Le Diable souffle – d’Edmond T. Gréville – 1947
Un homme trop seul, une femme trop belle, un deuxième homme trop jeune… Combinaison typique d’un film noir à l’américaine, que Gréville s’approprie totalement. Son principal apport, c’est le vent, ce vent présenté dès la belle introduction comme le personnage principal du drame. Un vent qui souffle constamment sur cette petite maison isolée du monde, sur une île entre deux pays, la France et l’Espagne. Un vent qui pèse sur les humeurs, qui isole, qui exacerbe les sentiments, qui rend fou…
Gréville flirte avec les codes du film noir. Il fait de Charles Vanel (immense, mais comme toujours finalement) un bon type asocial, qui tombe amoureux d’une jeune femme (Héléna Bossis) dont on sent bien qu’elle n’est pas pour lui : une citadine habituée à la vie nocturne, qu’il rencontre alors qu’elle a tout perdu, avant de l’emmener dans son île si proche, mais si loin de tout. Et puis ce troisième personnage (Jean Chevrier), dont on sent aussi qu’il amène le drame malgré lui, chirurgien madrilène condamné à mort dans son pays.
Un canevas si classique, pour un film si singulier. La justesse exceptionnelle des personnages (cette ultime main tendue entre Vanel et Héléna Bossis, d’une beauté renversante), et le choc esthétique que procure à peu près chaque plan… La pluie lourde et les barres verticales qui soulignent le poids qui pèse sur la jeune femme au début du film, dans des décors poisseux impressionnants… Des éléments de décors qui isolent l’un ou l’autre des acteurs… Ce vent qui ploie les roseaux ou souligne la sensualité brûlante d’Héléna Bossis…
Gréville est un très grand cinéaste méconnu, qui n’occupe pas la place qu’il mérite dans l’histoire du cinéma. Ce film majeur en est une preuve éclatante.
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.