La Courtisane (Susan Lenox (her fall and rise)) – de Robert Z. Leonard – 1931
Greta Garbo et Clark Gable, deux immenses stars, deux monstres sacrés symboles de deux âges d’or d’Hollywood, que la MGM réunit pour l’unique fois de leur carrière. Sur le papier, ça fait rêver. A l’écran, ça ne fait pas vraiment des étincelles. Comme les deux personnages qui passent une grande partie du film à passer l’un à côté de l’autre, les deux stars, si glamours soient-elles, échouent à former l’un de ces couples mythiques qui font la grandeur d’Hollywood.
A quoi est-ce dû ? A l’incompatibilité de jeu entre ces deux monuments, représentant chacun une époque bien différente de l’autre ? Ou plutôt à la mise en scène tantôt très inspirée tantôt un peu lâche, pas aidée par un montage trop serré qui ne rend pas hommage à l’ampleur de la destinée humaine qui se joue. Comment résumer en moins d’une heure vingt des mois, voire des années de drame ? A l’impossible, nul n’est tenu, en tout cas par Leonard, cinéaste inégal.
Inégal, il l’est ici aussi, avec une seconde moitié trop relâchée pour être vraiment émouvante, et une premier parsemée de moments absolument magnifiques. Les premières minutes notamment, font partie de ce que Robert Z. Leonard a fait de plus beau, de plus audacieux, et de plus fort : la naissance et la jeunesse du personnage de Garbo, résumé par un enchaînement d’ombres portées sur un grand mur vide. Du grand art, pour une séance superbe qui se termine par l’ombre du profil très reconnaissable de la Divine.
Promise à un mariage dont elle ne veut pas (avec Alan Hale), la jeune s’enfuit et se réfugie chez Clark Gable, qui la prend sous son aile avant de tomber amoureux. Mais le destin s’en mêle, et sépare les deux amants, qui s’enfoncent l’un et l’autre très profondément dans une spirale d’incompréhension et de rancœurs. Un peu trop d’ailleurs : Garbo passe son temps à tenter de reconquérir ce crétin de Gable trop fier, trop aveugle, trop con pour faire simple, pour simplement essayer de l’écouter.
Garbo est superbe dans ce film, tourné la même année que Mata-Hari ou le très beau L’Inspiratrice. Parfaite, et toute en nuances, face à un Clark Gable très charismatique mais qui pour le coup, en manque singulièrement (de nuances).