Un plan simple (A simple plan) – de Sam Raimi – 1998
Une petite ville enneigée au cœur de l’Amérique rurale, de braves gens sans histoire entraînés dans une spirale infernale pour avoir succombé au mirage de la fortune facile… Décidément, Fargo est un excellent film ! Et décidément, le succès du film des frères Coen a relancé une petite vague de films noirs en milieu rural, plus ou moins inspirés. Pour ce Plan Simple, Sam Raimi, au moins, ne cache pas ses influences : le ton de son film évoque furieusement celui de Fargo. La comparaison, toutefois, ne nuit pas trop au film de Raimi, qui se révèle plutôt efficace, même s’il aurait sans doute gagné à être plus concis : le film n’évite pas les longueurs et le sentiment de redites.
On aurait tort de gâcher son plaisir : le portrait de ces trois losers magnifiques est très réussi, et même si Raimi force un peu le trait, il adopte une vraie sensibilité très éloignée de ses précédents films : Un plan simple est son premier « film mature », après l’effervescence de ses débuts (que ce soit avec la trilogie Evil Dead ou avec l’excellent Darkman). Plus posé, plus émouvant aussi, en particulier avec ces deux frères que tout oppose, interprétés par Bill Paxton et Billy Bob Thornton. Ce dernier, surtout, est excellent et apporte beaucoup de profondeur à un personnage qu’on perçoit d’abord comme un débile profond. La séquence où il doit choisir entre son meilleur ami et son frère avec qui il n’a rien en commun, est poignante. Pour un peu, on penserait à une version Amérique profonde de La Grande Illusion, mais là, franchement, ce serait aller un peu loin…
Comme dans Fargo, la neige donne une atmosphère très originale à une histoire qui s’inscrit par ailleurs dans la grande tradition du film noir. Lorsque ces trois compères découvrent par hasard un sac bourré de billets de banque dans un petit avion qui s’est écrasé, on comprend tout de suite que leur vie tranquille ne va pas tarder à virer au cauchemar. Et on n’est pas déçu !
Raimi en profite aussi pour se payer une tranche du fameux rêve américain, et de ses valeurs absolues : Bridget Fonda, dans le rôle un peu en retrait de l’épouse bien sage de Bill Paxton, n’est pas épargnée. Son personnage, que l’on présente comme un modèle de femme rangée bien comme il faut, révèle sa véritable nature en quelques secondes seulement. Si elle trouvait une fortune dans un sac, elle ne le garderait pas, affirme-t-elle en pensant tenir une conversation théorique. Mais lorsqu’elle découvre l’argent sous ses yeux, elle ne tarde pas à devenir la plus déterminée de tous les personnages du film. Prêtes à tout sacrifier pour l’argent. C’est d’ailleurs elle, et les décisions qu’elle impose à son homme, qui sont à l’origine directe de toutes les horreurs du film. Il est beau le rêve américain…