A bord du Darjeeling Limited (The Darjeeling Limited) – de Wes Anderson – 2007
Trois frères qui se sont perdus de vue se retrouvent dans un train qui traverse l’Inde, un an après le décès de leur père, à la recherche de leur mère. L’aîné rêve ce voyage comme l’occasion pour eux de redevenir les frères qu’ils étaient enfants, proches et soudés. C’est Owen Wilson, lunaire et formidablement exaspérant, qui réclame un « voyage spirituel ». Ce sera plutôt un voyage symbolique, décalé, à la manière inimitable de Wes Anderson.
Le premier veut façonner ses frères tels qu’il les garde en mémoire. Le deuxième s’est accaparé les lunettes, le rasoir du père, autant de reliques qui le rattachent à cette enfance disparue. Le troisième reste enfermé dans une certaine insouciance de l’enfance, comme hermétique aux évolutions et aux réalités de la vie qui avance.
Ils traversent le pays avec des tonnes de bagages, ceux du père bien sûr, qui les suivent à la trace où qu’ils aillent. On le voit bien venir : la finalité du voyage sera de se débarrasser de ces bagages trop encombrants, et de tourner le dos à une mère dont ils doivent encore s’émanciper.
Le film a le regard décalé de Wes Anderson, souvent très drôle, avec cette mélancolie à fleur de peau, et cette souffrance qui affleure, mais ne surgit qu’à de brefs moments, laissant le plus souvent la place à une ironie douce-amère, à l’image de l’autoritarisme léger d’Owen Wilson dont on réalise tardivement qu’il s’agit d’un atavisme moins touchant que troublant.
Ils pensaient se rapprocher en se retournant vers l’enfance… C’est quand ils lui tourneront le dos après un drame terrible qu’ils pourront se découvrir un avenir commun, en affirmant ce qu’ils sont devenus plutôt que ce qu’ils étaient.