Gremlins 2 : la nouvelle génération (Gremlins 2 : the new batch) – de Joe Dante – 1990
Joe Dante n’est pas homme à se plier aux attentes d’un grand studio, sa carrière le prouve. Le succès de Gremlins en 1984 ressemble d’ailleurs presque à un accident de parcours, qui porte sans doute autant la patte du producteur Steven Spielberg que la sienne. Six ans après, Dante renoue avec les bestioles qui ont valu la gloire, mais avec la ferme intention de dynamiter le mythe qu’il a lui-même mis en scène, comme pour mettre fin à un malentendu. Il le fera d’ailleurs de nouveau avec son film suivant, le très beau Panic sur Florida Beach. Mais avec ce Gremlins 2, il le fait de la manière la plus radicale qui soit.
Une suite se doit d’être plus grande, plus explosive, plus tout ? OK, Dante quitte sa petite ville de province sortie de La Vie est belle pour installer son action dans l’immeuble le plus moderne de New York, véritable ville dans la ville où tout est mécanisé, informatisé et déshumanisé. Une manière de rompre avec les bons sentiments du premier film, mais aussi de s’offrir un terrain de jeu à la hauteur de sa folie.
Parce que folie il y a dans cette suite, et une folie totalement désinhibée. Joe Dante s’accorde tous les délires, tous les excès, multipliant les monstres et les transformant au gré de son imagination, abolissant toutes les limites scénaristiques grâce à un très opportun laboratoire dirigé par une sorte de savant fou joué par Christopher Lee : l’un prend la parole et se livre à une véritable logorrhée, un autre se voit littéralement pousser des ailes avant de se transformer en gargouille de cathédrale, un autre encore devient une araignée géante…
Et chaque fois, le cinéphile Joe Dante s’offre une évocation des grandes heures du cinéma fantastique, bis ou pas, de Tarantula à Batman en passant par Le Fantôme de l’Opéra. Les citations dépassent d’ailleurs allégrement le genre purement horrifique, avec des clins d’œil délirants à Chantons sous la pluie, Marathon Man ou King Kong. Sans oublier les références explicites à l’accueil du premier film, lorsque le célèbre critique Leonard Maltin apparaît pour descendre Gremlins avant de subir les assauts des monstres.
Phoebe Cates et Zack Galligan, les deux jeunes acteurs principaux du premier film, sont bien de retour. Mais Joe Dante ne s’intéresse vraiment qu’à dépasser autant que possible toutes les frontières habituelles du cinéma populaire. Jusqu’à sortir du film dans une séquence centrale extraordinaire, sans doute la meilleure, lorsque la pellicule brûle comme cela arrivait parfois à l’époque (curieux hasard, l’incident m’était vraiment arrivé quelques jours plus tôt, lors d’une projection de 48 heures de plus), avant que l’on comprenne grâce à des ombres chinoises que ce sont les gremlins qui se sont emparés de la cabine de projection !
Ce gag était assez formidable, dans le contexte d’une vraie salle de cinéma en 1990. Et témoignait de l’imagination foutraque et totalement débridée d’un cinéaste cinéphile, qui voyait dans son art bien autre chose que la logique trop facile d’une suite forcément lucrative. Il a d’ailleurs fallu bien des années avant que Gremlins 2 soit vraiment apprécié comme le film culte qu’il est.
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