Entre onze heures et minuit – de Henri Decoin – 1948
Un policier enquête sur un meurtre quand il découvre une seconde victime : le cadavre d’un homme qui était son sosie parfait. Le flic prend alors la place du mort, pour tenter de démasquer le coupable, et tombe amoureux de la petite amie de ce dernier.
Encore une histoire de sosie pour Louis Jouvet ? Oui, mais bien différente de celle de Copie conforme, gros succès qui fait figure d’aimable divertissement à côté du film de Decoin. Decoin qui s’amuse joyeusement de cette parenté dans un prologue réjouissant : voix off qui évoque avec dérision les facilités du cinéma, son appétence pour les sosies, tout à la fois le Edward G. Robinson de Toute la ville en parle, le Chaplin du Dictateur… et le Jouvet de Copie conforme !
Le procédé ici est différent, nettement plus subtil. D’abord, Jouvet ne joue pas vraiment deux rôles. Si ce n’est sur une photo, jamais on ne voit vraiment le visage du mort. Mais le film met en scène ce flic qui semble se dissoudre dans la vie de cet alter ego qui n’a rien d’aimable, mais dont l’existence tangible le fascine.
Un trouble qui prend l’apparence de la maîtresse, jouée par Madeleine Robinson, qui semble elle découvrir l’homme qu’elle aimait tel qu’elle l’a toujours rêvé. Pour la première fois. Bien plus que Copie conforme, dont l’intérêt reposait avant tout sur les trucages et la confrontation de deux Jouvet à l’écran, le film de Decoin aborde avec intelligence et force la question de l’identité, à travers l’existence de deux hommes physiquement interchangeables.
Decoin emballe ça dans une mise en scène magnifique de film noir, avec jeux d’ombres et reflets dans les miroirs. Une imagerie fascinante qui donne encore plus de poids à cette thématique du double, beau film de genre, belle réflexion sur l’identité, et beau portrait d’un homme qui se découvre, superbe Louis Jouvet.
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