ont du flair…

Ici, c’est Nicolas Cage, donc, tout jeune et déjà hallucinant, incarnation idéale du plus cartoonesque des Coen. Il n’a pas encore été Sailor pour l’éternité, mais il a déjà été mémorable au côté de Peggy Sue. Ici, il est hallucinant, débordant d’humanité tout en affichant une débilité très prononcée. Un type bien, d’une pureté presque angélique, mais aussi un braqueur très récidiviste, doublé d’un voleur de bébé.

Mais c’est pour la bonne cause : un sens de la justice qui lui est très personnel, le bonheur de celle qu’il aime, merveilleuse Holly Hunter, ex-flic devenue hors-la-loi par besoin de maternité… Leur logique se tiendrait presque (j’ai dit presque) : puisqu’elle ne peut pas avoir d’enfant et qu’un riche couple vient d’avoir des quintuplés, n’est-ce pas rétablir un semblant de justice que de prendre l’un des cinq bébés ?

L’épopée de ces deux-là est romantique et grotesque. En même temps. Et tous ceux qu’ils croisent sont taillés dans le même bois, comme des personnages de dessin animé, tendance Tex Avery : trop méchants, trop bêtes, trop naïfs… Mention à John Goodman bien sûr, magnifique évadé transformant la vulgarité en poésie.

Il a un second rôle, mais le film lui ressemble : trop expressif, trop exagéré, trop démonstratif, trop tout… Mais bizarrement poétique, fou et doux à la fois, comme le regard de Nicolas Cage, profondément réjouissant, et furieusement à fleur de peau.

Duo à trois (Bull Durham) – de Ron Shelton – 1988

Posté : 23 juin, 2024 @ 8:00 dans 1980-1989, COSTNER Kevin, SHELTON Ron | Pas de commentaires »

Duo à trois

A quoi ça tient, parfois, l’envie de revoir un film, même un film qui m’avait laissé de marbre quand je l’avais vu il y a une vingtaine d’années : une image, furtive, en revoyant le très beau Un monde parfait que tournerait Costner cinq ans (et un statut de mégastar) plus tard. Dans le film d’Eastwood, la caméra passe rapidement sur une affiche placardée sur un mur. Les mots « Bull Durham » s’y lisent clairement : le nom d’une équipe de base-ball, et le titre d’un film porté par Costner, que les Américains adorent paraît-il.

Et voilà comment l’envie de ressortir le DVD est venue. Et de revoir ce film, totalement culte aux Etats-Unis, totalement oublié chez nous. Ce qui n’est pas étonnant : Bull Durham est un film exclusivement à la gloire de ce sport national et inexportable qu’est le base-ball. Une véritable religion pour le personnage-clé du film : une jeune fan (Susan Sarandon), mascotte hyper-sexuée qui, chaque saison, jette son dévolu sur l’un des joueurs de l’équipe.

Cette saison-là, ils sont deux : le jeune talent en devenir, Tim Robbins, irrésistible en gentil demeuré ; et Kevin Costner, d’un charisme dingue en vieux briscard (déjà : il a 33 ans) chargé de dégrossir le jeune chien fou.

Tout ça n’est pas d’une délicatesse folle. Et les nuances du base-ball échappent dans les grandes largeurs à la perspicacité d’un Français de base (moi, par exemple). Mais on prend un petit plaisir indéniable devant cette chose sans grande envergure, menée avec savoir faire et sans génie par un spécialiste du film de sports (que Costner retrouvera pour Tin Cup, autour… du golf).

Surtout, Kevin Costner commence à imposer son personnage : une sorte d’incarnation idéale et absolue de l’Amérique comme elle n’existe plus guère en dehors de lui. Un personnage qu’il n’a cessé d’approfondir depuis (et dès son deuxième film autour du base-ball, le magnifique Field of Dreams), et qui fait de lui un acteur hors du temps et, oui, précieux.

Stand by me (id.) – de Rob Reiner – 1986

Posté : 30 mai, 2024 @ 8:00 dans 1980-1989, REINER Rob | Pas de commentaires »

Stand by me

Quatre ans avant Misery, Rob Reiner adaptait déjà Stephen King, mais dans un tout autre registre. Si Stand by me tire des frissons, c’est à la manière d’un Tom Sawyer, dans ce que le film dit des peurs et des angoisses enfantines…

Stand by me est un très beau film sur la prime adolescence, sur ces sentiments que l’on ne ressent qu’à un âge où l’innocence n’est pas encore troublée.

Ils sont quatre, quatre amis qui, au cœur des années 1950, et à la fin des vacances d’été, décident de partir en expédition, pour aller voir le cadavre d’un jeune mort accidentellement, qui aurait été aperçu dans les bois.

Le cadavre n’est qu’un prétexte qui pousse les quatre amis à avancer, et à se plonger dans une sorte d’introspection intime et douloureuse de quatre amis sur le point de quitter l’enfance. Leur aventure est avant tout intérieure, chacun révélant des failles parfois abyssales.

Grand réalisateur populaire hollywoodien mésestimé, Reiner était alors au début d’une série de grandes réussites. Et son talent pour filmer les personnages, pour faire naître l’émotion avec élégance, est déjà bien présent.

Quelque part entre Les Goonies (dont on retrouve d’ailleurs l’un des jeunes acteurs, Corey Feldman) et Les Contrebandiers de Moonfleet (autre grand film sur l’enfance), Stand by me est un film drôle et profondément émouvant, d’une grande justesse.

Emouvante, surtout, l’interprétation de River Phoenix, d’une intensité folle dans le rôle d’un jeune écorché vif, bouleversante. Et quels seconds rôles : John Cusack et Kiefer Sutherland à l’aube de leurs carrières, Richard Dreyfuss… Toute une époque.

Commando (id.) – de Mark L. Lester – 1985

Posté : 29 mai, 2024 @ 8:00 dans 1980-1989, ACTION US (1980-…), LESTER Mark L. | Pas de commentaires »

Commando

Presque quarante après, un doute m’étreint toujours à propos de Commando : dans quel état d’esprit le film a-t-il été tourné ? Est-il un pur produit, outrancièrement extrême, des dérives totalement et outrancièrement extrêmes du cinéma d’action des années 1980 ? Ou est-il une pure parodie à prendre au 36e degré ?

Aujourd’hui, évidemment, impossible de le prendre autrement que comme ceci : une vision ironique et rigolarde des dérives d’un cinéma que Stallone, cette même année 1985, entraînait au premier degré (sans doute possible, en ce qui le concerne) vers des excès dont lui-même finirait par rire (Rambo 2 et Rocky 4), et que Schwarzie saurait tourner en dérision.

Cela dit, pas si sûr, quand même, que le réalisateur ait pensé autre chose que : « Fuck ! Je vais niquer Rambo sur ce coup-là, avec tous les mecs que mon héros va dézinguer ! » C’est vrai. Difficile de battre ce record. J’ai bien essayé de compter, mais dans le seul assaut final d’un Schwarzenegger surarmé (et à moitié à poil) face à une armée surarmée, j’avoue avoir perdu le compte après quinze… soit après une bonne minute de combat, les quinze minutes suivantes apportant une bonne centaine de morts violents supplémentaires, Schwarzie dégommant à tout va sans même avoir besoin de se baisser ou de se cacher, les méchants tombant plus vite que mes cheveux…

C’est con. C’est très con. Mais ça a le mérite d’être affiché dès la première scène, avec images irrésistibles de bonheur familial : Arnold portant un tronc d’arbre, Arnold et sa fille (toute jeune Alyssa Milano) s’amusant à partager leurs glaces, Arnold et sa fille donnant à manger à une biche… Si, si. Finalement, ça doit être parodique. C’est aussi d’un mauvais goût assumé, moche, poussif, lourdingue et dévoré par une musique affreuse de James Horner.

 C’est en tout cas très drôle, y compris dans les punchlines qui accompagnent chaque mise à mort. Ma préférée : « Tu te souviens que j’avais dit que je te tuerais en dernier?… J’ai menti ! »Et puis le film est une sorte de mise en images d’un fantasme cinématographique autour du corps d’Arnold Schwarzenegger, qui est le vrai sujet du film. Film qui mérite d’être vu, ne serait-ce que pour souligner en creux le génie de John McTiernan qui, deux ans plus tard, tirerait un pur chef d’œuvre ce cette même vision fantasmagorique. Commando, ébauche cartoonesque et idiote de Predator

La Petite Boutique des Horreurs (Little Shop of Horrors) – de Frank Oz – 1986

Posté : 26 mai, 2024 @ 8:00 dans 1980-1989, COMEDIES MUSICALES, FANTASTIQUE/SF, OZ Frank | Pas de commentaires »

La Petite Boutique des Horreurs

A l’origine, La Petite Boutique des Horreurs est un petit film d’épouvante fauché et rigolo de feu Roger Corman, qui devint bizarrement une comédie musicale au début des années 1980. Devant la caméra de Frank Oz, alors surtout connu pour son goût pour les marionnettes et autres créatures (il a réalisé Dark Crystal et donné sa voix à Yoda), cette comédie horrifique est donc elle aussi musicale.

Et c’est ma foi une comédie musicale qui tient franchement bien la route et l’épreuve du temps. Presque quarante ans après, ce pur produit des années 80 reste un vrai plaisir plein de vivacité, et plutôt bien foutu, dont les chansons restent très agréables.

Bien sûr, on ne va pas prendre au sérieux un film où l’on croise en vrac une plante carnivore qui devient une tueuse d’hommes, un dentiste sadique (Steve Martin, en roue libre) et son patient masochiste (Bill Murray, en roue libre itou le temps d’une unique scène), et Rick Moranis en héros séducteur. Mais cette liberté et cette gourmandise sont l’essence même de ce film réjouissant, parce que débridé.

Outre sa drôlerie, ses belles séquences musicales et son rythme imparable de pop corn movie assumé, le film de Frank Oz réjouit aussi par les innombrables clins d’œil cinéphiliques, qui nous emmènent de West Side Story à Chantons sous la pluie en passant par… The Shop around the Corner ou Gremlins. Réjouissant, je vous dis…

Hitcher (The Hitcher) – de Robert Harmon – 1986

Posté : 24 mai, 2024 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 1980-1989, HARMON Robert | Pas de commentaires »

Hitcher

Voilà un film qui m’avait laissé une impression assez dingue, il y a… au moins 25 ans. J’en avais gardé un souvenir assez traumatisé, une sensation de grande tension et d’horreur diffuse. Sa sortie en blu ray (chez Sidonis/Calysta) est une occasion plutôt excitante de confronter ces souvenirs (ou plutôt ces sensations résiduelles) à une re-vision.

Eh bien il tient plutôt pas mal la route, ce thriller horrifique qui lança (pas pour longtemps) la carrière de Robert Harmon, réalisateur dont la filmographie au cinéma se limitera à pas grand-chose (un Van Damme un peu mou du genou) après une série de choix discutables (après Hitcher, le gars a refusé L’Arme fatale et Liaison fatale, nous apprennent les suppléments du blu ray… double refus fatal).

Au niveau de l’inspiration, le film doit beaucoup à une poignée de références fortes : Le Voyage de la Peur pour l’histoire de ce type sans problème qui prend en stop un psychopathe bien gratiné ; Duel pour les grands espaces désertiques et oppressants de l’Ouest américain, et pour la menace irrationnelle ; mais aussi Halloween et la vague des slashers pour l’incarnation du mal absolu dont les actes et l’omniscience échappent à toute logique psychologique réaliste.

Eric Red (le scénariste, à l’origine du projet) et Robert Harmon s’approprient ces références en en démultipliant l’impact : beaucoup plus de morts, beaucoup plus de rebondissementsL’occasion aussi de vérifier une nouvelle fois que plus, ce n’est pas forcément mieux : dans tous les aspects, si réussi soit-il, Hitcher ne dépasse pas vraiment le stade du bon élève, qui flirte parfois avec le grand guignol.

Mais Robert Harmon tire le meilleur de ce scénario très (trop) généreux. En premier lieu grâce à un vrai talent pour filmer les paysages grandioses comme des éléments d’angoisse qui enferment les personnages. Et l’angoisse est réellement omniprésente, rendant la vision du film assez traumatisante… alors que l’horreur n’est, à peu près, jamais filmée. Les morts s’enchaînent, les détails horrifiques aussi, mais toujours hors champs.

Est-ce ce parti-pris ? Ou l’interprétation inquiétante mais presque douce de Rutger Hauer, flippant face à un C. Thomas Howell un peu terne ? Hitcher reste en tout cas un film particulièrement efficace, et une variation très originale dans cette grande mode des tueurs en série maléfiques. Une belle redécouverte.

Damnation (Kárhozat) – de Béla Tarr – 1988

Posté : 28 novembre, 2023 @ 8:00 dans 1980-1989, TARR Bela | Pas de commentaires »

Damnation

Béla Tarr filme la laideur, et c’est magnifique. Visuellement en tout cas, tout en plans séquences, en mouvements de grue et en panoramiques extraordinaires. Parce que les personnages, eux, ne le sont pas (magnifiques). Ils sont même d’une tristesse et d’une noirceur assez abyssales, quand on prend le temps de les observer.

Et il le prend (le temps), notre cinéaste hongrois préféré, qui semble redoubler d’intensité lorsqu’il filme les silences, l’ennui, le temps qui paraît même ne pas passer tant les personnages s’enfoncent dans un immobilisme radical, tout en moments sans cesse rejoués, en paroles presque vides de sens, en tout cas d’intérêt.

On pourrait résumer l’histoire assez simplement : un homme coupé du monde peine à conquérir une jeune chanteuse avec laquelle il a une liaison intermittente, et profite d’une occasion qui se présente pour envoyer le mari de cette dernière convoyer un chargement de drogue… Une intrigue de film noir, avec anti-héros, mari cocu, femme fatale… et pluie battante.

Pourtant, Tarr ne fait de cette intrigue qu’une vague trame, qu’il relègue au second plan, loin derrière l’observation de ces êtres qui se désagrègent. Une vision que renforcent les décors glauques, tout en friches et en terrains vagues, mais aussi ce noir et blanc au grain profond qui sera la marque du cinéaste dans ses grands films à venir.

Il y a quand même quelque chose d’assez intimidant à parler d’un film de Béla Tarr. Parce que l’intrigue est secondaire. Parce que son cinéma est un étonnant mélange d’austérité et de générosité, d’un rythme extrêmement lent et d’images superbes. Parce que ces images forment un tout fascinant et parfois abscons.

Une chose est sûre : Damnation est une suite presque ininterrompue d’images d’une puissance incroyables, qu’on aurait envie de toutes citer. Deux exemples, simplement… Le premier plan d’abord, paysage désolé et vaguement industriel que sa durée rend fascinant, annonçant l’ouverture hypnotique du Cheval de Turin. Et puis ce face à face inattendu et hallucinant entre le « héros » et un chien, les deux se lançant dans une espèce de duel, ou de danse, sous très haute tension.

On sort de Damnation avec le sentiment d’avoir vécu une expérience hors normes, et d’avoir été plongé dans les tourments internes de personnages paumés et presque résignés. Et c’est déstabilisant.

Princess Bride (The Princess Bride) – de Rob Reiner – 1987

Posté : 7 novembre, 2023 @ 8:00 dans 1980-1989, FANTASTIQUE/SF, REINER Rob | Pas de commentaires »

Princess Bride

Princess Bride est sorti il y a plus de trente-cinq ans, à une époque où les téléphones sans fil avaient une portée de dix mètres (et de toute façon ne tenaient pas dans la poche), et où Internet n’existait pas. Mais en 1987, les gamins (pas moi, mais c’est une autre histoire) avaient déjà des écrans dans leurs chambres : une télévision, des jeux vidéos… Bref, tout pour ringardiser la lecture et l’imagination.

Tout ça pour dire que Rob Reiner était rudement en avance sur son temps avec cette féérie irrésistible, chant d’amour ou pouvoir de la fiction et, donc, de l’imagination. Malin, il ouvre son fils sur un gamin malade et alité, plongé dans une partie de jeu vidéo (dont le graphisme rappelle l’hallucinant chemin qui a été fait depuis), et à qui son grand-père rend visite. Pas de quoi ravir le gamin, qui n’a pas très envie de lâcher la manette pour écouter ce vieil homme rasoir.

Un vieil homme qui a la bouille de Peter Falk, sourire narquois, regard malicieux, assez sûr de son effet lorsqu’il sort un vieux livre d’aventures, dont il entreprend la lecture, parfois entrecoupée par les protestations, de plus en plus faible, de son jeune auditeur. Et cette lecture, qui prend forme sous nos yeux, c’est une espèce de champ des possibles de ce qu’offre la fiction en général, la littérature et le cinéma en particulier.

Une princesse forcément blonde (Robin Wright, toute jeune, à peine sortie de Santa Barbara), un écuyer forcément beau (Cary Elwes, tout jeunot et tout blondinet aussi), un méchant roi, un homme de main machiavélique, un géant au grand cœur, un homme de main au grand cœur et surtout un as de l’épée en quête de vengeance : Mandy Patinkin, dans un rôle inoubliable.

« My name is Inigo Montoya. You killed my father. Prepare to die… » Quand on a entendu cette réplique une fois, on ne l’oublie plus. Pas plus qu’on oublie la géniale partie de trompe-la-mort du « génie du mal » Vizzini (Wallace Shawn), ou la course poursuite en bateau…

Princess Bride est un film réjouissant, parce que drôle et totalement décomplexé. En se plaçant ouvertement sous le couvert du conte pour enfants, Rob Reiner s’offre toutes les possibilités, toutes les folies, avec une bienveillance et une gourmandise qui font plaisir. Et qui passent fort bien l’épreuve du temps.

Shining (The Shining) – de Stanley Kubrick – 1980

Posté : 20 octobre, 2023 @ 8:00 dans 1980-1989, FANTASTIQUE/SF, KUBRICK Stanley | Pas de commentaires »

Shining

Comment, en prenant de telles libertés avec le roman de Stephen King (l’un de ses meilleurs), et en reprenant des trucs aussi éculés du film d’horreur, tant scénaristiquement que visuellement, Kubrick a-t-il pu réussir un film à ce point singulier et fondateur du genre ? Bref : un grand chef d’œuvre qu’il faut sans doute revoir à plusieurs âges de la vie pour en apprécier la richesse.

Jeune, j’en avais me semble-t-il surtout saisi la grandeur de l’aspect horrifique à proprement parler, et cette lente glissade dans la folie qu’opère Jack Torrance, le personnage incarné par Jack Nicholson, dont le rictus machiavélique n’a peut-être jamais été si bien utilisé. A le revoir des années après, désormais père de famille, c’est une autre vision qui gagne : le portrait d’un homme hanté par ses échecs en tant que créateur, et par ricochet en tant que l’image qu’on a du chef de famille.

C’est pour soigner sa panne d’inspiration que l’écrivain Jack Torrance embarque sa famille pour un long hiver de totale solitude dans l’Overlook Hotel, établissement haut perché dans les montagnes où il a accepté un poste de gardien, conscient qu’il sera coupé du monde avec sa femme Wendy et leur jeune fils Dany (Shelley Duvall et Dany Lloyd, des rôles dont on ne se remet pas), et que c’est juste ce dont il a besoin pour retrouver la fièvre créatrice.

Sauf que dès les premières scènes, sous un voile apparent de normalité, Kubrick installe le malaise. Les souvenirs étant trompeurs, il me semblait que Nicholson était omniprésent, et que le film narrait dans les détails sa longue transformation, avalé par les fantômes de l’hôtel, où quoi que ce soit. Ce n’est pas tout à fait juste : dès le début, il porte déjà ses fantômes en lui, qui ne sont probablement pas les mêmes que ceux qui habitent la chambre 237. Ou peut-être que si, allez savoir…

Le fait est que le mal est déjà là, profondément ancré. Et ce mal remonte à loin (loin comment ? Ça…). D’ailleurs, le point de vue adopté est beaucoup moins celui de Jack que ceux de Wendy et Dany, qui sentent monter le déséquilibre, et la menace. Et Kubrick nous balade à travers l’Overlook en faisant monter la tension qui, d’énorme, devient intenable, au point que les rares effusions de (bain de) sang et de violence s’avèrent libératrices.

Travellings hallucinants, gros plans percutants, visions d’horreurs… Kubrick nous entraîne dans un vertige de sensations, jusqu’à un final (littéralement) glaçant dans le labyrinthe de l’hôtel qui est aussi celui des méandres de l’esprit, et sans doute beaucoup plus. Quoi exactement ? On a la nuit pour y repenser, et elle risque d’être longue.

Nola Darling n’en fait qu’à sa tête (She’s gotta have it) – de Spike Lee – 1986

Posté : 22 septembre, 2023 @ 8:00 dans 1980-1989, LEE Spike | Pas de commentaires »

Nola Darling n'en fait qu'à sa tête

Le premier long métrage de Spike Lee n’est ni le plus abouti, ni le plus emblématique de sa carrière, loin de là. Mais le cinéaste y affirme déjà un ton, une certaine liberté, et ce sens de la rupture qui caractériseront beaucoup de ses films. Un mélange d’ironie mordante et de bien-pensance aussi, qui fait que même quand il secoue l’ordre établi, Lee reste un citoyen bien élevé.

Le personnage de Nola Darling ressemble en fait beaucoup à son cinéma : une jeune femme noire ivre de liberté, qui multiplie les amants tous différents les uns des autres, comme un refus de se plier à la norme, mais qui se révèle incapable de choisir entre une facette ou l’autre de l’homo erectus. Ou une fausse nympho qui finit par opter pour la chasteté.

Bref, Nola Darling n’est pas telle qu’elle semble être au premier abord, pas plus que le cinéma de Spike Lee, qui est finalement moins politique que… cinématographique. C’est sur la forme, plus que sur le fond, que Lee est grand. On ne peut pas dire que ce constat soit évident dès ce premier film, encore un peu brouillon, plus bouillonnant que maîtrisé. Mais quand même…

Si Nola Darling… tranche avec de nombreux (premiers) films de cette époque, ce n’est pas tant par la liberté affichée de son héroïne. Sur ce plan, Lee n’invente pas grand-chose : son cinéma évoque même celui d’un Cassavetes des premiers temps, en plus sage et moins subversif. Mais dans la forme, il impose déjà une marque très personnelle, par quelques détails qui lui sont propres.

Sa manière de filmer le visage et le corps de Tracy Camilla Johns (pas une grande actrice, mais une grande présence… qu’on ne reverra quasiment plus par la suite), son utilisation des travelling et des gros plans, sa construction qui évoque un journal intime, ou l’irruption soudaine de la couleur dans un film au noir et blanc granuleux. Des petites choses qui assoient déjà le regard singulier de Spike Lee.

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