Police – d’Anne Fontaine – 2020
Premier constat : j’aime Virginie Efira d’un amour cinéphilique qui n’a plus beaucoup de borne. Film après film, l’actrice ne cesse de surprendre et de bouleverser avec son jeu, à la fois extraordinairement précis et d’une intensité bouleversante. Pas un rôle dont on peut simplement dire qu’elle est très bien. Non, elle est toujours au-delà, vraie, profonde, humaine… L’une des plus grandes actrices du monde, disons la Vivien Leigh d’aujourd’hui.
Voilà qui est dit. Deuxième constat : Anne Fontaine est une grande réalisatrice, qui a un regard, et un vrai talent pour filmer les états d’âme. Ce n’est pas si courant, et c’est ce qui fait le poids de Police, beau film dont les moments les plus intenses sont ceux où il ne se passe rien en apparence. Ceux où l’esprit des personnages vagabonde, tiraillé entre l’intégrité et l’humanité, en quelque sorte.
Grande réalisatrice, et grande directrice d’acteurs. Virginie Efira est sublime, donc. Mais Omar Sy et Grégory Gadebois sont également magnifiques dans les deux autres rôles centraux. Trois flics parisiens en uniforme, chargés d’amener un immigré à qui l’asile a été refusé vers l’aéroport où un avion doit le ramener dans son pays, où une mort probable l’attend. Un paumé, dont on ne sait pas grand-chose, et qui ne parle ni ne comprend un mot de français…
Mais les policiers qui l’escortent, eux, sont des paumés dont on sait beaucoup. Parce qu’une série de flash-backs nous les présente dans leur intimité un peu minable. Mal mariés, au bord de la rupture. Virginie (Efira) et Aristide (Omar Sy) ont eu une liaison extra-conjugale, et la première est enceinte du second. Erik (Gadebois) est marié à une femme qui ne le supporte plus. Aucun d’eux ne compte ses heures, mais est-ce par sens du devoir ou par désir de fuir le quotidien ?
Ce migrant que l’on renvoie vers une mort probable est le prétexte à une prise de conscience introspective. Et c’est la principale limite du film, qui évite soigneusement tout véritable engagement humanitaire ou politique, pour se focaliser ces trois policiers rongés par leur quotidien et le poids de leur fonction. On peut trouver le propos limité. On peut aussi reconnaître à Anne Fontaine le talent pour tirer de ces situations l’humanité la plus profonde.
Dans Police, l’essentiel de l’action se déroule dans l’habitacle d’une voiture : des regards, des non-dits, une tension. C’est passionnant, c’est bouleversant, c’est beau. Me voilà touché, profondément.