Le Roman de Mildred Pierce (Mildred Pierce) – de Michael Curtiz – 1945
C’est le rôle d’une vie, ça… Mildred Pierce, mère courage, femme tragique, le plus beau rôle de Joan Crawford et, peut-être, le plus intense, le plus fort, le plus désespéré… Grand rôle dans un film immense. Un chef d’œuvre, oui.
Première image : Zachary Scott se fait descendre, et meurt après avoir prononcé ce dernier nom, Mildred, celui de son épouse. Mais qui l’a tué ? Mildred, Joan Crawford, se retrouve au commissariat, et raconte les événements qui, ces dernières années, ont conduit à ce crime.
Un meurtre, un flash-back… Cela ressemble à un point de départ assez classique de film noir. Mais la singularité du film est flagrante dès ces premières images. Le soin que Michael Curtiz apporte à ses images et aux lumières, quasi-expressionnistes, la puissance symbolique des cadres, la manière dont il filme le visage tragique de Crawford… On est d’emblée au-delà du film noir classique.
La simplicité du titre est une clé : Mildred Pierce est le sujet du film, cette femme simple et aimante, dont la vie correspond si peu à l’idée qu’elle s’en faisait. Une femme qui laisse partir son mari, qu’elle aime pourtant. Une mère, surtout, qui voit ses illusions exploser en vol. Sa fille cadette meurt, son aînée est un monstre d’égoïsme et de cupidité. Mildred n’est pas innocente : cette enfant, elle l’a pourrie, gâtée, quasiment achetée pour la garder près d’elle.
C’est l’histoire d’une femme tellement courageuse et dévouée à ceux qu’elle aime qu’elle en devient héroïque, mais une femme qui n’en finit plus de faire des mauvais choix. Joan Crawford est d’une intensité folle, justement récompensée par un Oscar, femme forte et indépendante dans un monde dominé par les hommes (grands rôles, d’ailleurs, pour Jack Carson et Zachary Scott, formidables). Très grand rôle, très grand film, très grand réalisateur… Un chef d’œuvre, cruel et définitif.