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Archive pour la catégorie '2010-2019'

Alceste à bicyclette – de Philippe Le Guay – 2013

Posté : 19 octobre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, LE GUAY Philippe | Pas de commentaires »

Alceste à bicyclette

Un acteur en vogue (il est le héros d’une série médicale sur TF1, c’est dire) se rend sur l’île de Ré pour tenter de convaincre un autre acteur, retiré du monde depuis des années, de remonter sur scène pour une adaptation du Misanthrope qu’il s’apprête à monter. Plaisirs des deux amis de se retrouver, répétitions qui n’en finissent plus, séduction et manipulation… Le retraité va-t-il faire son retour ? Ou se contente-t-il de profiter de cette parenthèse avant de la refermer ?

On pourrait presque dire la même chose d’Alceste à bicyclette que de Un coup de maître. Les deux films prennent pour cadre un microcosme artistique. Les deux films mettent en scène un duo d’amis dont l’un a pris le parti de jouer le jeu, tandis que l’autre est incapable de faire le moindre compromis. Et dans les deux films, le plaisir vient avant tout des comédiens : Lambert Wilson et Fabrice Luchini en l’occurrence.

Luchini surtout, dont je découvre décidément un peu tardivement à quel point il est un grand acteur. Il est formidable ici, jouant avec ses propres tics d’acteurs lorsqu’il interprète le comédien retiré du monde renouant avec la comédie. Formidable et touchant. Un peu troublant aussi, dans sa manière de se jouer de son entourage, authentique misanthrope qui ne voit personne d’autre que lui pour jouer Alceste, mais qui se refuse à s’y abaisser.

Le film n’est pas totalement convaincant en revanche lorsqu’il sort de cette amitié qui semble d’abord si pure. Philippe Le Guay nous laisse un peu en chemin en complexifiant cette relation, flirtant avec quelque chose de nettement plus toxique. Mais Luchini est grand, Wilson est très bien, et Maya Sansa (la belle actrice de Nos meilleures années) est parfaite en divorcée à la croisée des chemins. Pour les acteurs.

Dans la maison – de François Ozon – 2012

Posté : 14 octobre, 2023 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2010-2019, OZON François | Pas de commentaires »

Dans la maison

C’est marrant comment on a systématiquement envie de dire que Luchini est sobre, dans un film où il est formidable. C’est marrant, parce que ça a un côté un peu, même franchement, injuste. Comme si l’acteur, si exubérant en promo, n’était pas l’un des très très grands, et ce depuis des années, comme si ses excès et sa pause de beau parleur vampaient son jeu si fin.

Dans Dans la maison, il est donc sobre. Comme Jouvet l’était : avec ce débit qui lui est si caractéristique, et cette intelligence du jeu qui le place toujours là où on ne l’attend pas vraiment. Semblable, et différent à chaque film, Luchini explore ici une zone particulièrement inconfortable, dans un rôle qu’on dirait pourtant sur mesure.

Pensez donc : un prof de lettres vieillissant qui mène une vie de bobo, parle littérature avec passion, et jeunesse avec méfiance. Mais ce prof, marié à une Kristin Scott-Thomas parfaite en contrepoint bousculé dans ses habitudes, se prend de passion pour le talent caché d’un étudiant taciturne, qui lui donne l’inspiration qui lui manquait depuis longtemps pour écrire son propre livre.

Les écrits que lui livre cet adolescent le fascinent : il y raconte ses rapports troubles avec une famille parfaite en tous points en apparence (avec des parents joués par Emmanuelle Seigner et Denis Ménochet), dans des compositions écrites qui sont en fait des récits intimes, dont lui-même (Luchini) s’inspire pour son grand roman… quitte à pousser le jeune homme à aller toujours plus loin.

Dans la maison, sous ses faux airs de thriller hitchcockien, est un film qui crée un malaise persistant, tant le personnage de Lucchini s’y enfonce dans une relation toxique, pour le moins troublante. Il est question de création, d’emprise morale, de manipulation, de désir et des limites qu’il ne faudrait pas franchir. Ozon signe l’une de ses grandes réussites, et échappe totalement à toute velléité moralisatrice. On lui en sait gré.

La French – de Cédric Jimenez – 2014

Posté : 11 octobre, 2023 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2010-2019, JIMENEZ Cédric | Pas de commentaires »

La French

Il faut au moins reconnaître à Cédric Jimenez son ambition : ils ne sont pas si nombreux, les cinéastes français, à vouloir à ce point tirer le film de genre vers le haut. Ou disons vers ses modèles américains les plus glorieux. Et c’est bien ce qu’il fait avec ce film, pourtant très français et inspiré d’une histoire vraie : la french connection et l’assassinat du juge Michel.

Sa principale limite, sans doute, est d’hésiter constamment entre une reconstitution précise et rigoureuse, et une dramatisation de l’intrigue pour rendre le film plus… plus quoi ? fun ? efficace ? américain ?

C’est clairement une limite, parce que cette histoire n’en avait pas besoin : pas besoin de cette rencontre improbable entre le juge et le parrain qui semble n’avoir été écrite que pour aménager une scène commune à Jean Dujardin et Gilles Lellouche, et pour citer en passant une autre rencontre au sommet, dans le Heat de Michael Mann.

Pas besoin non plus de faire du juge un authentique cowboy qui finit par se mêler physiquement à l’action, comme si son courage n’était pas si flagrant. Des moments censés être immersifs qui ont l’effet totalement inverse sur le spectateur, qui aimerait que le réalisateur lui fasse un peu plus confiance…

Ces réserves faites, il faut reconnaître une belle efficacité, une reconstitution assez bluffante, un vrai sens du rythme, et surtout une belle idée, qui doit beaucoup au chef d’œuvre de Michael Mann d’ailleurs : mettre en scène les deux antagonistes dans leur vie familiale, gommant les différences dans leurs rapports à leurs femmes. Avec pour effet de rendre ce sinistre fait divers humain, et l’affrontement, pour le coup, vraiment dramatique.

Mann n’est pas la seule influence de Jimenez, qui flirte aussi beaucoup du côté de Scorsese, dans cette longue séquence qui permet de planter le décor et de présenter les différents personnages, séquence qui serait brillante si elle ne souffrait de la comparaison avec son modèle évident, Les Affranchis. Disons que c’est le retour de bâton que risque tout cinéaste cinéphile : gare à la comparaison.

The Lost City of Z (id.) – de James Gray – 2016

Posté : 2 octobre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, GRAY James | Pas de commentaires »

The Lost City of Z

En quittant la jungle urbaine qui était le décor de ses cinq premiers films, James Gray allait-il rester ce cinéaste passionnant que l’on aime tant ? Non, il fait mieux que ça : il se réinvente, et signe tout simplement son chef d’œuvre, ce film dont on se dit qu’il est le signe de tous les possibles. Gray peut s’emparer d’un univers qui a priori lui est étranger, et en faire une œuvre profondément personnelle, et d’une intensité folle. Bref, il peut tout faire : ses deux films à suivre (le SF Ad Astra et le très intime Armageddon Time) le confirmeront.

N’anticipons pas… The Lost City of Z est d’abord une histoire vraie : celle de Percy Fawcett, officier britannique du début du XXe siècle, qui est envoyé au cœur de l’Amazonie avec la mission d’établir une carte détaillée de ces contrées encore sauvages, alors que lui ne rêve que d’exploits héroïques pour effacer la tâche familiale que représente le comportement d’un père alcoolique et joueur.

La figure du père… Omniprésente depuis Little Odessa dans l’œuvre de Gray, elle est ici doublement centrale : d’abord dans ce poids que représente le souvenir du père disparu, puis dans les relations que fuit Fawcett avec son propre fils, dont la naissance correspond à son premier voyage, et qui finira par partir avec lui pour son ultime aventure amazonienne vingt ans plus tard.

Et ce n’est pas spoiler que d’évoquer « l’ultime » voyage : le poids du destin pèse constamment sur le film, la conscience que cette plongée dans une aventure qui tourne à l’obsession finira mal, et mystérieusement. L’obsession : le fil conducteur du film, qui donne le sentiment de creuser de plus en plus profondément le même sillon, au fil des voyages successifs.

Charlie Hunnam est exceptionnel dans ce rôle d’une intensité dingue, personnage douloureux et tourmenté, habité par une soif absolue de s’accomplir, et qui ne trouvera un semblant d’apaisement qu’en flirtant avec les limites de l’humanité. Et on notera aussi au passage la prestation d’un Robert Pattinson méconnaissable en compagnon de voyage, magnifique contrepoint au personnage de Fawcett.

On pense bien plus à Aguirre d’Herzog qu’aux Aventuriers de l’Arche perdue de Spielberg. Mais The Lost City of Z est sur un autre registre, plus intime, étrangement plus apaisé aussi. Un film qui, au fond, échappe à toute comparaison possible pour s’imposer comme un grand James Gray. Un film visuellement splendide, dont la beauté formelle nous plonge dans les méandres mentaux de son héros. Un chef d’œuvre.

Le Retour du héros – de Laurent Tirard – 2018

Posté : 29 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, TIRARD Laurent | Pas de commentaires »

Le Retour du héros

Pendant les guerres napoléoniennes, le capitaine Neuville est appelé sur le front à la veille de son mariage avec Pauline, jeune femme de la petite noblesse provinciale, qui reste désespérée en attendant désespérément des nouvelles de son fiancé, et se laissant bientôt dépérir. Pour la stimuler, sa sœur Elisabeth écrit elle-même des lettres qu’elle dit être de Neuville, lui inventant des exploits militaires, et finalement une mort héroïque. Mais le « capitaine » réapparaît trois ans plus tard, et Elisabeth le découvre crève-la-faim, lâche, déserteur… Il décide alors de se faire passer pour le héros que toute la ville pense qu’il est.

L’histoire est plutôt séduisante, et aurait pu donner un film d’aventure à l’ancienne assez sombre, ou une comédie réjouissante. Laurent Tirard fait le choix de la comédie. Pourquoi pas, donc. Mais tout sonne faux, constamment, dans ce film visuellement très propre (réalisation soignée, rien qui dépasse, pas même de poussière sur les meubles), et écrit comme… en fait non, pas écrit du tout.

On ne croit ni aux rebondissements, ni aux personnages, et encore moins aux dialogues dignes d’un atelier d’écriture pour élèves de primaire. Les acteurs sont en roue libre, mal dirigés et impuissants face à des personnages si mal définis. Alors Jean Dujardin ressort sa panoplie (et ses mimiques) d’Hubert Bonisseur de la Bath. Et Mélanie Laurent passe son temps à observer la scène avec un petit sourire amusé ou agacé, c’est selon.

Rien à sauver, hélas.

1917 (id.) – de Sam Mendes – 2019

Posté : 17 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, MENDES Sam | Pas de commentaires »

1917

Après une longue parenthèse consacrée à James Bond (Skyfall et Spectre, deux films qui font référence, et qui l’ont occupé pendant pas mal d’années), Sam Mendes revenait en 2019 avec une nouvelle grosse production, qui était aussi un film très personnel pour lui, le premier qu’il écrit lui-même, inspiré des récits de guerre de son propre grand-père, à qui le film est d’ailleurs dédié.

Film personnel, auquel il tenait visiblement beaucoup, 1917 est pourtant assez anecdotique sur le fond : on pourrait assez facilement le résumer à un simple survival sur le front Ouest de la Grande Guerre, en France, en 1917 donc. Deux soldats sont chargés de traverser les lignes pour délivrer un message important qui pourrait sauver 1600 vies.

La simplicité du scénario est un parti-pris finalement fort. Le fait de tourner le film comme un unique plan-séquence de près de deux heures, donc sans montage apparent, en un autre. Pas novateur, ni même totalement convaincant dans la première partie, l’artificialité du procédé suscitant plutôt la curiosité, mais finalement très immersif.

1917 serait même le pendant « Grande Guerre » d’Il faut sauver le soldat Ryan, dans cette volonté du réalisateur de transcender une histoire simple et humaine en une immersion radicale et inédite dans les horreurs et la sinistre banalité de la guerre. Et sans doute le fait qu’une histoire de famille déchirée vienne se greffer au récit n’est pas un hasard.

Mendes ne tombe pas dans le piège de la surenchère. Même la course-poursuite dantesque dans les ruines fumantes d’un village, ou l’assaut final, ne sont filmés que du point de vue du personnage principal, soldat britannique dont on ignore tout de la vie, et qu’on n’apprend à connaître qu’à travers son visage blême et son regard dévasté, le rôle d’une vie pour George MacKay.

Brillant et passionnant, 1917 est un film impressionnant, mais surtout humain. Mendes pourrait faire le choix de l’hyperréalisme avec ce procédé de long plan-séquence. Mais le réalisme n’est que d’apparence, ne serait-ce que parce qu’il ne fait que donner le sentiment du temps réel. Il condense en fait en deux heures toute l’humanité sacrifiée, la peur, le courage, le désespoir, dans un vaste mouvement qui n’est peut-être pas totalement réaliste, mais qui est à coup sûr celui de la vie.

La Bataille de Solférino – de Justine Triet – 2013

Posté : 5 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, TRIET Justine | Pas de commentaires »

La Bataille de Solférino

« C’est la troisième fois que je me fais humilier aujourd’hui, j’en ai ras le cul », lance un Vincent Maicagne faussement débonnaire et réellement au bout du rouleau au flic qui l’interroge rudement. Jusqu’alors on aurait vite fait de le cataloguer comme le cool rigolo ou comme le psychopathe de service, tant son jeu lunaire peut semer de fausses pistes. Mais cette réplique livre une vérité brutale et sèche qui cingle comme une gifle.

Et ça me semble une bonne manière de résumer le cinéma de Justine Triet, dès ce premier long métrage libre et envoûtant. Tout s’y mélange : l’absurde et le profond, le très léger et le très grave, les dialogues très écrits et les images volées dans une actualité bien réelle. Et de ce chaos apparent, Justine Triet tire une vérité qui secoue d’autant plus qu’on ne la voit jamais vraiment venir.

La cinéaste mêle intimement destins personnels et événements d’actualité avec une évidence totale. Parce que l’histoire contemporaine n’existe en fait que par le regard qu’on lui portes, elle fait de son héroïne non seulement une mère dépassée, mais aussi une journaliste de la chaîne d’info continue i-Télé en mai 2012, le soir de l’élection de François Hollande. Comme un espoir de jours meilleurs pour une jeune femme qui semble passer à côté de tout.

Même son rôle de mère, Justine Triet le filme d’emblée comme une épreuve à peine humaine, ouvrant son film avec une longue scène faite de petits riens, d’une mère qui peine à faire face à ses deux filles en bas âge qui pleurent beaucoup et très fort. A ce chaos initial, Justine Triet en ajoute bien d’autres : un ex-mari angoissé et encombrant (Macaigne, formidable), un baby-sitter dépassé, et d’autres rencontres plus ou moins déstabilisantes.

Entre les moments intimes et intenses, et les impressionnantes séquences filmées durant cette fameuse soirée d’élection et de liesse populaire, la réalisatrice trouve un élan commun, un mouvement faussement continue qui semble mener vers un paroxysme inévitable, mais qui privilégie les moments de calmes entre les tempêtes. Ce pourrait être bordélique, mais ce sentiment de toucher à la vérité la plus intime nous rattrape constamment.

Donner le sentiment d’un cinéma tellement libre qu’il en paraît improvisé, tout en maîtrisant totalement et absolument sa narration… Justine Triet dévoile dès ce premier long métrage une vision personnelle et un langage qui lui est propre, qui passe autant par l’image que par le son (l’utilisation des chansons, déjà…). Grand premier film d’une grande cinéaste.

Victoria – de Justine Triet – 2016

Posté : 4 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, EFIRA Virginie, TRIET Justine | Pas de commentaires »

Victoria

En attendant de découvrir la Palme d’Or 2023, il est bon de se replonger dans les premiers films de Justine Triet, cinéaste qui, dès ce deuxième long métrage, dévoile à la fois un univers très personnel, et une maîtrise assez impressionnante.

L’histoire de cette jeune avocate dont toute la vie semble être une fuite en avant absolument pas maîtrisée ressemble sur le papier à beaucoup d’autres films français récents. Mais le résultat est un film qui ne ressemble à aucun autre, par sa manière de toucher la vérité en flirtant avec la comédie, par la distance que la cinéaste place avec les emmerdes de son héroïne, par son utilisation formidable de chansons rares et fascinantes, ou encore par ce qu’elle révèle de son actrice principale.

Virginie Efira, dont les habitués de ce blog savent à quel point je la considère comme très grande, et qui prend ici une toute nouvelle dimension. Plutôt habituée aux comédies romantiques, la voilà qui s’empare d’un grand rôle complexe où son sens de la nuance éclate littéralement. Touchante et drôle dans la même scène, dans le même instant, elle est formidable en femme libre mais totalement enfermée dans une course dont elle a perdu toute maîtrise.

Dès les premières minutes, Justine Triet crée une ambiance atypique, faisant se côtoyer le grotesque, l’ironie et le tragique. Dans ce mariage qui ouvre le film, et qui semble si parfait au premier coup d’œil, avec ces invités bien habillés et ces belles tablées dans l’orangerie, Justine Triet multiplie les détails qui tranchent avec la perfection affichée : ce voisin de table assommant, la présence d’un singe, la témoin à la robe gênante… Et cet incident qu’elle met en scène (sans le filmer) sans le moindre effet dramatique.

Mine de rien, Justine Triet joue avec les clichés, renverse les situations attendues, confronte des réalités inconciliables. Victoria répète ad nauseum à tous ceux à qui elle se livre que le sexe ne l’intéresse plus, mais multiplie les plans culs (foireux et irrésistibles). Ses amis ont tous quelque chose de dérangeant (dont Melvil Poupaud, certes marqué a posteriori par sa prestation en mari violent dans le récent L’Amour et les forêts)… Finalement, c’est d’un ex-dealer, joué par le parfait Vincent Lacoste, que viennent les vrais moments de calme et de liberté.

Et c’est beau de voir les visages de ces personnages qui ne cherchent qu’à afficher l’image de l’épanouissement, et d’où les fêlures et défauts ne surgissent que par petits éclats. Ces éclats de vérité qui font la beauté de ce film, et du cinéma de Justine Triet. Vivement la Palme d’Or…

Get out (id.) – de Jordan Peele – 2017

Posté : 6 juillet, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, FANTASTIQUE/SF, PEELE Jordan | Pas de commentaires »

Get out

Il fait fort, Jordan Peele, avec ce premier long métrage venu d’on ne sait où. Ou plutôt si, certaines influences sont assez évidentes, mais on ne saurait trop en dire sans déflorer les surprises, nombreuses, du film. Soulignons quand même que la toute première scène inscrit ouvertement Get out dans une sorte d’héritage du cinéma de John Carpenter. C’est en partie le cas, avec quelques effets de styles clairement inspirés du maître.

Comme Carpenter, Peele s’empare des codes du film de genre dans ce qu’il a de plus décomplexé, pour livrer une vision glaçante et sans concession de la société actuelle. Mais à l’opposée du réalisateur de They live !, lui fait naître l’angoisse de détails anodins, réalistes et terriblement quotidiens : la manière dont une communauté blanche bien sous tout rapport accueille un jeune homme noir, sans la moindre hostilité apparente, mais avec de petits gestes, des regards, des mots qui n’ont l’air de rien, mais qui créent une brèche dans les sourires si bienveillants.

Il n’aurait pas dû accepter de se rendre chez sa belle-famille blanche, ce jeune photographe afro-américain. Son pote lui avait dit. Et on lui dirait bien aussi de se sauver en courant. Mais non, il l’aime tellement, sa jeune fiancée, qu’il est prêt à affronter le long week-end d’épreuves sociales qui l’attend. Et quelles épreuves ! D’abord ce père trop copain, puis cette mère trop posée, ce fils étrangement agressifs, et encore ces invités aux silences troublants. Et ces deux serviteurs noirs surtout, aux trop larges sourires et comme étrangers à eux-mêmes…

Il y a un tournant radical dans le film, dont on ne dira pas grand-chose, si ce n’est qu’avant ce tournant, Peele signe avec Get out une chronique glaçante et radicale du racisme banal et du masque de la bien-pensance. Pour faire monter l’angoisse, qui atteint des sommets, Peele ne se refuse rien, jouant à la fois sur les effets à la Carpenter (une silhouette qui apparaît, une note de musique qui cingle), sur la mise en scène de comportements pour le moins décalés, ou sur le souvenir traumatisant de la première scène.

Et puis le film fait un virage brusque vers autre chose, vers un cinéma de genre assez radical comme on n’en fait finalement plus guère depuis les années 1940. En tout cas pas avec un tel regard, et une telle efficacité. Flippant et engagé, dérangeant et fascinant… Et si le premier digne héritier de Carpenter était enfin né ?

A couteaux tirés (Knives Out) – de Rian Johnson – 2019

Posté : 2 janvier, 2023 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, JOHNSON Rian | Pas de commentaires »

A couteaux tirés

C’est donc pour donner des suites à ce film que Netflix a fait un chèque monumental. Sans doute y a-t-il un vrai potentiel derrière le personnage de détective qu’incarne Daniel Craig (juste avant d’endosser pour la dernière fois les fripes de 007), mais il faut bien le reconnaître : il n’y a quand même pas grand-chose de neuf sous le soleil. Ce « Benoît Blanc » aux origines indéterminées (mais à prononcer avec un c final sonore) est l’héritier à peine déguisé de Miss Marple et d’Hercule Poirot.

D’ailleurs, comme dans les grandes adaptations de l’œuvre d’Agatha Christie des années 70 et 80, et plus récemment dans celles de Kenneth Branagh, c’est un casting all-star que nous sort Rian Johnson, qui s’offre là une nouvelle virginité et un nouveau filon juteux, après avoir fâché une partie des membres de l’univers Star Wars. Toni Collette, Jamie Lee Curtis, Ana de Armas (avant Mourir peut attendre, donc), Michael Shannon, Don Johnson… et autant de coupables potentiels.

La formule est sans surprise : le film est construit en forme de Cluedo géant. Qui donc a tuer Christopher Plummer, richissime écrivain qui venait de déshériter à peu près tout le monde quand une mort violente et mystérieuse l’a fauché. Rien de bien neuf donc, même si côté scénario, il faut souligner l’originalité de la chose, qui nous dévoile très tôt le nom du coupable… Sauf que, bien sûr, non, c’est un peu plus compliqué.

Le film a un petit côté bâton de maréchal post-James Bond pour Daniel Craig, mais l’acteur s’amuse visiblement beaucoup à créer ce détective faussement nonchalant et très sûr de son talent. Et ce plaisir s’avère vite très communicatif, surtout quand Rian Johnson adopte un ton gentiment décalé et ne verse pas dans le suspens plus traditionnel, ce qu’il fait hélas dans la dernière partie. Mais ce premier film, sans rien révolutionner, donne plutôt envie de revoir Daniel Craig dans le rôle de ce Benoît BlanC. Et le c se prononce.

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