Play it again, Sam

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Archive pour la catégorie '2010-2019'

Sur la piste du Marsupilami – d’Alain Chabat – 2012

Posté : 29 mars, 2020 @ 8:00 dans 2010-2019, CHABAT Alain, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Sur la piste du Marsupilami

Après le triomphe de son Astérix, Chabat aurait pu enchaîner les grosses productions, les succès faciles. Mais l’ancien Nul est surtout homme à aller au bout de ses envies. Que son envie du moment soit de jouer un chien (Didier), de mettre en scène une comédie préhistorique avec les Robin des Bois (RRRrrrr !!!), ou d’adapter Franquin, un auteur de BD qu’il vénère.

Il a un univers, Chabat, une manière de balancer des vannes qui n’appartient qu’à lui, une manière aussi d’être fidèle à l’esprit de l’univers qu’il adapte tout en signant un film totalement personnel. Il y a tout ça dans ce Marsupilami, que les spécialistes de la maison (mes enfants) jurent être très fidèles à la BD. Chabat signe une comédie vraiment familiale, loufoque, idiote et irrésistible.

On pourrait reprocher quelques gags pipi-caca. Mais on pourrait rétorquer que les Nuls allaient encore plus loin dans le cracra. Surtout, on pourrait reconnaître que, même bas du front, le film est, très souvent, très très drôle. Un gros balaise de 150 kg à la voix très haut perchée suffit à déclencher l’hilarité. Ou un perroquet trop cabot. Ou un dictateur fan de Céline Dion (Lambert Wilson).

Plus que le très mignon Marsupilami en images de synthèses, le film vaut surtout pour le duo formé par Jamel Debbouze et Chabat lui-même, capables de transformer n’importe quelle réplique à peine écrite en un sommet comique. Pur plaisir régressif et sans arrière-pensée, j’adhère.

Qu’a fait Jack ? (What did Jack do ?) – de David Lynch – 2017

Posté : 27 mars, 2020 @ 8:00 dans 2010-2019, COURTS MÉTRAGES, FANTASTIQUE/SF, LYNCH David, POLARS/NOIRS | Pas de commentaires »

Qu'a fait Jack

Entre deux saisons de Twin Peaks (il y en aura bien une quatrième, n’est-ce pas ???!!!), la filmographie de David Lynch est essentiellement faite de courts métrages ces dernières années. Œuvres majeures ou mineures ? Comment diable peut-on répondre à cette simple question devant cette chose aussi séduisante que déroutante : 17 minutes d’un interrogatoire mené par un détective qui soupçonne un petit singe.

Qui le soupçonne de quoi au juste ? D’avoir fricoté avec des volailles, d’avoir assassiné quelqu’un, de faire partie d’une organisation communiste ? Le singe se défend : normal, un petit animal aussi bien habillé que lui est forcément doué de parole. Et c’est un trucage aussi simple que rudimentaire qui lui permet de parler, une bouche humaine étant plaquée sur le visage de l’animal. Aussi imparfait que déstabilisant.

Face à lui, c’est David Lynch lui-même qui mène l’enquête, le costume et la mèche impeccable, sorte de double de Gordon Cole, son personnage de Twin Peaks. L’esthétique, d’ailleurs, évoque d’ailleurs immédiatement le fameux épisode 8 de la troisième saison, avec ce noir et blanc au grain profond et plein de défauts. Mais très vite, c’est le surréalisme de la Loge Noire que l’on croit retrouver, dans ce dialogue totalement lynchien.

Lynchien, parce que le réalisateur (également scénariste, ingénieur son, décorateur, acteur, monteur…) crée une atmosphère qui n’appartient qu’à lui, où l’absurde cohabite avec une vérité troublante. Il est franchement difficile de résumer le dialogue qui se noue entre ces deux personnages, encore plus de le comprendre vraiment. Mais il y a une ambiance de film noir à l’ancienne, une pression qui se fait de plus en plus fortes, et quelques références qui invoquent des heures troubles…

Il y a aussi la présence de Lynch, magnétique et fascinante. Et le regard quasi-fixe de ce petit singe pas très net mais acculé, regard noir et profond qui, malgré l’absurdité du procédé et les faux airs de sketch rigolard, happe l’attention et l’émotion. Incompréhensible, mais passionnant. David Lynch, en somme…

Mindhunter (id.) – saison 2 – créée par Joe Penhall et David Fincher – 2019

Posté : 19 mars, 2020 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, DOMINIK Andrew, FINCHER David, FRANKLIN Carl, PENHALL Joe, TÉLÉVISION | Pas de commentaires »

Mindhunter saison 2

Après l’excellente première saison, on se demandait quand même un peu si le show de David Fincher allait réussir à garder la même intensité, avec ce parti-pris si radical. La réponse est oui, grâce à une logique dont Fincher ne se départit jamais : il n’est pas homme à se reposer sur ses lauriers, ses différentes contributions au « film de serial killer » le prouvent. Cette deuxième saison, tout en s’inscrivant dans le prolongement de la précédente, fait donc le choix d’une évolution très marquée.

Les entretiens avec les tueurs enfermés sont toujours présents, mais n’apportent plus grand-chose d’autres que des échecs, comme si Fincher (qui réalise encore les trois premiers épisodes) et les scénaristes voulaient montrer qu’ils n’étaient pas dupe : après la théorie, il est grand temps de passer à la pratique. En l’occurrence à la traque d’un authentique tueur en série toujours en activité : à Atlanta, où de nombreux enfants noirs ont été enlevés et assassinés.

Cette enquête, la première à laquelle la cellule créée par nos héros au sein du FBI est officiellement associée, occupe la plus grande partie de cette saison. Un choix là encore assez radical. D’abord parce que l’affaire, bien réelle, n’a été que partiellement élucidée. Puis parce qu’un doute subsiste toujours sur l’existence d’un tueur unique dans cette vague de meurtres.

Fausses pistes, plantages complets… L’enquête souligne l’importance de cette science du comportement encore balbutiante, mais aussi ses limites, et la difficulté d’associer les méthodes nouvelles et celles plus traditionnelles. Le formidable duo formé par les agents Ford (Jonathan Groff) et Tench (Holt McCallany) l’illustre bien : ce dernier étant partagé entre admiration et agacement à propos de son jeune collègue, aussi brillant et intuitif lorsqu’il s’agit de comprendre des tueurs qu’il ne connaît pas, que déconnecté et à côté de la plaque avec son entourage.

L’entourage du duo d’enquêteurs et de l’analyste jouée par Anna Torv semble en retrait. Pourtant, son importance est centrale dans cette saison qui, au fond, évoque surtout la radicalisation de ces personnages qui, plus ils avancent dans la compréhension de ces tueurs qu’ils apprennent à connaître mieux que quiconque, plus ils s’enfoncent dans une logique d’où tous les êtres censés sont exclus. Les dernières minutes de cette belle fascinante d’épisodes sont ainsi d’une tristesse insondable. La troisième saison, incertaine, n’en est que plus urgente.

Alice et le maire – de Nicolas Pariser – 2019

Posté : 10 mars, 2020 @ 8:00 dans 2010-2019, PARISER Nicolas | Pas de commentaires »

Alice et le maire

Voilà un film bien dans l’air du temps du cinéma français. A la fois fin, intelligent et assez passionnant, et d’une modestie presque agaçante, comme si les cinéastes français ne voulaient surtout pas être taxés de faire leur malin, ces dernières années. La modestie, motif de cette plongée dans les coulisses du pouvoir (de la mairie de Lyon en l’occurrence), comme une volonté presque maladive d’éviter l’esbroufe ou le sensationnel.

Cela donne une scène formidable, le « climax » du film, tout en attente et en silences, où le suspense repose simplement sur la question de savoir si, oui ou non, Fabrice Lucchini va se lever de son fauteuil. Cela donne aussi une poignée de scènes propres et fonctionnelles, dont on pourrait dire qu’elles sont fort bien cadrées, fort bien éclairées, fort bien jouée, et fort oubliables.

Mais il y a une petite musique très séduisante. Celle de Wagner, et celle du réalisateur Nicolas Pariser qui, après un gros premier quart d’heure un peu plan-plan, réussit à installée un mouvement très musical et assez envoûtant, en resserrant son film sur son duo principal : le maire Lucchini et sa jeune « conseillère en idées » Anaïs Demoustiez.

Le film n’est jamais aussi bien que quand il concentre l’intrigue sur ces deux là, excellents, repoussant le reste du casting à une sorte de périphérie dont on cherche à faire abstraction, à la fois dans et en dehors de la mairie.

Le film déglingue aussi ouvertement les conseillers en communication et autres têtes pensantes, dans un jeu de massacre assez facile, mais rigolard et réjouissant. Beau duo et beau film, d’atmosphère par intermittence.

Mindhunter (id.) – saison 1 – créée par Joe Penhall et David Fincher – 2017

Posté : 1 mars, 2020 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, DOUGLAS Andrew, FINCHER David, KAPADIA Asif, LINDHOLM Tobias, PENHALL Joe, TÉLÉVISION | Pas de commentaires »

Minhunter saison 1

La fascination de David Fincher pour les tueurs en série a donné de grands films de cinéma : Seven, Zodiac, mais aussi Millenium. Elle donne cette fois une grande série télé qui, comme tout ce qu’il a fait jusqu’à présent, offre une approche inédite du genre.

Loin de Seven, donc. Loin de Zodiac aussi, Mindhunter évoque la naissance de la science du comportement au sein du FBI. Inspirée de personnages réels, la série met en scène quelques uns des tueurs en série les plus marquants des Etats-Unis, à commencer par Ed Kemper, mais d’une manière assez radicale, en reléguant le suspense traditionnel loin, très loin en arrière-plan.

Rien de facile, ni d’évident dans l’approche de Mindhunter. L’essentiel de l’action consiste en de longues « interviews » des criminels en prison. Il y a bien quelques tueurs en liberté, que les méthodes nouvelles de nos héros pourraient aider à interpeller. Mais la série évite de tomber dans la logique du polar, et fuit comme la peste toutes les ficelles habituelles pour créer le suspense.

Peu de suspense, d’ailleurs, mais une tension, énorme. Et des glissements, imperceptibles et vertigineux. Celui de Ford et Tench, les deux agents si différents dont le quotidien est de côtoyer les pires monstres de l’histoire récente avant de rentrer faire un bécot à leurs compagnes. Ils sont formidables, Jonathan Groff et Holt McCanally, deux acteurs aux styles radicalement opposés : l’un éthéré, délicat et si perméable aux horreurs qu’il approche au plus près, l’autre solide, massif et terrien. Une grande trouvaille, que d’associer ces deux là.

David Fincher, comme il l’avait fait pour House of Cards, définit l’univers visuel de la série en réalisant lui-même les deux premiers épisodes. Il signe aussi les deux derniers de cette première saison, chef d’œuvre de tension, inconfortable au possible.

On sort haletant de cette ultime confrontation entre Ford et Kemper, conscient des limites de ce l’humain peut endurer. Mal à l’aise, mais on en redemande…

Hangman (id.) – de Johnny Martin – 2017

Posté : 26 février, 2020 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, MARTIN Johnny, PACINO Al | Pas de commentaires »

Hangman

Le Parrain, Serpico, Un après-midi de chien, Heat… et Hangman. Pacino touche le fond avec ce thriller de bas étage, pâle copie tardive de Seven, tourné à une époque où on ne pensait plus voir de pâles copies de Seven, tant le sujet a été rabâché dans les années 90.

Il a tourné beaucoup, et souvent n’importe quoi, Pacino, ces dernières années. Beaucoup de films indignes de son talent. Mais là… Pas envie d’en rajouter sur le film lui-même, au scénario très con (un tueur en série qui s’inspire du jeu du pendu), à la mise en scène épileptique, aux acteurs lambda (Karl Urban, bof), sans surprise et à peine efficace.

Il y aurait en revanche beaucoup à dire sur le choix d’Al Pacino, légende vivante qui se vautre dans un rôle qui n’est ni de sa trempe, ni de son âge. Gênant, même pour lui. Après ça, il enchaînera avec Tarantino et Scorsese, pour ses deux meilleurs films depuis plus de vingt ans. Sans doute lui fallait-il toucher le fond pour remonter à la surface !

Klaus (id.) – de Sergio Pablos – 2019

Posté : 24 février, 2020 @ 8:00 dans 2010-2019, DESSINS ANIMÉS, PABLOS Sergio | Pas de commentaires »

Klaus

Que voilà un dessin animé enthousiasmant ! Première réalisation de l’Espagnol Sergio Pablos, premier long métrage d’animation produit par Netflix. Bref, rien ne présageait une telle réussite, et un film si original.

Cette histoire d’un jeune héritier trop gâté qui se retrouve coincé dans une petite ville perdue au fin-fond du Grand Nord, dans une communauté divisée par une vieille querelle ancestrale, n’est pas en soi révolutionnaire. C’est l’éternelle histoire de rédemption et de découverte des sentiments les plus purs, dans les conditions les plus extrêmes.

Mais Sergio Pablos fait le choix d’une animation traditionnelle aux éclairages soignés, et d’un trait de dessin dynamique et moderne, avec des décors aussi simples que spectaculaires. Autant de choix esthétiques qui donnent au film une couleur très originale et très séduisante.

Il y a aussi un humour ravageur, beaucoup d’émotion, un rythme impeccable, et une pointe de méchanceté bienvenue. Surtout, il y a un scénario assez formidable, qui raconte quand même la naissance du Père Noël : comment le mythe est né, comment les rênes ont été choisis, et comment il est devenu universel, dans une vibrante ode à l’ouverture et aux différentes cultures.

C’est drôle, c’est surprenant, c’est intelligent, et c’est même profond. Ce blog ne se fait pas vraiment une spécialité du cinéma d’animation, mais ce Klaus s’installe tranquillement dans le haut du panier.

L’Ascension de Skywalker / Star Wars, épisode IX (Star Wars : Episode IX – The Rise of Skywalker) – de JJ Abrams – 2019

Posté : 21 février, 2020 @ 8:00 dans 2010-2019, ABRAMS J.J., FANTASTIQUE/SF, FORD Harrison | Pas de commentaires »

Star Wars 9 L'Ascension de Skywalker

Avec l’épisode 7, JJ Abrams avait signé une suite à la fois réussie et trop, beaucoup trop respectueuse. Cinéaste de la déférence par excellence (et pas seulement pour Super 8, son hommage énamouré à Spielberg), l’homme ne s’est jamais départi de sa logique de créateur de séries TV. Tous ses films, ou presque, relèvent de cette logique, avec souvent le sentiment qu’il veut s’inscrire dans un tout plutôt que bousculer les codes.

Tout ça pour dire que, malgré un épisode 8 qui avait été une agréable surprise, cet épisode 9 ne présageait rien de franchement excitant. Le vague plaisir de retrouver une dernière fois Luke, Leia et Chewie, peut-être. Et un intérêt encore plus vague pour le destin réservé aux nouveaux héros qui, sans jouer les vieux cons, n’ont jamais réussi à faire oublier ceux de la trilogie originelle.

Dès les cinq premières minutes, Abrams surprend donc très positivement. Loin de l’aspect bien trop sage de sa première participation à l’univers de Star Wars, il ouvre cette conclusion par des images d’une noirceur abyssale. On sent d’emblée que la mort sera un élément central du film, et c’est bien à la mort que l’on doit les éléments les plus forts.

La présence de Carrie Fisher est, en soi, particulièrement troublante. L’actrice est morte avant le tournage de cet épisode 9, mais son personnage de Leia est bien présente, grâce à des scènes pas conservées dans les deux films précédents. A l’inverse, des personnages morts et enterrés sont de retour, pour de simples apparitions, ou pour des rôles centraux : ce sera même le grand méchant, qui rassemble une armée de morts sortant de l’ombre dans une séquence franchement impressionnante, qui ne ressemble à aucune autre de la saga.

JJ Abrams semble vouloir rattraper les erreurs de son épisode 7, à commencer par la disparition frustrante de Han Solo. Surtout, il ose ce qu’il n’avait pas oser auparavant : inventer de nouvelles formes, de nouveaux motifs. Il imagine l’affrontement à distance de deux Jedi, assez fascinant. Et filme une analogie troublante avec la nuit de cristal, dans cette scène nocturne sur la planète où Poe Dameron retrouve son passé, et où on découvre la population martyrisée par les troupes de l’Empire.

Finalement, les personnages historiques sont relégués à de courtes apparitions, toutes marquantes (on oubliera quand même le cadeau fait à Billie Dee Williams qui retrouve son personnage de Lando Calrissian pour ne pas en faire grand-chose). Et l’intrigue se resserre sur le trio formé par Rey (Daisy Ridley), Finn (John Boyega) et Poe (Oscar Isaac) et sur le duel fratricide entre Rey et Kylo Ren (Adam Driver). Deux aspects qui peinaient à convaincre vraiment jusqu’à présent, et qui prennent enfin une nouvelle dimension. Réjouissant.

La saga Star Wars

Vic le Viking (Vic the Viking and the Magic Sword) – d’Eric Cazes – 2019

Posté : 17 février, 2020 @ 8:00 dans 2010-2019, CAZES Eric, DESSINS ANIMÉS | Pas de commentaires »

Vic le Viking

Le fils d’un chef viking désespère de voir son père enfin reconnaître ses vrais qualités… Cette adaptation en long métrage d’une série animée qui a bercé l’enfance des quadras d’aujourd’hui est une jolie réussite, sans prétention et sans excès de quoi que ce soit. Juste une belle histoire de transmission, sur l’éternel sujet du passage de l’enfance à l’âge adulte.

Beaucoup d’humour, beaucoup de rebondissements, quelques effets saisissants (la belle scène du bateau surfant entre deux eaux), et une réappropriation maligne du mythe de Odin et de ses fils ennemis, dont Thor, qu’on a plutôt plaisir à retrouver avec son marteau, mais sans les Avengers.

Bref, du cinéma d’animation très recommandable pour les fêtes de fin d’année. Pas du cinéma d’auteur, mais pas de la grosse guimauve abêtissante non plus.

Brooklyn Affairs (Motherless Brooklyn) – d’Edward Norton – 2019

Posté : 16 février, 2020 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, NORTON Edward | Pas de commentaires »

Brooklyn Affairs

Il est des films comme ça dont on ne saurait dire d’emblée pourquoi ils sont au-dessus des autres. C’est clairement le cas de ce Brooklyn Affairs, deuxième mise en scène d’Edward Norton, presque vingt ans après son baptême du feu (pour Au nom d’Anna, pas vu). Et tant qu’on est dans les chiffres : cela fait une dizaine d’années que l’acteur planche sur cette adaptation, dont il a lui-même écrit le scénario, ample et complexe.

L’intrigue s’inscrit dans la lignée d’un Chinatown : la ville est différente (ici, c’est New York), mais on retrouve la même ambition, la même ampleur, la même complexité aussi, avec ces ramifications qui s’entrecroisent et ne cessent de s’ouvrir vers d’autres choses, mélange de politique véreuse et de secrets d’alcôves. Le récit est dense, touffu même, mais toujours limpide : la marque d’un cinéaste qui maîtrise totalement son sujet.

A ce sujet s’ajoute le personnage que joue Norton : un petit détective sans envergure, dont la vie est bouffée par le syndrome Gilles de la Tourette qui le déforme à force de tics, et qui le pousse à sortir des insanités ou des phrases absurdes. Un syndrome qu’on n’imaginait à vrai dire pas voir un jour dans un film, si ce n’est sous l’angle de la comédie. Et là, petit miracle : ça ne prête jamais à sourire autrement qu’avec bienveillance et tendresse. Ce pourrait être ridicule, risible, mais non. Tout en en faisant beaucoup, Norton réussit à rendre ça naturel, sans angélisme ni apitoiement.

Pourtant, c’est encore un autre aspect du film qui marque le plus : cette petite musique d’un autre temps. Elle vient du jazz bien sûr, omniprésent dans la bande son et à l’image. Mais pas seulement. Cette petite musique si vivante, qui semble raviver toute une imagerie d’une certaine Amérique, elle vient aussi des choix esthétiques de Norton. Une scène, magique, l’illustre bien : celle de la gare, où le héros va trouver la clé de l’intrigue.

Cette scène toute entière a quelque chose d’irréel, et une beauté picturale qui renvoie directement au réalisme social des peintres américains des années 40. Cette femme assise sur un tas de valises, éclairée par un halo de lumière, et près de laquelle un pigeon picore des miettes. Plus loin, ce couple qui s’embrasse près des casiers de la gare. Là encore, Norton flirte avec le grotesque, tant ces images semblent iconiques. Mais non, ces apparitions ancrent le film dans une certaine idée de l’Amérique, nostalgique et fascinante.

C’est d’ailleurs lui, Norton, qui a placé son intrigue dans l’Amérique des années 50. Un choix qui renforce le caractère social de l’histoire, et notamment la lutte des noirs pour leurs droits, centrale dans le film. Ancrée dans cette décennie donc, mais avec de brûlantes résonances avec l’époque moderne, en particulier dans le personnage du grand méchant politicien, qu’Alec Baldwin s’amuse en transformer en brûlot anti-Trump (qui veut que l’Amérique soit grande).

Grand film de détective, grand film de personnages (des tas de seconds rôles formidables, dont Willem Dafoe et Bruce Willis), grand film jazzy, et grand film romantique aussi. Voir surtout. La plus belle scène, celle qui dit le mieux la réussite de ce film, c’est celle du club de jazz, où un Edward Norton ravagé par les tics est soudain calmé par la main que la jeune militante noire dont il s’éprend (Gugu Mbatha-Raw) lui passe doucement sur la nuque, comme le faisait sa maman lorsqu’il était petit.

Ce geste simple pourrait facilement être grotesque, là encore. Mais non. Ce moment, simple et tendre, cette parenthèse dans le tourment intérieur du héros, pendant que l’orchestre joue, est l’un de ces moments rares de cinéma où le temps s’arrête, où les frissons vous gagnent. Un moment de pure magie.

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