Le Tonnerre de Dieu – de Denys de La Patellière – 1965
Comment passer à côté d’un grand rôle ? Eh bien en confiant la mise en scène d’un projet plutôt prometteur à un réalisateur comme Denys de La Patellière, qui semble incapable d’aller au bout d’une idée, de puiser toutes les richesses d’une situation, et même de terminer convenablement une scène, optant systématiquement pour un fondu au noir, comme s’il ne savait plus quoi faire de son matériau.
C’est dommage, parce qu’il y avait là la vraie matière, si ce n’est à un grand film, au moins à un grand rôle pour Jean Gabin, que l’on découvre alcoolisé à l’extrême, traînant la patte et la voix d’un troquet à l’autre. Et il a l’alcool mauvais ce riche propriétaire, marie détestable, homme fatigué des hommes, qui ramasse une prostituée comme il ramasse des animaux, en vieux vétérinaire qu’il est.
Il y a là des tas de bribes de beaux moments, et d’idées fortes. Cette prostituée (jouée par Michèle Mercier) que Gabin tire du ruisseau, cette épouse (Lilli Palmer) qui attend un signe d’amour, ce proxénète (Robert Hossein) lâche et ridicule, Gabin lui-même, odieux et touchant dans le même mouvement… Et il y a bien quelques beaux moments. Mais Denys de La Patellière balaye toutes ses idées fortes par une mise en scène trop nonchalantes, une incapacité à créer une vraie atmosphère et une cohérence sur le long terme.
Pas vraiment désagréable ce film, si ce n’est cette propension à aligner les dialogues tape-à-l’oreille à la Audiard (c’est Pascal Jardin qui s’y colle). Mais l’impression de passer à côté de quelque chose de plus mémorable est trop forte pour ne pas ressentir d’abord une vraie frustration.