L’Amour en fuite – de François Truffaut – 1979
Antoine et Christine divorcent. Ils sont même le premier couple à divorcer par consentement mutuel, signe une nouvelle fois que la saga Doinel est aussi pour Truffaut une manière d’illustrer l’air du temps. Aussi, mais avant tout, Antoine Doinel reste ce gamin mal aimé par ses parents, éternellement marqué par une jeunesse pas heureuse, constamment à la recherche de sa place dans le monde. Le double parfait et inoubliable du cinéaste.
Forcément, cet ultime film de la sage a quelque chose de testamentaire, même si Truffaut était encore jeune (on imagine ce qu’il aurait pu continuer à filmer depuis quarante ans, avec Jean-Pierre Léaud, son alter ego des premiers temps) et qu’il tournera encore quelques grands films dans le court temps qui lui restait à vivre. Etrangement testamentaire même : Doinel n’a que 35 ans environ, mais déjà à l’heure du bilan, les extraits des quatre premiers films émaillant le récit.
Récit un rien nostalgique, même si tourné vers l’avenir, et la vie. Doinel retrouve les femmes qui ont marqué sa vie : Christine (Claude Jade) et Colette (Marie-France Pisier), et les regards sont emplis d’une tendresse qui n’existe plus que dans les souvenirs. Et ses ex n’ont qu’un désir : qu’Antoine s’engage vraiment avec sa nouvelle petite amie, interprétée par une toute jeune Dorothée, comédienne éphémère et charmante.
Beaucoup d’extraits des précédents films, donc, mais L’Amour en fuite n’est pas pour autant une compilation, ou un film passéiste. Mais Truffaut semble tourner une page, faire ses adieux au personnage en revenant sur son parcours, avec un regard forcément subjectif (Doinel a publié un livre, présenté comme un roman, qui raconte sa jeunesse et ses amours) qui donne une épaisseur inédite à tout son parcours.
L’Amour en fuite n’existe que par les films qui ont précédé. Mais il leur donne également une nouvelle dimension, comme un accomplissement tardif pour Truffaut ou Doinel, vingt ans tout juste après leurs premiers pas conjoints. Mal aimé, mal compris sans doute, L’Amour en fuite referme en beauté l’une des sagas les plus passionnantes du cinéma français.
- Saga Antoine Doinel : Les 400 coups, Antoine et Colette, Baisers volés, Domicile conjugal, L’Amour en fuite.