Les Grandes Familles – de Denys de La Pattière – 1958
La Patellière et Audiard au scénario, le premier derrière la caméra, le second aux dialogues. Pas le tandem le plus excitant du cinéma français, et le résultat, tiré d’un roman de Maurice Druon, n’est certes pas révolutionnaire. Il manque du panache, de la tension, de la profondeur…
La voix off qui introduit les personnages en mode reportage de l’ORTF annonce, sans tromperie sur la marchandise, l’académisme du film, qu’on peut regretter. Car le scénario, lui, tient plutôt la route, et le cynisme et la cruauté de cette grande et belle famille sont frappants.
Le patriarche d’abord, Jean Gabin, digne et sûr de lui. Tel qu’en lui-même, semble-t-il : la colère facile, une manière de remettre les autres, et surtout la jeune génération, à leur place, et le dernier mot pour toutes choses. Mais ce Gabin-là est un monstre de cynisme, d’une cruauté rare.
Son entourage ne rattrape rien, du cousin jouisseur joué par Pierre Brasseur au beau-frère qui fait parler un défunt illustre… Tous manipulent, flattent et trompent pour obtenir ce qu’ils veulent. Une belle famille, vraiment, dont le fils tête-à-claque (Jean Desailly) s’avère le plus humain, jusque dans ses défauts.
Comme souvent dans le cinéma français de ces années-là, l’académisme de la mise en scène est sauvée en partie par la qualité des acteurs. Bernard Blier en particulier est comme toujours parfaitement juste dans le rôle de ce fondé de pouvoir, dont la fidélité à toute épreuve fait passer tous les écarts. Gabin est formidable dans le rôle ce réac horrible rattrapé par sa volonté de tout dominer. La dernière image, avec la photo de son fils sur le journal gisant par terre, est cruelle, et forte.