Un homme est passé (Bad Day at Black Rock) – de John Sturges – 1955
Black Rock… Charmante bourgade au milieu des plaines désertiques de l’Ouest américain. La deuxième guerre mondiale est terminée depuis deux mois, mais la ville semble être la même qu’aux grandes heures de la conquête de l’Ouest.
C’est dans ce lieu comme oublié par le temps qu’un homme descend du train, premier visiteur depuis quatre ans. En quelques heures seulement, cet étranger va réveiller un secret mal enfoui, déclenchant haine et mauvaise conscience…
John Sturges filme cette histoire comme un authentique western, genre dont il est un grand spécialiste. Mais s’y ajoute la mauvaise conscience d’un pays qui a maltraité sa population d’origine japonaise au lendemain de Pearl Harbor. Les camps créés pour les parquer comme des menaces intérieures sont évoquées. Au-delà, c’est tout le racisme et la violence liés à l’histoire du pays qui pèsent.
Sturges aborde cette culpabilité par le prisme du film de genre, western ou noir, qu’importe. Il le fait avec un dispositif dramatique qui confine à l’épure la plus totale. Unité de lieu, de temps, une demi-douzaine de personnages seulement (et quel casting : Robert Ryan, Ernest Borgnine, Lee Marvin, Walter Brennan, autour de Spencer Tracy). Mais le scénario est formidable, et la mise en scène d’une précision remarquable.
Un homme est passé (pour une fois, le titre français est bien plus beau et fort que le titre original) est aussi un modèle de tension et de suspense. Tracy est grand et garde longtemps le mystère sur la nature exacte de son personnage, simple visiteur ou… ? Grand film, à tous les niveaux.