Le Mort en fuite – d’André Berthomieu – 1936
Deux mauvais acteurs de revue trouvent une idée géniale pour s’assurer la publicité qui fera d’eux des vedettes : faire croire à tout le monde que l’un a assassiné l’autre par jalousie. Après bien des difficultés, le plan marche au-delà de leurs espérances, en tout cas dans sa première partie : le faux assassin est condamné à mort. Mais quand il doit réapparaître, le second est enlevé par erreur par des Soviétiques, qui le prennent pour un ancien général en fuite…
Michel Simon, Jules Berry, et un festival de cabotinage assumé pour cette comédie étonnante, à la fois vive et longuette, grotesque et audacieuse. Le cabotinage est le sujet même du film, et ne concerne pas que ces deux acteurs. A propos, Simon et Berry sont assez géniaux quand ils jouent les mauvais acteurs, donnant une vie inattendue à leur surjeu. Une vraie performance, même si l’un et l’autre ont à leur actif une tonne de rôles plus marquants.
Autour d’eux, le cabotinage est partout. Chez la vedette du show d’abord, « mobile » ravie de se retrouver à la une des journaux. Chez les « témoins » de l’affaire, qui prennent le tribunal pour une scène. Et chez l’avocat du « tueur », qui se prépare pour « son » moment, « son » triomphe, la plaidoirie qui tient du théâtre plus que de la vérité.
Ce n’est, franchement, pas d’une finesse immense. Les ficelles sont énormes (le coup du sosie, il fallait oser), les détails aussi (mon dieu cet accent belge!)… Mais il y a derrière ça un travail étonnant de mise en scène. André Berthomieu filme cette grosse comédie comme un drame sombre et réaliste. Le dernier tiers, surtout, avec la tension qui monte et le suspense qui se met en place, a toutes les caractéristiques d’un film noir tragique. Cadres soignés, ombres profondes, gros plans dramatiques…
A défaut d’être totalement convaincant, Le Mort en fuite a au moins le mérite d’être étonnant.