Le Golem – de Julien Duvivier – 1936
Impressionnant et imparfait, ce Golem. Un Duvivier mineur, assurément, loin par exemple (mais il y en a d’autres) de Pépé le Moko ou La Belle Équipe, qu’il tournera à la même époque. Son âge d’or, celui du cinéma français aussi.
Mineur dans la filmographie de Duvivier, c’est un fait, Le Golem n’en reste pas moins un film assez fascinant, et bien supérieur au tout-venant de l’époque. Quelques notes de mauvais goût, notamment dans l’entourage un rien clownesque et régressif de l’empereur Rodolph (mais Harry Baur est génial, une fois de plus, en monarque totalement ravagé), quelques rares passages un peu termes et deux ou trois longueurs. Tout ce qu’on ne trouve pas dans les meilleurs films de Duvivier.
Mais quand même, dans cette légende tchèque, le réalisateur trouve la matière à ce qu’il aime le plus : s’imprégner d’une culture qui n’est pas la sienne, filmer un peuple au plus près. Cette fois, c’est en studio qu’il le fait, avec une esthétique baroque proche de l’impressionnisme par moments. Loin du naturalisme qui lui réussit bien, donc, il filme un peuple juif persécuté dans le ghetto de Prague, ces Juifs qui espèrent un meilleur avenir grâce à l’intervention de ce mythique Golem, créature façonnée dans la glaise à qui un rabbin/savant a insufflé la vie, sorte d’ancêtre de Frankenstein.
Ce thème de la créature à qui on donne la vie n’est pas une nouveauté : il est même très en vogue depuis le succès du premier Frankenstein. Filmer la persécution des Juifs, en 1936, est en revanche nettement plus audacieux. Duvivier en tire les moments les plus forts, les images les plus saisissantes, cadres désaxés et ombres omniprésentes.
Il oppose habilement les voûtes écrasantes du ghetto aux plafonds trop hauts du palais, sorte de prison dorée pour l’empereur fou joué par Harry Baur. Une grande partie du film repose sur cette opposition. Son côté le plus réussi en tout cas. Les deux personnages de Français (Roger Duchesne et Raymond Aimos) sont moins convaincants, mais Le Golem, imparfait, reste un Duvivier passionnant, qui ne ressemble à aucun autre.
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