Les Mois d’avril sont meurtriers – de Laurent Heynemann – 1987
Vu il y a bien longtemps, ce polar m’avait laissé une forte impression, qui se confirme largement à la revoyure. Les Mois d’avril sont meurtriers, adapté d’un roman de Robin Cook, est moins un film policier classique que le portrait assez envoûtant d’un homme qui surnage : un flic, joué par un Jean-Pierre Marielle impérial, qui tente de surmonter la mort de sa fille grâce à son boulot.
Il est grand, Marielle, dégageant une émotion immense en ne l’affichant jamais : digne, presque monolithique, y compris dans sa manière de parler à sa fille disparue dans une voix off qui rythme le film. Un homme dont les fantômes font partie intégrante de sa vie, et qu’il n’affronte qu’à distance : sa femme internée dans un asile et à qui il se contente de rendre des visites muettes, et sa fille dont il ne fleurit la tombe que par l’intermédiaire du gardien du cimetière.
C’est un polar, avec meurtres sordides et recherche de meurtrier, mais ce n’est clairement pas ça qui intéresse Heynemman et son coscénariste Bertrand Tavernier, dont il fut longtemps l’assistant avant de passer derrière la caméra. Le film, à vrai dire, se concentre largement sur le face à face étonnant et fascinant entre le flic et le suspect dont il se persuade bientôt qu’il est l’assassin, joué par un très suave Jean-Pierre Bisson.
Etonnant duo, formé par un suspect qui semble sortir de sa torpeur grâce à ce flic qui le harcèle, et par le policier qui lui s’enferme peu à peu dans des tourments internes qu’il cherche à maintenir à distance. Et auxquels Heynemman donne une forme fascinante : les grands décors vides dans lesquels Marielle se retrouve souvent seul, entouré de vastes surfaces monochromes et de formes géométriques sans aspérités.
Ce décor rend palpable la douleur et la profonde solitude que n’affiche pas le flic Marielle. Il fait des Mois d’avril sont meurtriers un polar qui ne ressemble à aucun autres, dérangeant et fascinant, et passionnant.
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