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Des enfants gâtés – de Bertrand Tavernier – 1977

Classé dans : 1970-1979,TAVERNIER Bertrand — 15 août, 2021 @ 8:00

Des enfants gâtés

Après trois premiers longs métrages qui sont autant de petits classiques, dans des genres très différents (L’Horloger de Saint-Paul, Que la fête commence, Le Juge et l’assassin), Bertrand Tavernier signe avec Des enfants gâtés son premier film ouvertement politique. Pas que ses premiers pas aient été dénués d’engagement, loin de là. Mais cette fois, le jeune cinéaste se débarrasse des atours du film de genre ou des costumes pour un film social et contemporain, presque totalement dénué d’une véritable intrigue.

C’est aussi son premier film sans Philippe Noiret, dont les deux comparses de Que la fête commence, Jean Rochefort et Jean-Pierre Marielle, chantent la formidable chanson générique (signée Caussimon, comme un clin d’œil à Le Juge et l’assassin) sans pour autant apparaître dans le film. Comme s’il lui fallait se priver de son meilleur alter ego pour s’engager frontalement. En l’occurrence contre le mal logement et les abus de propriétaires exploiteurs, dans un Paris dont Tavernier ne filme que les tours et les barres d’immeubles, et les chantiers gigantesques qui, déjà en 1977, semblent chasser les habitants vers les quartiers périphériques.

Tavernier se débarrasse tellement des atours du film de genre qu’il fait de Michel Piccoli, son personnage principal, un cinéaste occupé à écrire son prochain film. Un cinéaste dont le plus grand succès s’appelle La mort en direct, qui sera justement le film suivant de Tavernier. Pour écrire ce film, donc, Piccoli s’installe dans un appartement qu’il espère tranquille pour pouvoir travailler au calme loin de sa famille, mais qui se retrouve embarqué dans le combat des locataires contre les excès de leur puissant propriétaire.

Sitôt le générique terminé, Tavernier confronte Piccoli à toute une galerie de parasites : un agent immobilier bien décidé à ne faire aucun effort pour placer des appartements qui, de toute façon, trouveront preneurs (Michel Blanc, toute la bande masculine du Splendid suivra, Lhermitte, Clavier et surtout Jugnot dans un beau rôle de premier plan) ; le notaire hautain et arrogant pour les mêmes raisons ; et un agent dont on ne sait trop ce qu’il vient faire si ce n’est encaisser une commission…

Les portraits sont féroces, frôlant même le trop-plein, dans quoi Tavernier versera d’ailleurs brièvement lors de la confrontation finale avec le tout puissant propriétaire. Sans doute manque-t-il d’un rien de mesure (même si j’avoue ne pas maîtriser la réalité du logement dans ces années 70), mais la charge est efficace, et réjouissante. Le film trouve un bel équilibre entre une certaine ironie et une vraie gravité : Tavernier a ce talent pour filmer des personnages fragiles et en souffrance, qui restent debout malgré tout, ne baissant la garde que subrepticement, par des regards soudain déchirants.

Celui accablé de Gérard Jugnot justement, qui prend conscience d’avoir cherché à profiter d’une situation à son avantage, en prêtant de l’argent à la jolie Christine Pascal. Un brave type, qui l’espace d’un instant s’est laissé aller à vouloir donner un peu d’air à son existence. Avec ces tours, ces immeubles qui bouchent l’horizon et contraignent le ciel, Tavernier crée un sentiment d’étouffement constant, voire d’aliénation. Un film plein d’empathie, passionné et généreux, à l’image de son réalisateur.

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