Raging Bull (id.) – de Martin Scorsese – 1980
Martin Scorsese ne voulait pas réaliser Raging Bull. Il avouait ne rien comprendre à la boxe, et ne pas aimer ce personnage autodestructeur qu’était Jake La Motta. Pourtant, ce film voulu par DeNiro a sans doute sauvé la carrière, et la vie, de Scorsese, empêtré dans la drogue et la dépression. Et puis, bien sûr, Raging Bull est devenu l’un des chefs d’œuvre du cinéaste, et l’un des plus grands films de boxe.
Scorsese ne s’est pas contenté de céder aux désirs de De Niro, il s’est approprié le sujet et a inventé une nouvelle manière de filmer la boxe. Des nouvelles manières, d’ailleurs : chaque combat a sa propre signature visuelle, mais toujours au plus près des corps, des visages, stylisé jusqu’à frôler l’abstraction. Jamais pourtant des combats de boxe n’avaient été aussi percutants, sentant la sueur et le sang.
Chaque combat est vu comme une étape dans le parcours de La Motta, petit gars plein d’ambition et de morgue, qui ira jusqu’au sommet grâce à une foi inextinguible en lui-même, et qui descendra très bas à cause d’une paranoïa cultivée très tôt. Avec un point de rupture filmé avec force symbolique : la correction infligée par Sugar Ray Robinson, qui provoque son déclin, et que Scorsese filme comme s’il filmait la Passion du Christ, la corde du ring d’où goutte son sang évoquant la couronne d’épine… ou les barbelés en temps de guerre, c’est selon.
Sans bêtes jeux de mots, Raging Bull est un film coup de poing qui garde toute sa puissance de frappe aujourd’hui, définitivement à part à la fois dans la longue série des biopics comme dans celle des films de boxe. Un film à part aussi pour De Niro, dont la métamorphose physique dans le film (il a pris plus de trente kilos pour les dernières scènes) a souvent été mise en avant, au détriment de l’intensité de son jeu. Habité et immense, l’Oscar qu’il a décroché pour ce rôle à Oscar est, pour le coup, totalement mérité.
Il fallait un acteur de sa trempe pour rendre supportable, voire touchant (par moments), ce personnage névrosé possédé par une violence à fleur de peau, qui bat sa femme et domine son frère. Ses face-à-face avec Joe Pesci sont édifiants, brutaux, et émouvants. Raging Bull, c’est aussi, et surtout, une histoire de famille.
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