La Chatte sort ses griffes – de Henri Decoin – 1960
Le succès de La Chatte, deux ans plus tôt, a donné des idées aux producteurs. Seul problème : l’héroïne, résistante piégée par les Nazis, finissait mal. Dans ces conditions, comment faire revenir Françoise Arnoul, qui avait fait sensation dans le premier film, et qui serait la raison d’être d’une possible suite.
Cette suite, donc, commence très exactement là où s’achevait le premier film : dans la rue, là où Cora, la « Chatte », a été abattue par ses anciens compagnons persuadés de sa traîtrise. Sauf que, après le générique de fin du premier film, et pendant le générique de début de celui-ci, Cora a été sauvée, ramenée à la vie par des médecins allemands. Qui lui ont fait un lavage de cerveau pour en faire une espionne.
Voilà un argument digne des serials les plus décomplexés des années 30. De fait, la suite, toujours signée Decoin, prend des raccourcis pour le moins audacieux : la facilité avec laquelle Cora revient à la vie, le fait qu’elle puisse infiltrer sans problème une Résistance qui lui faisait tellement peu confiance qu’elle en est (presque) morte… Tout ça sent la mauvaise idée et le fiasco à plein nez.
Pourtant, ça marche. Toutes ses réserves mises à part, et une fois l’idée même de cette suite improbable digérée, La Chatte sort ses griffes s’avère tout aussi passionnant et tendu que le premier film. Decoin y joue une nouvelle fois sur le trouble d’une jeune femme sans histoire plongée bien malgré elle dans un univers de violence, et qui refuse d’abdiquer.
Et cette fois encore, Françoise Arnoul est parfaite dans ce rôle, mélange de fragilité et de détermination, qui apporte au film ce je ne sais quoi de différent, comme si c’était son visage si insondable qui donnait son atmosphère et son rythme au film. Son regard lorsqu’elle assiste à la condamnation à mort d’un résistant par la résistance, sans intervenir, semble être un cri déchirant et silencieux.
Rien ne devait marcher dans cette suite tellement improbable. Pourtant, en assumant ses contraintes scénaristiques, en mettant une nouvelle fois en valeur son actrice principale, Decoin emporte plutôt la mise. Une suite réussie, donc, en dépit de tout.