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Archive pour la catégorie '1920-1929'

A l’Américaine (Champagne) – d’Alfred Hitchcock – 1928

Posté : 14 juin, 2011 @ 12:45 dans 1920-1929, FILMS MUETS, HITCHCOCK Alfred | 2 commentaires »

A l'Américaine

Vous ne lirez pas souvent la phrase qui suit sur ce blog : ce Hitchcock n’est pas un grand cru, loin s’en faut. A vrai dire, Champagne est, assez nettement, le film le moins intéressant de toute la carrière du génial Hitchcock. Un assez banal drame social qui raconte la déchéance d’une jeune femme, fille d’un richissime américain, qui se retrouve à travailler dans un établissement nocturne parisien fréquenté par des hommes peu fréquentables…

Le thème n’est pas sans évoquer le sous-estimé (même par Hitchcock lui-même) Downhill, qui racontait lui aussi une déchéance sociale, et où les bas-fonds se situaient également en France (décidément…). Mais Downhill était constamment inventif, et bénéficiait d’un solide suspense, ce qui n’est pas le cas de Champagne.

Hitchcock n’est pas entièrement responsable de cet échec : il a raconté à Peter Bogdanovich que son projet initial était très différent. Son héroïne devait être une ouvrière travaillant à Reims, chez un producteur de champagne, où elle voyait partir tous les jours des centaines de bouteilles vers Paris. Un jour, elle décidait d’aller à son tour tenter sa chance dans la capitale, mais ne tardait pas à découvrir les ravages que causait l’alcool qu’elle contribuait à produire, et devenait elle-même une espère de prostituée…

Même si on retrouve quelques bribes de cette histoire dans le film tel qu’il a été tourné, l’originalité du sujet (on imagine les trouvailles qu’Hitchcock aurait pu avoir autour du trajet des bouteilles de Champagne, et celui de son héroïne) a en grande partie disparu. L’héroïne du film, jouée par Betty Balfour, est la fille très volage d’un riche homme d’affaires, qui s’apprête à se marier avec l’homme qu’elle aime contre l’avis de son père. Prête à toutes les excentricités, elle entre même en scène en faisant amerrir son avion près du bateau où se trouve son amoureux, ce qui donne lieu à quelques scènes qui évoquent, avec quelques années d’avance, le nettement plus réjouissant A l’Est de Shanghaï.

Désespéré par le comportement d’enfant gâté de sa fille, le père lui annonce qu’ils sont totalement ruinés, et qu’elle doit désormais travailler pour subvenir à leurs besoins. Totalement faux, bien sûr, mais la jeune écervelée ne tarde pas à être embauchée, pour la beauté de ses jambes, dans un établissement bien peu fréquentable, ce que le fiancé prend bien mal. Et le père pas mieux…

Le scénario, à vrai dire, semble être en grande partie improvisé : on ne croit pas vraiment à ses rebondissements et à ses personnages pas très bien dessinés. Le film ne manque toutefois pas totalement d’intérêt. Le cynisme d’Hitchcock est là, en filigrane (si vous croyez que la jeune femme va découvrir dans la misère les vraies valeurs humaines, vous êtes loin du compte). Et Hitchcock expérimente bien de temps en temps, notamment avec une série de plans impossibles en caméra subjective : l’un des premiers plans du film met ainsi le spectateur dans la peau d’un homme qui boit une coupe de Champagne, et qui découvre la scène à travers le fond de son verre.

C’est bien peu par rapport à ce qu’on attend d’un Hitchcock (même à cette époque : le jeune réalisateur, qui signe là son avant-dernier film muet, est déjà un immense cinéaste), mais bien assez pour assurer l’intérêt, et éviter l’ennui.

Le Masque de cuir (The Ring) – d’Alfred Hitchcock – 1927

Posté : 29 mai, 2011 @ 8:45 dans 1920-1929, FILMS MUETS, HITCHCOCK Alfred | Pas de commentaires »

Le Masque de cuir (The Ring) - d'Alfred Hitchcock - 1927 dans 1920-1929 le-masque-de-cuir

Hitchcock a raconté que l’envie de faire ce film (muet) est venu de deux images toutes simples : alors qu’il assistait régulièrement à des combats de boxe, à Londres, le jeune réalisateur avait été frappé par la présence d’un public de bourgeois vêtus de blanc. Il avait aussi été frappé par l’utilisation de champagne, que l’entraîneur versait sur la tête du boxeur entre deux rounds. Deux images que l’on retrouve d’ailleurs dans ce film, muet, tourné alors que le jeune Hitch était déjà un réalisateur tout puissant en Angleterre. Un réalisateur qui pouvait déjà tourné à peu près ce qu’il voulait.

n peut alors s’étonner que son choix se soit porté sur une intrigue aussi classique : The Ring, c’est l’histoire on ne peut plus banale (même à cette époque) du triangle amoureux. Une femme aimée par deux hommes, qui se battent pour elle. Littéralement, ici, parce que les deux hommes en question sont boxeurs. Le fiancé officiel (Carl Brisson) est un jeune pugiliste plein de promesses, mais cantonné à de petits combats dans des fêtes foraines. L’amant (Ian Hunterà est un champion national (d’Australie), qui embauche le fiancé, officiellement pour lui servir de sparing partner, officieusement pour attirer la belle (Lillian Hall-Davies) vers lui…

Rien d’original dans l’histoire en elle-même, donc, si ce n’est la dimension exceptionnelle que lui donne la boxe en toile de fond. Dans un genre auquel il n’est pas habitué, Hitchcock se révèle particulièrement inspiré : le film est une splendeur, qui s’ouvre sur une plongée impressionnante dans l’univers de la fête foraine. La caméra plonge dans la foule et recrée, sans l’aide du son bien sûr, l’effervescence qui règne à la fois dans le public très nombreux, et chez les forains. Entre plans de foules et gros plans, ces premières minutes démontrent la maîtrise parfaite d’un cinéaste qui n’a pas 30 ans, mais qui est déjà le plus grand de son pays.

On retrouve indéniablement la patte d’Hitchcock, cette manière qui n’appartient qu’à lui d’être le plus politiquement incorrect des grands maîtres, l’air de ne pas y toucher. Avec une légèreté qui n’est qu’un leurre, il filme un policier qui regarde, rigolard, un noir se faire ridiculiser par une bande de garnements, avant d’intervenir contraint et forcé.Il filme aussi magnifiquement la jalousie qui naît chez le brave boxeur, par petites touches délicates. Mais surtout, il filme les coulisses de la boxe et les combats eux-mêmes avec un génie de tous les instants, se renouvelant scène après scène. Le premier combat se déroule même hors champs ; lors d’un autre, la caméra reste fixée sur le visage de ce jeune boxeur dont l’ascension ne peut que culminer avec ce combat face à celui qui fut son mentor, qui est son rival, et qui sera son rédempteur…

Le film était le plus gros budget du cinéma anglais à l’époque. Il fut aussi un triomphe critique et public, et reste, 84 ans plus tard, un sommet du cinéma muet britannique.

Les Révoltés / La Révoltée (Outside the law) – de Tod Browning – 1920

Posté : 19 mai, 2011 @ 9:43 dans * Films de gangsters, 1920-1929, BROWNING Tod, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Les Révoltés

Après un vol qui leur a rapporté une fortune, un couple se fait oublier durant quelques semaines en s’enfermant dans un appartement… L’histoire évoque étrangement celle de White Tiger, que le même Tod Browning tournera trois ans plus tard. Le cinéaste creusera souvent le même sillon, se renouvelant pourtant toujours pour aller de plus en plus loin. C’est déjà le cas avec ses films de jeunesse, moins traumatisants que des chef d’œuvre comme L’Inconnu ou L’Oiseau Noir, mais déjà passionnants.

Loin du morbide qui fera sa réputation, Browning signe un film de gangsters qui n’a rien de classique. Tout commence dans un Chinatown filmé d’une manière extraordinairement vivante par Browning, qui nous plonge au cœur des arrière-boutiques et de cette vie nocturne entre violence et mystères. Et comme dans White Tiger, c’est dans ces bas-fonds qu’une grande figure du gangstérisme est trahie, à la suite d’une séquence de fusillade ébouriffante. Après son arrestation, sa fille (Priscilla Dean, l’actrice fétiche de Browning à cette époque) est bien décidée à le venger.

Pourtant, c’est bien un film sur la rédemption, et non sur la vengeance. Et c’est un film qui évite les sentiers balisés : alors que l’intrigue est bien en place, les deux héros se retrouvent enfermés dans un appartement (tout confort, loin de la cabane rustique de White Tiger), où ils n’ont rien d’autre à faire que de se regarder dans le blanc des yeux, faire des plans d’avenir, et décider de tirer un trait sur leur passé de criminels… C’est a priori le passage le plus austère du film, et c’est pourtant le plus abouti, et de loin. Ce huis-clos soudain bulle de légèreté dans un univers inquiétant, est fascinant. Avec l’arrivée d’un gamin pas tête-à-claque du voisinage, il fait même basculer le film dans une espèce de comédie de mœurs très émouvante.

On est décidément bien loin des grands classiques de Browing des années à venir. Pourtant, Outside the law marque la deuxième collaboration (après The Wicked Darling) du réalisateur avec celui qui symbolisera son cinéma pour l’éternité : Lon Chaney. Ce dernier apparaît d’ailleurs déjà dans un double rôle, comme il le fera à plusieurs reprises à l’avenir. Il interprète à la fois le traître impitoyable Black Mike, et un Chinois aux yeux très (très, très) bridés, Ah Wing.

White Tiger (id.) – de Tod Browning – 1923

Posté : 3 mai, 2011 @ 3:17 dans * Films de gangsters, 1920-1929, BROWNING Tod, FILMS MUETS | 2 commentaires »

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Browning n’a pas encore trouvé définitivement son créneau (l’ultra morbide, dont Lon Chaney sera l’interprète parfaite), mais il est déjà un très grand cinéaste, quand il signe ce beau film de gangsters qui commence comme un Dickens : dans les bas-fonds de Londres, un gangster respecté vit avec ses enfants, Sylvia et Roy, et se planque en compagnie de son complice Bill Hawkes. Mais ce dernier (joué par Wallace Beery, excellent) l’a balancé à la police, qui ne tarde pas à débarquer. Dans la confusion, le père est tué, Roy s’enfuit seul, et Sylvia est recueillie par Hawkes. Les années passent, Roy et Sylvia ont grandi, tous deux persuadés que l’autre est mort, et tous deux décidés à retrouver et tuer celui qui a causé la mort de leur père.

Par hasard, c’est grâce à Hawkes que le frère et la sœur, qui ne se reconnaissent évidemment pas, se retrouvent. Roy (Raymond Griffith, pas très convaincant) est devenu un arnaqueur qui gagne sa vie grâce à un automate-joueur d’échecs qu’il actionne lui-même discrètement. Sylvia (Priscilla Dean, qui était alors l’actrice fétiche de Browning) et Bill Hawkes vivent de petites arnaques, et proposent au jeune homme (qu’ils n’ont pas reconnu) de les accompagner en Amérique pour tenter de s’intégrer dans le grand monde, où il y a beaucoup d’argent à se faire.

Mais une arnaque tourne mal, et les trois escrocs, ainsi qu’un séducteur tombé amoureux de Sylvia, sont poursuivis par la police, et se réfugient avec leur butin dans une cabane perdue dans les bois, où ils espèrent se faire oublier. Le temps passe, et les soupçons commencent à apparaître entre les quatre co-locataires. La manière dont Browning filme ce huis-clos tardif est magistrale : par petites touches, le cinéaste fait monter la tension, et exprime parfaitement (évidemment sans paroles, mais les regards en biais suffisent) les suspicions, et la haine qui sépare les protagonistes, tout en les liant inexorablement les uns aux autres.

C’est du très grand art, d’autant plus que le frère et la sœur ne se sont toujours pas reconnus, et que la situation menace de tourner à la tragédie la plus morbide. La tension n’en est que plus terrible…

Sans la raconter en détail, la fin du film laisse hélas un goût d’inachevé, avec quelques idées magnifiques (comme le dernier plan, étonnant, de Wallace Beery), mais aussi le sentiment un peu frustrant que Browning est encore bridé, et qu’il n’a pas osé aller au bout de son univers.

Downhill / La Pente (Downhill) – d’Alfred Hitchcock – 1927

Posté : 13 avril, 2011 @ 7:39 dans 1920-1929, FILMS MUETS, HITCHCOCK Alfred | Pas de commentaires »

Downhill

Après The Lodger, son premier chef d’œuvre, le jeune Hitchcock retrouve la star Ivor Novello pour ce drame social, mélo aux effets bien appuyés, mais qui porte indéniablement la marque du réalisateur. Même s’il ne s’agit pas d’un thriller, on trouve déjà dans ce film le thème du faux coupable, que Hitchcock ne cessera de décliner jusqu’à ses dernières années. Mais ici, c’est un faux coupable qui n’essaye pas de prouver son innocence, et c’est même tout le sujet du film.

Ivor Novello est un brillant étudiant, fils de grande famille, promis à un bel avenir. Intelligent, sage, sportif (reconnaissance ultime pour lui, il vient d’être nommé capitaine de l’équipe de foot de son campus). Autant dire que tout va bien pour lui. Mais le gars est tellement parfait que, lors d’une soirée avec un ami nettement moins sage que lui, il refuse les avances d’une jeune femme délurée. Celle-ci ne tarde pas à se venger en l’accusant d’avoir abusé d’elle. Pour ne pas mettre son ami dans une situation délicate, qui pourrait lui coûter la bourse dont il a besoin, il garde le silence. Et c’est l’engrenage fatal.

Viré du campus, il devient figurant dans un music hall et finit par épouser la vedette, qui s’avère être une belle garce, et le met à la porte sans un sou. Devenu gigolo à Paris, au Moulin-Rouge, il continue sa descente dans les bas-fonds de l’humanité, et se retrouve bientôt paumé au tréfonds du port de Marseille, survivant comme un fantôme dans un univers qui n’est décidément pas le sien, sombrant peu à peu dans la folie et la maladie, voyant partout le visage de ce père qui, en ne le croyant pas, à précipité sa chute…

Hitchcok est particulièrement inspiré lorsqu’il filme littéralement la descente de son héros. Descente physique, puisque par une série de plans magnifiques et très sombres, il le fait descendre dans le métro, puis en ascenseur, par des escaliers… Tout au long du film, Novello, qui était porté en triomphe vers le ciel par ses camarades d’université, n’en finit pas de descendre, toujours plus bas. Et lorsqu’il revient finalement à Londres, c’est les yeux au raz du quai qu’on le retrouve, totalement hagard.

Dans sa représentation de la descente de classe, Downhill présente bien des points communs avec Le Dernier des Hommes. Ce n’est sans doute pas un hasard : à ses tout débuts, lorsqu’il travaillait pour la société de production UFA en Allemagne, Hitchcock avait eu l’occasion d’assister au tournage du chef d’œuvre de Murnau, en 1924. Devenu réalisateur à son tour, Hitchcock s’est sans doute souvenu du travail de Murnau.

La fin de Downhill paraît un peu artificielle, surtout venant après une série de scènes particulièrement glauques et oppressantes, se déroulant dans des bas-fonds marseillais transcendés par un expressionnisme lui aussi très inspiré du cinéma allemand de l’époque. Mais Downhill est bel et bien l’œuvre d’un cinéaste déjà solide, inspiré, et passionnant.

The Lure of the Labrador (id.) – de Varick Frissell – 1926

Posté : 10 mars, 2011 @ 10:31 dans 1920-1929, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS, FRISSELL Varick | Pas de commentaires »

The Lure of the Labrador

Entré dans l’histoire du cinéma pour avoir péri lors du tournage de The Viking, le premier film parlant de l’histoire du cinéma canadien, Varick Frissell était peut-être, avant même d’être un cinéaste de première importance, l’un des plus grands ambassadeurs du « Labrador », cette région sauvage du Canada célèbre pour ses forêts et ses étendues d’eau.

Ce court métrage tourné en 1926 n’a, cinématographiquement parlant, pas grand intérêt : il ressemble plutôt à un dépliant filmé pour la région, avec ses grands paysages, son contexte historique, ses habitants au mode de vie si éloigné du nôtre…

C’est assez intéressant, c’est vrai. Mais pas plus que de nombreux autres documentaires tournés à l’époque. Il manque un fil conducteur à ce court film, que le temps a par ailleurs un peu abîmé.

La Petite Vendeuse (My Best Girl) – de Sam Taylor – 1927

Posté : 9 mars, 2011 @ 10:48 dans 1920-1929, FILMS MUETS, PICKFORD Mary, TAYLOR Sam | Pas de commentaires »

La Petite Vendeuse

J’ai toujours eu un petit faible pour cette bluette charmante d’une simplicité extrême : une petite employée d’un grand magasin tombe sous le charme d’un jeune stagiaire un peu maladroit, qui est en fait le fils du richissime propriétaire du magasin, arrivé là incognito pour faire ses preuves. Un monde sépare les deux jeunes gens ; mais bien sûr, l’amour dépasse toutes les barrières sociales…

Je crois bien être tombé sous le charme de « la petite fiancée de l’Amérique », comme on l’appelait dans les années 20, en voyant une scène de ce film : assise à l’arrière d’une camionnette en marche, le personnage joué par Mary Pickford fait ostensiblement tomber quelque chose pour que l’homme qu’elle aime déjà la rejoigne, courant avec un large sourire dans les rues de Los Angeles (la séquence a été tournée en décor réel, ce qui en accentue encore la force). Admirablement filmée, la scène vous file un sourire large comme ça : comment ne pas craquer devant le minois de Pickford ?

La réalisation de Sam Taylor, constamment inventive et souvent étonnamment moderne, fait beaucoup pour le film. Dès la première séquence, le ton est ouvertement décalé, et surprend autant qu’il séduit (ça commence quand même par un plan de Mary Pickford perdant sa culotte !). Et ça n’arrête plus de tout le film, mené à un rythme trépidant qui n’est pas sans rappeler les grandes comédies de Capra (difficile de ne pas penser à Vous ne l’emporterez pas avec vous, en particulier dans la dernière séquence).

Le film est, comme ça, jalonné de scènes inoubliables : celle du camion, donc, mais aussi ce joli passage où les deux futurs amants déjeunent tête à tête dans l’espace confiné d’une caisse en bois dans la remise ; celle où Mary Pickford veut présenter Joe à sa famille mais, tombant sur une dispute, fait croire au jeune homme qu’ils arrivent au cœur d’une répétition théâtrale ; la rencontre avec les riches parents de Joe ; la séquence du tribunal (avec le chaplinesque Mack Swain en juge débonnaire)…

My best girl est sans doute l’un des plus beaux films de Mary Pickford. C’est aussi, hélas, la fin d’une époque : il s’agit de l’ultime film muet de la star (et donc du début de la fin de sa carrière). Elle y donné la réplique au séduisant Charles « Buddy » Rogers, qui deviendra quelque temps après son dernier mari, après sa séparation d’avec Douglas Fairbanks, avec qui elle formait le couple le plus glamour de toute cette décennie magnifique. La fin d’une époque, je vous dis…

Nana – de Jean Renoir – 1926

Posté : 31 janvier, 2011 @ 12:37 dans 1920-1929, FILMS MUETS, RENOIR Jean | Pas de commentaires »

Nana

C’est le premier film important de Renoir, qui était jeune (32 ans) mais déjà très ambitieux, et franchement doué : cette adaptation gonflée du roman de Zola est une grande production « à l’américaine », qui tranche nettement avec la majorité des films français de l’époque. Renoir a d’ailleurs souvent dit qu’il voulait apporter au cinéma d’ici ce qui lui manquait à trop vouloir s’intellectualiser : un vrai sens du récit et du spectacle. En cela, Nana est franchement réussi, malgré des décors curieusement dépouillés.

L’hommage, délibéré, à Eric Von Stroheim, est frappant : Renoir n’a jamais caché non plus qu’il avait voulu faire ce film parce qu’il avait été enthousiasmé par Folies de Femmes, et qu’il voulait réaliser un long métrage dans la même veine, avec un personnage de femme qui pourrait en être issu. Là aussi, c’est très réussi.

A vrai dire, même si on est assez loin des chefs d’œuvre qu’il réalisera dans les années à venir, Nana est une vraie réussite, grâce notamment à des personnages masculins très forts et interprétés avec beaucoup de subtilité par Werner Krauss ou Jean Angelo, tous les deux géniaux dans des rôles d’hommes du monde qui finissent par abandonner toute convenance pour cette petite artiste de music-hall adulée par le tout-Paris : l’un détruira son foyer ; l’autre trichera aux courses. Comme eux, tous les hommes qui tomberont sous le charme de Nana tourneront particulièrement mal…

Mais il y a un problème de taille dans ce film, c’est Catherine Hessling : la compagne de Renoir de l’époque minaude et en fait des tonnes durant les deux heures vingt de film, et ça devient bien vite assez insupportable. Jouant les divas à la Gloria Swanson, prenant des poses lascives, fixant la caméra avec des yeux qui se veulent coquins, et une bouche de geisha de dessin animé… elle s’imagine provocante, elle est juste un peu ridicule, et surtout totalement dépourvue du charme et du sex-appeal dont ce personnage avait besoin. Difficile de concevoir qu’autant d’hommes puissent être à ses pieds.

C’est franchement dommage, parce que le film ne manque pas de qualités. Mais la présence de l’actrice est bien trop pesante pour les apprécier pleinement. Heureusement pour la carrière à venir de Renoir (et pour le cinéma français), le réalisateur et sa muse ne tarderont pas à se séparer…

Chantage (Blackmail) – de Alfred Hitchcock – 1929

Posté : 14 janvier, 2011 @ 11:15 dans * Polars européens, 1920-1929, HITCHCOCK Alfred | Pas de commentaires »

Chantage (Blackmail) - de Alfred Hitchcock - 1929 dans * Polars européens chantage

Hitchcock passe du muet au parlant de manière magistrale, dans ce petit chef d’œuvre (ben oui, encore) qui est la matrice presque définitive de la plupart des grands films à suivre du génial cinéaste.

Tout commence comme un film muet (le tournage a d’ailleurs réellement commencé comme un muet traditionnel, mais Hitchcock, qui s’attendait à ce qu’on lui demande de sonoriser son film, préparait cette transition dès l’origine du projet) : la première séquence, qui n’a rien à voir avec l’intrigue principale, présente l’inspecteur Frank Webber (John Longden) et son équipier, deux policiers de Scotland Yard, qui s’apprêtent à arrêter un homme recherché. Hitchcock se montre d’une précision absolue dans cette séquence : l’arrestation (filmée avec l’inventivité et l’efficacité qui lui sont déjà naturelles par le cinéaste), la mise en examen, la confrontation avec un témoin, la mise en cellule… Hitchcock n’oublie aucune étape pour ce qui se veut être une vision la plus réaliste possible du quotidien d’un policier. C’est passionnant, et brillant. Blackmail promet alors d’être le plus abouti des films muets du gros Hitch.

Sauf que la partie muette s’arrête là. Sitôt leur journée de travail finie, la véritable intrigue s’apprête à se mettre en place, et le film prend la parole. Gonflé, cynique, et bourré d’humour, Hitchcock fait son entrée dans le parlant avec un dialogue entre les deux flics d’un inintérêt total : durant quelques instants, alors qu’ils quittent les locaux de Scotland Yard, Frank et son équipier parlent de tailleur, de costumes, d’étoffe… un dialogue sans la moindre profondeur, sans le moindre second degré. Bref, sans le moindre intérêt. Si Hitchcock avait voulu se moquer de la passion grandissante pour le cinéma parlant, il ne s’y serait pas pris autrement.

Ce n’est pas pour autant qu’il prend à la légère les possibilités offertes par le son. Bien au contraire : il ne cesse d’en explorer toutes les possibilités, jusqu’à la fin du film.

Les quelques scènes qui suivent son un peu poussives, mais permettent de découvrir les autres personnages : la fiancée de Frank, Alice (la craquante Anny Ondra, déjà filmée par Hitch dans The Manxman, absolument magnifique dans tous les registres ; même si elle est doublée par Joan Barry pour cause d’accent tchèque imbitable, sa prestation est inoubliable) ; et un obscur artiste qui tente de séduire Alice, cette dernière se montrant d’ailleurs peu farouche, au point de le suivre jusque chez lui.

Et là, le film redevient génial. Utilisant la musique, la profondeur de champs, le champs-contre champs, le hors cadre… avec une inspiration de chaque plan, Hitchcock ne laisse plus jamais retomber la pression avant la fin du film. Dans une longue séquence d’une grande beauté (Anny Ondra y est bouleversante), Alice finit par poignarder à mort celui qui se voyait comme son amant, dans un final dont on ne voit rien, mais qui évoque avant l’heure la mort du Crime était presque parfait.

Bien sûr, c’est Frank qui est chargé de l’affaire, et il suffit d’un soudain travelling sur le visage du mort pour que le flic comprenne que sa fiancée était là, et qu’elle a fait le coup. C’est simple, d’une richesse visuelle folle, et d’une efficacité absolue.

out ce qui suit est aussi réussi. On a beaucoup parlé, évidemment, de cette scène où Alice est à table avec ses parents, et où une mégère parle sans jamais s’arrêter du crime, flot de paroles dont on finit par ne plus rien saisir si ce n’est le mot « knife » (couteau) qui revient sans cesse et par lequel Alice, rongée par la culpabilité, est obnubilée. De la même manière, alors qu’elle déambule dans les rues du Londres nocturne, des signes, des gestes, des images, lui rappellent son crime à chaque pas… Un procédé que Hitchcock reprendra notamment dans La Maison du docteur Edwardes.

On retrouve même le thème du faux coupable, omniprésent dans le cinéma hitchcockien, mais traité ici avec un cynisme total : le faux coupable est un maître chanteur qui a la preuve qu’Alice est coupable, et qui tente d’en tirer parti, est puni à la place de la vraie meurtrière, qui ne sera punie elle que par sa propre culpabilité. Une culpabilité qui ne semble même pas effleurer son compagnon policier, visiblement tout à fait prêt à vivre avec ce poids, et totalement inflexible lorsque le maître chanteur supplie (dans une scène particulièrement dure) le policier de le laisser partir. Blackmail est tout, sauf un film moral…

Même l’apparition traditionnelle d’Hitchcock est réjouissante : tout jeunôt, il apparaît dans une courte scène de métro, dans le rôle d’un passager martyrisé par un enfant très turbulent.

Docteur Mabuse, le joueur (Dr. Mabuse der Spieler) – de Fritz Lang – 1922

Posté : 12 janvier, 2011 @ 1:42 dans * Films de gangsters, * Polars européens, 1920-1929, FILMS MUETS, LANG Fritz | Pas de commentaires »

Docteur Mabuse le joueur

Il y a un petit côté Feuillade, période Les Vampires ou Fantômas, dans ce film fleuve de plus de quatre heures et demi. Ben oui, c’est long, mais arrivé à la fin, on en redemande. Bourré de rebondissements comme dans tout bon serial, découpé en chapitres, Docteur Mabuse est un vrai feuilleton populaire, mais aussi un film d’une richesse et d’une beauté formelle immenses.

Le fameux docteur Mabuse est une figure typique du cinéma langien : une pure incarnation du Mal, qui ne s’intègre dans la société que pour mieux en détourner les règles à son propre profit. Dans ce domaine, Mabuse est un maître. Et Lang a une inspiration totale pour mettre en images ses machinations. Le film commence très fort, avec une énorme arnaque à la Bourse que Lang, par la grâce d’images sublimes et d’un montage virtuose, parvient à rendre aussi passionnante et fluide qu’une simple poursuite.

C’est une entrée en matière géniale, qui laisse penser que le film sera une succession d’arnaques sans rapport les unes avec les autres. Mais ce n’est pas le cas. Après ce prologue flamboyant, qui a pour objectif de présenter son génie du crime et la manière dont il s’inscrit dans son époque (le début de la république de Weimar), Lang lance vraiment son histoire, faite de multiples intrigues dont il tire un à un chacun des fils.

Feuilletonnant et rocambolesque, Docteur Mabuse est aussi passionnant parce qu’il plonge au cœur du Berlin de l’entre-deux guerres, que Lang filme avec toute la beauté de son style expressionniste. L’histoire est parfois un peu énorme, et franchement, on a un peu de mal à croire en cette vision très cartoonesque de l’hypnose, mais qu’importe, on prend un plaisir fou à suivre les machinations diaboliques du Docteur, et l’enquête du « super flic » Von Wenk.

Qu’importe aussi le charme très discutable des deux personnages féminins principaux (la comtesse Told et la danseuse Carozza), Lang réunit un casting masculin parfait et inoubliable. Dans le rôle de Mabuse, Rudolf Klein-Rogge (qui retrouvera son rôle pour la suite onze ans plus tard), acteur fétiche de Lang jusqu’à son départ d’Allemagne en 1933, a un charisme fou et vampe littéralement la caméra. Face à lui, Bernhard Goetzke est parfait, tout en sobriété, en super flic.

Les seconds rôles sont également frappants, en particulier Alfred Abel (qu’on avait vu dans Les Finances du Grand-Duc de Murnau), génial en victime désigné : le comte Told, que Mabuse hypnotise et oblige à tricher aux cartes, détruisant ainsi sa réputation, et le poussant à une déchéance totale et au suicide, pour « voler » sa femme.

Le film est parfois cruel, souvent palpitant (le suspense fonctionne parfaitement), et toujours passionnant. En quatre heures et demi, Lang réussit à garder le cap et la tension, sans le moindre flottement.

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