Ennemis rapprochés (The Devil’s Own) – d’Alan J. Pakula – 1997
La grande critique, à la sortie en salles, voulait que Harrison Ford et Brad Pitt donnent l’impression de jouer dans deux films différents. C’est assez vrai, mais la critique semble assez injuste, à vrai dire. Pas que le film ne mérite pas de critique : il est effectivement à moitié convaincant, seulement, et donne bien souvent le sentiment de rater sa cible.
Mais cette impression de deux grands acteurs qui se croisent sans se comprendre vraiment est, au fond, le sujet même du film. D’un côté, Brad Pitt, figure de l’IRA armée qui vit dans la violence et la mort depuis que son père a été abattu sous ses yeux alors qu’il n’était qu’un gamin (ce qui nous donne un prologue en forme de compilation de clichés irlandais). De l’autre, Harrison Ford, flic new-yorkais d’origine irlandaise, droit comme la justice, bon père de famille, habité par des idéaux dont il ne dévie jamais, et qui n’a jamais tiré sur qui que ce soit en vingt-trois ans de police…
Comment voulez-vous que ces deux-là se comprennent vraiment, alors qu’ils vivent dans des univers si radicalement différents ? Le premier côtoie la violence au quotidien, le second ne la comprend plus et n’aspire qu’à une vie de famille rangée dans son paisible quartier pavillonnaire du New Jersey. Le sujet est fort, et assez beau. Il donne lieu à quelques très belles scènes, parce que ces deux-là, s’ils ne se comprennent pas, s’aiment d’un amour filial.
C’est parfois beau, donc, et c’est parfois lourdement appuyé. Très lourdement, comme cette réplique finale qui fait lever les yeux au ciel : « On n’a jamais eu le choix, ni toi, ni moi ». Franchement, quand un réalisateur arrive sur le plateau en devant filmer un tel dialogue, dans un tel contexte, ne doit-il pas comprendre qu’il ferait mieux de retravailler son scénario ? Quelque chose, en tout cas, quine soit pas si abêtissant pour le spectateur (des fois qu’on n’aurait pas compris ce qui se joue).
Ford est très bien, mais en terrain connu. Pitt est d’une intensité assez émouvante. La rencontre de ces deux-là ne fait pas vraiment d’étincelles, mais elle évite au moins les sentiers battus. Pakula, finalement, signe une réflexion pas si facile sur la violence et ses effets, et sur les chemins qu’impose la vie. « On n’a jamais eu le choix »…
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