Fille dangereuse (Bufere) – de Guido Brignone – 1953
Un chirurgien réputé et bien marié sacrifie tout pour une vamp qui l’obsède. Schéma on ne peut plus classique, pour ce film tourné en italien qui n’ajoute rien ni à ce thème si souvent exploité, ni à la carrière de Jean Gabin. Bufere est même, sans doute, le moins intéressant de sa période « creuse » (pas si creuse, j’ai déjà eu l’occasion de l’écrire) de l’après-guerre.
A grand renfort d’ellipses malheureuses, Guido Brignone (jamais rien vu du monsieur, jusqu’à présent) passe même totalement à côté des moments potentiellement les plus forts du récit : ceux où les convictions du grand chirurgien vacillent face aux attraits d’une femme qui représente tout ce qu’il n’est pas. De ces moments, on ne verra strictement rien. On passe, assez radicalement, d’un Jean Gabin droit et impassible, à un Jean Gabin alangui et soumis.
Soulignons d’ailleurs que cette soumission, si peu crédible soit-elle, contrebalance celle à laquelle les femmes semblent naturellement destinées. « Mon seul mérite c’est d’avoir épousé un homme comme toi », lance avec conviction l’épouse du bon docteur (Carla Del Poggio). « Les femmes ne sont qu’instinct », commente de son côté la maîtresse si libre (Silvana Pampanini). Aucune, en tout cas, ne s’imaginerait vivre sans homme…
Comment s’étonner alors que Serge Reggiani, le soi-disant frère de Silvana, se livre à une confession qui ressemble plus à un avertissement confraternel, et avec beaucoup de naturel : « Vous n’avez pas idée de ce que j’ai dû encaisser pour me résigner à lui taper dessus. » Pauvre petit homme triste… Comment donc ? Ce ne serait pas le film le plus féministe du monde ? Ah… Ce n’est pas, non plus, le plus intense, le plus troublant, ou le plus convaincant.