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Archive pour la catégorie '1960-1969'

La Chatte sort ses griffes – de Henri Decoin – 1960

Posté : 22 décembre, 2022 @ 8:00 dans 1960-1969, DECOIN Henri | Pas de commentaires »

La Chatte sort ses griffes

Le succès de La Chatte, deux ans plus tôt, a donné des idées aux producteurs. Seul problème : l’héroïne, résistante piégée par les Nazis, finissait mal. Dans ces conditions, comment faire revenir Françoise Arnoul, qui avait fait sensation dans le premier film, et qui serait la raison d’être d’une possible suite.

Cette suite, donc, commence très exactement là où s’achevait le premier film : dans la rue, là où Cora, la « Chatte », a été abattue par ses anciens compagnons persuadés de sa traîtrise. Sauf que, après le générique de fin du premier film, et pendant le générique de début de celui-ci, Cora a été sauvée, ramenée à la vie par des médecins allemands. Qui lui ont fait un lavage de cerveau pour en faire une espionne.

Voilà un argument digne des serials les plus décomplexés des années 30. De fait, la suite, toujours signée Decoin, prend des raccourcis pour le moins audacieux : la facilité avec laquelle Cora revient à la vie, le fait qu’elle puisse infiltrer sans problème une Résistance qui lui faisait tellement peu confiance qu’elle en est (presque) morte… Tout ça sent la mauvaise idée et le fiasco à plein nez.

Pourtant, ça marche. Toutes ses réserves mises à part, et une fois l’idée même de cette suite improbable digérée, La Chatte sort ses griffes s’avère tout aussi passionnant et tendu que le premier film. Decoin y joue une nouvelle fois sur le trouble d’une jeune femme sans histoire plongée bien malgré elle dans un univers de violence, et qui refuse d’abdiquer.

Et cette fois encore, Françoise Arnoul est parfaite dans ce rôle, mélange de fragilité et de détermination, qui apporte au film ce je ne sais quoi de différent, comme si c’était son visage si insondable qui donnait son atmosphère et son rythme au film. Son regard lorsqu’elle assiste à la condamnation à mort d’un résistant par la résistance, sans intervenir, semble être un cri déchirant et silencieux.

Rien ne devait marcher dans cette suite tellement improbable. Pourtant, en assumant ses contraintes scénaristiques, en mettant une nouvelle fois en valeur son actrice principale, Decoin emporte plutôt la mise. Une suite réussie, donc, en dépit de tout.

Maléfices – de Henri Decoin – 1962

Posté : 21 décembre, 2022 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1960-1969, DECOIN Henri | Pas de commentaires »

Maléfices

Decoin qui marche dans les pas de Jacques Tourneur ? Voilà qui mérite le détour, et voilà qui mérite d’être salué : même si, esthétiquement, on est loin des zones d’ombre chères au cinéaste de La Féline et de Vaudou (ici, c’est plutôt grand ciel lumineux et vastes horizons), ce Maléfices frappe d’emblée par la manière dont Decoin fait naître l’angoisse.

C’est frappant dès le générique de début, avec ce long travelling aérien sur une musique déstructurée et crispante soulignant parfaitement ce qui va être l’atmosphère du film, dévoilant le décor central du drame : une route immergée à marée basse reliant le continent rassurant (là où le héros vit avec sa douce épouse dans une maison chaleureuse) à la presque île menaçante (là où le même héros vit une liaison avec une femme belle et inquiétante, dans une villa angoissante).

Cette route entre terre et mer, qui apparaît et disparaît au rythme des marées, est un motif central, omniprésent. Le film semble n’être construit qu’autour de cette route, lieu d’incessants allers et retours, comme autant de doute dans l’esprit de plus en plus torturé du héros (Jean-Marc Bory), vétérinaire de campagne qui réalise un peu tristement qu’il ne désire plus sa femme, pourtant si belle et si aimante (Liselotte Pulver), et qui tombe entre les mains de cette mystérieuse femme dont il vient soigner le guépard…

Juliette Gréco, qui apporte la dimension mystérieuse qu’il fallait à ce personnage, influencée par les rites magiques de l’Afrique noire… L’histoire se passe près de Noirmoutier, mais ces rites magiques semblent omniprésents. Des vaches tombent malades, et un vieux fermier est persuadé qu’un ennemi lui a jeté un sort. Et les drogues que prend la mystérieuse brune, ne lui permettent-elles pas de quitter son corps pour assouvir une malédiction ?

Les promesses du début ne sont pas totalement tenues, en tout cas pas jusqu’au bout : le film cède à une conclusion plus convenable. Mais Decoin, malgré cette esthétique typique des années 60, très lisse et un peu terne, réussit un vrai film d’angoisse, qui joue parfaitement avec les peurs et les superstitions. Dans la production française, ce n’est pas si courant…

El Texican (The Texican / El Tejano) – de Lesley Selander – 1966

Posté : 19 décembre, 2022 @ 8:00 dans 1960-1969, MURPHY Audie, SELANDER Lesley, WESTERNS | Pas de commentaires »

El Texican

Marrant ce western où Audie Murphy passe une grande partie de son temps à chevaucher dans des paysages très vallonnés, montant et descendant de petites collines, semblant tourner en rond pour bien mettre en valeur les décors naturels, censés être les rives du Rio Grande.

Le film a en fait été tourné en Espagne, ce qui n’a rien d’étonnant dans ce mitan des années 1960 : on est alors en pleine vogue du western italien, et on sent clairement son influence sur cette coproduction américano-européenne. Dans les duels surtout, où Audie Murphy se retrouve systématiquement face à plusieurs tueurs, comme Clint Eastwood chez Sergio Leone. Dans l’utilisation d’une musique tonitruante aussi, hélas pas signée Morricone, et très encombrantes.

Il y a d’ailleurs beaucoup de maladresses, voire de lourdeurs dans cette petite production pas désagréable, mais sans grande surprise. Lesley Selander a du mal à trouver ses marques, oscillant constamment entre cette influence européenne et une approche plus classique du western, genre qui, à Hollywood, est alors en bout de course.

Est-ce de là que vient l’étrange nostalgie qui plane sur tout le film, et ce rythme un peu lent, un peu fatigué. Audie Murphy lui-même (qui ne tournera plus que deux films avant de mourir prématurément) incarne un mauvais garçon qui semble revenu de tout, profondément las. Son face-à-face avec un chasseur de prime venu le capturer est particulièrement étonnant, et même assez beau, les deux hommes qui se connaissent depuis longtemps paraissant résignés, accablés par ce destin qu’ils n’ont pas la force de contourner…

Un beau moment aussi, étonnant : l’arrivée du héros dans un saloon et son « dialogue » musical avec un cowboy qui entonne des ballades à la guitare, commentant la tension montante en improvisant cette chanson dans son coin. Un intermède musical qui reste hélas sans suite, dont on se dit qu’il aurait pu être la base d’une sorte de chœur antique très séduisant.

Des qualités, donc, dans ce western imparfait. Et surtout la présence de Broderick Crawford. Avec sa masse et son incroyable voix profonde, impérial et parfaitement juste comme toujours, même dans un rôle caricatural comme celui-ci. Le genre d’acteurs capable de sortir n’importe quelle série B de l’anonymat.

Le Garde du corps (Yojimbo) – d’Akira Kurosawa – 1961

Posté : 28 novembre, 2022 @ 8:00 dans 1960-1969, KUROSAWA Akira | Pas de commentaires »

Le Garde du Corps Yojimbo

On le sait, le cinéma de Kurosawa a énormément inspiré le western, et au-delà une partie du cinéma populaire hollywoodien (des Sept Mercenaires à Star Wars). Mais lui-même s’est nettement nourri du cinéma américain. Ce Yojimbo, que Sergio Leone adaptera très fidèlement sans le dire avec Pour une poignée de dollars, doit ainsi beaucoup à La Clé de verre, classique du film noir dont le héros, joué par Alan Ladd, joue un double-jeu très similaire à celui de Toshiro Mifune ici.

Les héros des deux films, en apparence très différents, sont également taiseux, et cachent derrière un cynisme revendiqué une sorte de grandeur d’âme, en tout cas une fidélité à des valeurs qui font défaut à la plupart des autres personnages, trop occupés à se livrer à une guerre de pouvoir. Sanjuro (Mifune) est taiseux parce qu’il analyse, parce qu’il calcule, parce qu’il sait que ses talents de combattant valent cher dans un conflit comme celui qui oppose ces deux familles.

Ce cynisme est de façade : c’est parce qu’il agit en fonction de la morale que le « garde du corps » frôle le trépas (grande différence avec le remake de Leone, où on verra longuement Clint Eastwood se faire tabasser : Mifune apparaît le visage tuméfié après avoir été battu hors champs). Mais il y en a bien un fond (de cynisme) : dans la manière dont Mifune fait le ménage dans la ville, s’amusant du décompte des cadavres qu’il laisse derrière lui.

La violence est extrême (bras et mains coupés, morts qui s’enchaînent). Elle est pourtant relativement peu présente à l’écran, souvent amorcée et reportée, constamment fulgurante. Kurosawa ne s’y attarde pas (au contraire de Leone), privilégiant la tension et l’ironie, qui s’installent dès la longue scène d’introduction, lorsque le personnage de Mifune débarque dans cette ville à pied et observe en silence l’étrange ballet de haine qui s’y livre.

Sept ans après Les Sept Samouraïs, Kurosawa revient à un genre qui lui réussit bien, mais avec une vision dépouillée et radicalisée. Le cinéaste s’est montré et se montrera autrement plus ambitieux, thématiquement. Mais il se concentre ici sur le pur plaisir d’un cinéma d’action tendu et réjouissant. C’est ce qu’on appelle un exercice de style, et c’est rudement bon.

L’Affaire Thomas Crown (The Thomas Crown Affair) – de Norman Jewison – 1968

Posté : 11 novembre, 2022 @ 8:00 dans * Polars US (1960-1979), 1960-1969, JEWISON Noman | Pas de commentaires »

L'affaire Thomas Crown

Franchement, je ne crois pas une seconde en ce personnage de riche homme d’affaire qui organise des braquages de banques pour se distraire. Franchement, je ne crois pas une seconde en cette enquêtrice d’assurances qui tombe sous le charme de sa proie après avoir mis quelques minutes à peine à l’identifier. Pourtant, L’Affaire Thomas Crown est un film passionnant, et fascinant. Etrange, non ?

Norman Jewison lui-même a dit que pour ce film, la forme était plus importante que le fond (source Wikipédia, c’est dire si c’est fiable). C’est effectivement la forme qui fascine. Moins, sans doute, les allusions sexuelles très, très lourdement appuyées de la fameuse scène des échecs entre Faye Dunaway et Steve McQueen, que l’utilisation du split-screen, pour laquelle le film est entré dans la légende.

Jewison n’est pas le premier cinéaste à utiliser ce dispositif qui consiste à séparer l’écran en plusieurs images (Loïs Weber l’a fait plus d’un demi-siècle avant lui, dans Suspense), et bien sûr par le dernier (Richard Fleischer l’imitera quelques mois plus tard avec L’Etrangleur de Boston). Mais pas sûr qu’il ait été surpassé : jamais gratuit, jamais répétitif, jamais pesant, ce dispositif participe au rythme et à l’atmosphère de ce faux thriller dont le suspense tourne court, Jewison ne s’intéressant qu’à créer de beaux moments de cinéma.

Cela se sent dans les premiers face à face entre ses deux stars, où le cinéaste s’amuse à souligner la tension sexuelle avec un regard que n’aurait pas renié Hitchcock. Ou dans sa manière de faire se répondre les deux scènes de braquage : la première avec une méticulosité virtuose, la seconde étant expédiée de manière assez radicale. Et partout, l’envie manifeste de créer de grands moments, à la manière du Hawks du Grand Sommeil.

Le film est aussi resté célèbre pour The Windmills of your mind, la fameuse chanson de Michel Legrand (qui signe toute la bande originale), qui rythme le film en opposition totale avec ce que l’on peut attendre de la bande son d’un thriller. Jewison joue avec les clichés, surligne le sex-appeal dévastateur de ses deux stars, et fait de son Thomas Crown un pur moment de cinéma jubilatoire.

L’Outrage (The Outrage) – de Martin Ritt – 1964

Posté : 24 octobre, 2022 @ 8:00 dans 1960-1969, NEWMAN Paul, RITT Martin, WESTERNS | Pas de commentaires »

L'Outrage

Le cinéma de Kurosawa a décidément nourri le western. Après Les 7 Mercenaires d’après Les 7 Samouraïs, et la même année que Pour une poignée de dollars d’après Yojimbo, c’est Rashomon que Martin Ritt refait à la sauce westernienne. Avec une dévotion flagrante pour le chef d’œuvre original, et avec fort peu de recul.

D’emblée, quelque chose de ce remake qui se contente de transposer l’histoire et les parti-pris de Rashomon dans un décor de western. Dès cette première scène, où trois personnes se rencontrent dans une gare abandonnée, sous une pluie battante. C’est exactement de la même manière que le film de Kurosawa commençait, mais dans un temple auquel cette gare miteuse fait furieusement penser. Comme ce décor désertique et montagneux que l’on devine derrière le rideau de pluie et l’obscurité.

Mais quelque chose cloche, donc. Peut-être est-ce la bande son, ces voix post-synchronisées trop claires, et le sentiment que Ritt ne sait pas quoi faire du bruit de la pluie lorsqu’il passe du présent des narrateurs aux différents flash-backs. Ou peut-être est-ce l’aspect quasi-caricatural, en tout cas désincarné, des personnages, réduits à leur type : un vieux prospecteur (Howard Da Silva, très bien), un escroc (Edward G. Robinson, truculent) et un pasteur (William Shatner, transparent). Sans vraie personnalité, en tout cas.

Le procédé narrative est le même que le film d’Akira Kurosawa : un enchevêtrement de flash-backs, et autant de points de vue qui racontent en se contredisant la rencontre fatale entre un couple de gringos (Claire Bloom et Laurence Harvey) et un bandit mexicain, joué par Paul Newman… Euh… Paul Newman en bandit mexicain ? Avec accent à couper au couteau et peau tannée soulignant ses yeux bleus ? V’là une idée qui sent le délire de fin de soirée arrosée… Il n’est pas mauvais d’ailleurs, dans ce rôle, mais difficile de croire à un personnage quand ce qu’on voit à l’écran, eh bien c’est un acteur trop grimé.

Bon. Dans Rashomon, chaque point de vue révélait quelque chose du narrateur, en plus d’apporter un nouvel éclairage sur le fait divers. Ici, c’est moins convaincant. Et comme Martin Ritt, réalisateur souvent inspiré, n’est quand même pas Kurowawa, son seul talent ne suffit pas à éviter le sentiment de redite, d’un point de vue à l’autre. Surtout que ces flash-backs subjectifs ont une tendance à tirer en longueur.

Bref. Pas convaincu par ce remake inutile, qui n’apporte rien et dont on se dit qu’il est à la fois un objet de dévotion, l’œuvre d’un cinéaste avide de se rapprocher de son modèle, et un film taillé pour un public américain pas prêt à se taper du Japonais sur grand écran.

Johnny Nobody (id.) – de Nigel Patrick – 1961

Posté : 14 septembre, 2022 @ 8:00 dans * Polars européens, 1960-1969, PATRICK Nigel | Pas de commentaires »

Johnny Nobody

Après The Teckman Mystery, retour au polar british, et même constat, mêmes limites : un manque de style, un manque de rythme, un aspect lisse et impersonnel… Bref, très peu de caractère dans ce film qui se révèle plutôt amusant dans son propos : l’histoire d’un prêtre (Nigel Patrick, également derrière la caméra pour second long métrage en tant que réalisateur) témoin d’un meurtre qui devient un fugitif un peu par accident.

Sauf que la première partie laisse espérer autre chose qu’un film vaguement amusant. Dans un petit village irlandais qui ressemble étrangement à celui de L’Homme tranquille, un écrivain américain vit en quasi-ermite, et en quasi-alcoolique. C’est William Bendix, et c’est forcément assez excitant : sa présence suffit souvent à sauver des films pas toujours formidables. Mais sa présence ne dure pas. Agacé par la place de la religion dans cette communauté, il défie Dieu sur la place du village. Quelques instants après, un mystérieux étranger le tue, avant de demander l’aide du prêtre.

Intervention divine ou crime de droit commun ? Ce n’est pas tant le doute sur la nature du meurtre que l’interrogation qui ronge le prêtre lorsqu’un avocat lui pose une question inattendue, qui peut sembler anodine mais qui plonge au cœur d’une certaine âme irlandaise : pensez-vous qu’il ait été guidé par Dieu ?

Ce cas de conscience est plein de promesses. Il n’est pas exploré comme il le devrait, hélas. On est souvent plus proche du Hitchcock des années britanniques, le style, le rythme et l’humour en moins, que d’une profonde réflexion sur la foi et la responsabilité. Un rythme pépère, une cascade dans un train à laquelle on a bien du mal à croire, des personnages un peu ternes… Pas désagréable, pas mémorable non plus.

Compartiment tueurs – de Costa-Gavras – 1965

Posté : 13 septembre, 2022 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1960-1969, COSTA-GAVRAS | Pas de commentaires »

Compartiment tueurs

Est-ce d’abord le style ? Ou cette manière de dresser les portraits de paumés pathétiques ? Le premier film de Costa-Gavras, pas encore cinéaste engagé, est un polar qui ne ressemble à aucun autre et qui vous marque durablement. Ni vraiment classique, ni totalement Nouvelle Vague… Costa-Gavras se nourrit de toutes ses influences pour signet un film fort et intime, puissant et authentique.

Le style est inventif, percutant, et jamais tape à l’œil. Un plan, simple et formidable, illustre bien la maîtrise totale de la narration et des effets purement cinématographiques : Montand, qui efface le nom d’un passager dont il comprend qu’il n’était pas à bord, ouvrant la porte à une résolution de l’intrigue encore lointaine. Ce plan n’a l’air de rien. Le dialogue qui se noue alors n’est même pas raccord à l’image. Mais ce petit moment est fulgurant.

Le rapport entre l’image et le son est primordial dans ce polar tout en introspection : la voix off de Michel Piccoli qui nous plonge dans son esprit pathétique. En passant d’un personnage à l’autre, Costa-Gavras dévoile l’intimité de chacun, comme dans un roman qui serait raconté à la première personne par plusieurs narrateurs successivement.

L’effet est hypnotique. Il l’est d’ailleurs dès le premier plan, avec cette caméra accrochée au train qui entre en gare. Avec ce premier film, le jeune réalisateur va plus loin dans la forme que dans n’importe lequel de ses films suivants, et signe une œuvre pas loin d’être expérimentale, mais qui n’oublie jamais l’intrigue, le suspense. Grand film intime, c’est aussi un vrai polar, avec un flic taiseux et fatigué (Montand donc, formidable), du suspense, des meurtres comme autant d’irruptions dans une humanité si intime.

Le film n’annonce en rien le cinéma qui sera pour toujours attaché à Costa-Gavras. Rien de politique, ici, mais un pur film de genre et un exercice de style hyper réjouissant, au casting extraordinaire. Simone Signoret, Jean-Louis Trintignant, Jacques Perrin, Catherine Allégret, Pierre Mondy, Charles Denner, Bernadette Laffont, Daniel Gélin. Souvent oublié dans la filmographie du cinéaste, Compartiment tueurs est pourtant, peut-être, le plus maîtrisé et le plus abouti de ses films. Au moins formellement.

Au service secret de sa Majesté (On her Majesty’s Secret Service) – de Peter Hunt – 1969

Posté : 22 juin, 2022 @ 8:00 dans * Espionnage, 1960-1969, HUNT Peter, James Bond | Pas de commentaires »

Au service secret de sa majesté

Un Bond à part, et pas seulement parce que c’était le seul que je n’avais encore jamais vu. Parce qu’il marque l’unique incursion de George Lazenby dans le rôle – et on ne s’en plaindra pas, tant il manque tout à la fois de charisme, de présence, et de qualités d’acteur. Et aussi parce qu’il s’éloigne beaucoup de ce qui était déjà devenu le prototype d’un film de 007.

Pas de gadget, beaucoup de sentiments, une vraie romance, même… Ce n’est pas encore l’ère Daniel Craig, mais on sent bien que ce Bond là a largement infusé sur les films les plus récents de la saga : la station de haute montagne de Spectre évoque furieusement la base de Blofled dans Au service secret… et le personnage de Léa Seydoux dans les deux derniers Craig a plus d’un point commun avec celui de Diana Rigg ici.

Elle est irrésistible, bien sûr, et on ne spoilera pas en dévoilant le final audacieux et glaçant. Déjà auréolée de sa gloire post Chapeau melon et bottes de cuirs, l’actrice est une Bond Girl comme il y en aura peu, voire pas, avant Casino Royale : un personnage fort qui ne fait pas que passer par le lit de Bond. D’autres s’en chargent cela dit, on ne se refait pas.

Dès la traditionnelle scène pré-générique, le côté intime et sentimental est mis en avant, délaissant le spectaculaire à tout prix. Il y aura bien des scènes d’action : pas mal de bagarres, des fusillades, une poursuite à ski assez percutante (malgré quelques transparences malheureuses), une attaque en hélicoptère… Mais c’est surtout un Bond plus humain qu’à l’accoutumée que l’on découvre : traqué et effrayé par un homme en costume d’ours, faillible, vulnérable.

C’est d’ailleurs dans ces moments que Lazenby est le plus convaincant : lorsqu’il délaisse ses allures de super-agent pour redevenir un homme avec ses failles. Dans l’action comme dans les postures ironiques habituelles de 007, il semble constamment porter une étiquette « mauvais choix » scotché sur le front… Il a la réputation d’être le plus mauvais interprète de Bond ? Il l’est, à peu près sans doute possible.

Et pourtant, son Bond fait partie des grandes réussites de la saga. Pour son humanité, pour son audace, pour sa simplicité, pour l’efficacité de sa mise en scène, et pour la photo qui témoigne le plus souvent d’une belle ambition (en plus d’une grande maîtrise). Bon… ce dernier commentaire ne tient pas compte du passage fleur bleue-violons-flou artistique sur des fleurs en gros plan qui marque le début de la romance entre James et sa belle. Tellement caricatural qu’il ouvre allégrement la porte à toutes les parodies. A part ça, un Bond séduisant, et surprenant.

Bons baisers de Russie (From Russia with love) – de Terence Young – 1963

Posté : 19 juin, 2022 @ 8:00 dans * Espionnage, 1960-1969, James Bond, YOUNG Terence | Pas de commentaires »

Bons baisers de Russie

Ce deuxième 007 a un statut un peu à part. Le premier, Dr No, posait les bases d’un mythe. Le troisième, Goldfinger, entérinait la série comme une véritable saga répondant à des codes très précis. Entre ces deux épisodes fondateurs, celui-ci se présente comme une suite finalement assez classique, qui invoque James Bond non comme une figure quasi-mythique, mais comme le héros d’un premier film dont on découvre de nouvelles aventures.

Les codes inamovibles de la saga sont là, déjà : un pré-générique, la silhouette de Bond dans le viseur, la chanson-générique (assez laid, le générique), le bureau de M, Moneypenny, les gadgets de Q… Mais tout ça n’est qu’une mise en bouche, qui semble n’appeler que les films qui suivront. Celui-ci, dépassé les dix premières minutes assez formatées, surprend surtout pour son extrême simplicité.

Ici, Bond ne sauve pas le monde. Il ne passe pas son temps à passer d’un pays à l’autre. Il n’enchaîne pas les conquêtes d’un soir, encore que l’envie ne lui manque pas. Il est confronté au SPECTRE, mais ne le comprend que très tardivement. Pas de base secrète high tech non plus, ni de scènes d’action bigger than life. A vrai dire, Bons baisers de Russie est le film le plus franchement « d’espionnage » de la saga. Et de loin.

On est finalement souvent plus proche de L’Espion qui venait du froid que de la saga imaginée par Ian Fleming. Ce deuxième opus est moins un film d’action que de suspense. Qui ne manque pas, et que Terence Young filme avec un vrai talent, un vrai sens visuel, qui capte l’esprit de son décor. Comme son titre ne l’indique pas, le film se passe en grande partie à Istambul, dont on ressent l’atmosphère chaude et fascinante : la poésie du Bosphore et l’effervescence du Grand Bazar.

Young signe un film simple et direct, où les effets pyrotechniques restent la plupart du temps en retrait. Il prend le temps, surtout, d’installer durablement l’action dans des lieux, développant l’amitié entre Bond et un diplomate d’Istambul, consacrant une longue séquence à un voyage à haut risque dans un train… soudain presque hitchcockien, et très efficace.

Un point, quand même, où la saga ne dément en rien sa réputation : la représentation des femmes. Entre la jolie Russe prête à se damner pour James Bond parce qu’elle l’a trouvé séduisant sur une photo, et la vieille mégère psychopathe, entre une Moneypenney qui se pâme dès qu’elle entend la voix de Bond, et deux tziganes qui s’entretuent à moitié nues, forcément pour obtenir les faveurs d’un homme… comment dire…

La surprise vient en revanche du grand méchant. Pas le chef du SPECTRE, apparition déjà très stéréotypée. Mais le tueur qu’incarne Robert Shaw avec une froideur… eh bien glaçante. Face à lui, Sean Connery incarne un James Bond sûr de lui, mais très souvent dépassé par les événements, voire totalement manipulé. Comme dans Goldfinger en fait : le plus grand des espions n’est finalement jamais aussi passionnant que quand il comprend qu’il est battu.

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