Amants – de Nicole Garcia – 2020
Le plus beau dans le cinéma de Nicole Garcia, c’est cette délicatesse et ce naturel avec lesquels elle fait surgir l’émotion autour d’un personnage, autour d’une situation. C’est encore une fois vrai avec Amants, neuvième long métrage de la dame qui, mine de rien, est devenue l’une des cinéastes françaises les plus passionnantes.
Quasiment depuis ses débuts, Nicole Garcia flirte avec le film noir, en effleurant le genre (avec Le Fils préféré, voire même Un balcon sur la mer) ou de manière plus frontale (Place Vendôme). Amants possède tous les attraits du film noir : un jeune homme un peu paumé (Pierre Niney), une femme un peu fatale (Stacy Martin), et un mari un peu gênant (Benoît Magimel). Pour un peu, on se croirait dans Le Facteur sonne toujours deux fois.
Cette référence parmi tant d’autres dans ce genre très américain est très présente. Et même si le film n’est pas clairement un polar, elle plane comme la menace d’un destin tragique inhérent au genre. Ce n’est évidemment pas un hasard si le couple principal termine une soirée tendre et intime en regardant L’Ultime Razzia, avec cet ultime plan superbement définitif sur les portes d’aéroport qui se referment.
La tragédie est au bout du chemin. Nicole Garcia n’en fait pas un mystère. Pourtant, on retrouve dans Amants la même immense empathie pour les personnages, tous les personnages, que dans tous ses films. Et la même attention infinie dans la manière de les filmer. Pas besoin d’être acteur pour comprendre qu’être filmé par elle ressemble à une sorte d’aboutissement. Film après film, le même constat revient d’ailleurs : untel n’a peut-être jamais été aussi bien qu’ici. Spécialement les hommes.
Pierre Niney et Benoît Magimel entrent ainsi dans le beau club déjà occupé par le Gérard Lanvin du Fils Préféré ou le Jean Dujardin d’Un balcon sur la mer. C’est dire. Ils sont tous les deux formidables, mis à nus (littéralement) avec une délicatesse infinie, une classe folle, et même une vraie tendresse. Le personnage de Niney a un côté petit con ? Celui de Magimel a l’arrogance des hommes trop riches ? Oui, et Nicole Garcia les met en scène sans jamais les magnifier. Sans jamais leur enlever leur profonde humanité, non plus.
Entre eux, Stacy Martin est une révélation (pour moi en tout cas, qui étais totalement passé à côté jusqu’à présent), elle aussi superbe dans le rôle d’une jeune femme arrachée trop brutalement à ses rêves d’enfant, ou un peu trop dépendante c’est selon. La scène des retrouvailles avec Pierre Niney, tout en bravades et en cynisme feint, est l’une des plus belles du cinéma de Nicole Garcia. L’un de ces moments magiques où l’émotion éclate sans qu’on l’ait vraiment vu venir.
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