Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour la catégorie 'WESTERNS'

Killers of the Flower Moon (id.) – de Martin Scorsese – 2023

Posté : 4 novembre, 2023 @ 8:00 dans * Films de gangsters, * Thrillers US (1980-…), 2020-2029, DE NIRO Robert, SCORSESE Martin, WESTERNS | Pas de commentaires »

Killers of the Flower Moon

Le film américain le plus excitant de l’année, forcément : Scorsese, quatre ans après The Irishman, et avec De Niro, et avec Di Caprio, et d’après un livre-enquête absolument formidable de David Grann, qui se lit comme un roman comme on dit… Bref : l’attente était immense. Et le résultat à la hauteur : Killers of the Flower Moon n’est pas seulement le plus beau titre de film américain de l’année, il est aussi l’un des plus beaux, et l’un des plus ambitieux.

C’est d’ailleurs ce qui saute aux yeux le premier : l’extrême ambition du film, l’ampleur de la mise en scène. Scorsese, 80 ans au compteur, signe un film comme on n’en fait quasiment plus. Et c’est cette impression qui persiste longtemps après la projection : voir Killers of the Flower Moon donne le sentiment de découvrir un vieux classique indémodable, l’un de ces chefs d’œuvre que l’on voit et revoit au cours d’une vie, sans que jamais il ne paraisse usé par le temps.

Ces dernières années, le cinéma de Scorsese tendait de plus en plus vers ce classicisme classieux, aux antipodes des chocs esthétiques radicaux que furent Taxi Driver, Les Affranchis ou Casino, la quintessence de son art. Killers of the Flower Moon est très loin de ces jalons incontournables et géniaux. Mais le film n’est pas moins passionnant : Scorsese flirte cette fois avec les grands maîtres hollywoodiens, à la manière d’un Clint Eastwood, mais avec une ampleur bien plus importantes.

On pense forcément à Sergio Leone et à Il était une fois dans l’Ouest, dans la scène de la gare qui amène le personnage de Leonardo Di Caprio (et le spectateur) dans cette petite ville de western. Mais il y a aussi beaucoup de John Ford, voire de King Vidor, dans cette manière de filmer des communautés qui s’entrechoquent, une histoire en marche, et une violence omniprésente sans jamais occuper le premier plan.

Et elle est violente, cette histoire (authentique)… Au début du XXe siècle, le peuple indien des Osages est devenu le plus riche d’Amérique après que du pétrole a été découvert dans les terres arides sur lesquelles les colons les avaient parqués. De quoi aviver la convoitise de familles blanches qui se découvraient des passions pour ce peuple et ses filles, parfaites épouses. Ou d’une administration qui assigne aux riches Indiens des tuteurs pour surveiller cette fortune…

Lorsque le film commence, les morts suspectes se multiplient au sein des Osages. On pourrait s’attendre à ce que Scorsese s’appuie sur ce déchaînement de violences. Il n’en fait rien, refuse de jouer sur un faux suspense (on comprend d’emblée qui est l’instigateur de ces crimes) et se concentre sur ses personnages, notamment sur l’étonnant couple formé par Lily Gladstone (merveilleuse, la révélation du film) et Leonardo Di Caprio (dont l’interprétation intense mais très excessive est plus problématique, et moins tenue).

Au fil de ce film-fleuve (3h30), l’univers semble se refermer autour de ce couple complexe, au cœur des crimes, dont sont victimes tous les membres de sa famille à elle. Plus les meurtres s’accumulent, plus les signes de culpabilité semblent évidents, plus ces deux-là s’aiment, d’un amour que l’on devine sincère malgré l’horreur et l’absurdité. Deux êtres qui s’enferment dans une sorte de dénis fascinant.

Et puis il y a Robert De Niro, figure du Mal diamétralement opposée aux gangsters qu’il a interprété pour Scorsese. Il est extraordinaire dans le rôle de ce patriarche aux faux airs de grand-père idéal, retors et machiavélique. D’une justesse absolue, De Niro livre l’une de ses très grandes performances d’acteur, l’une de ses plus belles depuis plus de vingt-cinq ans. Son dixième rôle pour Scorsese rappelle à quel point cette association-là est précieuse dans l’histoire récente du cinéma.

La Fille du Far West (The Girl of the Golden West) – de Cecil B. De Mille – 1915

Posté : 25 octobre, 2023 @ 8:00 dans 1895-1919, De MILLE Cecil B., FILMS MUETS, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Fille du Far West

Découvrir The Girl of the Golden West après avoir revu The Plainsman permet de voir à quel point De Mille, mais aussi le cinéma en général, a évolué en vingt ans seulement. Comparer ces deux westerns n’est pas aberrant : l’un comme l’autre commence par un carton justifiant les libertés prises avec le réel par une volonté de rendre hommage à cette époque de pionniers.

Les temps, cela dit, ne sont pas les mêmes. Et il y a dans cette adaptation d’une pièce à succès quelque chose de très théâtral. Moins dans le sujet et le scénario d’ailleurs, que dans la mise en scène elle-même. Comme c’était beaucoup le cas à cette époque, la caméra est fixe, occupant à peu près la place qu’occupe le spectateur dans un théâtre, offrant une vue large et frontale sur la scène.

De Mille en sent visiblement les limites, et varie ses effets : plans larges, plans rapprochés, gros plans… Mais le plus souvent, ce sont les personnages qui se déplacent vers la caméra pour changer la perspective. D’où un côté un peu figé auquel le cinéaste n’échappe pas toujours.

Le film n’en est pas moins assez passionnant, parce que mené à un rythme d’enfer (55 minutes, bien remplies) par un De Mille déjà très maître du timing, qui réussit quelques belles séquences d’action.

Quant à l’histoire elle-même, elle est assez classique, reprenant l’éternelle trame du triangle amoureux : le shérif traque un bandit, ce dernier tombe amoureux de la jolie patronne de bar en taisant sa véritable identité, jeune femme que convoite le shérif…

L’originalité vient plutôt du décor : un campement boueux d’orpailleurs, plutôt qu’une ville à proprement parler. Et la présence importante du climat : la neige, la boue, et même le soleil qui éclaire cette espèce de saloon à ciel à demi-ouvert. On n’est pas chez Nuri Bilge Ceylan, mais…

Un détail étonnant, aussi : ces gouttes de sang qui coulent du faux plafond, trahissant la présence du bandit. Un détail que Hawks n’a donc pas inventé, même s’il le sublimera dans Rio Bravo.

Une aventure de Buffalo Bill (The Plainsman) – de Cecil B. De Mille – 1936

Posté : 21 octobre, 2023 @ 8:00 dans 1930-1939, COOPER Gary, De MILLE Cecil B., WESTERNS | Pas de commentaires »

Une aventure de Buffalo Bill

Le titre français est doublement trompeur. D’abord, le héros n’est pas Buffalo Bill : le plus célèbre des tueurs de bisons est bien là, mais il ne tient qu’un second rôle au côté du véritable pilier du film, Wild Bill Hickock. Sans doute moins ancré dans les esprits français, et moins bankable par la même occasion.

Surtout, ce titre semble annoncer un western assez classique, basé sur un épisode héroïque de la vie d’une légende de l’Ouest. Comme on en verra des tas dans les années 40 ou 50. Mais l’ambition de Cecil B. De Mille est toute autre : à travers le parcours de Wild Bill et des compagnons qui croisent régulièrement sa route (Bill Cody et Calamity Jane, surtout), c’est rien moins que toute la mythologie de l’Ouest qu’il cherche à porter à l’écran.

L’ambition est grande, et l’approche décomplexée. Le texte qui ouvre le film (après un générique à la manière spectaculaire que reprendra George Lucas pour ses Star Wars) annonce la couleur : le film qu’on va voir condense en une seule histoire « plusieurs années, plusieurs vies, et des événements d’époques différentes ». Une entrée en matière simple et maligne qui permet d’anticiper et de balayer d’un revers de la main les fines bouches historiques.

Dans cette histoire, qui s’ouvre sur le dernier jour de Lincoln, on assistera donc, en vrac, à la ruée sur les Black Hills, au massacre de Little Big Horn, à l’assassinat de Wild Bill… Qu’importe la vérité historique : De Mille présente son film comme un hommage à un certain état d’esprit. Et comme un pur film de cinéma, tel qu’il le conçoit, avec pour seules contraintes celles du grand spectacle, de l’efficacité et de l’émotion.

Et dans ce domaine, De Mille est l’un des plus grands. Même en noir et blanc, même avec un format classique loin du Cinemascope, même avec des transparences encore imparfaites… le grand spectacle est de tous les plans, tous les instants. De Mille voulait faire de son hommage aux pionniers de l’Ouest une narration cohérente : il le fait avec une fluidité absolument parfaite, avec un sens du rythme parfait.

Les grands moyens dont il dispose (décors impressionnants, figurants par centaines) étoufferaient le talent de bien des réalisateurs. Lui les utilise pleinement (ces moyens se voient clairement à l’écran), mais toujours au service du mouvement, de l’action et des personnages. Régulièrement, sa caméra embrasse les décors dans ce qu’ils ont de grands et bouillonnants, pour se recentrer sur les visages rapprochés de deux personnages, sans que plus rien d’autre n’existe.

C’est historiquement très discutable. Les héros ont le cœur pur et les amitiés sincères, sans grand défaut apparent. Du pur cinéma hollywoodien, donc. Mais dans ce qu’il a de meilleur, enthousiasmant, passionnant, et même émouvant. Gary Cooper est impérial en Wild Bill flamboyant. Jean Arthur touchante en Calamity Jane énamourée. Même le bien terne James Ellison séduit en Buffalo Bill rangé des affaires…

The Plainsman (le titre original, nettement plus convainquant dans ce qu’il évoque une idée de l’Ouest plutôt qu’un unique personnage) m’avait laissé un souvenir très fort dans mon adolescence, un western épique fondateur de ma cinéphilie. Le revoir bien des années après laisse une impression tout aussi forte, et donne l’envie de revoir l’autre grand western épique de De Mille, le tout aussi passionnant Pacific Express.

Marked men (id.) – de John Ford – 1919

Posté : 19 septembre, 2023 @ 8:00 dans 1895-1919, FILMS MUETS, FORD John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Marked men

Encore un Ford qu’on croyait définitivement perdu… et qui l’est sans doute effectivement, à l’exception d’un court fragment que le Eye Film Institute a mis en ligne. Pour être précis, ces trois petites minutes ne sont pas officiellement attribuées à Ford, et apparaissent comme une segment anonyme.

Mais le casting (Harry Carey en tête) l’histoire que l’on devine, deux noms qui figurent sur un intertitre (en néerlandais) et un troisième aperçu sur un livre entre les mains d’un personnage lèvent tous les doutes : il s’agit bien d’une bribe de Marked Men, remake du film The Three Godfathers qu’interprétait déjà Carey en 1916, et dont Ford signera lui-même un remake trente ans plus tard (dédié à Carey).

Cette version-ci s’inscrit dans la longue série des Cheyenne Harry, popularisée par Straight Shooting ou Bucking Broadway par Ford. Un Cheyenne Harry que l’on découvre dans ce passage (sans doute la conclusion du film) laissant un bébé entre les mains d’une jeune femme, et s’apprêtant à se laisser arrêter par un homme dont on comprend qu’il représente la loi.

Il est des fragments de films perdus qui se suffisent presque à eux-mêmes. Ce n’est pas le cas de Marked Men, dont on ne comprend vraiment les enjeux que parce qu’on connaît l’histoire grâce au remake à venir. On comprend ainsi que Harry avait deux comparses qui sont morts en savant la vie du bébé, et que lui-même est un outlaw recherché par le shérif.

On comprend aussi qu’il est question de rédemption, de transmission, et que le poids du passé joue, déjà, un rôle important. De là à préjuger de la qualité du film… Dans un décor unique, et avec un montage qui semble syncopé à force sans doute d’avoir été coupé et recoupé, difficile de s’en faire une idée précise avec ces trois petites minutes, précieuses mais bien courtes.

Le Fleuve de la dernière chance (Smoke Signal) – de Jerry Hopper – 1955

Posté : 30 août, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, HOPPER Jerry, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Fleuve de la dernière chance

Smoke Signal est tourné en 1955, et 1955 vient juste après 1954. Si, si. Et si c’est important, c’est parce que 1954 est l’année de River of no return, le merveilleux classique d’Otto Preminger avec Marylin et Robert. Dans Smoke Signal, il n’y a ni l’une ni l’autre, mais il y a Piper Laurie et Dana Andrews, ce qui n’est pas tout à fait aussi prestigieux, mais ça a tout de même beaucoup d’allure. Surtout, il y a aussi un fleuve particulièrement à descendre pour échapper à des Indiens. Et voilà pourquoi c’est important.

Le film de Jerry Hopper s’inscrit donc très clairement dans le sillage de celui de Preminger, gros succès qui a donné quelques idées aux producteurs. Et on ne va pas s’amuser à comparer les deux films, assez semblables sur le fond : Hopper n’est pas Preminger, il n’en a ni le talent, ni les moyens. Mais il est un cinéaste qui sait être efficace quand il le faut. Et il s’avère ici particulièrement inspiré pour filmer un scénario d’une précision assez remarquable.

De la première à la dernière image, il n’y a à peu près aucun temps mort, aucun ventre mou, aucune pause. Smoke Signal avance avec la même régularité et la même inexorabilité que ce fleuve qui donne au film son titre français. Il y a des remous, des écueils, des berges instables et menaçantes. Mais il y a surtout un débit que rien ne semble pouvoir arrêter.

L’histoire est d’une simplicité exemplaire : un groupe d’hommes dans un environnement hostile tente d’échapper à une meute d’Indiens très remontés. A peu près rien de plus, si ce n’est Dana Andrews, toujours impeccable, dans le rôle assez trouble d’un blanc considéré comme un lâche ; William Talmadge en officier droit et honnête, mais décidé à faire passer Andrews par les armes ; et Piper Laurie dont le jeu atypique et profond transcende le statut de caution féminine.

C’est simple et direct. C’est aussi précis, concis, et efficace, grand film d’action non-stop qui répond à une logique de pure efficacité. Hopper tire le meilleur d’un budget visiblement très réduit. Il doit se contenter d’une poignée de figurants pour incarner une meute assez cheap d’indien… Ses transparences sont assez pourries… Mais qu’importe : le rythme et la construction sont à ce point impeccables que rien ne vient gâcher le plaisir.

Les Ecumeurs (The Spoilers) – de Ray Enright – 1942

Posté : 22 avril, 2023 @ 8:00 dans 1940-1949, DIETRICH Marlene, ENRIGHT Ray, WAYNE John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Les Ecumeurs

Marlene Dietrich, John Wayne, Randolph Scott (sans oublier le vétéran Harry Carey)… Quelle affiche, quand même, que celle des Ecumeurs. La même d’ailleurs que celle de Pittsburgh, qui sera tourné quelques mois plus tard par Lewis Seiler. Mais cette affiche spectaculaire est quand même à nuancer…

D’abord, Marlene semble la quasi-caricature d’elle-même, jouant une énième fois la reine du saloon, et l’objet de toutes les convoitises. Ensuite, Wayne est encore un peu jeunot, manquant de cette présence inouïe qu’il aura dans tous ses films, y compris les moins bons, quelques années plus tard. Enfin, Scott n’est pas encore la grande figure westernienne qu’il deviendra dans sa maturité. Il reste l’acteur de comédie de ses débuts, le sourire constamment aux lèvres quelle que soit la situation.

Ce sourire pose rapidement problème, parce qu’il ne colle pas à son personnage pour le moins trouble, ni même à une histoire qui aurait mérité plus de noirceur, plus de gravité. Le sujet est sombre : la spoliation des terres dont on été victimes des prospecteurs en Alaska vers 1900, sous le couvert d’une pseudo-loi face à laquelle les individus se heurtaient à un dénis de leurs droits. L’histoire est passionnante, et édifiante, le rythme est impeccable… mais pourquoi diriger les acteurs avec tant de légèreté, quand le sujet est si sombre ?

Cette approche, presque de comédie, fait passer Enright à côté d’un film qui s’annonçait pourtant spectaculaire. Il est impressionnant, ce premier plan, montrant un train traversant la ville boueuse et bondée de monde de prospecteurs. Comme sont impressionnants toutes les scènes d’ensemble, cette manière de filmer la vie dans ce coin du monde, avec des moyens qui semblent importants : des décors magnifiques, des dizaines de figurants, de la boue partout, de la vie, du mouvement…

Impressionnante aussi, la grande scène de bagarre, d’une grande brutalité, et mettant en scène dans de nombreux plans très percutants les acteurs eux-mêmes, qui donnent beaucoup de leur personne. Alors oui, on prend un certain plaisir à voir ces trois grands noms se livrer à un dangereux triangle amoureux, mais avec le sentiment constant de passer à côté de quelque chose autrement plus grand.

Un peu comme cette scène courte et étonnante où le personnage de Marlene Dietrich croise dans son saloon un homme qui lui explique être en train d’écrire une histoire, qui sera celle de The Shooting of Dan McGrew, un fameux poème narratif évoquant la vie des pionniers en Alaska (et dont Tex Avery tirera son Shooting of Dan McGoo), étrange clin d’œil furtif et sans conséquence, qui ouvre des perspectives sans rien en faire.

Dix hommes à abattre (Ten wanted men) – de H. Bruce Humberstone – 1955

Posté : 3 avril, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, HUMBERSTONE Bruce, WESTERNS | Pas de commentaires »

Dix hommes à abattre

Randolph Scott décidé à se venger après la mort d’un proche… Voilà une phrase qui peut résumer une belle quantité de westerns. De là à dire que celui-ci tombe dans la facilité, il y a un pas que je ne franchirais pas. Il y a bien des raccourcis dans ce film : une romance qui se noue en un quart de seconde, un prétexte de querelle auquel on a bien du mal à croire, des rebondissements téléphonés (on sait d’emblée qui va se faire tuer et qui va s’en sortir). Mais il y a aussi des choses assez enthousiasmantes.

Et ça commence par une scène inattendue : un braquage de diligence (oui, oh, rien de bien original), qui s’avère être une blague, que vient dévoiler le grand rire d’un Randolph Scott inhabituellement jovial en grand propriétaire tout à son bonheur de retrouver son frère et son neveu, qu’il n’a pas vus depuis dix-huit ans. Sauf que le neveu tombe raide amoureux (au premier regard) d’une jeune femme qu’un autre grand propriétaire veut garder pour lui. C’est Richard Boone, alors on sait qu’il sera le grand méchant de l’histoire. Pas manqué.

C’est le grand méchant, mais il est assez étonnant. Parce qu’il n’est visiblement motivé que par l’amour (un amour très possessif, mais un amour quand même), et pas par l’argent ou le pouvoir. Parce qu’il ne tarde pas à se faire dépasser par les tueurs qu’il a engagés. Et parce qu’il est franchement assez pathétique, jusqu’au duel (presque) final attendu.

Ce western détonne par la place qu’il réserve aux femmes et aux romances, centrales à plusieurs titres. Le scénario n’est certes pas d’une très grande finesse, mais Humberstone, cinéaste nettement moins réputé que Boetticher ou De Toth dans le genre (pour citer les deux cinéastes fétiches de Randolph Scott au cours de cette décennie), mais il signe un western passionnant, avec quelques très beaux moments, à l’image de cette scène d’attente dans la maison assiégée, avec une série furtive de gros plans magnifiques.

Belle aussi, la relation de Scott avec la veuve jouée par Jocelyne Brando (la sœur de), romance qui ne dit pas son nom. Humberstone met joliment en scène la tendresse qui unit cet homme jovial et très entouré et pourtant solitaire, et cette femme plus si jeune. Les autres rôles féminins ne sont sans doute pas aussi intéressants, aussi développés. Mais ne serait-ce que pour la place qui est réservée aux femmes, Dix hommes à abattre mérite d’être découvert.

Le Shérif aux mains rouges (The Gunfight at Dodge City) – de Joseph M. Newman – 1959

Posté : 22 mars, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, NEWMAN Joseph M., WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Shérif aux mains rouges

The Gunflight at Dodge City : voilà un titre qui claque, plus en tout cas que l’étonnante « traduction » française. Un règlement de compte dans l’une des villes les plus mythiques de l’Ouest, point d’orgue annoncé d’un western qui coche scrupuleusement toutes les cases incontournables du genre. Sans le transcender, sans surprendre, sans même entraîner un enthousiasme démesuré.

Le film est de ces westerns qui se veulent biographiques, mais qui prennent d’énormes libertés avec la réalité. Le héros en l’occurrence, c’est Bat Masterson, le genre de noms que l’on connaît sans trop savoir ce qu’ils nous évoquent. Une figure (authentique) de l’Ouest, donc, un nom dont on sait parfaitement qu’on l’a déjà croisée dans plus d’un western. Mais où ?… réponse : dans beaucoup de films évoquant la figure de Wyatt Earp, dont Masterson fut l’un des adjoints.

De Wyatt Earp, on n’entendra parler ici qu’au détour d’un bref dialogue. Le film revient, en 1h20 et avec beaucoup de libertés, sur les épisodes les plus marquants du parcours de Masterson, ancien chasseur de bison, ancien éclaireur, reconverti en propriétaire de saloon et en homme de loi par le hasard des rencontres et de la vie. C’est Joel McCrea, toujours très bien, même avec deux décennies de trop au compteur pour le rôle.

L’acteur retrouve là son réalisateur de l’excellent Fort Massacre, pour un western radicalement différent, faux biopic assez paradoxal. Parce que, d’une part, il s’autorise absolument toutes les libertés par rapport au vrai destin de son personnage. Et parce que, malgré cette liberté, le film semble engoncé par les limites de la réalité historique. Il y a bien un vague fil rouge, mais le film est pour l’essentiel une succession de moments, sans énorme enjeu suivi.

Le film est ainsi parsemé de moments de bravoure (la première fusillade notamment, impromptue et radicale), mais manque de liants. L’interprétation d’un McCrea toujours parfait, et la présence d’un comparse campé par l’indispensable John McIntire, suffisent à assurer l’intérêt, et presque à faire oublier un ultime gunfight, qui gâche un peu la bonne impression qu’avait laissé la toute première scène du film, dialogue particulièrement fort sur les effets de la violence, qui laissait espérer un drame nettement plus nuancé.

  • Dans la collection Westerns de Légende de Sidonis/Calysta

Violence au Kansas (The Jayhawkers) – de Melvin Franck – 1959

Posté : 20 mars, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, FRANCK Melvin, WESTERNS | Pas de commentaires »

Violence au Kansas

Voilà un western qui renouvelle d’une manière assez passionnante l’éternel thème de la vengeance. Evadé de prison, un homme rentre chez lui et découvre que sa femme est morte, victime d’un puissant chef de gang. Une trame qui rappelle celle de bien des films, notamment des westerns de Boetticher avec Randolph Scott. Ici, c’est Melvin Franck qui s’y colle. Et non, le gars n’a pas la carrure de Boetticher.

Plus habitué à la comédie, Franck n’a pas le talent de l’épure qu’ont beaucoup de grands noms du genre. Certains plans sont étirés inutilement, et le rythme du film s’en ressent souvent. Il a aussi un handicap dont il ne sait visiblement pas trop que faire : plusieurs acteurs assez ternes, à commencer par le héros, Fess Parker (« y’avait un homme qui s’appelait Davy… » éternel Davy Crockett de mon enfance), monolithique en toutes circonstances.

Mais le scénario (auquel participe « Buzz » Bezzerides) est particulièrement original, osant une amitié profonde et sincère entre les deux adversaires : l’homme avide de vengeance, et celui qui a causé la perte de celle qu’il aimait. Dans ce rôle, Jeff Chandler est excellent, parfait mélange de sensibilité et de froideur meurtrière : un admirateur de Napoléon qui se rêve en maître du Kansas, dictateur en puissance aux aspirations humanistes. Un tueur impitoyable, doublé d’un homme sensible et séduisant.

Franck capte des moments inattendus de tendresse entre ces deux hommes amenés à se trahir et à s’entretuer. Des moments franchement rares dans un genre souvent marqué par une virilité à l’ancienne qui ne laisse guère de place à de telles relations entre hommes. Mais pas question de pousser trop loin l’éventuel sous-texte : une femme est là pour remettre nos couillus cow-boys dans le droit chemin (la Française Nicole Maurey, jolie et tout juste convaincante).

Mais ce qui frappe le plus dans ce western méconnu, c’est à la fois l’ampleur de la production, avec de beaux décors et beaucoup de figurants, et la beauté de la photo, chaude et profonde, que l’on doit à Loyal Griggs (oscarisé pour Shane). C’est grâce à lui si certaines scènes sont si marquantes, notamment les attaques nocturnes, spectaculaires et visuellement superbes.

  • Dans la collection Westerns de Légende de Sidonis/Calysta

Hitchin’ Posts (id.) – de John Ford – 1920

Posté : 9 mars, 2023 @ 8:00 dans 1920-1929, FILMS MUETS, FORD John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Hitchin' Posts

Je croyais ce Hitchin’ Posts totalement perdu, comme l’immense majorité des Ford de cette époque, voilà que je découvre qu’il n’en est rien… enfin pas totalement : de ce film qui devait durer quelque chose comme cinquante minutes, il en subsiste trois (minutes), précieusement conservées par la Library of Congress, et dans un état assez exceptionnel.

Trois minutes, c’est peu, et ça ne permet évidemment pas d’appréhender l’ensemble de l’histoire. Mais en l’état, ce fragment peut se suffire à lui-même. Le découvrir est en tout cas enthousiasmant… et très frustrant. Parce que ces trois minutes sont absolument magnifiques, laissant penser que Ford est déjà au sommet de son talent. Et que si tout le film était de ce niveau, alors Hitchin’ Posts avait tout du chef d’œuvre.

En quelques secondes seulement, Ford plante une atmosphère profondément nostalgique : celle du Sud de l’après-guerre civile, où les anciens riches propriétaires sont réduits à jouer leur avenir aux cartes. On découvre ainsi deux d’entre eux jouant une main fatidique. L’un gagne (beaucoup), l’autre perd (gros). Les deux hommes réagissent avec une même grandeur, une même humanité qui dit beaucoup de tout ce que la guerre leur a enlevés…

La scène se passe sur un bateau à vapeur avançant au rythme lent du fleuve, ce genre de bateaux et de rythmes que Ford retrouvera dans Steamboat Round the Bend quinze ans plus tard. Et le décor est tout sauf anodin. Après la défaite lourde de conséquence du propriétaire, un plan de coupe montre une jeune femme sur le bord du fleuve saluant le passage du bateau, geste léger qui contraste avec le drame qui se noue.

Quant au vainqueur, Ford le film à la porte de la cabine, les rives du fleuve défilant lentement en arrière-plan dans une image visuellement splendide, qui dit aussi beaucoup du rythme de la vie, du temps qui passe lentement mais inexorablement. C’est beau, simple, et ça prend aux tripes. Enthousiasmant et hyper-frustrant, donc : un fragment fordien de plus dont on sort en espérant qu’un jour, peut-être, un miracle permette de découvrir la suite de cette merveille.

12345...40
 

Kiefer Sutherland Filmographie |
LE PIANO un film de Lévon ... |
Twilight, The vampire diari... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | CABINE OF THE DEAD
| film streaming
| inderalfr