Police Frontière (The Border) – de Tony Richardson – 1982
Ça commence d’une manière assez ridicule, avec l’un des tremblements de terre les plus cheap de l’histoire des tremblements de terre au cinéma, filmé avec une série de gros plans et une caméra secouée de manière totalement artificielle. Tout pourri, donc, et totalement inutile qui plus est. Impardonnable, donc.
Tony Richardson avait-il vraiment besoin de cette entrée en matière dramatique et faussement spectaculaire, alors que toute la suite de son film privilégie les détails, les regards empathiques mais sans éclats ? Ben non, bien sûr. Ce début ne gâche pas le film, mais il diffère le plaisir qu’on y prendra, portant une sorte de doute sur les scènes qui suivent.
Cela dit, Richardson finit par rattraper le coup, et par instaurer un rythme bien différent, nettement plus convaincant, quand il adopte le strict point de vue de Jack Nicholson, flic qui ne rêve que de retourner à la surveillance des forêts et des canards, mais que l’avidité et l’égoïsme de sa gourde de femme conduit à la police aux frontières, entre les Etats-Unis et le Mexique.
Et là, ce type plein d’empathie et de bienveillance est confronté à la violence des situations, et à la corruption qui gangrène son unité (incarnée par Harvey Keitel). Forcé de participer, même passivement, à des actes déshumanisants. Entre le fiasco de son couple et le naufrage de ses idéaux, ce flic se raccroche à ce qu’il trouve : une jeune Mexicaine totalement paumée (Elpidia Carrillo, que l’on reverra dans Predator), dont il deviendra une sorte d’ange gardien.
Il y a des courses-poursuites, des bagarres, des fusillades même. Mais toutes, si percutantes soient-elles, sont expédiées en quelques plans, avec un sens de la précision particulièrement efficace. Pour Richardson, le polar, musclé et tendu, est l’occasion de filmer les « dos mouillés », de montrer ces Mexicains en quête d’un lendemain plus souriant, mais sans illusion, avec honnêteté et sans misérabilisme.
Son film, de ce point de vue, est une grande réussite. Il semble, presque quarante ans plus tard, plus actuel que jamais.