Los Angeles 2013 (Escape from L.A.) – de John Carpenter – 1996
Suite ? Remake ? John Carpenter et Kurt Russell (co-scénariste du film) revisitent leur classique New York 1997. On retrouve bien sûr le mythique Snake Plissken, personnage devenu icône en un unique film. On retrouve aussi les mêmes motifs dramatiques, la même construction, les mêmes enjeux, la même intro presque, et un décor qui ressemble à un étrange copié-collé. L’île de New York était transformée en île-prison dans le classique de 1981… Los Angeles est transformée en île et en prison ici.
Doit-on prendre cette suite vraiment au sérieux. That is the real question. Le doute est longtemps permis. La réponse intervient tardivement, et prend (réellement) l’allure d’une vague. Là, le doute n’est plus permis. Los Angeles 2013 peut être vu comme une suite, un remake, un reboot ou quel que soit le terme, mais aussi comme une parodie, et comme une manière de dresser un fier doigt d’honneur à l’industrie hollywoodienne.
OK, on me saoule depuis des années pour que je surfe sur le succès de New York 1997, avec une suite qui serait forcément plus spectaculaire, plus dense, plus riche en effets spéciaux, plus tout… eh bien je vais vous en donner, du surf, et il n’y aura pas de limite à la surenchère. Un doigt d’honneur, vraiment, qui flirte avec le grand n’importe quoi, et qui séduit malgré tout par cette liberté jusqu’au-boutiste.
La plus grande séquence de suspense ? Un défi de basket totalement improbable. La plus grande scène d’action ? L’attaque d’un stade bondé par une poignée d’assaillants en deltaplane. Carpenter se délecte du mauvais goût ambiant, et fait de cette pure commande mercantile un film ouvertement brouillon qui se libère de toute obligation en terme de réalisme, de crédibilité, ou même d’efficacité.
Plus que jamais, Kurt Russell / Snake Plissken est l’alter ego de Carpenter : un électron libre fatigué d’être aux ordres, de faire ce qu’on attend de lui. A l’époque, le cinéaste rappelait dès qu’il avait l’occasion qu’il était devenu un spécialiste du fantastique un peu par hasard, et que son truc à lui c’était le western, ce western qu’il ne réalisera jamais mais vers lequel il n’a cessé de tendre. C’est finalement tout le sujet de Los Angeles 2013.
Plissken, ou Carpenter, suffoque dans cette Amérique aseptisée. La scène finale, qu’on soupçonne être l’unique raison pour laquelle Carpenter a accepté le projet, est une baffe radicale et définitive donnée aux tenants du bon goût, un cri de rage et un doigt d’honneur à l’ordre et à la modernité. Une main tendue vers une forme de liberté liée au western, dans une sorte de superbe« rien à foutre ».