Au-delà du Missouri (Across the Wide Missouri) – de William A. Wellman – 1951
Une voix off qui commente assez platement une série d’images – cartes postales, des personnages qui semblent mal dégrossis, des couleurs un peu criardes qui ont franchement mal vieilli (contrairement à la réputation que le film continue à avoir)… Les premières minutes laissent craindre le pire : comme si Wellman, pour une fois, avait un peu raté son coup.
Pour une fois, parce que Wellman est quand même un cinéaste assez magique qui a le don quasi-unique de transcender tout ce qui lui tombe sous la main, quel que soit le genre et les moyens qui lui sont confiés. Et il tourne beaucoup : cette seule année 1951, ce sont trois films qui portent sa signature, dont le très beau Convoi de femmes.
Un faux pas, donc ? Eh bien non : une fois encore, la magie opère. Le scénario est clairement abouti que celui de Convoi…, et ça se sent. L’humour un peu potache, les Indiens tels que Hollywood les fantasme, l’histoire d’amour un peu facile dans sa première partie (elle gagne en profondeur, quand même)… Autant de défauts qui se ressentent tout de même.
Mais il y a cette « patte » Wellman, cette capacité qu’il, comme Walsh, à donner du corps, de l’intensité et du rythme à son histoire, avec une impression de naturel confondante. Au-delà du Missouri est donc, en dépit de tous ses défauts, passionnant.
Dans cette Amérique des pionniers (l’histoire se passe entre 1828 et 1830), Clark Gable est un trappeur cynique qui « achète » une Indienne dans une scène étonnante, avant d’en tomber sincèrement amoureux. Plus que l’histoire, racontée comme un hommage à des pionniers d’un pays encore à construire, ce sont les paysages qui frappent. Leur beauté, l’importance des grands espaces, mais aussi leur diversité. Des montagnes enneigées aux forêts de bouleaux en passant par les lacs et les vastes plaines, Au-delà du Missouri est aussi un hommage à la beauté de ce pays, entaché de sang.
La voix off renforce l’impression de paradis perdu, un paradis au goût amer, quand même, que fréquentent des immigrants qui ont rompu avec un passé sans doute glorieux : un noble français (Adolph Menjou, réjouissant), ou un officier écossais. Et la cornemuse qui retentit dans les grands espaces du Montana, ça a vraiment de la gueule…
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