Volpone – de Maurice Tourneur – 1940
A Venise, un riche armateur humilié par trois hommes mesquins décide de se venger. Pour cela, il se fait passer pour moribond avec l’aide d’un parasite rencontré en prison… La pièce de Ben Johnson inspirera bien plus tard à Mankiewicz un Guêpier pour trois abeilles au titre évocateur. En 1940, c’est Maurice Tourneur qui est aux manettes pour une adaptation signée Jules Romains. Belle affiche, donc, très prometteuse, d’autant plus que les deux rôles principaux sont tenus par Harry Baur et Louis Jouvet.
Prometteur, oui. Mais l’exubérance très théâtrale d’Harry Baur, une fois n’est pas coutume, agace dès les premières minutes. A ce niveau là, ce n’est plus du cabotinage, ni du sur-jeu. C’est une sorte d’extravagance jusqu’au-boutiste qui sonne constamment faux. Harry Baur est un grand acteur, à la présence généralement incroyable. Là, on ne voit que Louis Jouvet, d’un naturel et d’une discrétion pourtant exemplaires qui éclipse tous les seconds rôles, de Fernand Ledoux à Charles Dullin, le déjà vieux complice de Jouvet de l’époque du Vieux Colombier.
Volpone est donc une comédie agaçante, plus que grinçante. C’est surtout un film très discutable quand on se souvient qu’on est en 1940, et que même si le personnage est présenté comme un « levantin », il arbore les artifices les plus répugnants que l’antisémitisme d’alors réserve aux Juifs, à commencer par un faux nez démesuré, digne du tristement fameux Juif Süss, sorti la même année.
La comparaison s’arrête là : Volpone est avant tout une comédie cynique, avec une intrigue joliment retorse et quelques beaux moments. Une fable dont personne ne sort grandi, grand jeu de massacre dont le personnage d’Harry Baur, si caricatural et manipulateur soit-il, apparaît au final comme le plus humain peut-être, le plus attachant de tous. Mais entre le cabotinage des uns et la caricature parfois gênante, le talent de Maurice Tourneur ne suffit pas. Celui de Jouvet si, par moments.
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.