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Archive pour décembre, 2022

Aventures en Birmanie (Objective, Burma !) – de Raoul Walsh – 1945

Posté : 14 décembre, 2022 @ 8:00 dans 1940-1949, WALSH Raoul | Pas de commentaires »

Aventures en Birmanie

Immense dans le polar (White Heat), immense dans le western (La Fille du Désert), immense dans l’aventure (Capitaine sans peur), immense même dans la comédie (The Strawberry Blonde)… Walsh est un cinéaste immense, qui a transcendé à un moment ou à un autre tous les grands genres du cinéma américain. Le film de guerre ne fait pas exception : celui-ci est même, n’ayons pas peur des mots, le modèle indépassable de tous les films de commando qui ont suivi. Du Anthony Mann de Côte 465 au Terrence Malick de La Ligne rouge en passant par le Spielberg de Il faut sauver le soldat Ryan, tous doivent quelque chose à ce film. Sans oublier John McTiernan, dont le Predator reprend la même trame narrative, quasi-remake qui ne dit pas son nom.

Aventures en Birmanie est en tout cas un modèle de construction, dont Walsh transcende (une nouvelle fois) la simplicité. Une mission : se faufiler dans la jungle birmane pour faire sauter un radar japonais, et permettre aux Américains de revenir en force dans le pays. Un commando réduit : une quarantaine d’hommes derrière l’officier Errol Flynn. Un succès rapide et facile : cible détruite, aucune perte, pas même le moindre blessé. Il n’y a plus qu’à rentrer au bercail, mais c’est là que tout part de travers…

Et c’est là que le film déjà passionnant, prend une autre dimension. On retrouve là le sens du rythme et la fluidité parfaite du cinéma de Walsh. Comme dans tous les Walsh, d’ailleurs. Mais il y a autre chose, qui inspirera tant d’autres cinéastes : une manière de saisir les moments d’attente en filmant les visages des soldats au plus près dans de lents et beau travellings latéraux qui passent de l’un à l’autre, dévoilant les angoisses, les peurs, les postures de personnages à la présence puissante, même si on n’apprend pas grand-chose de leurs histoires personnelles (dont Henry Hull, particulièrement attachant en journaliste vieillissant).

Ces plans reviennent souvent dans le film, constamment renouvelés, toujours très intenses. Dans ce décor où la végétation est omniprésente, Walsh évite la sensation de redite, donnant le sentiment d’un perpétuel changement, créant par la même occasion un inconfort constant. Le danger est potentiellement partout, et sa manière de filmer les murs végétaux, l’obscurité ou l’eau croupie des marécages renforce l’angoisse, lourde et pesante.

Même virtuosité dans les scènes de combat, jamais identiques. L’attaque finale sur la colline, de nuit, est particulièrement forte. Walsh joue sur l’invisible pour renforcer encore la tension, étirant un suspense de plus en plus insoutenable, puis révélant l’urgence de la situation en éclairant artificiellement la scène. Du grand art…

Armageddon Time (id.) – de James Gray – 2022

Posté : 13 décembre, 2022 @ 8:00 dans 2020-2029, GRAY James | Pas de commentaires »

Armageddon Time

Il a fallu des voyages dans la jungle (The Lost City of Z) et dans l’espace (Ad Astra) pour que James Gray se décide à revenir à New York. Et ce retour se fait avec le plus intime, le plus personnel de ses films. Tellement personnel, même, qu’il en est troublant, tant on a le sentiment, scène après scène, que ce sont ses propres souvenirs d’enfance que nous livre le cinéaste, qui semble totalement libéré de toute contrainte de genre, ou d’efficacité immédiate.

James Gray nous plonge dans le New York de 1980, et suit l’histoire d’un gamin du Queens que sa famille cherche à protéger du monde extérieur, mais qui s’attire quelques ennuis avec son copain de classe, qui se trouve être noir, et du Bronx… Si on ajoute que le gamin a l’âge que Gray avait à cette époque, qu’il est roux et malingre, et qu’il rêve de devenir artiste dans une famille qui ne l’est ni de près ou de loin… Difficile d’y voir autre chose que la vision de Gray de sa propre enfance.

Qu’importe d’ailleurs la part de pure fiction. Le cinéaste nous offre une évocation de cette époque charnière pour lui, qui est aussi une époque charnière pour New York et pour l’Amérique, cette époque « d’Armageddon », pour reprendre le titre du film, où s’affrontent tous les possibles des dernières années, et les changements effrayants qui s’annoncent avec le triomphe attendu de Reagan et du libéralisme galopant.

Armageddon Time n’est d’ailleurs pas un film politique, mais James Gray y dévoile une nostalgie profondément intime, et profondément émouvante. Il y rend aussi un hommage appuyé, et plus ou moins conscient semble-t-il, à un cinéaste qu’il a souvent cité comme une référence : Truffaut bien sûr, et particulièrement Les 400 coups. Son héros a à peu près le même âge qu’Antoine Doinel, se retrouve confronté à des incertitudes très similaires… et quand il cherche à s’évader, c’est en volant un ordinateur, qui fait furieusement penser à une certaine machine à écrire.

Sans préjuger de ce que sera The Fabelmans de Spielberg, on jurerait qu’Armageddon Time emprunte les mêmes voies : celles d’un cinéma introspectif, comme si ces (grands) cinéastes ressentaient le besoin de partager une époque fondatrice de leur jeunesse. C’est beau, particulièrement lorsque Gray invoque la figure de ce grand-père joué avec une bouleversante bienveillance par Anthony Hopkins. Et ça nous renvoie tous à nos propres nostalgies. Grand film intime.

Novembre – de Cédric Jimenez – 2022

Posté : 12 décembre, 2022 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2020-2029, JIMENEZ Cédric | Pas de commentaires »

Novembre

Cédric Jimenez, cinéaste pas toujours délicat, qui s’attaque aux attentats du 13 novembre ? On pouvait craindre le pire. La surprise est bonne. Thriller efficace, Novembre est aussi et surtout une espèce de voyage intense et respectueux au sein de notre mémoire collective. Contrairement à Revoir Paris, qui était une évocation qui se libérait de tout poids lié à une reconstitution précise, le film de Jimenez colle réellement aux événements qui ont bousculé la France ces jours-là.

Mais Jimenez choisit de ne rien filmer des attentats eux-mêmes, prenant le parti-pris (évident à ce stade de notre traumatisme à tous) de ne pas mettre en image des tueries dont, tous, on s’est fait nos propres images insoutenables. Son film reconstitue avec minutie les heures et les jours qui ont suivi, et il a la pertinence d’un témoignage personnel, à ceci près que ce serait celui de flics qui se seraient retrouvés plongés dans cette horreur, confrontés à l’urgence de retrouver et de neutraliser au plus vite les survivants de ces attaques.

Plutôt que de se risquer à une représentation des attentats, Jimenez fait dont appel à notre mémoire. Si son film est si fort, si marquant, c’est parce qu’il donne le sentiment de nous plonger dans les coulisses d’images que l’on a bel et bien vues dans ces heures d’angoisse : ces images vides d’un immeuble criblé de balles par exemples, ou d’une capitale foudroyée par la douleur avec des gyrophares en arrière-plan. Novembre réveille ces souvenirs-là, ces images diffusées à la télévision il y a sept ans, qui ne disaient rien d’autre que l’angoisse, la peur et la douleur collectives.

Novembre restitue un récit derrière ces images d’attente, en nous faisant partager l’urgence de ces policiers qui, eux, n’étaient pas dans l’attente mais dans l’action. Là, Jimenez prend des libertés en inventant des personnages, et particulièrement celui du superflic joué par Jean Dujardin. Mais ces libertés, au service de l’efficacité, ne nuisent pas au propos. Après tout, le film n’est pas un documentaire, mais une fiction. Une fiction qui prend en compte le vécu personnel de chacun de ses spectateurs, ce qui n’est pas une mince affaire.

Alors oui, Novembre est une réussite. Radicalement différent du sensible et très beau Revoir Paris, et finalement assez complémentaire. On en sort en tout cas assez assommé. Moins par l’incroyable déluge de feux de la scène de l’assaut, que par tous les souvenirs, toutes les sensations et émotions, qu’il fait resurgir avec une acuité troublante.

Un père (The Good Provider) – de Frank Borzage – 1922

Posté : 11 décembre, 2022 @ 8:00 dans 1920-1929, BORZAGE Frank, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

The Good Provider

Bon… Je pense que voilà la preuve définitive absolue que Frank Borzage est l’un des cinéastes les plus sensibles de toute l’histoire du cinéma. Le simple fragment de 7 minutes disponible, le seul qui semble avoir survécu de ce long métrage, suffit pour tirer des torrents d’émotion. Et c’est avec une économie de moyen remarquable que Borzage (qui, certes, ne pouvait pas savoir que ne subsisteraient que ces sept précieuses minutes) réussit cet exploit.

Je ne m’avancerai pas à préciser de quoi parle le film. Ce qu’on peut en comprendre d’après cette unique séquence est assez simple : dans une famille bourgeoise, le dialogue est rompu entre le fils devenu jeune homme et le père vieillissant, malgré les efforts de la mère. Efforts vains, comme on peut le voir au début de cette scène. Le fils s’en va, bravache mais pas radicalement braqué. Le père reste, assis sous son porche. La mère le rejoint. La suite est un long dialogue du vieux couple, que la caméra cadre en plan moyen.

C’est simple, direct, et pourtant d’une beauté qui vous saisit les triples. Peut-être par la grâce de ce plan qui soudain devient large, soulignant en une poignée de secondes la solitude qui entoure désormais ce couple de parents dont les enfants s’éloignent. Peut-être aussi grâce à ce plan soudain rapproché sur la main du père qui, avec maladresse et hésitation, saisit celle de sa femme qui ne s’y attendait plus… Peut-être simplement pour l’émotion retenue qui transparaît de ces regards qui ne se croisent pas.

Borzage saisit tout ça, toutes ces émotions changeantes et profondes, avec cette délicatesse et cette sensibilité exacerbées qui sont sa marque. Bien sûr, ce fragment donne une furieuse envie de découvrir un jour The Good Provider. Mais même comme ça, cet éclat brillant suffit à rappeler à quel point Borzage est grand.

L’Homme à l’imperméable – de Julien Duvivier – 1957

Posté : 10 décembre, 2022 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1950-1959, DUVIVIER Julien | Pas de commentaires »

L'Homme à l'imperméable

Entre un grand film noir qui lui permet de retrouver Gabin (Voici le temps des assassins) et l’adaptation d’un roman de Zola (Pot-Bouille), Duvivier confirme son éclectisme en renouant avec la comédie, et par la même occasion avec sa star de Don Camillo. Fernandel donc, dans le rôle d’un homme sans histoire, clarinettiste au Théâtre du Chatelet, qu’une faiblesse d’un soir va précipiter au cœur d’une histoire de meurtres, de trafic et de chantage…

Le roman dont le film est tiré est signé James Hadley Chase, romancier britannique très porté sur la violence et le côté sombre des personnages. C’est dire si le film de Duvivier aurait pu prendre un autre chemin. Mais c’est bien celui de la comédie qu’il emprunte. Ou plutôt : c’est comme une comédie qu’il filme cette histoire sombre et violente, où les morts s’enchaînent, jamais naturelles.

Le parti-pris est intéressant, surtout lorsque, esthétiquement, Duvivier adopte les codes du film noir américain. La scène par laquelle tout commence, d’abord : celle où Fernandel, profitant de l’absence de sa femme, s’est rendu chez une prostituée qu’il retrouve, deux minutes après lui avoir parlé, un poignard planté dans le dos. Ou, beaucoup plus tard, cette fusillade sous un tunnel, sur les quais de la Seine… Deux séquences nocturnes et visuellement très fortes, dans lesquelles la présence comique de Fernandel sonne comme un étonnant contrepoint.

L’équilibre que cherche Duvivier entre la comédie et le noir est audacieux. Il n’est pas toujours tenu, loin s’en faut. Parfois réjouissant, surtout quand il met en scène un Bernard Blier barbu, parfaitement détestable en voisin libidineux et manipulateur, parfois vain et too much (toute la partie avec le gang américain), L’Homme à l’imperméable est loin des grandes réussites de Duvivier dans le domaine de la comédie, L’Homme du jour ou La Fête à Henriette.

Avatar (id.) – de James Cameron – 2009

Posté : 9 décembre, 2022 @ 8:00 dans 2000-2009, ACTION US (1980-…), CAMERON James, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Avatar

Déjà treize ans que le film de Cameron est sorti. Et malgré tout le bien que je pense du cinéaste et d’à peu près tous les films qu’il a fait, cela faisait treize ans… que je n’avais pas envie de voir cet Avatar qui a poussé toutes les cinémas du monde à s’équiper de projecteurs 3D qui ne servent à peu près plus à rien ! Treize ans que l’idée de me plonger dans une planète numérique peuplée par de grands êtres bleus numérisés me faisait fuir. Dont acte, comme on dit.

Mais voilà, j’y ai mis les pieds, sur Pandora, convaincu par mon fiston (un juste retour des choses après toutes les vieilleries avec lesquelles il a été biberonné). Il était temps… Eh bien me voilà conquis. Si. Oh ! Il faut bien un peu de temps pour se laisser emporter dans cet univers, dans cette planète numérique peuplée par de grands êtres bleus numérisés… Disons que les trois premiers quarts d’heures confirment tout le bien que je pense de l’incroyable savoir-faire de Cameron… et mes appréhensions initiales.

Mais le savoir-faire finit par emporter la partie. Et c’est le James Cameron délicat et couillu à la fois que l’on retrouve dans ce film, que l’on pourrait résumer à une rencontre improbable et séduisante entre Danse Avec les Loups et Aliens le retour (Cameron s’inscrit clairement dans l’univers militaire et technologique de son film, jusqu’à invoquer le personnage de Ripley avec Sigourney Weaver filmée brièvement en tee-shirt et culotte), baignée dans un univers à la Miyazaki.

Visuellement, le film est d’une densité folle. Il faut dire que Cameron rêvait de ce film depuis son enfance, paraît-il, et qu’il a eu le temps de peaufiner sa vision : cette planète Pandora où les Na’avi vivaient en parfaite harmonie avec la nature avant que ces bourrins d’humains ne débarquent pour en exploiter les richesses du sous-sol. Ou comment James Cameron signe la première fable écolo à 200 millions de dollars !

Le film se place ouvertement du côté de la fable et du symbole, mais avec ce souffle épique qui n’appartient qu’au cinéaste. Qui d’autre que lui aurait pu imaginer le personnage de Sam Worthington ? Marine paralysé des membres inférieurs choisit un peu par hasard pour infiltrer le peuple na’avi en « pilotant » un avatar, qui lui permet de retrouver l’usage de ses jambes, grâce à ce corps de substitution. Et si vous n’avez rien compris à cette dernière phrase, c’est que je n’étais pas le seul à être passé à côté d’Avatar depuis treize ans.

Ce pourrait être un peu naïf, il se dégage surtout une sensation de pureté et de sincérité qui va droit au cœur. Cameron n’a rien perdu de son sens du spectacle, de son sens de la dramatisation, de son génie pour caractériser des personnages en peu de traits. De Zoë Saldana en na’avi qui fait vaciller le cœur du héros, à Stephen Lang en odieux militaire va-t-en-guerre… Cameron réussit le miracle de faire croire en des personnages qui cochent toutes les cases de ce qu’on en attend. Rien que ça, c’est du grand art.

Fat City / La dernière chance (Fat City) – de John Huston – 1972

Posté : 8 décembre, 2022 @ 8:00 dans 1970-1979, HUSTON John | Pas de commentaires »

Fat City

La filmographie de John Huston est pleine de paumés, de ratés, de losers, de laissés-pour-compte. Mais des ratés aussi peu flamboyants que les boxeurs de Fat City, il n’y en a pas des masses. En signant « son » film de boxe, ce sport qu’il a pratiqué passionnément pendant sa jeunesse et qu’il rêvait depuis longtemps de porter à l’écran, Huston adopte une radicalité exemplaire, un réalisme absolu totalement dénué du romantisme habituellement lié au « noble art ».

Ni noblesse, ni romantisme dans le parcours de ces deux jeunes boxeurs qu’interprètent Stacy Keach et Jeff Bridges. Le premier n’a pas encore 30 ans, mais il est déjà revenu de tout : boxeur sur le retour, abîmé par une expérience malheureuse, il a raccroché les gants depuis près de deux ans. Le second est beaucoup plus jeune, et ne monte sur le ring que grâce à sa rencontre avec le premier qui voit en lui un futur champion. Un futur champion qui enchaîne les défaites avec une régularité remarquable.

Huston filme ces deux personnages avec un tel souci de vérité que son film flirte parfois avec la comédie : les échecs répétés de ces deux-là, le systématisme avec lequel leurs espoirs se fracassent à la dure réalité de la vie et de l’échec… Même les nez déformés à force d’être cassés finissent par entraîner des rictus, voire des rires nerveux. On sent bien que l’espoir auquel se raccrochent vaguement les personnages, sans y croire eux-mêmes, n’est que chimère. Mieux vaut en rire qu’en pleurer…

Huston, on le sent, invoque ses propres souvenirs, l’atmosphère de ces combats amateurs sans gloire et sans fortune, où des jeunes gens sans horizon se jettent à corps perdu parce que c’est leur seule manière de se raccrocher à l’espoir d’une autre vie, loin de ces petits boulots qu’ils sont obligés d’enchaîner pour survivre. Mais les miracles, c’est bon pour le cinéma, pas pour la vraie vie. Ici, même la victoire n’a rien d’héroïque ou de galvanisant : « J’ai été mis KO ? » interroge l’un des boxeurs tellement sonné par le lourd combat qu’il vient de mener qu’il ne réalise pas que c’est lui qui a gagné…

La toute dernière scène, sans rien en dévoiler, enfonce le clou avec un mélange d’amertume et de bienveillance qui sied parfaitement au cinéma de Huston. Point d’horizon, point de miracle à attendre, mais des personnages confrontés à la réalité de leur condition. Et le regard tendre et dur à la fois du cinéaste, acéré, pertinent, fascinant.

Rambo : Last Blood (id.) – d’Adrian Grunberg – 2019

Posté : 7 décembre, 2022 @ 8:00 dans 2010-2019, ACTION US (1980-…), GRÜNBERG Adrian, STALLONE Sylvester | Pas de commentaires »

Rambo Last Blood

Après avoir fait (probablement) ses adieux à Rocky avec le décevant Creed 2, Stallone fait (probablement) ses adieux à Rambo. Le voir renouer une fois de plus avec ses deux personnages fétiches n’est pas un hasard : comme à l’époque de Rocky Balboa et de John Rambo qui l’avaient sorti d’un long purgatoire, Stallone vient d’enchaîner quelques catastrophes industrielles. A 70 ans passés, il semble bien difficile pour lui de trouver un nouveau souffle au-delà de Rocky et de Rambo. Peut-être la série Tulsa King changera-t-elle la donne…

En attendant, ce Last Blood (une manière de boucler la boucle après l’inaugural First Blood de 1982) n’est pas le ratage complet souvent annoncé. On pourrait même le considérer comme la plus digne des suites, celle dans laquelle le personnage est finalement le mieux respecté. En tout cas le moins trahi. C’est que, depuis un Rambo 2 qui ne gardait à peu près du personnage que son côté machine de guerre, la saga a eu toutes les peines du monde à trouver son équilibre entre le traumatisme du vétéran façon seventies et cet aspect va-t-en guerre typique des eighties.

Avec John Rambo, en 2008, Stallone ne cherchait pas vraiment à trouver une porte de sortie satisfaisante, se contentant grosso-modo de recycler des aspects des trois premiers films. En revenant sur le sol américain, Last Blood se recentre sur le personnage de Rambo, qui mène depuis une dizaine d’années une vie paisible, tentant de garder ses fantômes à distance. C’est un peu comme si le William Munny d’Impitoyable et le Walt Kowalski de Gran Torino ne faisaient plus qu’un…

L’ombre de Clint Eastwood plane sur le film… Non : elle pèse sur le film, rappelant constamment ce qu’aurait pu être Last Blood si Stallone (scénariste du film) avait fait davantage confiance au potentiel dramatique de son film. La première partie est assez belle, se concentrant sur les relations du vétéran avec une ado qu’il considère comme sa fille, avec qui il a enfin trouvé la paix. Jusqu’à ce que la jeune femme, contre l’avis de son protecteur, ne décide de partir pour le Mexique, à la recherche de son vrai père, qui l’a abandonnée.

Et c’est là que ça se gâte. Parce que la relation fille/père est évacuée en une courte scène franchement ridicule. Parce que le Mexique est présenté d’emblée comme le lieu de tous les dangers où le pire des destins attend immanquablement une jeune Américaine en visite. Et parce que le pire des destins attend effectivement la jeune Américaine en visite. Pour la délicatesse, on repassera, mais Stallone émeut par sa présence fatiguée, par ce regard qui dit toute sa douleur et toute sa fatigue.

Reste la dernière partie, comme coupée du reste du film : un massacre sanglant et gore, vingt minutes au cours desquelles Rambo flingue, décapite, explose, découpe, charcute, charcle… Bref, il tue par tous les moyens dont il dispose, qui sont nombreux. C’est super violent, super efficace, et super bas du front. Et on se rappelle que, dans le film de 1982, Rambo ne tuait qu’une personne, et encore le faisait-il involontairement. Le premier sang versé était rare, et marquant. Près de quatre décennies plus tard, c’est sur des hectolitres de sang que le vétéran devenu mythe populaire tire sa révérence…

La Justice des hommes (The Talk of the Town) – de George Stevens – 1942

Posté : 6 décembre, 2022 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, STEVENS George | Pas de commentaires »

La Justice des hommes

Comédie, thriller, triangle amoureux, et même film de procès… George Stevens jongle avec pas mal de genres très différents dans ce film. Quitte à laisser tomber quelques quilles en cours de route d’ailleurs : à changer de ton si souvent, il finit par accoucher d’un film un peu bancal. Bancal, mais pourtant assez réjouissant à de nombreuses occasions.

La séquence d’ouverture, d’abord, est remarquable. Sans un mot ou presque, avec un montage très dynamique utilisant coupures de presse et fausses images d’archives, Stevens plante le décor, et résume ce qui aurait pu être une longue partie d’introduction en quelques instants d’une clarté et d’une concision impressionnantes.

On a donc Cary Grant (un peu en retrait, mais joyeusement cabotin), accusé d’avoir mis le feu à l’usine où il travaillait, causant ainsi la mort d’un homme. Jugé, sur le point d’être condamné à mort, il s’évade et se réfugie au domicile d’une vague amie d’enfance (Jean Arthur, piquante et irrésistible). Mais quelques minutes après débarque un juriste éminent et raide comme la justice qui a loué la maison (Ronald Coleman, merveilleusement suave). Grant n’a que le temps de se cacher dans le grenier.

Commence alors un étrange huis-clos, plein de suspense et d’humour, avec cette cohabitation dissimulée particulièrement originale. Et ce n’est que la première partie d’un film qui ne cesse de prendre de nouveaux départs, quitte à changer de direction, passant de la comédie de mœurs la plus légère au drame judiciaire le plus intense. Et même s’il manque une ligne réellement cohérente, Stevens se révèle également à l’aise dans tous les tons.

On retiendra une course poursuite en pantoufles entre le juriste et une meute de chien, un repas enthousiaste autour d’un borscht (avec un œuf), une déclaration d’amour finale à grandes enjambées, ou encore un face-à-face tendu entre Cary Grant et une foule déchaînée… Beaucoup de moments mémorables pour un film très imparfait, et foncièrement attachant.

Poulet frites – de Jean Libon et Yves Hinant – 2022

Posté : 5 décembre, 2022 @ 8:00 dans * Polars européens, 2020-2029, DOCUMENTAIRE, HINANT Yves, LIBON Jean | Pas de commentaires »

Poulet frites

Quatre ans après le formidable Ni juge, ni soumise, les deux auteurs de la série documentaire Strip Tease sortent de leurs cartons une autre pépite : une enquête autour d’un meurtre à Bruxelles, dont l’indice le plus important, celui qui pourrait innocenter le principal suspect, est une frite retrouvée dans l’estomac de la victime, et qui a « le même calibre » que les frites cuisines par ledit suspect.

On retrouve dans Poulet frites le même esprit que dans le précédent long métrage (et que dans feu la série) : une manière de capter la réalité en filmant les personnages au plus près, dans leur routine quotidienne. Ici, l’équipe a semble-t-il suivi l’équipe de policiers (et la juge Anne Gruwez, la même qui était au cœur de Ni juge…, formidable personnage de cinéma) pendant de longs mois. Cette enquête avait d’ailleurs été diffusée dans Strip Tease il y a une bonne quinzaine d’années, en trois épisodes d’une heure.

Le duo Libon/Hinant en livre un montage inédit, et dans un beau noir et blanc. Et le résultat est passionnant à tous les niveaux. C’est d’abord une plongée documentaire fascinante dans le quotidien de ces flics qui ont accepté de se faire filmer dans la routine de leur travail, devant une caméra qui capte aussi bien lemoments de grâce et d’autres moins glorieux. C’est aussi un vrai polar, auquel le montage au cordeau donne un rythme de fiction.

On s’attache à ces personnages : les policiers souvent dépassés d’abord, mais aussi ce suspect trop évident dont on voit bien que les flics eux-mêmes doutent de la culpabilité. « Si je l’avais tuée, je m’en souviendrais, quand même ! » lance-t-il à plusieurs reprises, rappelant l’essence même de Strip Tease : une manière brute et frontale de filmer des personnages et des répliques qu’un scénariste n’oserait pas inventer. Comme cet indice central dans l’enquête : cette frite retrouvée dans l’estomac de la victime, et cette réplique définitive de l’enquêteur : « Ce qui m’a frappé, c’est le calibre de la frite… »

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