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Archive pour la catégorie '1980-1989'

Pluie noire (Kuroi ame) – de Shohei Imamura – 1989

Posté : 17 novembre, 2014 @ 5:13 dans 1980-1989, IMAMURA Shohei | Pas de commentaires »

Pluie noire

Comment filmer l’indiscible ? Comment rendre palpable le summum de l’horreur et de l’inhumanité ? Imamura s’attaque à un sujet immense : l’utilisation de l’arme atomique sur Iroshima, sujet tellement inhumain, tellement extrême, qu’il n’a que rarement été évoqué frontalement au cinéma. Lui n’élude pas la violence et la souffrance physique : on a bien droit à d’insoutenables images de « la bombe », des corps disloqués, des visages déformés, des enfants comme figés, des êtres qui seraient grotesques si elles n’étaient pas aussi horribles…

Mais le cinéaste fait surtout le choix de rester constamment à hauteur d’hommes, en suivant le destin d’une poignée de personnages frappés directement par l’horreur, par ces scènes de fin du monde dont ils ont été les témoins « privilégiés » : un couple de Japonais « normaux » et leur nièce, qu’ils ont élevée, qui traversent les ruines encore fumantes sans la moindre protection, inconscients de faire le plein de cette radioactivité dont on sait qu’elle les condamne à une longue agonie…

Imamura filme la bombe H du strict point de vue de ces Japonais anonymes : comme la mort et l’horreur qui font irruption dans leur quotidien, sans que rien ne les y ai préparé. Et sans que personne ne les accompagne réellement et ne les aide à en affronter les conséquences. Les images d’horreur reviennent régulièrement, comme des cauchemars qui viennent hanter les personnages, comme gravés à jamais sur leurs rétines. Mais c’est surtout les effets de cette arme ultime sur leur vie que filme Imamura. L’incompréhension, l’ignorance absolue, et la conscience de plus en plus vive de devenir des parias, marqués par la « pluie noire ».

Rien de spectaculaire, dans ce que montre Imamura : des êtres fatigués qui observent impuissants leur propre décomposition ; une communauté qui enterre ses morts les uns après les autres, comme une triste routine dont chacun sait qu’elle les touchera bientôt ; une belle jeune femme dont les projets de mariage sont condamnés les uns après les autres, comme un sinistre running gag, qui serait comique s’il n’était aussi tragique. Imamura filme les espoirs déçus de cette amoureuse pleine de vie comme il filmerait une comédie romantique. Mais le rire reste constamment en travers de la gorge, entravé par l’horreur de ces destins sacrifiés.

Pluie noire est un film précieux mais sans illusion, comme ce fol espoir qui vient clore le film. Ce paysage figé que l’on scrute en espérant y voir apparaître un arc-en-ciel. Bien illusoire, bien sûr : comment tirer des leçons si tout le monde se désintéresse des victimes ? Prix spécial mérité au festival de Cannes en 1989.

Dreamscape (id.) – de Joseph Ruben – 1984

Posté : 26 octobre, 2014 @ 7:56 dans 1980-1989, FANTASTIQUE/SF, RUBEN Joseph | Pas de commentaires »

Dreamscape

Ainsi donc, vingt-cinq ans avant Inception, le grand-œuvre virtuose et un peu vain de Christopher Nolan, un autre auteur-réalisateur avait imaginé que l’on pouvait pénétrer dans les rêves d’autrui et y prendre une part active… Totalement tombé dans l’oubli, Dreamscape n’a même pas eu droit à un regain de notoriété lorsque est sorti le blockbuster de Nolan. C’eut pourtant été un juste retour des choses, tant la parenté entre ces deux films est flagrante. Avec Matrix aussi d’ailleurs, les Wachowski s’en étant visiblement très inspiré pour évoquer leur univers mental où toutes les prouesses sont possibles.

Bien sûr, il y a le poids des ans, flagrant dès la toute première scène, une séquence de cauchemar apocalyptique dont les effets spéciaux rudimentaires nous renvoient immédiatement à la préhistoire des trucages : la période pré-Terminator 2 pour faire court, à une époque où le top des jeux vidéos consistaient à faire bouger deux traits blancs pour se renvoyer une sorte de balle carrée.

On n’est pas très loin de cette caricature avec les trucages de Dreamscape, mais Joseph Ruben, réalisateur lui aussi tombé dans l’oubli mais qui eut beaucoup d’ambitions à ses débuts, parvient dans la plupart des séquences de rêves à créer une étrangeté sensorielle plutôt réussie, avec une économie de moyens assumée : une image légèrement distordue, quelques taches sur l’objectif, quelques décors oniriques… Les trucs les plus simples se révèlent nettement plus efficaces que les effets spéciaux plus recherchés.

Le scénario, lui, est un peu bancal et maladroit, avec des personnages assez mal dessinés que parviennent à sauver la plupart du temps d’excellents acteurs. C’est notamment le cas de Christopher Plummer, flippant en patron des services secrets hyper-puissants que le film montre simplement comme un mec super bien habillé et très raide entouré de trois gorilles un peu bas du front. Kate Capshaw est charmante mais n’a pas grand-chose d’autre à faire que d’être l’atout charme (et sexy dans une scène de rêve plutôt chaude). Max Von Sydow est impeccable dans un rôle de scientifique sans surprise. Et Dennis Quaid sourit déjà beaucoup en jeune médium qui voyage dans les rêves des autres… une sorte de répétition avant son voyage dans le corps humain (L’Aventure intérieure).

Tantôt réjouissant, tantôt frustrant, Dreamscape souffre de maladresses et d’un manque de rythme flagrant dans certaines scènes (était-ce bien utile de garder in extenso de longs trajets dans des couloirs, soulignés lourdement par une musique électro de Maurice Jarre qui a pris un sale coup de vieux). Il passe surtout à côté du grand film paranoïaque qu’il aurait pu être, dans la lignée d’Un crime dans la tête par exemple.

Au final, Ruben signe un film hybride ni très sombre, ni vraiment fun, que les distributeurs ne sauront pas comment et à qui vendre, tentant de le faire passer pour un film d’aventures à la Indiana Jones à travers une affiche originale aberrante, qui joue sans doute sur la présence de Kate Capshaw, à l’affiche cette même année d’Indiana Jones et le Temple maudit

• Le film est une rareté et une curiosité. C’est sans doute ce qui a incité le très exigeant éditeur Carlotta à le sortir dans un DVD au contenu éditorial assez limité. Uniques bonus : la bande annonce originale et une interview d’époque de Dennis Quaid, visiblement fatigué de répondre à d’insipides questions.

Bill Doolin le hors-la-loi (Cattle Annie and Little Britches) – de Lamont Johnson – 1980

Posté : 15 octobre, 2014 @ 2:10 dans 1980-1989, JOHNSON Lamont, WESTERNS | Pas de commentaires »

Bill Doolin le hors la loi

Heureuse surprise que ce western dont je n’avais même jamais entendu parler, signé par un réalisateur dont le Dialogue de feu (improbable rencontre entre Kirk Douglas et Johnny Cash) ne m’avait pas laissé un souvenir impérissable, pour rester tempéré. Tourné à une époque (1980) où le genre est à peu près totalement mort, ce beau film peuplé de figures authentiques de l’Ouest encore sauvage évoque à la fois les œuvres classiques d’un George Marshall, et les grandes œuvres à venir dans la lignée d’Impitoyable.

C’est une ode énamourée et un rien nostalgique aux mythes qui ont fait l’Ouest. C’est aussi un film qui démystifie gentiment : Burt Lancaster, impérial dans son dernier rôle d’homme de l’Ouest, est une légende qui apparaît d’abord dans toute sa superbe, avant d’être rapidement confronté à une réalité bien moins glamour. Son gang se résume à une bande de clodos crades et sans le sou, ses attaques de train se soldent par des butins ridicules (un cochon ou du matériel de base-ball).

Un humour légèrement désabusé baigne le film. Une grande vivacité aussi, avec les personnages de ces deux fillettes (Amanda Plummer et Diane Lane, formidables toutes les deux) qui rêvent de devenir hors-la-loi, et qui redonnent du souffle à ce gang vieillissant qui ne croit plus en grand-chose. Au cœur du film, les deux jeunes filles donnent aussi un ton totalement atypique au film, apportant une tendresse inattendue et touchante aux rapports entre ces gangsters revenus de tout.

Mais c’est bien la fin d’une époque que montre le film : la vie dont rêve les gamines, elles l’ont fantasmée à travers des romans illustrés qui immortalisent une épopée qui s’achève. Et puis Lancaster, comme sa nemesis, le marshall joué par Rod Steiger, sont deux hommes d’un autre âge, des « vieux ». Le plus beau, d’ailleurs, c’est peut-être ces petits moments fugaces où le regard de Lancaster accuse soudainement le poids de son âge ; ou encore lorsque Rod Steiger, pour une fois sobre, et Lancaster, côte à côte, reconnaissent avec émotion que les deux jeunes filles ont leur avenir devant elles, alors que eux sont des vieux promis à une disparition rapide.

Passé totalement inaperçu (il n’est même pas sorti en salles en France), un western surprenant, et très attachant.

• DVD dans la collection Western de Légende de Sidonis, avec une présentation par Patrick Brion et un documentaire sur Burt Lancaster.

L’Inspecteur Harry est la dernière cible (The Dead Pool) – de Buddy Van Horn – 1988

Posté : 15 octobre, 2014 @ 1:59 dans * Thrillers US (1980-…), 1980-1989, EASTWOOD Clint (acteur), VAN HORN Buddy | Pas de commentaires »

L'Inspecteur Harry est la dernière cible

A la fin des années 80, Clint Eastwood arrive dans une sorte d’impasse. Sa fameuse logique de carrière, selon laquelle un film de genre permet de combler les déficits de ses œuvres plus personnelles, atteint sa limite. Et l’âge venant, Clint sait qu’il ne pourra pas jouer indéfiniment les superflics. Contre toute-attente, il sort une dernière fois l’inspecteur Harry de sa retraite, désireux d’offrir à la Warner un succès garanti, alors qu’il vient d’achever le tournage de Bird, film auquel il tient particulièrement en dépit de toute logique commerciale.

Mieux : avant de tourner un autre film très personnel, hommage à John Huston et African Queen (Chasseur Blanc, cœur noir), il enchaîne les tournages de deux polars, dont il confie la réalisation à son fidèle responsable des cascades, Buddy Van Horn. Ce sera La Dernière Cible, celui des cinq « Harry » qui connaîtra le succès le plus modeste ; et Pink Cadillac, un nanar tout juste sympathique qui sera un désastre commercial, et ne sortira pas même dans les salles françaises.

Ses films plus personnels ne connaissant qu’un succès commercial d’estime, Eastwood est alors dans le plus grand creux de sa carrière, depuis ses premiers succès vingt-cinq ans plus tôt. Déconnecté du public, il tentera de surfer sur la nouvelle mode des action-movies avec La Relève. Mais ce n’est que lorsqu’il abandonnera toute logique de carrière, et qu’il se contentera de faire ce dont il a envie qu’il enchaînera ses meilleurs films : avec Impitoyable, c’est une nouvelle ère, la plus passionnante, qui s’ouvrira pour lui.

Voilà pour le contexte. Du film lui-même, pas grand-chose à dire, une fois que l’on connaît sa raison d’être, et la personnalité du réalisateur : Van Horn, le collaborateur de toujours, que l’on a même vu incarner le shérif dans les flash-backs de L’Homme des hautes plaines, et qu’Eastwood semble remercier pour sa fidélité plus que pour un talent que, de toute évidence, il n’a pas. Van Horn n’est qu’un yes-man qui signe une réalisation propre mais purement fonctionnelle.

Peu de surprise dans ce Dirty Harry numéro cinq, qui reprend les mêmes recettes que les précédents films. Au détour d’un repas aux chandelles entre Harry et une journaliste (Patricia Clarkson), la brève évocation du passé de Callahan, et la lumière chaude et intime du restaurant, laisse en suspense une petite touche d’émotion et de nostalgie, rapidement balayée par une énième fusillade. On peut noter aussi la présence de Liam Neeson, pas terrible dans l’un de ses premiers rôles d’envergure. Ou encore l’une des premières apparitions à l’écran de Jim Carrey, dans celui de la star du rock qui trépasse à la fin de la première bobine.

On peut surtout s’amuser du sort réservé à une critique de cinéma acerbe que l’on devine inspirée par Pauline Kael, la grande prêtresse de la critique américaine, farouche détracteur d’Eastwood qui fut l’une des seules à descendre en flamme Bird lors de sa présentation à Cannes.

Mais le film ne semble avoir qu’un objectif : nous conduire à cette incroyable poursuite en voitures dans les rues de San Francisco entre la Ford de Callahan et un modèle réduit… clin d’œil un rien parodique aux grandes poursuites du polar des années 70, qui faisaient les grandes heures de Bullitt, French Connection… ou Dirty Harry.

• Voir aussi les quatre précédents épisodes de la saga Callahan, très inégaux : L’Inspecteur Harry,Magnum Force, L’Inspecteur ne renonce jamais et Le Retour de l’Inspecteur Harry.

Le Retour de l’Inspecteur Harry (Sudden Impact) – de Clint Eastwood – 1983

Posté : 18 septembre, 2014 @ 2:27 dans * Thrillers US (1980-…), 1980-1989, EASTWOOD Clint (acteur), EASTWOOD Clint (réal.) | 1 commentaire »

Le Retour de l'Inspecteur Harry

« Go ahead, make my day ! »

En 1983, Clint Eastwood a 53 ans et reste une star toute puissante, mais un cinéaste pas encore tout à fait reconnu par la critique. L’année précédente, son magnifique Honkytonk Man n’a pas déchaîné les enthousiasmes, pas plus que le très beau et très personnel Bronco Billy, faux western déroutant et comédie douce-amère à la Capra. A cette époque, Eastwood est en plein dans sa logique « un film personnel – un film commercial ». Après les échecs commerciaux de ses deux films précédents, quoi de mieux, donc, que de renouer avec son personnage le plus populaire, Dirty Harry en personne.

Ce retour n’avait alors rien d’évident : le dernier film de la série, le faiblard The Enforcer remontait déjà à sept ans, et Clint s’était éloigné depuis du polar pur et dur : sa seule incursion dans le genre, L’Epreuve de force, relevait avait un aspect parodique poussé à l’extrême. D’ailleurs, en retrouvant son personnage fétiche, et en assurant lui-même la réalisation de ce quatrième volet (c’est le seul Dirty Harry qu’il signe), Eastwood entend bien en faire ce qu’il veut. C’est-à-dire ne pas prendre au sérieux ce personnage qu’il a jusque là interprété au premier degré, mais dont il fait ici une sorte de parodie de lui-même.

Flic las et écoeuré, Harry Calahan se transforme dans Sudden Impact en une sorte de chevalier moderne privé d’affect et de perspective, et qui semble attirer toute la violence et toute la haine de San Francisco. Le film, surtout dans sa première partie, enchaîne ainsi les fusillades sans raison ni logique, comme s’il remplissait un simple cahier des charges. Le scénario est fait de multiples rebondissements, grotesques et inutiles, et donne la part belle aux petites phrases censées restées dans l’histoire. C’est d’ailleurs réussi : que reste-t-il de Sudden Impact si ce n’est « Smith, Wesson, and me » et « Go ahead, make my day », deux phrases cultes qu’Eastwood sort dans la même scène, en quelques secondes seulement.

Mais parfois, au détour d’un plan qui s’allonge plus qu’il ne faudrait, des accords de jazz se mettent à résonner, et la patte d’Eastwood apparaît subrepticement. La vérité, c’est qu’Eastwood semble peu intéressé par ce personnage condamné à revivre inlassablement les mêmes écueils (fusillades, embuscades, et bureaucratie), et dont il fait une machine affublée d’un chien pêteur !

Ce qui l’intéresse visiblement beaucoup plus, c’est le personnage joué par Sandra Locke (leur dernier film en commun, si on exclut Vanessa, l’épisode de la série Amazing Stories), hantée par un viol dont elle et sa sœur ont été victimes dix ans plus tôt. La descente aux enfers de cette jeune femme en apparence si fragile, mais lancée dans une croisade vengeresse et violente, est le vrai sujet du film.

Là, on retrouve toute l’ambiguïté du personnage de Harry. Où se situe la justice ? Jusqu’où peut-on aller quand l’institution n’est pas efficace ? Là, enfin, le film devient troublant et fascinant, à mesure que Callahan paraît tiraillé par cette interrogation. Jusqu’à une séquence finale virtuose et crépusculaire dans un parc d’attraction à l’abandon. Laissé pour mort, Callahan réapparaît comme s’il sortait de la nuit, silhouette menaçantee et presque surnaturelle, une apparition fantômatiqu, figure redondante du cinéma d’Eastwood, de L’Homme des hautes plaines à Impitoyable.

Sans un mot, Eastwood impose alors sa marque. Avec nettement plus de force que lorsqu’il enchaîne les bons mots un peu lourdingues et les rebondissements inutiles.

• Pour l’intégrale Harry Callahan, voir aussi L’Inspecteur Harry, Magnum Force, L’Inspecteur ne renonce jamais et La Dernière Cible.

Les Faucons de la nuit (Nighthawks) – de Bruce Malmuth – 1981

Posté : 29 août, 2014 @ 3:51 dans * Thrillers US (1980-…), 1980-1989, MALMUTH Bruce, STALLONE Sylvester | Pas de commentaires »

Les Faucons de la nuit

En 1981, l’année de sa sortie, Les Faucons de la nuit devait déjà sembler anachronique, tant il fleure bon les années 70. Le look qu’arbore Stallone ne ment pas : manteau en cuir, grosses lunettes et barbe d’une semaine… c’est le flic à la sauce Serpico que tente de retrouver l’obscur réalisateur Bruce Malmuth. Avec un bonheur, disons, mitigé.

Ce n’est quand même pas un hasard si, d’une part, le nom de Malmuth est totalement tombé dans l’oubli, et si ce film demeure largement méconnu, alors que Stallone était déjà une star quand il l’a tourné (c’était aussi l’année de Rocky 3). Plein de bonnes intentions, Les Faucons de la nuit est un film souvent très maladroit, et écrit avec des moufles.

Le scénario ne fait pas grand cas de la vraisemblance, avec ces deux flics bad-ass (Stallone et Billy Dee Williams, qui venait de connaître une gloire éphémère avec L’Empire contre-attaque) qui passent leurs journée à monter des traquenards pour délinquants ; la psychologie des personnages se résume à… rien du tout ; et les principaux rebondissements dramatiques du film sont gâchés par des ficelles énormes (lorsque Stallone propose au boss qu’il ne pouvait pas blairer trois minutes plus tôt d’aller manger chinois lorsque leur opération serait terminée, on comprend tout de suite que le boss en question ne s’en sortira pas).

Il y a pourtant du très bon, dans ce polar urbain qui s’inscrit dans une prestigieuse lignée de classique des seventies (Dirty Harry en tête), et qui pose mine de rien des questions complexes et avant-gardistes : s’interroger, vingt ans avant le 11 septembre, sur les méthodes acceptables à utiliser contre le terrorisme, paraît bien en avance sur son temps. Le fait d’avoir limité l’ennemi à un homme (Rutger Hauer) plutôt qu’à une organisation, ou une « cause », en limite l’impact, mais tout de même…

Visuellement aussi, quelques fulgurances viennent sortir le film de l’anonymat : une poignée d’images jouant habilement sur la profondeur de champs, une séquence nocturne joliment stylisée, ou encore une poursuite dans le métro parfaitement haletante… Mais ces passages franchement passionnants alternent constamment avec des procédés nettement plus discutables. Jusqu’au dénouement final qui, en une poignée de plans (et de secondes), parvient à alterner le meilleur (quelques gros plans joliment tendus) et le grand guignol (le corps qui s’effondre en virevoltant).

Imparfait, Les Faucons de la Nuit reste toutefois une curiosité plutôt recommandable pour les admirateurs de Stallone.

Local Hero (id.) – de Bill Forsyth – 1983

Posté : 12 août, 2014 @ 4:24 dans 1980-1989, FORSYTH Bill, LANCASTER Burt | Pas de commentaires »

Local Hero

Il y a des endroits, comme ça, dont on aimerait faire partie. Des lieux que l’on découvre et vers lesquels on retourne régulièrement tout au long de sa vie, qu’on quitte à chaque fois en ayant l’impression d’y laisser une part de soi, mais où on sait bien qu’on sera toujours un étranger. Pour moi, ce sont les Highlands, dans le nord de l’Ecosse. Et c’est très exactement ce sentiment qu’y découvre le personnage principal de Local Hero.

Le film de Bill Forsyth est forcément séduisant. Parce qu’il y a les paysages si majestueux et dramatiques des Highlands, et surtout parce qu’on y retrouve l’esprit écossais : ce mélange de rugosité et de chaleur, cette manière de porter avec fierté la difficulté de la vie dans cette région vaste et quasi-déserte, à la beauté revêche.

Le film suit le rythme de MacIntyre, ce faux Ecossais, Américain sans racine chargé par une grande compagnie pétrolière texane de négocier avec les villageois écossais le rachat de leurs terrains, afin d’y implanter un gigantesque centre pétrolier. Et c’est lorsque ce rythme se coule enfin dans celui de cette petite communauté écossaise que le film devient vraiment beau et envoûtant. On se sent alors l’âme de ce marin russe qui débarque comme il le fait visiblement régulièrement pour profiter d’une tranche de vie dans ce village en dehors du monde…

Mais la première partie, essentiellement texane, déstabilise un peu. Des images grises au grain peu séduisant, une musique très datée eighties, et un scénar qui ne fait rien pour éviter les grosses ficelles : la grande ville contre le petit village, la toute puissante compagnie contre des villageois sans ressource, des hommes riches mais seuls contre une communauté pauvre mais soudée… Et puis Forsyth glisse un étrange humour décalé qui ne fait jamais vraiment mouche, donnant trop d’importance au grand patron de la compagnie (joué il est vrai par Burt Lancaster), homme vieillissant suivant une curieuse thérapie basée sur l’humiliation.

Un film en demi-teinte, donc, mais qui donne furieusement envie de se perdre dans le brouillard et sur les petites routes d’Ecosse… et de s’installer au comptoir de ce pub, pour goûter ce whisky de 42 ans d’âge en écoutant les conversations des villageois…

• Le DVD du film fait partie de la collection Les Films de ma vie.

Top Gun (id.) – de Tony Scott – 1986

Posté : 1 juillet, 2014 @ 8:13 dans 1980-1989, CRUISE Tom, SCOTT Tony | 1 commentaire »

Top Gun

La sortie dans une belle édition blue ray de ce film étendard de la culture pop des eighties est l’occasion de redécouvrir le film qui a fait de Tom Cruise la plus grande star de sa génération à seulement 24 ans, lui qui venait d’être remarqué dans Risky Business (un succès) et Legend (un échec), sans doute le film le plus oublié de Ridley Scott.

Changement de style, donc, avec l’autre frangin Scott qui, avec ce Top Gun, crée une imagerie qui fera école dans les dix ans qui suivront. Pour le pire plus que pour le meilleur, d’ailleurs : héroïsme primaire, glorification du corps et de l’uniforme, musiques sirupeuses et esthétique criarde, Top Gun est le symbole de ce qui s’est fait à peu près de pire dans le cinéma américain.

Le scénario tient sur une plaque d’identification, et le film étire à l’envi des scènes qui n’apportent rien d’autres que des images qui renforcent la cool attitude des personnages : une interminable partie de beach volley pour mettre en valeur les corps musclés et bronzés des pilotes, d’innombrables chevauchées à moto de Tom dans le crépuscule… Le film semble bien souvent n’être qu’une succession de clips illustrant des chansons guimauve qui furent des tubes.

On devrait le détester, ce film, et pourtant… Est-ce pour les images, tout de même souvent très belles ? Est-ce pour les répliques cool et cultes qu’on se récitait en boucle dans les cours de récréation ? Est-ce pour la naissance de la star Tom Cruise ? Toujours est-il que le film garde une vraie côte de sympathie, malgré des séquences aériennes trop longues, et une histoire d’amour qui paraît hors de propos.

Non, Top Gun est une histoire d’hommes entre eux. La vraie love story, ce n’est pas celle qui unit Tom Cruise à Kelly McGillis, mais celle entre l’interprète de Maverick et celui d’Iceman, Val Kilmer. Leur attirance-répulsion, marquée par l’admiration, la rivalité, et une espèce d’amour vachard, est le vrai sujet de ce film qui, malgré tout ses aspects typiquement années 80, supporte plutôt bien l’épreuve du temps.

Et puis il y a Tom Cruise, à la jeunesse insolente, qui donne le ton au film. Sa performance, ici, n’est pas particulièrement nuancée. Mais il est de toutes les scènes, et son charisme, sa présence hors du commun, font énormément pour la réussite du film. Autant que ce que le film a apporté à la carrière de la star…

• Le digibook que Paramount vient d’éditer propose une quantité de bonus sur le blue ray, notamment un très long et très intéressant making of dans lequel interviennent aussi bien Tom Cruise que Jerry Bruckenheimer, Tony Scott ou Val Kilmer. Le livre, lui, est essentiellement une succession de belles illustrations et de citations du film.

La Valse des pantins (The King of Comedy) – de Martin Scorsese – 1983

Posté : 27 juin, 2014 @ 4:39 dans 1980-1989, DE NIRO Robert, SCORSESE Martin | Pas de commentaires »

La Valse des pantins

En filmant des personnages borderline, incapables de trouver leur place dans la société, ou à la frontière de la folie, Scorsese a souvent créé le malaise dans ses films, de Taxi Driver à Shutter Island. Mais c’est peut-être dans cette satire en apparence plus anodine que le malaise est le plus grand, dans ce portrait d’un apprenti comique trop sûr de lui, qui se heurte à la réalité d’un monde pour lequel il n’est pas taillé. Du moins de l’avis général…

Tourné après le phénomène Raging Bull, qui avait consacré Scorsese comme l’un des plus grands cinéastes du moment, et Robert DeNiro comme l’acteur le plus doué de sa génération, La Valse des pantins peut semble plus anecdotique. La forme est ainsi nettement plus classique, même si le réalisateur joue habilement avec les codes de la télévision et du cinéma pour explorer les fantasmes de son personnage. Et le sujet lui-même ne semble pas très sérieux.

Rupert Pupkin, donc, qui se rêve en nouvelle vedette du one-man-show, fait partie d’une meute de fans hystériques qui chassent les autographes, et parvient miraculeusement à approcher son idole, Jerry Langford (Jerry Lewis, qui parvient à insuffler une vraie humanité à ce personnage peu aimable, et réduit au rang d’icône désincarnée). Pour se débarrasser de cet emmerdeur, la star lui propose de prendre rendez-vous à son bureau. Sauf que, appel après appel, visite après visite, la porte reste fermée à Pupkin, dont personne ne parvient jamais à prononcer le nom.

Le film laisse entrapercevoir des bribes du quotidien solitaire de la star. Mais c’est surtout le personnage de Pupkin qui fascine Scorsese : ce type tellement persuadé de son destin, qui fantasme d’hypothétiques conversations à sa gloire, lance ses vannes devant le poster d’une foule en délire en imaginant ses applaudissements, et sourie seul à ses plaisanteries… Un homme si déterminé qu’il va toujours de plus en plus loin dans les situations embarrassantes. Pour le spectateur en tout cas, toujours plus mal à l’aise, à l’image de Rita, l’amour de jeunesse qui accepte de le suivre pour un week-end chez Jerry, où Rupert assure avoir été invité.

La première heure est absolument formidable, mais totalement inconfortable, tant Scorsese filme des personnages navrants : une star du rire trop seule et trop aigrie, une groupie prête à tout et hystérique (Sandra Bernhard, hallucinante), une ex-reine de beauté sans un avenir dans un rade paumé, et cet apprenti comique ridicule et totalement inadapté à la société.

Sauf que tout n’est pas si simple. Pupkin / De Niro est bien prêt à tout, et enlèvera cette star qui lui a refusé la chance qu’il espérait, et ira au bout de sa « folie » pour obtenir ce qu’il veut. Cynique, Scorsese clôt son film sur une victoire inattendue, sorte de miroir inversé de la fin de Raging Bull, et porte ouverte vers une nouvelle ère pour le cinéma et la télévision, d’une froide modernité. De Niro, qui a porté le projet du film pendant dix ans, est exceptionnel dans le rôle de ce faux ringard à la folie déstabilisante.

• Carlotta vient d’éditer un double DVD du film (restauré en 2013), et des bonus passionnants : un documentaire dans lequel Scorsese et Sandra Bernard reviennent sur le tournage ; une interview passionnante de Thelma Schoonmaker, la monteuse attitrée de Scorsese ; plus d’une demi-heure de scènes coupées ; et une longue conversation entre De Niro, Scorsese et Jerry Lewis filmée en 2013 en clôture du festival de Tribeca, où la version restaurée du film avait été présentée.

Terminator (The Terminator) – de James Cameron – 1984

Posté : 2 mai, 2014 @ 2:26 dans 1980-1989, CAMERON James, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Terminator

Alors que Schwarzenegger s’apprête à retrouver son rôle fétiche de T-800, un petit retour aux sources s’impose avec ce Terminator premier du nom, petite révolution du cinéma d’action et de la SF sortie il y a tout juste trente ans, et qui a propulsé Schwarzie dans une autre dimension, lui qui n’était alors connu que pour son passé de Mister Univers, et pour son rôle musculeux de Conan.

Avec Terminator, l’acteur novice a eu une grande inspiration : refuser le rôle héroïque de Kyle Reese, qui lui était destiné, pour réclamer celui du Terminator, machine de mort pour laquelle sa stature monumentale, sa présence incroyable, mais aussi ses limites d’acteur, sont d’immenses atouts. Son inexpressivité, et l’absence totale de sentiments qu’il véhicule ici font beaucoup pour la réussite du film.

Car le film reste une référence, même s’il accuse rudement, par certains aspects, le poids des trois décennies écoulées. On est en plein dans les années 80, sans doute la période qui a le plus mal vieilli en terme de cinéma populaire. Les effets spéciaux, bien sûr, font pâle figure à côté de ceux de T2, sorti sept ans plus tard seulement. Le look de Linda Hamilton et les fringues de Schwarzie sont bien rigolos, aussi. Mais le pire, c’est la musique qui, à l’exception de l’inoubliable thème principal et de quelques passages, est assez horrible, en particulier dans les séquences d’action, baignées par une bande son électro-bontanpi insupportable.

Mais il y a l’efficacité, imparable, de la mise en scène d’un James Cameron qui, après le coup d’essai de Piranhas 2, entre d’un coup dans la cour des grands. Le jeune cinéaste, surtout, pose les bases d’une mythologie fascinante et pleine de promesses (promesses qui ne seront vraiment tenues que par lui-même pour la première suite, les deux films suivant étant loin d’être à la hauteur).

Cameron signe un pur film de divertissement, bourré d’action et très impressionnant. Mais il le fait en soulevant des questions vertigineuses sur la destinée et sur l’inéluctabilité, et en s’évertuant à gommer la frontière entre passé, présent et avenir… Osant la noirceur la plus totale, Cameron filme une société condamnée à l’extermination, invoquant d’ailleurs des références à la Shoah avec les confidences de Reese (l’envoyé du futur interprété par Michael Biehn), qui en disent plus sur l’avenir que les quelques flash-forwards avec lesquels le cinéaste laisse déjà transparaître son goût pour la démesure.

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