Les Chevaliers du Texas (South of St. Louis) – de Ray Enright – 1949
Trois amis inséparables sont séparés par la guerre. Joli thème pour ce western imparfait mais plein de charmes signé par un petit spécialiste du genre : Ray Enright, solide artisan taillé pour donner du nerf aux scènes d’actions, et qui filme plutôt bien les moments en creux. Pas un grand, non : Enright peine ainsi à donner du corps aux nombreuses ellipses qui émaillent son récit, et qui sont pourtant autant de coups durs portés à la belle amitié de ces trois personnages.
Mais Enright sait tirer le meilleur des points forts de son scénario, en l’occurrence ses personnages. Un détail, déjà, donne un relief particulier à cette amitié entre les trois hommes, qui tous portent une petite clochette à leur éperon. Enright multiplie les plans serrés sur ces éperons, parfois proches les uns des autres, parfois isolés. Beau symbole aussi marquant visuellement que par la petite musique qui l’accompagne. Et qui donne une ultime fusillade magnifique.
Elle est d’autant plus belle que le film tient parfaitement son suspense. C’est suffisamment rare pour le souligner : l’issue de cette histoire reste incertaine jusqu’aux toutes dernières minutes du film, avec une tension extrême dans la dernière séquence, et une belle utilisation du gros plan sur le visage de Zachary Scott, face à ses amis Joel McCrea et Douglas Kennedy.
Cette scène est particulièrement réussie parce que Enright sait y mettre une grande tension, mais aussi parce que, comme dans toutes les scènes d’action qui émaillent le film, il utilise à merveille la profondeur de champs. Les décors de la ville ne sont pas uniquement importants au premier plan : ils le sont aussi tout au fond de l’image, où l’action est tout aussi forte. Cette manière de faire bouger les personnages dans la profondeur du cadre donne un rythme tout particulier à ces scènes d’action.
Un pur western d’hommes, ce South of St. Louis ? Pas tout à fait, non. Comme dans à peu près tous les westerns, les femmes sont volontiers laissés de côté : dès la première scène, la pauvre Dorothy Malone aura beau tout faire pour les retenir, elle ne pourra pas empêcher McCrea, Scott et Kennedy d’aller affronter le terrible Cottrell (très inspiré de Quantrill, comme son patronyme le laisse supposer).
Quant à Alexis Smith, dans le rôle de la chanteuse Rouge (c’est son surnom, en français dans le texte), elle semble destinée à jouer les éternelles laissées pour compte : un énième personnage de jeune femme légère condamnée à vivre cette vie de bars et d’hommes avinés. Sauf que le film lui offre une place inattendue, et centrale. Et même si McCrea est excellent, bien moins lisse que souvent, c’est elle qui a le rôle le plus fort de ce bon petit western.