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Archive pour la catégorie 'DOUGLAS Kirk'

Spartacus (id.) – de Stanley Kubrick (et Anthony Mann) – 1960

Posté : 14 août, 2015 @ 12:23 dans 1960-1969, CURTIS Tony, DOUGLAS Kirk, KUBRICK Stanley, MANN Anthony | Pas de commentaires »

Spartacus

Kubrick a décidément marqué tous les genres qu’il a abordés. Avec Spartacus (commencé par Anthony Mann, à qui on doit les premiers plans du film), c’est tout simplement l’un des plus beaux péplums du monde qu’il réalise. Pour ne pas dire LE plus beau. Superproduction et drame intime, le film est une merveille sur tous les plans. Si le film est si réussi, c’est parce que malgré l’ampleur des moyens et la beauté fulgurante des images, c’est le couple Jean Simmons-Kirk Douglas qui est au coeur de tout, incarnation superbe de tous les rêves brisés de ces esclaves.

« Did they hurt you? » murmure Spartacus le gladiateur à la belle esclave jouée par Jean Simmons avec laquelle il a noué une relation uniquement basée sur le regard, privés de tout autre contact. Et ce simple murmure, bouleversant, équivaut à la plus déchirante des déclarations d’amour. Cette histoire d’amour est, tout au long des trois heures du film, le fil conducteur, le moteur et l’âme de Spartacus, fresque grandiose dont les moyens immenses sont toujours au service des personnages.

La mise en scène de Kubrick est exceptionnelle. Parfois minimaliste, comme cette série de plans très simples dans les cellules qui souligne l’isolement extrême et cruel des gladiateurs. Avec, aussi, une utilisation très intelligente des ellipses, qui évitent l’accumulation de scènes de combats qui n’auraient rien apporté au propos. Mais même s’il ne se complaît pas dans l’étalage de ses moyens, Kubrick assume l’aspect superproduction de son film, avec de superbes plans de foule ou encore l’impressionnante marche des légions romaines lors de la grande bataille.

Sans jeu de mots pourri, les morceaux de bravoure sont légions. Les moments de calme en sont d’autant plus forts, comme cette parenthèse bouleversante durant laquelle le personnage de Tony Curtis dit un poème aux esclaves en fuite, sublime partage des beautés et des espoirs de la vie.

Le film trouve le parfait équilibre entre ces moments de pure beauté et les scènes d’action, durant lesquelles les acteurs donnent de leur personne. Y compris la star Kirk Douglas, dont on voit bien pendant l’évasion qu’il a lui-même fait ses cascades. Aussi formidable pour sa présence physique hors norme que pour le mélange de force et de douleur qu’il apporte à son personnage. L’un des plus beaux moments du film est son regard perdu lorsque le gladiateur joué par Woody Strode (magnifique dans un rôle quasi-muet) refuse de le tuer, signant par là-même son propre arrêt de mort.

Comme dans la plupart des grosses productions de l’époque, Kubrick a droit à une distribution très prestigieuses. Souvent un cadeau empoisonné, avec la difficulté que l’on imagine pour que chacun trouve sa place. Mais le cinéaste parvient à faire exister chacun d’entre eux, et de quelle manière. Laurence Olivier, Charles Laughton (monstrueux et terriblement humain), Peter Ustinov, John Gavin (inattendu en César), Charles McCraw, John McIntire… tous trouvent ici l’un de leurs meilleurs rôles.

Spartacus est un chef d’oeuvre comme le péplum en a peu connu. Le génie de Kubrick y est pour beaucoup, l’implication totale de l’acteur et producteur Kirk Douglas aussi. Quant au scénario, signé Dalton Trumbo, il est lui aussi exceptionnel, osant « infliger » au spectateur une ultime demi-heure d’une noirceur et d’un pessimisme déchirants.

Le Duel des héros (Draw !) – de Steven Hilliard Stern – 1976/1984

Posté : 6 février, 2015 @ 6:16 dans 1970-1979, 1980-1989, DOUGLAS Kirk, STERN Steven Hilliard, TÉLÉVISION, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Duel des héros

Il y a une petite incertitude, quant à l’origine de ce film. Il semble que ce western ait été tourné en 1976 pour la télévision, mais qu’il ait eu droit à une petite carrière sur grand écran huit ans plus tard. Information à prendre toutefois avec beaucoup de précaution…

Ce qui semble plus sûr, par contre, c’est que le sujet ait été apporté par Kirk Douglas, et que l’acteur, clairement pas dans la période la plus glorieuse de son immense carrière, ait longtemps cherché à l’interpréter au côté de son vieux complice Burt Lancaster. Finalement, c’est à James Coburn qu’il donne la réplique. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le pauvre sent à plein nez le « choix bis », dans un rôle écrit pour un acteur de l’âge de Douglas (Coburn a 12 ans de moins, et la différence d’âge est flagrante).

Mais le principal problème du film, c’est l’incapacité du réalisateur à opter pour un ton précis : son western est-il noir et réaliste, ou flirte-t-il avec la parodie ? A force de ne pas choisir, Stern n’est jamais réellement convaincant.

L’histoire, pourtant, était assez originale et pleine de promesses : un vieux pistolero rangé des affaires se réfugie dans l’hôtel d’une petite ville après avoir tué un shérif en légitime défense. Alors que la population veut le lyncher, un ancien homme de loi débarque : un homme qui l’a longtemps poursuivi, avant de déposer les armes et de devenir alcoolique…

Le Duel des héros n’est pas un ratage absolu : on est toujours heureux de revoir ce vieux Kirk, toujours très en forme malgré ses 60 ans bien tapés. Mais Coburn, aussi sympathique soit-il, n’est clairement pas du même niveau. Et le film manque cruellement d’une quelconque unité. Comme si Stern était aussi tenté par Une corde pour te pendre (le premier western de Douglas) et Cactus Jack (une parodie du genre, tournée à la même époque).

• Sidonis fait les fonds de tiroir, cette fois, pour son incontournable collection « Westerns de Légende ». En bonus : une simple présentation par Patrick Brion.

L’Homme qui n’a pas d’étoile (The Man without a star) – de King Vidor – 1955

Posté : 30 août, 2013 @ 4:35 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, VIDOR King, WESTERNS | Pas de commentaires »

L’Homme qui n’a pas d’étoile (The Man without a star) - de King Vidor - 1955 dans 1950-1959 lhomme-qui-na-pas-detoile

De ce chef d’œuvre du western, vu il y a bien quinze ans, je me souvenais de la chanson-titre, interprétée par Frankie Laine : l’une des chansons les plus marquantes de toute l’histoire du genre (avec « My darling Clementine » et une poignée d’autres). A le revoir, ce qui marque le plus, c’est de constater avec quelle perfection et quelle évidence le film combine des éléments inoubliables, et une grande simplicité.

Le scénario, signé Borden Chase (quelle carrière, quand même, allez donc jeter un œil à sa filmographie) et D.D. Beauchamps (qui a travaillé sur Le Barrage de Burlington), est d’une rare intelligence, et va bien au-delà du simple postulat de base, hyper classique.

C’est l’histoire d’un cow-boy sans le sou qui se retrouve au cœur d’un affrontement entre gros et petits éleveurs. Un thème récurrent dans l’histoire du western, qui évoque l’arrivée des barbelés dans les « open ranges » : la fin de l’Ouest sauvage et des grands espaces ouverts, et l’arrivée du capitalisme, d’une économie de plus en plus organisée. La lutte entre les puissants et les modestes ne se règle plus uniquement à coups de revolvers, mais aussi par une guerre économique.

Une mise en scène formidablement fluide, un montage au cordeau (pas un plan superflu, pas une minute inutile), une manière presque unique d’intégrer la musique (et notamment la chanson de Laine) à l’histoire jusque dans la bouche des personnages… Vidor signe l’un des plus grands westerns de la décennie, malgré un tournage chaotique, marqué par des affrontements constants entre le cinéaste et sa star, Kirk Douglas.

L’acteur entendait bien imposer sa vision du film. Difficile d’affirmer ce que l’on doit vraiment à l’un, et ce que l’on doit à l’autre, mais une chose est sûre : Douglas appose sa marque. Son interprétation, toute en énergie explosive (impressionnant lorsqu’il passe d’un rictus de tueur à un large sourire de fêtard), donne un ton à peu près unique et un rythme exceptionnel au film.

L’Homme qui n’a pas d’étoile est totalement à l’image de son interprétation : enlevé, souvent très léger (Douglas discute tranquillement à table tandis qu’on entend son jeune partenaire se battre dehors, hors champs), mais pourtant complexe et d’une grande profondeur, et bouleversant. Car ce type avide de liberté, qui apprend malgré tout à composer avec des règles de plus en plus contraignantes, surmonte toutes les épreuves mais arrive à une triste conclusion : il n’a plus sa place dans ce monde en mutation.

La Caravane de feu (The War Wagon) – de Burt Kennedy – 1967

Posté : 17 juin, 2013 @ 1:56 dans 1960-1969, DOUGLAS Kirk, KENNEDY Burt, WAYNE John, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Caravane de feu (The War Wagon) – de Burt Kennedy – 1967 dans 1960-1969 la-caravane-de-feu

La Caravane de feu semble n’avoir été fait qu’avec deux idées fortes : associer John Wayne et Kirk Douglas, et transposer le film de cambriolage, genre très en vogue dans les années 60, dans l’Ouest sauvage. Verdict ? Honorable, dirons-nous.

Le film ressemble quand même à un grand truc un peu informe, la plupart du temps. Un véhicule confortable pour deux stars dont l’apogée est déjà derrière elles. Deux hommes de l’Ouest vieillissants qui jouent ici gentiment avec leur image. Sans l’abîmer ni la remettre en question, sans prendre le moindre risque.

L’affrontement de ces deux monstres du cinéma tourne un peu en rond, sur le mode semi-parodique. Le scénario nous les présente comme deux ennemis mortels qui font alliance pour le seul appât du gain, mais on ne sent pas la moindre menace entre ces deux-là. Leurs face-à-face virils et faussement dangereux ne sont jamais pris au sérieux. Ce qui donne au film une légèreté pas désagréable, mais qui nous prive de la tension que cela aurait pu donner.

La transposition du film de cambriolage est un poil plus intéressante, parce que ce western respecte absolument tous les codes du genre : le « cerveau » qui réunit une bande hétéroclite, les préparatifs, le braquage à proprement parler, et la répartition du butin, où le plan parfaitement huilé vole en éclats…

C’est tellement fidèle à ce qu’on a vu cent fois en costumes contemporains, et même si le film a tous les attraits d’un vrai western, que tout effet de surprise tombe à plat. Surtout que le scénario est franchement paresseux, tout entier dirigé vers la vraie star du film : ce fourgon blindé que les cinq voleurs se préparent à attaquer. Le fourgon est tellement central dans l’entreprise de Burt Kennedy que le réalisateur le met en scène dès qu’il le peut tout au long du film, le faisant traverser le champ à la première occasion.

Kennedy n’a rien d’un auteur, mais c’est un honnête réalisateur, qui signe un western tout à fait honorable, avec des acteurs impeccables (Bruce Cabot, qui fut la vedette de King Kong quelques décennies plus tôt, en grand méchant ; Bruce Dern, récent prix d’interprétation à Cannes pour Nebraska, en porte-flingue vite flingué), une belle musique très westernienne de Dimitri Tiomkin, et de belle scènes d’action bien spectaculaires. Un pur divertissement bien sympathique, quoi…

La Caravane de feu est disponible pour la première fois en blue ray, dans une édition simple et pas chère (sans le moindre bonus), chez Universal.

Furie (Fury) – de Brian De Palma – 1978

Posté : 28 avril, 2012 @ 10:54 dans 1970-1979, DE PALMA Brian, DOUGLAS Kirk, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Furie - De Palma

Chef d’œuvre ou nanar ? Film hyper maîtrisé ou brouillon de jeunesse ? Je suis bien incapable de dire ce que je pense vraiment de ce film à la fois étourdissant et bâclé. On peut dire à peu près tout et son contraire de Fury : qu’il est l’œuvre très personnelle d’un cinéaste qui définit film après film des thèmes qu’il ne cessera d’aborder ; mais aussi qu’il surfe sur les thèmes à la mode de l’époque (impossible de ne pas penser à L’Exorciste).

Le fait est que de Palma enchaîne le meilleur et le pire dans ce film qui traite du thème (franchement passé de mode) de la télépathie et de la télékinésie (dans Carrie, déjà…). Dès la séquence d’ouverture, cette ambivalence est tangible. Trois des personnages principaux y sont présentés : un Kirk Douglas vieillissant, son fils Andrew Stevens, et son ami John Cassavetes, qui deviendra sa nemesis. Rien ne sonne vraiment juste dans cette séquence d’exposition : les sentiments semblent trop primaires, les dialogues trop téléphonés, même le jeu des acteurs semble artificiel. Pourtant, la magie opère. La caméra de De Palma, forcément virtuose, virevolte autour de la table, et nous plonge malgré notre défiance dans cet univers mystérieux et si personnel.

Le thème, omniprésent dans l’œuvre de De Palma, de la vue et de la perception, est là, dès cet attentat qui sépare le père et le fils, et révèle la vraie nature de l’ami Cassavetes. Ce que l’on voit n’est pas forcément la vérité et mérite d’être décrypté. De Palma ne cessera de le répéter film après film.

L’attentat vu de plusieurs points de vue, et filmé par l’un des protagonistes ; Kirk Douglas observant les passants avec une acuité hors du commun ; les écrans de surveillance qui suivent l’évolution d’un personnage ; les yeux qui saignent… De Palma explore cette thématique tout au long du film. Logique : le ressors du film repose sur les capacités extra-sensorielles d’Andrew Stevens, et d’une jeune femme interprétée par Amy Irving, qui aide Kirk Douglas dans sa quête pour retrouver son fils, enlevé pour être l’objet d’expériences scientifiques.

Le film exerce une étrange fascination, malgré quelques effets grand-guignolesques (Cassavetes, qui s’ennuie visiblement dans ce film qu’il n’a accepté que pour financer ses propres films, ne s’éclate vraiment, et au sens propre, que dans sa dernière scène, kitchissime). Et on prend un vrai plaisir à retrouver ce bon vieux briscard de Kirk Douglas, dans un genre dont il n’est pas vraiment coutumier.

Une Corde pour te pendre / Le Désert de la peur (Along the great divide) – de Raoul Walsh – 1951

Posté : 24 avril, 2012 @ 12:29 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, WALSH Raoul, WESTERNS | Pas de commentaires »

Une corde pour te pendre

« Si seulement mon père n’était pas entre nous »

Walsh ne s’embarrasse pas de superflu avec ce western âpre et tendu, qui plonge le spectateur directement au cœur de l’action. Dès les premières images, dans un beau noir et blanc baigné de soleil, on est dans les grandes étendues qu’on ne quittera pas avant la séquence finale. Un marshall est là, avec ses deux adjoints. Que font-ils là ? On n’en sait rien et ça n’a aucun intérêt. Mais ils sont au bon endroit, au bon moment pour empêcher un lynchage. Ils convoient alors le « condamné » vers une ville où il pourra être jugé, mais sont pistés par les lyncheurs qui ont juré de l’abattre à tout prix.

C’est le premier western de Kirk Douglas qui, cinq ans après ses débuts sur grand écran, s’était particulièrement illustré dans le film noir jusqu’à présent (notamment avec ses deux premiers films, L’Emprise du crime et La Griffe du passé, deux chef d’œuvre absolus). Il apporte à son personnage de marshall obstiné jusqu’à l’extrême une modernité et une noirceur plutôt rare dans le genre.

Le personnage féminin est tout aussi réussi : c’est la très belle Virginia Mayo, que Walsh avait déjà dirigée dans La Fille du désert et surtout L’Enfer est à lui, et qu’il retrouvera pour Capitaine sans peur. Dans le rôle de la fille du lynché (joué lui par l’incontournable Walter Brennan), garçon manqué et incroyablement féminine, elle apporte au film une séduction trouble. Et qu’importe si elle sort du désert avec un brushing impeccable et une chemise immaculée…

Along the great divide (un titre original bien plus beau et poétique que l’un ou l’autre des titres français) n’est pas qu’un western de plus se déroulant dans le désert. Walsh, ici, ne parle ni d’héroïsme, ni de vengeance, ni d’amour : il ne s’intéresse qu’aux relations père-fils, au cœur de tout le film jusque dans ses moindres recoins.

L’obstination de Kirk Douglas est motivée par le souvenir douloureux de ses rapports avec son père décédé ; Walter Brennan se met en scène auprès de son « geôlier » comme un père de substitution sournois et manipulateur ; Virginia Mayo est prête à sacrifier son amour naissant et son propre sens de l’honneur pour soutenir son père ; le riche propriétaire qui piste le convoi est bien décidé à venger la mort de son fils préféré ; le frère aîné de ce dernier n’est motivé que par la volonté d’exister aux yeux de son père…

On pourrait encore continuer comme ça : il n’est question que des relations père-fils (ou fille) dans ce très beau western tendu et passionnant, réalisé par un Walsh en grande forme. Et ce ne sont pas les deux ou trois zooms grossiers (j’aime pas les zooms), qui tranchent avec la fluidité habituelle des films de Walsh, qui gâchent le plaisir. Même si ces effets pas terribles font un peu tâche chez le réalisateur qui a élevé le travelling au rang de grand art trente-cinq ans plus tôt, avec Régénération.

Règlement de comptes à O.K. Corral (Gunfight at the O.K. Corral) – de John Sturges – 1956

Posté : 18 avril, 2012 @ 10:07 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, LANCASTER Burt, STURGES John, WESTERNS, Wyatt Earp / Doc Holiday | Pas de commentaires »

Réglement de comptes à OK Corral

Revoir ce classique de John Sturges après avoir redécouvert le sublime La Poursuite infernale de Ford est une mauvaise idée. Les deux films étant inspirés du même événement authentique (l’affrontement sanglant entre les frères Earp et le clan Clanton, maintes fois porté à l’écran), et la plupart des personnages étant les mêmes, difficile de ne pas comparer ces deux versions. Et sur tous les plans, la supériorité du film de Ford est écrasante.

Tourné moins de dix ans après, le film de Sturges adopte un style très différent. Loin du noir et blanc nostalgique du Ford, Sturges préfère des couleurs vives et automnales. Dans les deux cas, Wyatt Earp est un homme d’une autre époque, en décalage avec le monde en mouvement qui l’entoure. Chez Ford, ce décalage est une malédiction, Earp est condamné à rester seul. Chez Sturges, c’est le début d’autre chose : il y a un espoir et un avenir pour le héros. Moins sombre, mais aussi nettement moins émouvant.

Comme dans le film de Ford, le plus beau ici, c’est la relation entre le marshall Wyatt Earp et l’ancien bandit Doc Holiday, leur amitié qui dépasse la loi et toute logique. J’avais le souvenir d’une sorte d’apothéose dans la carrière commune de Kirk Douglas et Burt Lancaster… Mais là encore, la comparaison avec le duo Victor Mature/Henry Fonda n’est pas à l’avantage du film de Sturges. Les deux stars sont excellentes, cela dit : Lancaster est droit et inflexible comme il faut, et Douglas secoue parfaitement sa mèche quand il tousse. Mais leur relation est beaucoup plus convenue que dans le film de Ford.

Pourtant, Sturges fait du bon travail. En habile cinéaste qu’il est, il signe un western bourré d’action, de bagarres, de règlements de comptes et de jolies femmes (en particulier Rhonda Fleming, vue dans Deux rouquines dans la bagarre et décidément très belle). Et puis en choisissant d’être un tantinet plus fidèle à la véritable histoire que Ford (on n’est pas dans documentaire, quand même), Sturges signe un film curieusement plus romanesque et épique. Et le fameux règlement de comptes de O.K. Corral est très spectaculaire.

Parmi les curiosités du film, notons la participation du jeune Dennis Hopper. Tout juste sorti de La Fureur de vivre, qu’il a tourné l’année précédente avec James Dean, le jeune acteur tient un petit rôle (celui du plus jeune fils Clanton), mais peut-être le plus intéressant du film : un gamin qui n’adhère pas aux crimes de sa famille, mais qui réalise qu’il n’a pas d’autre choix que de se ranger au côté des siens. Son destin sera tragique, et traité sans concession…

La Griffe du Passé / Pendez-moi haut et court (Out of the Past) – de Jacques Tourneur – 1947

Posté : 23 décembre, 2010 @ 12:14 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, DOUGLAS Kirk, MITCHUM Robert, TOURNEUR Jacques | Pas de commentaires »

La Griffe du passé

Après avoir réalisé quelques-uns des plus grands films d’angoisse de l’histoire (de La Féline à Vaudou), Tourneur junior aurait-il signé le plus grand des films noirs ? Out of the Past peut sans rougir prétendre à ce titre, malgré (ou en raison de) son apparent classicisme. Sur le papier, le film ne se démarque pas des dizaines d’autres qui sortaient sur les écrans depuis le début des années 40. On retrouve, sans en oublier aucun, tous les ingrédients du parfait film noir : la femme fatale, le détective intègre, une machination machiavélique, la petite bourgade tranquille, et même la voix off, qui rythme une partie du film.

Tourneur respecte à la lettre le cahier des charges, et ne raconte même pas son histoire au deuxième degré. Et pourtant, Out of the Past se démarque nettement de la plupart des autres films noirs de l’époque, par la beauté des images, par la qualité de ses dialogues et de l’interprétation, et par une construction plutôt originale, qui scinde le film en deux parties. La première est un flash-back dans lequel le héros, Jeff Bailey (Robert Mitchum) raconte à sa fiancée les événements qui l’ont poussé à se retirer, sous un faux nom, dans une petite ville. La seconde se déroule « en direct » sous nos yeux. L’une des grandes forces du film réside dans la rupture de ton très brutale entre ces deux parties : la première est d’une simplicité absolue, totalement linéaire, presque simpliste ; la seconde est nettement plus machiavélique et complexe, chaque personnage déployant des trésors d’imagination pour être le plus malin. La question n’est plus « à qui peut-on faire confiance ? », mais « qui sera le plus retors ? ».

Pas d’issue heureuse possible dans ce panier de crabes, où la douceur de la blonde Rhonda Fleming, seul élément d’innocence, s’apparente à un eden inaccessible, une sorte de fantasme irréaliste, auquel se raccroche un héros en quête de rédemption (comme Penelope Ann Miller pour Al Pacino dans L’Impasse, de Brian De Palma).

Quant à Jane Greer, à la fois sublime et inquiétante, elle est une femme fatale idéale : pas difficile d’imaginer qu’un homme puisse se laisser envoûter par une femme qui sait à ce point jouer avec les sentiments des autres. Le grand « méchant » du film apparaît à ses côtés presque comme une victime. Ce méchant, c’est Kirk Douglas, tout jeunôt, dans son deuxième rôle (après L’Emprise du Crime, de Lewis Milestone… pas mal, pour un début de carrière), dont les scènes avec Mitchum fonctionnent formidablement bien : une étrange complicité semble se lier entre les deux hommes, pourtant ennemis mortels.

Et puis il y a Mitchum, plus impassible que jamais, qui élève l’art de ne rien faire au rang de pratique géniale. Est-ce le plus nonchalant ou le plus sensible des acteurs ? Soixante ans après, le mystère demeure…

La Captive aux yeux clairs (The Big Sky) – de Howard Hawks – 1952

Posté : 12 octobre, 2010 @ 6:05 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, HAWKS Howard, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Captive aux yeux clairs

Un groupe d’hommes en marche dans une contrée sauvage, des amitiés viriles qui se nouent à coups de poings, et qu’aucune femme ne parviendra à troubler… Pas de doute, on est bien chez Howard Hawks, et dans un grand cru du monsieur, même. Quatre ans après ses premiers pas dans le western, avec un Rivière rouge mémorable, Hawks reprend une trame similaire, pour sa deuxième incursion dans le genre. Au convoi de bétail du précédent film, succède ici un voyage en bateau, en remontant le fleuve jusqu’à des contrées encore inexplorées par l’homme blanc.

La Captive aux yeux clairs est LE film que Hawks consacre aux Indiens. Souvent plus intéressé par les rapports entre les membres d’une même communauté (ce qui est d’ailleurs en grande partie le cas, ici encore), le cinéaste signe une peinture étonnamment contrastée (pour l’époque) de la nation indienne. Non pas d’une seule tribu, d’ailleurs, mais de deux : celle de la « captive » du titre, les Pieds Noirs, peuple pacifique prêt à récompenser les bons blancs qui ont pris grand soin de leur fille, mais prêts aussi à se plier aux règles du commerce… Et puis celle des « méchants » Crows, peuple fier dont on ne tarde pas à comprendre qu’ils sont en fait manipulés par d’autres marchands, bien décidés à rester maître de leur territoire.

Le film présente une tendresse inattendue pour un film de Hawks. Les scènes d’action sont nombreuses, et parfois très impressionnantes (la bataille le long du fleuve, notamment), mais le ton du film reste la plupart du temps assez léger, voire badin. La rencontre des deux héros, pour commencer, semble sortie d’un film d’Errol Flynn ! Bondissants et bouillonnants de vie, les deux comparses écument les petites villes et leurs bars, enchaînant les verres et les bagarres, toujours prêts à en découdre et à séduire les belles locales…

Et puis le film s’installe réellement lorsque tout ce petit peuple embarque en toute discrétion sur le bateau qu’ils ne quitteront plus, dans une magnifique scène nocturne, baignée de brume. La Captive aux yeux clairs est bien un western, mais un western qui ne ressemble à aucun autre, où les pistes poussiéreuses et rythmées par le bruit des sabots, a cédé la place au rythme tranquille (la plupart du temps en tout cas) du fleuve, où les éclaireurs ont plutôt la belle vie : lorsqu’ils ne paraissent pas sur le pont du bateau, ils chassent dans les terres, alors que les hommes d’équipage suent sang et eau pour faire avancer le bateau. Faignants, va…

Et bien sûr, comme ce n’est jamais le petit laborieux qui a le beau rôle, qui donc va se disputer les faveurs de la belle Indienne, que transportent le bateau ? Les deux amis éclaireurs, interprétés par le jeune chien fou Dewey Martin et le plus sage Kirk Douglas. Malin, Hawks nous fait croire un moment qu’on est dans un triangle amoureux comme tant d’autres. Mais que nenni. La rivalité entre les deux hommes prendra une tournure très, très inattendue, et loin du romantisme auquel on a généralement droit. Leur relation, au début très simple, se charge peu à peu d’un curieux sentiment de nostalgie, comme si l’un et l’autre regrettait que les tournants de leur cœur viennent compliquer une amitié si limpide…

Cette nostalgie baigne tout le film, dont le rythme est la plupart du temps assez lent, Hawks ne manquant aucune occasion de filmer la grandeur de ses décors naturels. C’est beau la nature, c’est beau le cinéma, et qu’est-ce que c’est beau, ce film…

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