Deux fils – de Félix Moati – 2018
Après le magnifique Lettre d’amour de Kinuyo Tanaka, on reste dans les premiers films avec ce très beau film signé par l’acteur Félix Moati. Il n’a que 28 ans quand il passe derrière la caméra, mais Deux fils affiche une étonnante maturité, dans sa manière de filmer des rapports familiaux intenses… et pas simples.
Benoît Poelvoorde est formidable dans un rôle de père célibataire totalement paumé, qui ne comprend plus vraiment le monde qui l’entoure, les personnes qui l’entourent, y compris ses deux fils, l’un jeune ado en révolte, l’autre tout jeune homme en pleine déprime, Vincent Lacoste et Mathieu Capela tout aussi formidables.
L’incompréhension entre les êtres les plus proches, l’incapacité à partager ses sentiments… et pourtant un amour fou, une admiration sans borne, que l’on ressent constamment dans cette famille très imparfaite et magnifique, pleines de failles et de grandeurs. Pathétiques ou sublimes ? Pour Moati, les deux vont de pairs, et c’est très beau.
Très beau la manière dont on découvre ces personnages : dans l’antichambre des pompes funèbres où Poelvoorde se glisse difficilement dans le cercueil prévu pour son frère qui vient de mourir, sous le regard de son plus jeune fils. Ce fils de 13 ans à peine, qui cultive son spleen à grandes lampées d’alcool plus ou moins fort. Et ce grand frère qui s’apitoie confortablement sur un amour depuis longtemps disparu.
Rien de bien spectaculaire dans le fond. Mais Moati filme ses personnages avec une liberté qui lui autorise tous les pas de côtés, toutes les pauses, suivant les pas de l’un ou de l’autre au gré des rencontres, des doutes, des coups de passion et des sentiments qui se révèlent ou se réveillent, au son d’une musique très jazzy et elle aussi très libre.
Le film dépeint avec finesse, émotion et profondeur cette insondable cellule familiale. Avec une certaine gravité mais sans lourdeur. Avec une touche de légèreté et un humour souvent irrésistible (Vincent Lacoste face à la psy du lycée… une stagiaire… la remplaçante du remplaçante). Un premier film très séduisant, à la belle atmosphère, qui donne envie de revoir Moati derrière la caméra.
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